21_REP_129 - Réponse du Conseil d'Etat au Grand Conseil à l'interpellation Catherine Labouchère et consorts - La Suisse est redevenue un pays tiers pour l'UE. Que fait le canton pour faire face à cette nouvelle position ? (21_INT_74).
Séance du Grand Conseil du mardi 21 décembre 2021, point 29 de l'ordre du jour
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Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourA la première lecture, cette réponse m’a laissée un peu désemparée et, par la suite, à tout le moins perplexe. En effet, a-t-on vraiment pris la mesure de la décision du Conseil fédéral du 26 mai dernier de renoncer à l’accord-cadre avec l’Union européenne ? Certes, il existe bien l’annexe citée dans la réponse, soit la lettre du 17 septembre dernier de la Conférence des gouvernements de Suisse occidentale (CGSO), à la Conférence des gouvernements cantonaux (CdC) signée par vous, monsieur le conseiller d’Etat. Cette lettre mentionne que les travaux de la CDC et du Conseil fédéral ne reprendront qu’en 2023-2024, et qu’il est plus que nécessaire d’avoir des dispositions transitoires réglant les conséquences négatives du *relancement. Concrètement, les effets négatifs du 26 mai se font déjà sentir pour nos chercheurs des Hautes écoles, pour les exportations des medtechs, notamment. De plus, nous avons appris hier que le forum de Davos est reporté, alors que nous attendions beaucoup de cette réunion pour arriver à trouver des solutions pour nos relations avec l’Union européenne (UE). Enfin, le franc fort n’aide en rien dans ce domaine, sans que cela soit le sujet principal.
Ainsi, plus nous attendons, plus la situation se complexifie et plus notre pays risque d’être marginalisé. Occupé par la crise Covid qui dure, le sujet de nos relations avec l’Europe passe au second plan. Il en va de notre responsabilité de ne pas oublier ce sujet au risque d’assister à une mort lente des accords bilatéraux. Si intellectuellement nous le savons, nous n’y croyons pas vraiment, pensant que nous nous en sortirons toujours. Mon inquiétude est donc bien présente, car les mois passent et bien peu de choses se concrétisent. Il est de notre devoir, comme canton qui prône l’innovation, d’être proactif. C’est pourquoi je dépose la détermination suivante :
« Le Grand Conseil encourage le Conseil d’Etat à ne pas relâcher ses efforts et à accentuer ses interventions auprès du Conseil fédéral pour trouver une solution d’ensemble avec l’Union européenne. »
La discussion sur la détermination est ouverte.
Mme Labouchère a raison, la situation est grave. Les accords avec l’UE s’érodent. La recherche se trouve en situation difficile, parce qu’elle perd son rôle de leader, alors qu’elle en a les talents. Elle conduisait de nombreux projets européens de recherche. Pourtant, elle doit laisser tomber son rôle de leader, simplement parce qu’un accord-cadre a été abandonné par notre gouvernement fédéral.
En matière de medtechs, 8 entreprises actives dans les techniques médicales viennent de déposer une plainte auprès du Tribunal européen, car leur agence de certification – en l’occurrence la SQS – a simplement été mise à l’écart. Les frais de certification pour les entreprises de technique médicale ne cessent d’augmenter depuis le 26 mai dernier. Face à cela, la détermination proposée est importante, car elle témoigne de la préoccupation de notre Parlement à ce que le Conseil d’Etat s’engage et s’implique à débloquer la situation. Il est vrai que des bisbilles existent jusqu’à l’intérieur du Conseil fédéral et notamment dans le parti du ministre des relations extérieures. Cela pose problème ; c’est délicat. La Commission européenne a donné au Conseil fédéral un délai jusqu’au forum de Davos pour établir une feuille de route. Alors, c’est peut-être la bonne nouvelle d’hier ! En principe le délai fixé à la mi-janvier s’allonge un tant soit peu. Mais, pour les entreprises, pour l’économie de ce pays, pour les chercheuses et les chercheurs, pour les étudiantes et les apprentis des programmes Erasmus, la situation est devenue précaire. Les choses ne s’arrangent pas depuis le 26 mai, malgré les quelques visites à Bruxelles effectuées par nos messagers fédéraux.
En conclusion, dans ce contexte, il est vraiment important que le Grand Conseil marque sa détermination dans le sens proposé par notre collègue Labouchère.
Je déclare mes intérêts comme travaillant à l’Université de Lausanne, et j’avais aussi déposé il y a quelques semaines une interpellation allant dans le même sens que celle de Mme Labouchère, à laquelle il a pu être répondu et que nous avons pu traiter la semaine dernière. Mme la conseillère Cesla Amarelle avait déjà évoqué tous les efforts consentis par le Conseil d’Etat dans le sens d’une promotion de la voie bilatérale et de sortie de cette crise qui est dommageable pour la recherche et pour l’innovation vaudoise. Le chiffre présenté est évalué à des dizaines de millions pour les chercheuses et les chercheurs vaudois. Dans ce sens, les efforts sont à saluer et à encourager. Aussi, je vous invite à soutenir la détermination proposée.
Je remercie Mme Labouchère de continuer à se battre inlassablement pour les Hautes écoles depuis de nombreuses années. Elle sait que le canton de Vaud s’en sort plutôt bien – avec un triple A –, ce que nous observons encore avec la diversification de notre tissu économique. Depuis plus de 20 ans, cette diversification a créé des postes à très haute valeur ajoutée. Les entreprises internationales et le tissu local ont besoin de main d’œuvre qualifiée. On retrouve cette dernière au niveau de l’EPFL, de l’Université, des HES, des écoles spécialisées, des écoles professionnelles : un lien que nous avons tissé depuis plus d’une trentaine d’années.
Après l’échec de l’Espace économique européen, la Suisse a choisi la voie bilatérale, une voie qui s’est avérée plutôt bénéfique pour le canton. En 20 ans, le canton de Vaud a enregistré environ 200’000 arrivées supplémentaires, ce qui permet une pyramide des âges très jeune et un tissu de Hautes écoles très diversifié. D’ailleurs, le rapport de la BCV, il y a quelques semaines, faisait aussi état de cette diversification économique majeure et de gens plutôt bien formés dans nos Hautes écoles. Ce matin, le président de la Confédération, Guy Parmelin, comme le Conseil d’Etat, a regretté que l’Europe mélange de temps en temps un peu les dossiers et prenne la Suisse en otage. Le dossier qui touche à la formation n’est pas à proprement parler en lien avec la voie bilatérale, tout comme l’équivalence boursière ou l’accord dans le domaine des medtechs. Nous essayons de trouver des solutions.
Enfin, madame la députée, votre détermination s’inscrit dans l’action du Conseil d’Etat. Si elle est retenue par le Grand Conseil, elle constituera un élément supplémentaire qui démontrera que le canton de Vaud souhaite trouver un chemin, non pas d’adhésion, mais d’une consolidation de la voie bilatérale qui rend le canton xénophile, attentif à sa relation avec l’étranger, notamment avec les pays voisins et le reste de l’Europe. Le texte de Mme Labouchère s’inscrit par conséquent dans l’action du gouvernement. S’il est retenu, ce sont des vitamines supplémentaires pour le combat que nous souhaitons mener pour la consolidation de la voie bilatérale.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
La détermination est adoptée avec quelques avis contraires et abstentions.
Ce point de l’ordre du jour est traité.