22_POS_55 - Postulat Fabrice Moscheni et consorts - Virage ambulatoire: Le Canton de Vaud s’est-il enrichi de 800 millions par année sur le dos des payeurs de prime maladie ?.
Séance du Grand Conseil du mardi 21 janvier 2025, point 15 de l'ordre du jour
Texte déposé
Depuis 2012 et l’introduction nationale des forfaits par cas (SwissDRG) on assiste semble-t-il à une diminution du nombre d’interventions en « stationnaire » tout comme à une augmentation du nombre d’interventions en « ambulatoire » dans nos hôpitaux. Au CHUV par exemple, un projet « Virage ambulatoire » a été lancé en 2017 pour transférer vers l’ambulatoire le maximum d’interventions, notamment en orthopédie et en chirurgie viscérale. La création de l’Hôtel des patients en 2016 concourrait d’ailleurs au même but.
Cette nouvelle façon de soigner autant que possible « en ambulatoire », soit via un passage à l’hôpital ou en clinique d’un jour au maximum, permet de réaliser des économies pour la même opération jusqu’à plusieurs milliers de francs par rapport à une hospitalisation « stationnaire » plus longue.
La Confédération incite aussi très concrètement à accélérer le rythme. Depuis janvier 2019 et sauf exception motivée par des raisons médicales, elle impose que certaines prestations chirurgicales courantes (arthroscopie du genou, opération des amygdales, varices, hernie, etc.) ne soient remboursées par l’Assurance obligatoire des soins (AOS) que si elles sont réalisées de manière ambulatoire.
Positif du point de vue de la maîtrise globale des coûts de la santé, le virage ambulatoire est aussi une très bonne nouvelle pour les Cantons. Ils ont en effet nettement moins d’opérations stationnaires à financer à 55%, selon le système DRG. C’en est par contre une assez mauvaise pour les patients et leurs assurances maladie qui doivent dès lors ensemble assumer le 100% de ces opérations (contre 45% auparavant), comme pour tous les autres traitements ambulatoires. Avec forcément l’influence que l’on devine sur les primes.
On parle ici sans doute de milliers d’opérations par an que le Canton de Vaud n’a plus besoin de co-financer à 55%, y compris pour les cliniques privées de la liste hospitalière, soit très probablement de millions de francs chaque année qu’il n’a plus à y consacrer.
Parallèlement, le développement des prestations ambulatoires amène aussi de l’argent frais dans la caisse des hôpitaux publics. À l’HRC par exemple, on compte même beaucoup sur cette hausse des « produits d’exploitation » pour bientôt équilibrer les comptes, selon le communiqué de presse présentant les résultats 2021 et se félicitant d’un développement de l’activité ambulatoire de 13,7 millions lors du dernier exercice. Au CHUV, on évoque dans le rapport d’activités 2021 une augmentation de 14,3% des prestations médicales ambulatoires TARMED, pour une facturation supplémentaire réalisée en un an d’environ 30 millions. Idem encore à l’HIB, qui se félicite d’une progression de de 5,4 millions (+ 15,74%) de ce secteur d’activités par rapport à 2020.
Avec une baisse des coûts d’un côté et une augmentation des rentrées de l’autre on aurait dû voir en toute logique un impact conséquent du virage ambulatoire dans les comptes et le budget du DSAS ces dernières années, mais le moins que l’on puisse, dire c’est que cela n’a sauté aux yeux de personne. Une première estimation est qu’en 2021, en comparaison avec 2012, l’impact est de 800 millions avec 500 millions provenant de la baisse des coûts et 300 millions provenant de l’augmentation des rentrées.
Las ! Le seul fait marquant de la dernière décennie est que dorénavant, le Canton consacre plus de 800 millions de francs par an à aider environ un tiers de la population vaudoise à payer ses primes. Mais n’est-il pas co-responsable de la hausse des primes? Une part significative de ces 800 millions n’est-elle pas due au virage ambulatoire ? Voire n’assiste-ton pas à un mécanisme un peu pervers où le Canton utilise les ressources du virage ambulatoire pour financer les subsides LAMal aux assurés ?
A l’heure où l’on évoque une fois encore des hausses de primes maladie importantes pour 2023, il serait de bon ton que le Conseil d’Etat nous éclaire rapidement sur les économies réalisées dans le stationnaire et les nouvelles rentrées enregistrées grâce à l’ambulatoire. Et sur ce qu’il en a fait. Le patient, contribuable et payeur de primes vaudois apprécierait, dans l’attente peut-être d’en voir un jour la couleur.
