22_POS_40 - Postulat Fabrice Moscheni et consorts - Aidons les jeunes de condition modeste à accéder au marché du travail grâce au permis de conduire.

Séance du Grand Conseil du mardi 6 juin 2023, point 16 de l'ordre du jour

Texte déposé

 

L’accès au marché du travail pour un jeune peut être un parcours compliqué. En sus d’une bonne formation et d’être motivé, il doit posséder d’autres compétences importantes lorsqu’une entreprise sélectionne un candidat parmi les différents dossiers qu’elle a reçus. Parmi ces compétences, on peut mentionner celui d’avoir une connaissance des outils numériques afin de pouvoir travailler efficacement.

Une autre compétence importante est celle de posséder le permis de conduire automobile (catégorie B). En effet, de nombreuses activités professionnelles requièrent la capacité de se rendre chez des clients avec du matériel pesant et/ou d’avoir accès rapidement à des endroits mal desservis par les transports publics.

Par ailleurs, le permis de conduire est une nécessité pour les personnes habitant dans les zones périphériques du Canton. Palliant le déserte modeste et peu efficace des transports publics, la voiture leur permet de se désenclaver et  d’avoir accès à un plus grand bassin d’opportunités professionnelles et associatives.

Actuellement, le coût pour obtenir un permis de conduire est devenu prohibitif pour les classes populaires. Si l’on n’a pas la chance de pouvoir compter sur l’aide familiale pour aider dans l’apprentissage de la conduite d’une voiture, le coût du permis varie entre 1'500 CHF, pour les plus habiles, et 4'000 CHF, voire plus, pour les moins chanceux. Certains jeunes peuvent y renoncer à cause des coûts trop importants et prétéritent ainsi leur chance d’accès au marché du travail ainsi que de désenclavement s’ils habitent dans une zone périphérique.

La Canton doit mettre en place les conditions-cadres permettant un accès équitable au marché du travail. Il doit aussi assurer un traitement équitable pour les personnes habitants dans les zones périphériques. Ceci est particulièrement crucial pour les jeunes. Dans ce contexte, aucun jeune ne devrait renoncer à obtenir son permis de conduire automobile pour cause d’un problème financier.

 

Ce postulat invite le Conseil d'Etat  à étudier l’opportunité d’aider financièrement les jeunes de condition modeste désireux d’obtenir le permis de conduire automobile de catégorie B.

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Yvan PahudUDC
Pierre-Alain FavrodUDC
Maurice TrebouxUDC
Jean-François ThuillardUDC
Denis DumartherayUDC
Guy GaudardPLR
Fabrice NeyroudUDC
Jean-Bernard ChevalleyUDC
Fabrice TannerUDC
Yann GlayreUDC
Oscar CherbuinV'L
Nicola Di GiulioUDC
Jacques-André HauryV'L
Philippe LinigerUDC
José DurusselUDC
Stéphane JordanUDC

Documents

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
Mme Mathilde Marendaz (EP) — Rapporteur-trice de majorité

Pour rappel, le présent postulat invitait le Conseil d’Etat à étudier l’opportunité d’aider financièrement les jeunes de condition modeste désireux d’obtenir le permis de conduire automobile de catégorie B. Je laisserai à la rapporteuse de minorité le soin de présenter les arguments de la minorité. La problématique du permis de conduire comme frein important à l’insertion professionnelle a déjà été relevée et traitée par la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS). Un projet-pilote vient d’être mis en place avec l’objectif de lever le frein à l’insertion par le financement de permis de conduire et la reconnaissance de permis étrangers. Ce projet-ci s’adressera à des bénéficiaires de mesures d’insertion socioprofessionnelle. Ce projet-pilote, détaillé dans le rapport de majorité, est prévu pour une durée de 12 mois, ce qui permettra de voir si l’on réussit, par le biais de l’obtention du permis de conduire, à augmenter de manière mesurable l’attractivité du profil des personnes concernées.

Aux yeux de la majorité de la commission, cette première étape pourra déjà nous apporter des réponses sur la pertinence d’une action spécifique en la matière. Il y a donc premièrement lieu d’attendre les résultats de cette étape avant d’engager un autre processus. Par ailleurs, d’autres problématiques sont concernées par ce postulat : le transport du lieu de domicile au lieu de travail et la nécessité de disposer d’un permis de conduire pour obtenir certains emplois, deux problématiques assez distinctes. Alors que dans passablement de métiers nécessitant de disposer du permis de conduire, il y a des aides patronales, la majorité de la commission ne pense pas que ce soit aujourd’hui à l’Etat d’aller plus loin. Plus précisément, la majorité de la commission soutient des mesures qui permettraient d’aider à obtenir des emplois, mais deux catégories posent particulièrement problème dans ce postulat, aux yeux de la majorité de la commission : la première est la catégorie de jeunes de condition modeste qui est perçue comme une catégorie assez floue et large, trop peu précise. La deuxième catégorie est la perspective de concevoir, de manière restreinte, l’aide à la mobilité individuelle motorisée comme voie d’amélioration de l’accès à l’emploi. La majorité de la commission préconise à l’inverse de mesurer ce qui pourrait créer un frein à l’emploi ou à l’apprentissage dans les populations mentionnées, en prenant compte d’une multiplicité de facteurs et donc d’une multiplicité de mesures.

