18_MOT_040 - Motion Jean-Michel Dolivo et consorts - Violation de l'obligation d'informer les locataires en cas de travaux dans leur immeuble, quelle conséquence ?.

Séance du Grand Conseil du mardi 21 décembre 2021, point 41 de l'ordre du jour

Texte déposé

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Transcriptions

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M. Jean-Luc Bezençon (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

Je vous communique la position majoritaire de la commission qui a traité de cette motion. Ont participé à cette séance, hormis les membres de la commission, Mme la conseillère d’Etat, Béatrice Métraux, cheffe du Département des institutions et de la sécurité, ainsi que Mme Corinne Martin, cheffe du Service des communes et du logement, et MM. Florian Failloubaz, chef de la Division logement et Eric Bron, juriste à la Division logement. Mme Fanny Krug, secrétaire de commission, était chargée de rédiger les notes de séance. J’en profite pour remercier l’ensemble de ces personnes pour leur collaboration.

En préambule, je relève qu’il est assez cocasse de constater que cette motion devait, selon ses auteurs, être traitée de toute urgence pour éviter des problèmes de blocage qui pourraient survenir entre propriétaires et locataires lors de rénovations de bâtiments, les auteurs jugeant que l’article 6 de la Loi sur la préservation et la promotion du parc locatif (LPPPL) était incomplet et pourrait nuire aux rapports entre partenaires concernés. Il est assez amusant de constater que le traitement en urgence aura finalement attendu jusqu’à aujourd’hui – soit plus de trois ans après notre séance de commission – pour être traité. Rappelons au passage que la loi est entrée en vigueur le 1er janvier 2018, voilà quatre ans, à dix jours près. La commission s’est réunie le 8 octobre 2018. Cette motion, qualifiée de pressante ainsi que les rapports établis auront dormi plus de trois ans dans le tiroir des objets en attente de traitement, et il y a fort à parier que cette motion pourrait somnoler encore longtemps sans pour autant créer les problèmes promis à l’époque !

Pour rappel, l’article 6 de la LPPPL instaure un devoir d’information et la consultation des locataires, lorsque des travaux de rénovation importants sont prévus dans l’immeuble. Ce droit est essentiel et peut aussi bien profiter aux locataires qu’aux bailleurs, propriétaires ou promoteurs. Cela permet aux locataires de donner leur avis sur les projets et éventuellement de faire des propositions quant à la planification des travaux. Il s’agit, par une consultation ou une information préalable, d’éviter une procédure qui peut aller jusqu’au Tribunal fédéral et bloquer les travaux sur plusieurs années, ce qui n’est dans l’intérêt de personne. Il est en effet toujours mieux de prévenir que de guérir.

Lors de l’élaboration de cette loi, au début de l’année 2017, les débats en plénum avaient déjà fait l’objet de discussions nourries concernant l’article 6. Le motionnaire prétend que le Grand Conseil n’a pas réussi à trouver une formulation satisfaisante sur l’éventuelle sanction à prononcer en cas de violation de cette obligation, et c’est à tort, selon lui, qu’il a laissé cet aspect au règlement. Il reconnait cependant qu’il était difficile de préciser dans le règlement la procédure à mettre en œuvre. Le texte actuellement en vigueur à l’article 6, alinéa 3, est ainsi libellé :

« Le maître de l’ouvrage ou son mandataire a l’obligation d’informer au préalable et par écrit les locataires et les consulter lorsqu’il a l’intention d’exécuter des travaux de démolition, transformation ou rénovation d’un bâtiment existant. Il leur expose son projet et les informe de la répercussion probable sur leurs loyers. Il leur impartit un délai de trente jours au moins pour présenter leurs observations et suggestions. »