Sur la base du développement ci-dessus, il est intéressant de savoir quelle a été, de 2012 à ce jour, l’évolution des activités stationnaires AOS dans les hôpitaux et cliniques de notre canton, et quel montant le Canton a dû chaque année y consacrer pour le financement de sa part forfaitaire des DRG (55%).
Par ailleurs, il semble pertinent d’avoir l’information sur quelle a été, de 2012 à ce jour, l’évolution des « produits d’exploitation » des activités ambulatoires AOS dans les hôpitaux publics de notre canton. Au vu de la difficulté de comprendre le document financier du Canton, il serait intéressant de savoir sous quelles rubriques du budget et des comptes de l’Etat de Vaud il est possible de juger de l’impact positif du virage ambulatoire effectué (évolution des coûts et des rentrées).
La compréhension de la situation serait améliorée si le Caton donne les chiffres de l’évolution de la part des coûts totaux de la santé vaudois financés par l’Etat, donc par le contribuable et respectivement par l’AOS, donc par les primes, et ceci depuis l’introduction de la LAMal en 1995.
On peut aussi s’enquérir de l’avis du Conseil d’Etat concernant les propositions faites par la Société vaudoise de médecine (SVM) pour que les économies réalisées par l’Etat de Vaud sur le financement du stationnaire soient réaffectées au financement de ces mêmes prestations en ambulatoire, afin d’en atténuer l’impact sur les primes.
Dès lors, ce postulat invite le Conseil d’Etat à présenter un rapport sur les impacts financiers pour les comptes du Canton, depuis l’année 2012 et jusqu’à ce jour, liés au transfert des prestations du mode stationnaire vers le mode ambulatoire et, en cas d’impact positif significatif pour les finances cantonales due à cette optimisation des coûts de la santé, d’identifier et d’évaluer les mécanismes possibles pour une restitution à l’ensemble de la population vaudoise.
Conclusion
Prise en considération immédiate
Liste exhaustive des cosignataires
Signataire | Parti |
---|---|
Nicolas Bolay | UDC |
Yann Glayre | UDC |
Marc Morandi | PLR |
Stéphane Jordan | UDC |
Jean-Bernard Chevalley | UDC |
Cédric Weissert | UDC |
Jean-François Thuillard | UDC |
Fabrice Tanner | UDC |
Céline Baux | UDC |
Jacques-André Haury | V'L |
Denis Dumartheray | UDC |
Nicolas Glauser | UDC |
Maurice Treboux | UDC |
Yvan Pahud | UDC |
José Durussel | UDC |
Aliette Rey-Marion | UDC |
Pierre-Alain Favrod | UDC |
Guy Gaudard | PLR |
Nicola Di Giulio | UDC |
Philippe Liniger | UDC |
Florence Gross | PLR |
Documents
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourLa commission s'est réunie le 13 janvier 2023 pour discuter de cet objet. Elle tient à remercier M. Ischy, secrétaire de commission, pour la rédaction des notes de séance. Le postulant a présenté deux documents : l'un concernant l'évolution des coûts de la santé en millions de francs par payeur dans le canton de Vaud depuis 1993, et l'autre sur l'augmentation des prestations facturées en ambulatoire pour les hôpitaux vaudois.
Selon ce document, le postulant estime que le montant économisé par le canton de Vaud en 2019 par rapport à 2012 s'élève à 800 millions. L'addition des économies réalisées depuis 2012 atteint ainsi la somme de 3,6 milliards. Il constate que le virage du stationnaire vers l'ambulatoire suscite également des préoccupations dans les autres cantons, qui, selon ses informations, ont déjà entamé des travaux d'analyse. Le postulat demande donc au Conseil d'État de mener une démarche similaire pour le canton de Vaud, afin d’assurer la transparence sur ce virage, de favoriser un débat plus apaisé concernant l'augmentation des primes, de repérer les leviers d'action et, accessoirement, de savoir comment ont été utilisées les sommes qui, selon M. Moscheni, ont été économisées par le canton.
