21_REP_208 - Réponse du Conseil d'Etat au Grand Conseil à l'interpellation Rebecca Joly - La loterie romande a-t-elle une politique publicitaire responsable (21_INT_134).
Séance du Grand Conseil du mardi 7 mai 2024, point 29 de l'ordre du jour
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Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourJe remercie le Conseil d'Etat pour sa réponse, même si je ne suis que partiellement satisfaite. Les questions autour de la Loterie Romande (LoRo) sont toujours un peu délicates et sensibles, mais c'est une entreprise détenue par les pouvoirs publics et, dans ce contexte, elle a un devoir d'exemplarité particulier ; c'est dans ce sens que j'avais déposé mon interpellation.
Les réponses sur le contenu sont intéressantes, mais beaucoup de choses sont simplement des répétitions des obligations légales. Il est fait mention de la question du marketing responsable et de la directive que la LoRo applique : la directive marketing et publicité. Dans cette directive, on trouve beaucoup d'éléments qui constituent des obligations légales et peu d'éléments vont beaucoup plus loin. Il y a toutefois quelques éléments intéressants à souligner, notamment le fait de ne pas avoir de mineurs dans les publicités ou ce genre d’informations – ce ne sont pas des obligations légales – qui vont un peu plus loin.
Concernant la question un peu particulière de la campagne de publicité que je soulignais, on est encore un petit peu à la vieille école – je cherchais un mot pour ne pas heurter les sensibilités de certains. On nous dit que le but des campagnes de publicité est de provoquer l'envie, le désir, l'amusement ; or, est-ce que l'amusement, c'est d'aller aux Maldives en avion ? Je ne crois pas. On peut avoir d'autres envies et susciter le rêve différemment. Le rôle des entreprises de marketing et de publicité est aussi d'essayer de susciter l'engouement sans vendre des choses complètement contraires à nos objectifs climatiques, environnementaux et sociaux. Dès lors, dans ce contexte, la réponse est vraiment assez faible. C'est une réponse qui est copiée-collée de la Loterie Romande, mais qui rappelle que cette dernière contribue à certaines actions environnementales par le reversement de ses bénéfices. Or, je rappelle encore une fois, comme j'ai eu plusieurs fois l'occasion de le faire à cette tribune, que ce n'est pas par charité que la Loterie Romande reverse ses bénéfices à des institutions sociales, culturelles et environnementales ; c’est uniquement parce qu'elle redistribue ses bénéfices à des institutions culturelles, sociales et environnementales qu'elle a le droit, selon la loi, de proposer des jeux d'argent. Il ne faut donc pas renverser la vapeur. Il est important de rappeler ici que cette redistribution est la condition légale à l'exploitation des jeux de grande envergure. Dans ce contexte, le Conseil d'Etat ne pouvait probablement pas me donner une meilleure réponse.
Toutefois, il y a un point qui m'a interpellée dans la directive, mais je ne pense pas que Mme la conseillère d'Etat pourra me répondre, car ce sont toujours des questions intercantonales. Dans la directive, on parle de lieux qui ne sont pas adaptés à de la publicité pour les jeux d'argent – je pense notamment aux transports publics. Or, on retrouve ces campagnes d'affichage massivement dans les gares ; certes, on n'est pas directement dans un transport public, mais l’on passe souvent plus de temps à la gare que dans un transport, du moins dans une agglomération. Dans ce cas, on joue un peu sur les mots.
Enfin, je suis consciente que cela dépasse le cadre de mon interpellation, mais il est mentionné que, depuis l'ouverture des jeux en ligne, il y a une augmentation des comportements de jeux à risque, notamment en ce qui concerne la question des paris sportifs, qui sont extrêmement addictifs et qui entraînent des comportements souvent problématiques. J’ai toujours été choquée de voir des publicités massives pour des jeux de paris sportifs durant les retransmissions de compétitions sportives. Les gens qui parient sur le sport aiment généralement le sport et le regardent ; dès lors, ceux qui ont un problème d’addiction sont inondés de publicités lors des compétitions et cela les empêche de profiter simplement desdites compétitions. On peut débattre des heures du fait qu'il faut que l'offre de jeux légale soit attrayante pour éviter que les personnes recourent à des offres de jeux illégales, mais cela ne doit se faire au détriment des personnes vulnérables qui pourraient ne plus pouvoir regarder la Coupe d'Europe cet été, parce qu'il y a trop de publicités pour les jeux.
Cela pose également beaucoup de problèmes, notamment sur le sponsoring et la vision des jeux à l'international. Par exemple, il y a eu des problèmes de retransmission des matchs de Young Boys en Ligue des champions, parce que le sponsor de Young Boys n'était pas compatible avec le droit européen. Dès lors, les matchs de Young Boys n'ont pas pu être regardés et diffusés par les télévisions européennes.
Je vais en rester là, mais la question des jeux d'argent ainsi que celle de la gouvernance de la LoRo sont extrêmement importantes. C’est pour cette raison que j'ai déposé aujourd’hui un postulat sur la question de la gouvernance de la Loro et du dialogue entre cette gouvernance et la question de la prévention du jeu. En effet, il me semble que certaines décisions d'entreprise de la LoRo ne sont pas compatibles avec une prévention auprès de la population et une préservation de la santé de la population. Dès lors, le risque est que ce que l'Etat gagne d'un côté avec les gains de la Loro soit perdu de l'autre avec des soins ou des programmes de prévention qui sont de plus en plus onéreux et qui pèsent de plus en plus sur les finances de santé publique de ce canton. C’est un autre débat que j'aurai le privilège de développer la semaine prochaine. Je remercie le Conseil d'Etat pour sa réponse, même si je n'en suis que partiellement satisfaite.
La discussion est ouverte.
J’ai une remarque à faire sur le côté institutionnel de certaines interpellations et celle-ci en est un bon exemple. La LoRo n'est ni le Conseil d'Etat ni son administration. En acceptant cette interpellation qui ne concerne pas l’administration, le Bureau du Grand Conseil demande simplement à la LoRo de répondre, comme cela se fait dans d'autres cas – certes, je simplifie un peu. La question qui devrait être posée est plutôt : quelles consignes ont reçu les représentants du gouvernement – ou le membre du gouvernement, puisque Mme Moret siège dans ce Conseil d'administration ? Quelle attitude a-t-elle eue ? Quelle position a-t-elle défendue ? Dans un tel cas, l'interpellation est un mauvais moyen d’intervenir, et peut même nuire à la cause défendue. En revanche, le postulat déposé aujourd’hui par Mme Rebecca Joly sur ce sujet est la bonne démarche à suivre ; je crois même que j'ai eu la faiblesse de le co-signer.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
Ce point de l’ordre du jour est traité.