Enfin, l’absence de réflexion globale sur la mobilité, en se concentrant dans ce postulat uniquement sur les transports individuels motorisés, semble à la majorité de la commission aller à contresens de la direction empruntée pour soutenir des mobilités diverses et plus douces. Nous pensons qu’il est important d’offrir des solutions variées, avec un impact climatique moindre en matière de mobilité, aussi dans l’accès à l’emploi. En conclusion, la majorité de la commission estime que ce postulat surchargera l’administration, dans une réflexion trop limitée à la fois au niveau de la catégorie visée –que nous ne jugeons pas claire – et parce que l’accès à l’emploi devrait être étudié au-delà du seul prisme du permis de conduire. La majorité de la commission redoute les implications du postulat à l’heure d’une réflexion pour changer nos habitudes de mobilité. Elle estime que des mesures existent déjà, qu’elles sont suffisantes et que ce n’est pas à l’Etat d’en faire aujourd’hui davantage. Par 4 voix pour le classement, 4 voix pour la prise en considération et donc avec la voix prépondérante de la présidente, la commission recommande au Grand Conseil de classer ce postulat.

Mme Marion Wahlen (PLR) — Rapporteur-trice de minorité

Dans certains métiers, notamment dans les secteurs primaires et secondaires, avoir un permis de conduire est encore quelque chose de nécessaire. Or, pour y accéder, il faut entre 2500 à 5000 francs, une somme assez considérable, d’où ce postulat permettant de réfléchir à la manière d’aider des jeunes de condition modeste à accéder à cet outil qui peut être nécessaire pour trouver un emploi. Il ne s’agit pas d’une logique de confort, mais avoir un permis de conduire est un outil pour accéder au marché de l’emploi. On peut d’ailleurs constater que de nombreuses offres d’emploi ont, comme condition pour postuler, la possession d’un permis de conduire.

Sur la base de ces constats, en partie partagés par la DGCS, le pôle insertion a mis en place un projet-pilote dont l’objectif est de lever le frein à l’insertion des personnes au revenu d’insertion (RI) par le financement de permis de conduire, ainsi que la reconnaissance de permis étrangers. Même si un projet est en route, la minorité de la commission demande au Conseil d’Etat d’étudier l’opportunité d’aider financièrement l’obtention du permis de conduire pour les jeunes de condition modeste et non pas uniquement les personnes au bénéfice du RI, car il est important d’intervenir en amont, soit avant que ces jeunes soient au RI. Précisons que posséder un permis de conduire ne signifie pas posséder une voiture, mais par exemple pouvoir conduire un véhicule d’entreprise. Il s’agit d’une mesure d’intégration qui permettra à des jeunes de condition modeste d’avoir un emploi, mais aussi de désenclaver des jeunes habitants dans des zones périphériques.

Dès lors, la minorité de la commission invite le Canton à mettre en place des conditions-cadres permettant un accès équitable au marché du travail et à étudier l’opportunité d’aider financièrement des jeunes de condition modeste désireux d’obtenir le permis de conduire automobile de catégorie B. Je vous remercie de soutenir ce postulat et son renvoi au Conseil d’Etat.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. Fabrice Moscheni (UDC) —

Que nous soyons de gauche ou de droite, nous avons tous à cœur l’intégration des jeunes dans notre société, qu’ils aient un travail et des projets. Ce postulat invite effectivement le Conseil d’Etat à étudier l’opportunité d’aider financièrement des jeunes de condition modeste désireux d’obtenir le permis de conduire automobile de catégorie B. Aujourd’hui, le coût pour obtenir un tel permis varie entre 2000 à 5000 francs. C’est souvent une somme trop importante pour certaines personnes de condition modeste. Je sais que certains d’entre vous n’aiment pas beaucoup la voiture, mais avoir un permis de conduire, ce n’est pas avoir une voiture. Avoir un permis de conduire donne simplement la possibilité de conduire une voiture, par exemple celle de l’entreprise dans laquelle vous travaillez. Par ailleurs, cette voiture peut être électrique.

Dans le cadre de la commission, deux questions ont attiré l’attention des commissaires de majorité : comment définir un jeune de condition modeste ? Le postulat reste ouvert, ce sera au Conseil d’Etat de définir quels sont les critères pour définir si quelqu’un est de condition modeste ou pas. Le financement a aussi été questionné. Ce dernier n’est pas défini, on peut parler d’un prêt avec intérêts pour tout ou partie du coût du permis. Tout cela reste ouvert à la discrétion du Conseil d’Etat.