La cheffe du Département de la santé et de l'action sociale (DSAS) a présenté une analyse complète à la commission, démontrant que, contrairement à l'affirmation du postulant, le Conseil d'État ne dépense pas moins pour le secteur hospitalier. Au contraire, le financement étatique des cas hospitaliers stationnaires ainsi que le nombre de séjours stationnaires par habitant ont augmenté depuis 2012. Il a également été précisé que le canton de Vaud a entamé son virage ambulatoire plus tôt que d'autres cantons, et que la liste nationale des interventions devant être réalisées en ambulatoire n'a qu'un impact financier limité. Entre 2015 et 2019, on observe une baisse de 0,3 % du montant à la charge du canton pour le financement de l'hospitalisation stationnaire. De même, entre 2015 et 2019, la baisse à la charge des assureurs maladie concernant les coûts hospitaliers stationnaires et ambulatoires est également de 0,3 %. Ces chiffres sont bien loin de ceux avancés dans le postulat.
En réalité, la croissance du secteur ambulatoire n'a pas profité à l'État. En effet, d'une part, les bénéfices que les hôpitaux peuvent réaliser sont limités par la loi sur l'assurance-maladie (LAMal), qui stipule que les tarifs ne doivent pas excéder les coûts d'une prise en charge efficace. D'autre part, l'État n'a aucune possibilité de s'approprier ou de réaffecter les produits générés par un hôpital, même si cet hôpital fait partie des services de l'État, comme le CHUV. En effet, les recettes appartiennent aux hôpitaux eux-mêmes et sont séparées de celles de l'État, y compris celles du CHUV.
En conclusion, la contribution cantonale aux coûts hospitaliers n’a pas diminué depuis 2012, mais a augmenté. Le virage ambulatoire n’a pas réduit la contribution de l’État ; il a simplement contribué à limiter son augmentation. Aucun des périmètres analysés n’indique une baisse significative de la part financée par l’État, qui justifierait une restitution comme demandée dans le postulat. Une modification de la LAMal, en ligne avec l’objectif du postulat « Stabilisation de la répartition des coûts entre le canton et l'AOS », est déjà en cours avec le projet de financement uniforme, qui a d'ailleurs été récemment voté. Il serait donc peu opportun de chercher à développer, parallèlement à cette réforme, des mécanismes alternatifs pour stabiliser cette répartition des coûts. Pour toutes ces raisons, le Conseil d'État recommande de ne pas prendre en considération ce postulat. Lors de la discussion générale, l'inexactitude des chiffres fournis par le postulant, la présentation claire de la conseillère d'État, ainsi que la difficulté à saisir les intentions du postulant, ont conduit la commission à recommander de ne pas prendre en considération ce postulat, avec un résultat de 9 voix contre 2 et 4 abstentions.
La discussion est ouverte.
Mon postulat demande qu'une étude soit réalisée sur l'éventuelle économie que l'État de Vaud aurait réalisée grâce au transfert des prestations stationnaires vers les prestations ambulatoires. Comme vous le savez, depuis 2012, la révision de la LAMal a instauré un nouveau paradigme. Dans le cadre de l'AOS, il existe deux types de soins. Si les soins sont hospitaliers, donc stationnaires, la rémunération du traitement se fait par des forfaits par cas. Les structures tarifaires de cette rémunération sont appelées SwissDRG, TARPSY et ST Reha. La facture est payée de la manière suivante : 55 % est pris en charge par le canton, c'est-à-dire par les impôts des contribuables, et 45 % est pris en charge par les assureurs, c'est-à-dire par les payeurs de primes. L'autre type de prestations concerne les soins ambulatoires. La rémunération de ces traitements se fait à l’acte, selon la structure tarifaire TARMED, et la facture est entièrement réglée par les payeurs de primes. On constate donc un déséquilibre, voire une différence notable, entre les sources de financement de l'hospitalier et de l'ambulatoire.
Mon postulat repose sur l’analyse suivante : comme cela a été souligné, le canton de Vaud est un précurseur dans le virage du secteur hospitalier vers l'ambulatoire. Depuis 2012, ce transfert a été significatif, avec des traitements qui, auparavant réalisés en stationnaire, sont désormais effectués en ambulatoire. Je tiens à rappeler ici le projet du virage ambulatoire du CHUV, qui vise à transférer un maximum de prestations vers l’ambulatoire. Dans ce contexte, mon postulat demande qu’une étude soit réalisée pour analyser l'impact financier de ce virage.