Notre ancien collègue Jean-Michel Dolivo propose donc un ajout à cet article ainsi libellé : « A réception de ces observations et suggestions, le maître d’ouvrage ou son mandataire les transmet à l’autorité compétente. En cas de violation de cette obligation, celle-ci n’entre pas en matière sur la demande d’autorisation de transformation ou de rénovation. » Lors de la séance de commission, il nous a été rappelé par la cheffe du département, à l’époque Mme Métraux, que le recul pour mesurer d’éventuelles lacunes ou imprécisions concernant cette loi récente était difficilement mesurable. Toutefois, après huit mois d’entrée en vigueur de la loi, la question de l’information ou du défaut d’information n’a pas suscité de problème porté à la connaissance de la Division du logement. Après 48 mois d’entrée en vigueur de la loi en question, le recul semble aujourd’hui largement suffisant pour mesurer d’éventuelles déficiences. Comme déjà évoqué, les libellés – tant à l’article 6 de la LPPPL que son règlement d’application à son article 10, alinéa 2 – introduisent l’obligation d’information préalable des locataires. C’est par souci de simplification administrative que la Commission cantonale consultative du logement n’a pas souhaité un renvoi systématique des documents relatifs à l’information des locataires. Ce point de vue a également été partagé par le Conseil d’Etat. Imaginez l’usine à gaz que nous mettrions en place en acceptant une telle proposition ! Si la transmission des documents en question devenait obligatoire et systématique, la Division du logement devrait contrôler 2000 ou 3000 dossiers chaque année pour des problèmes qui n’existent pas. J’en ai encore eu la confirmation auprès d’un collaborateur du Service du logement qui m’a déclaré que depuis l’entrée en vigueur de la loi, aucun cas d’abus ou de non-respect de l’article incriminé n’était à relever. De plus, en ce qui concerne les sanctions, la LPPPL prévoit déjà, à ses articles 25 et 26, la possibilité d’infliger une amende ou la suspension des travaux.

Lors de la discussion générale, les positions se sont très vite braquées, la minorité cherchant à minimiser ce que représenterait la charge administrative pour les autorités de surveillance et la nécessité de mettre en place une procédure, malgré le fait que les propriétaires malhonnêtes ne soient que très minoritaires, voire inexistants. Pour la majorité des commissaires, toutes les garanties sont réunies et ont pu être vérifiées dans la pratique, comme nous l’avaient expliqué à l’époque Mme la conseillère d’Etat, Mme Métraux ainsi que Mme Martin, cheffe du Service des communes et du logement, tout comme MM. Failloubaz et Bron, respectivement chef de la Division logement et juriste de cette même division. Il sera sans doute intéressant d’entendre la nouvelle cheffe du département en question, Mme la conseillère d’Etat Luisier Brodard sur ce sujet. Peut-être aura-t-elle d’autres informations à nous communiquer. Pour la majorité de la commission, cette motion ne ferait qu’alourdir un système qui donne aujourd’hui satisfaction, grâce à une loi qui comporte toutes les cautèles afin de garantir, tant aux locataires qu’aux propriétaires, la sauvegarde de leurs intérêts. En conclusion, la majorité de la commission vous recommande par 6 voix contre 5 et aucune abstention de ne pas prendre en considération cette motion.

Mme Jessica Jaccoud (SOC) — Rapporteur-trice de minorité

Cela peut vous paraître inhabituel, mais je souhaite que ce point soit reporté à une prochaine séance. M. le rapporteur de majorité nous a livré une lecture extensive ; précisons tout de même que les votes se sont joués à une voix près. Par conséquent, je souhaiterais aussi profiter d’une dizaine de minutes pour développer le rapport de minorité. En outre, de nombreux collègues souhaitent aussi intervenir. Ainsi, par respect pour toutes les personnes qui ont été invitées à notre soirée de Noël et pour les conseillers d’Etat qui se sont présentés devant nous, aujourd'hui, et afin que nous puissions mener un débat en bonne intelligence – je précise, madame la présidente, que nous nous sommes réunis en octobre 2018 – je nourris le sentiment intime que ce sujet pourra attendre les féeries de Noël. Si vous me concédez la remise de ce point à l’ordre du jour de la séance de la rentrée, je considère que les conditions seront réunies pour un débat beaucoup plus serein.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Cela ne me pose pas de problème, madame la députée, et je considère votre demande comme une motion d’ordre.

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

La discussion sur la motion d’ordre n’est pas utilisée.

La motion d’ordre Jessica Jaccoud est acceptée avec quelques avis contraires et abstentions.

Ce point de l'ordre du jour est renvoyé à une séance ultérieure.

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