Est-ce que le permis de conduire est quelque chose d’important ? C’est une question absolument cruciale dans le cadre de ce postulat. La DGCS nous donne la réponse. Je lis ce qui nous a été dit dans le cadre de la commission : « (La DGCS) sait que le fait de ne pas posséder de permis de conduire peut représenter un frein important à l’insertion professionnelle. Il s’agit d’une problématique qui a été relevée récemment par différents prestataires de mesures d’insertion socioprofessionnelles (MISP) dans le cadre des échanges avec la DGCS concernant des personnes qui relèvent du RI. (…) Suite à ces retours, le pôle insertion a pu consulter d’autres organismes avec lesquels on collabore, qui ont corroboré l’information selon laquelle le fait de ne pas posséder un permis de conduire réduit le territoire pris en considération par les bénéficiaires dans leur recherche d’emploi, de même que l’attractivité de leur profil vis-à-vis des futurs employeurs. »

La question que nous devons nous poser aujourd’hui est la suivante : faut-il aider les jeunes avant qu’ils soient au RI ? Je crois que poser la question, c’est y répondre. Pour ma part, je pense que ce serait une grossière erreur et un mauvais calcul pour notre société de ne pas les aider avant qu’ils soient au RI. Cela serait aussi très mauvais pour ces jeunes qui connaîtraient une situation de RI avant de pouvoir intégrer le marché du travail.

En plus de l’intégration professionnelle, comme cela a été rappelé par la rapporteuse de la majorité, le fait d’avoir un permis de conduire est aussi très important pour les gens qui n’habitent pas dans une zone urbaine, mais en zone périphérique. Pour ceux qui pensent que tout ce problème est simplement théorique, j’ai fait quelques recherches hier soir. J’aimerais vous faire part d’une offre d’emploi du canton de Vaud pour un poste d’employé d’entretien des routes cantonales. Il est clairement écrit que le permis de catégorie B est une exigence. Pour ceux qui pensent que le canton de Vaud est à droite et que les municipalités de gauche ne veulent plus avoir de voiture non plus, j’ai imprimé une autre offre d’emploi de la ville de Lausanne dans laquelle il est clairement écrit que le permis de conduire catégorie B est une exigence pour postuler. Pour toutes ces raisons, je vous invite donc à renvoyer ce postulat au Conseil d’Etat.

Mme Oriane Sarrasin (SOC) —

Je faisais partie de la commission qui a traité de cet objet et, lors des discussions, j’ai rapidement eu l’impression qu’il s’agissait d’une fausse bonne idée. Il est certes important de favoriser l’accès au marché du travail, mais en considérant plus de facteurs que l’unique permis de conduire de catégorie B, en ciblant plus que les jeunes – d’ailleurs, qui est jeune et qui ne l’est pas ? – et en connaissant les résultats de l’étude-pilote sur le même thème. J’invite donc le postulant, ou toute autre personne intéressée, à revenir avec un objet traitant plus largement des difficultés d’accès au marché de l’emploi où le permis de conduire sera facteur parmi tant d’autres.

M. Sylvain Freymond (UDC) —

Habitant un petit village du Pied du Jura, j’aimerais souligner que le permis de conduire est indispensable pour la plupart des personnes qui vivent en zone périphérique. Les coûts liés à l’obtention du permis de conduire sont en constante augmentation et peuvent poser de gros problèmes financiers pour un jeune qui débute sa carrière professionnelle ou sa formation. Pour de nombreuses professions, le permis de conduire est également indispensable et dans une période où le recrutement du personnel est de plus en plus compliqué pour les entreprises, il me semble important de soutenir les personnes qui souhaitent obtenir le permis de conduire. Pour toutes ces raisons, je vous encourage à favoriser l’accès au permis de conduire et donc à soutenir le rapport de la minorité de la commission.

M. Andreas Wüthrich (V'L) —

Il est vrai que l’absence d’un permis de conduire peut constituer un frein pour trouver un emploi. La DGCS l’a aussi constaté ; elle y travaille avec un projet-pilote. Le postulat demande une aide trop généralisée pour l’acquisition d’un permis de conduire en faveur des jeunes. Pour cette raison, nous vous encourageons à classer ce postulat.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil prend le postulat en considération par 61 voix contre 51 et 11 abstentions.

M. Romain Pilloud (SOC) —

Je demande un vote nominal.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui soutiennent le classement du postulat votent oui ; celles et ceux qui soutiennent la prise en considération votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, le Grand Conseil prend le postulat en considération par 66 voix contre 52 et 11 abstentions.

 

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