L’hypothèse à valider ou à invalider est la suivante : est-ce qu'il y a eu un transfert du financement de la santé, passant des impôts vers les primes ? Et ici, je voudrais rebondir sur ce qu’a dit ma préopinante. Il n’a jamais été question de chercher de l’argent dans les hôpitaux. La question posée est plutôt celle de savoir si le canton, en tant que réceptacle des impôts, a dû moins financer les hôpitaux, en raison du transfert des soins hospitaliers vers l’ambulatoire.
Deux remarques à ce sujet :
- Si un tel transfert existait, cela pourrait expliquer en partie pourquoi les primes maladie augmentent plus vite que les coûts de la santé, notamment dans le canton de Vaud.
- De plus, si un tel transfert existait, cela pourrait expliquer pourquoi les primes maladie sont particulièrement élevées dans le canton de Vaud, avec une différence de plus de 20 % par rapport au canton de Zurich.
Dans le cadre de la commission, le DSAS a effectivement présenté des chiffres qui montrent que j'avais totalement tort et qu'il n'y a pas de transfert entre l'hospitalier et l'ambulatoire en termes de financement. Cependant, il existe de nombreux indices qui suggèrent qu'un tel transfert pourrait exister, et qu'une étude devrait être réalisée, sera réalisée, et j'espère qu'elle le sera. Le premier indice se trouve sur le premier slide de la présentation.
* introduire image
C'est M. Pierre-Yves Maillard, ancien conseiller d'État en charge de la santé, qui nous fournit cet indice en affirmant qu'un tel transfert vers le payeur de primes existe. Dans un article du Temps du 17 juillet 2012, où il est question du virage ambulatoire du CHUV, il est écrit : « Un bémol apparaît toutefois au milieu de ce projet bien rodé. L'ambulatoire coûte cher aux assurances-maladie. Ses opérations sont prises entièrement en charge par l'assurance du patient, ce qui n'est pas le cas du stationnaire, dont le canton rembourse 55 % des frais, donc le contribuable ». M. Maillard déclare alors : « C'est en effet un problème qui va se poser à terme, concède Pierre-Yves Maillard. Un virage ambulatoire s'opère depuis 20 ans et les hôpitaux doivent suivre cette tendance. Il faut maintenant trouver de nouvelles clés de financement. La balance des coûts de la santé doit être à nouveau équilibrée entre l'État et l'assurance-maladie ». Mesdames et messieurs, M. Maillard le soulignait déjà en 2012 : selon lui, il existe bien un transfert de financement de la santé, passant des impôts vers les primes, comme le suggère mon postulat. La question qui se pose aujourd'hui est de savoir combien l'État a économisé en transférant cette charge sur les payeurs de primes.
* Introduire deuxième image
Il s'agit d'une source provenant de l'Office fédéral de la santé publique (OFSP), publiée le 31 août 2023. Selon cette source, en 2022, environ 1,5 milliard de francs ont été transférés du financement par les impôts, via les Diagnosis Related Groups (DRG), vers le financement par les primes. Si le canton de Vaud représente environ 10 % de la Suisse, cela équivaut à 150 millions de francs. Pour l'OFSP, ce transfert existe bel et bien.
* introduire troisième image
Il s'agit d'un article de la RTS, publié le 19 septembre 2023, intitulé : « La progression de l'ambulatoire a coûté des milliards de francs aux assurés ». Il n’est pas possible d’être plus explicite que cela. Mesdames et messieurs, en résumé, la part des soins financés par les impôts a diminué, tandis que celle financée par les primes a considérablement augmenté. La question qui se pose alors est : combien exactement ? Quel est l'impact spécifique dans le canton de Vaud ? C'est précisément l'objet de ce postulat : déterminer combien d'argent a été économisé par le canton de Vaud, de l'argent payé par les contribuables, et qui, aujourd'hui, est réaffecté à d'autres fins ou simplement utilisé pour alimenter le bénéfice du canton de Vaud. Depuis plus de 20 ans, ce bénéfice a avoisiné les 500 millions par an, mais, malheureusement, cela a disparu ces dernières années.
Mesdames et messieurs, beaucoup réclament de la transparence dans le marché de la santé. Les cantons en général, et le canton de Vaud en particulier, demandent cette transparence de la part des différents acteurs de la santé, comme les assurances-maladie. À la lumière des déclarations de M. Pierre-Yves Maillard, en 2012, ainsi que des informations de l'OFSP et de la RTS qui montrent qu'il existe un transfert du financement depuis les impôts vers les payeurs de primes au niveau suisse, une étude pour le canton de Vaud permettrait à tous de mieux comprendre ce qui se passe dans le marché de la santé vaudoise. Sans cette compréhension, il nous sera impossible de trouver des solutions pour freiner les augmentations constantes des coûts de la santé. Pour davantage de transparence, je vous demande de soutenir le renvoi de mon postulat au Conseil d'État.
Ce postulat soulève une question légitime. Avec le virage ambulatoire, il est en effet logique de penser que les cantons réalisent certaines économies. Cependant, aller jusqu'à articuler une économie de 800 millions pour le canton de Vaud semble un raisonnement plus difficile à soutenir. Je tiens à remercier le Conseil d'État pour sa démarche proactive dans la gestion de cette demande de postulat. Nous avons apprécié, au sein de la Commission de la santé publique, l'argumentaire détaillé qui a permis de nous convaincre que le canton ne s'est pas enrichi grâce au virage ambulatoire. Vous pourrez retrouver ces éléments dans le rapport de commission, à la fin du document.
On y apprend notamment que, premièrement, le financement des séjours hospitaliers est en hausse, de même que le taux d'hospitalisation par habitant. Deuxièmement, bien que le canton de Vaud ait été pionnier dans le virage ambulatoire, l'impact financier pour le canton semble limité. Et troisièmement, il n'est pas possible de demander aux hôpitaux de réaffecter les profits générés par leur activité au canton. En réalité, la véritable réponse à ce postulat s'est déjà jouée dans les urnes avec l'acceptation du projet de Financement uniforme des prestations ambulatoires et stationnaires (EFAS). En conclusion, je vous invite à suivre la grande majorité de la commission et à ne pas prendre en considération ce postulat. Ce sera ainsi un bel exemple de sobriété parlementaire.
Ce postulat a effectivement, selon les Verts, depuis le 24 novembre 2024, un petit goût d'anachronisme. En effet, à la suite de la votation sur le projet EFAS, toute la présentation du financement du stationnaire et de l'ambulatoire que nous a faite M. Moscheni n'est plus d'actualité. C'est un choix qui, pour les Verts, n'est pas forcément celui pour lequel nous nous battions, mais c'est la volonté du peuple. Nous avons donc accepté, en votation populaire, une uniformisation des financements des prestations médicales : 26,9 % seront financés par le canton, et 73,1 % par les assurances. Cette décision populaire, à mon avis, rend ce postulat quelque peu obsolète. Je vais donc vous encourager à suivre la proposition de la commission et à ne pas donner suite à ce postulat, par sobriété parlementaire, et aussi parce que le cadre a complètement changé depuis quelques mois.
Je dois dire que je suis un peu surpris de la tournure de la présentation de notre collègue Moscheni. Lors du débat en commission, M. Moscheni est venu avec un certain nombre de chiffres, certains difficiles à vérifier. Ensuite, nous avons eu une présentation vraiment claire et bien structurée de la part du Conseil d'État. Mais, aujourd'hui, M. Moscheni arrive avec d'autres chiffres, s'appuyant sur d'autres prises de parole et d'autres positions. Cela m'inspire la réflexion qu'il serait peut-être nécessaire, de la part de M. le postulant, de vérifier ses sources et ses chiffres afin d'être plus précis et clair dans son approche.
Ensuite, je pense qu'il faut se poser une question fondamentale : si l'on applique la proposition de M. Moscheni, qu'est-ce que cela signifie concrètement ? Cela nécessiterait d'analyser depuis 2012 l'ensemble des prestations ambulatoires réalisées par les hôpitaux de ce canton. Puis, il faudrait définir lesquelles auraient pu, dans un passé récent, être faites en stationnaire. Sur quelle base ? Leur attribuer un DRG approprié et en faire la différence économique. Pour moi, cela ressemble à de la sculpture sur nuages. Nous n'avons pas de base scientifique solide pour mener une telle analyse, et cela demanderait énormément de travail. Il faudrait mobiliser plusieurs personnes pour analyser les archives de tous les hôpitaux vaudois depuis 2012, ce qui semble considérable, notamment en termes d'ETP. Et comme l'a souligné Mme Dubuis, tout cela se fait dans un contexte qui va totalement changer avec l'arrivée du projet EFAS, redéfinissant complètement le système. Dans ce cadre, je ne vois pas l'intérêt de poursuivre cette démarche. Favorable à la sobriété et l'efficience, je vous encourage donc à ne pas donner suite à ce postulat.
Je voudrais apporter quelques précisions à M. Cala. Malheureusement, les chiffres que je vous ai présentés n'étaient pas disponibles au moment de la commission, car les données que j’ai partagées avec vous, notamment les transparents, datent de la mi-2023. C’est pour cette raison que je me suis permis de compléter ma présentation avec ces nouveaux chiffres dans le cadre du plénum.
Concernant l'argument selon lequel EFAS a été adopté et que, de fait, le mode de financement devient uniforme, je partage pleinement votre avis sur le fait que cela entraînera un changement. La véritable question reste celle-ci : qu'en a-t-il été durant ces 20 dernières années ? Combien d'argent le canton de Vaud a-t-il économisé en faisant supporter la charge aux payeurs de primes ? Il est important de rappeler que le Conseil d'État du canton de Vaud était initialement opposé à EFAS, peut-être pour de bonnes raisons, notamment en raison du coût qu'il entraînerait. Cela semble d'ailleurs corroborer l'hypothèse que j'avance : un transfert de charges qui profite au canton, lui permettant de payer moins et de conserver davantage d'argent, probablement au détriment des contribuables. D'ailleurs, cela aurait peut-être pu permettre une réduction des impôts, puisque moins payé par l'impôt et davantage par les primes. En effet, il faut noter que, pour une grande majorité des Vaudoises et Vaudois, les payeurs de primes et les contribuables sont souvent les mêmes personnes.
Aujourd’hui, ce que je soutiens, c’est qu’au cours de ces 20 dernières années, la fiscalité a été augmentée en raison de l’action du Conseil d'État, qui a fait supporter une charge plus lourde en primes aux contribuables, sans qu’en contrepartie leurs impôts aient diminué. C’est aussi simple que cela. L’objectif de ce postulat est de vérifier ou de réfuter cette hypothèse. Toutefois, je comprends parfaitement l'approche de la gauche ou de certains députés qui préfèrent éviter de soulever le voile sur cette question. Peut-être que depuis 20 ans, le contribuable vaudois a été lésé, et l’idée de rendre ces informations publiques n'est peut-être pas la bienvenue. C’est là mon point de vue.
Depuis un certain temps, nous avons régulièrement des exemples de cette situation, chaque mardi, comme celui de M. Moscheni, qui critique vigoureusement la gestion de la santé dans notre canton. Aujourd’hui, il tente de nous convaincre que la priorisation de l’ambulatoire est motivée uniquement par des raisons économiques, liées au financement de l'État. Cependant, chacun sait que l’amélioration des traitements et des techniques permet aujourd’hui de réduire le besoin d’hospitalisations, et ce, pour de nombreuses interventions. De plus, il est clair que c’est également ce que souhaitent les patients : s’ils peuvent être traités à domicile, en ambulatoire, ils préfèrent largement cette option à l’hospitalisation. Le débat doit donc également prendre en compte la satisfaction des patients. La priorisation de l’ambulatoire, c’est avant tout une question de bien-être des patients. C’est pourquoi nous vous proposons de ne pas envoyer ce texte au Conseil d’État, afin d’éviter d’ouvrir une nouvelle polémique sur ces enjeux.
La majorité du groupe PLR s’abstiendra sur ce postulat. En ce qui concerne la question de l’enrichissement, a-t-il eu lieu ou non ? Y a-t-il eu des économies, ou pas ? Chacune des parties renvoie la responsabilité à l’autre. Il y a des arguments valables des deux côtés. Oui, il serait pertinent de savoir ce qui s’est réellement passé. Mais d’un autre côté, si aucune économie n’a été réalisée, il faut en prendre acte. Il sera donc très difficile de trancher sur ce point, d’où la position du groupe. À titre personnel, je souligne simplement un fait : le canton de Vaud a été un précurseur en matière de transferts vers l’ambulatoire, et c’est une chose positive. Toutefois, je regrette que, si des économies ont été réalisées, ce ne soient pas les assurés qui en aient profité.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
Le Grand Conseil refuse la prise en considération du postulat par 62 voix contre 29 et 41 abstentions.