23_POS_59 - Postulat Alberto Mocchi et consorts - Le retour de la bouteille.

Séance du Grand Conseil du mardi 19 mars 2024, point 36 de l'ordre du jour

Texte déposé

 

Avec 314'000 tonnes de verres récoltées en 2021 (mais pas toujours forcément recyclées…), ce qui correspond à près de 95% de la consommation totale, la Suisse se classe parmi les bonnes élèves en la matière. Dans le canton de Vaud, ce sont 36'000 tonnes de verre qui ont été récoltées en 2021, soit environ 44 kilos par habitant-e.

 

Si la filière de recyclage du verre fonctionne bien, avec d’évidents bienfaits pour l’environnement, elle ne reste pas moins le dernier recours de valorisation pour ce matériau. La refonte du verre – si elle ménage les matières premières – n’en est par ailleurs pas moins énergivore, puisque sa température de fusion avoisine les 1600 degrés.

 

De nombreuses études ont ces dernières années mis en avant le meilleur bilan énergétique et environnemental d’une réutilisation après lavage des bouteilles et autres contenants en verre, pour autant que la collecte, le nettoyage et la remise en circulation s’effectuent dans un rayon de maximum 200 km, et que le même contenant soit réutilisé au moins 3 fois.

 

Si le système de réutilisation/consigne était la norme jusque dans les années 1960, il n’est aujourd’hui plus que l’exception, malgré certaines entreprises qui ont décidé de le conserver, ou de le réintroduire. On peut penser dans notre canton à la cave de la Crausaz à Féchy, qui lavent et réutilisent leurs bouteilles, ou la brasserie Docteur Gab’s, qui fait de même depuis plusieurs années.

 

Récemment, un projet pilote de développement dans notre canton d’une vraie filière de réutilisation des emballages en verre a vu le jour, sous le nom de « ça Vaud le retour » et porté par le « Réseau Consignes » romand, Sanu Durabilitas et l’œuvre Suisse d’Entraide Ouvrière (OSEO), avec le soutien des communes de Lausanne, Nyon et Gland, ainsi que du canton de Vaud. Un groupe de huit vignerons et vigneronnes a quant à lui lancé le projet « bottle back », toujours avec l’objectif de remplacer les bouteilles à usage unique par des réutilisables.

Ce type d’initiatives doit être soutenu et encouragé, afin de diminuer nos émissions de CO2, réduire l’utilisation de matières premières et soutenir le tissu économique local, en renforçant les liens entre producteurs et consommateurs.

 

Par le biais de ce postulat, nous souhaitons donc demander au Conseil d’Etat d’étudier les différentes mesures qui pourraient être mises en œuvre pour renforcer et développer le système de réutilisation des contenants en verre dans notre canton. On peut par exemple penser à des actions auprès des communes, afin qu’elles mettent à disposition des lieux pour le retour des contenants dans leurs déchetteries ou autres locaux adéquats, des campagnes de sensibilisation auprès de la population et des producteurs, ou encore à des facilitations administratives et soutiens financiers pour la mise en place de tels systèmes.

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Yannick MauryVER
Géraldine DubuisVER
Sébastien CalaSOC
Muriel ThalmannSOC
Hadrien BuclinEP
Laurent BalsigerSOC
David VogelV'L
Nathalie VezVER
Patricia Spack IsenrichSOC
Sébastien HumbertV'L
Cendrine CachemailleSOC
Alexandre RydloSOC
Nathalie JaccardVER
Marc VuilleumierEP
Kilian DugganVER
Yolanda Müller ChablozVER
Martine GerberVER
Graziella SchallerV'L
David RaedlerVER
Monique RyfSOC
Séverine EvéquozVER
Jean-Louis RadiceV'L
Rebecca JolyVER
Valérie ZoncaVER
Pierre FonjallazVER
Anna PerretVER
Pierre ZwahlenVER
Théophile SchenkerVER
Aurélien DemaurexV'L
Oriane SarrasinSOC
Vincent BonvinVER

Documents

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Nicolas Suter (PLR) — Rapporteur-trice

Je remercie M. Cédric Aeschlimann, secrétaire de commission, pour son excellente collaboration.

Le postulat évoque les initiatives en cours pour remettre au goût du jour la pratique, encore courante il y a quelques années, de réutiliser les bocaux et bouteilles en verre, pour éviter leur usage unique et le recyclage. Un groupe de vignerons a mis en place un système de retour de bouteilles et la fromagerie de Montricher utilise également des bocaux réutilisables. L’idée du postulat est d’examiner dans quelles mesures l’Etat pourrait soutenir le passage à ce mode de consommation qui, par ailleurs, crée de l’emploi et de la richesse, avec une filière à construire pour le lavage et la distribution. En commission, la discussion porte sur les questions de mise en place des consignes, sur les différentes utilisations possibles du verre usagé dans les domaines de la construction et du recyclage, ainsi que sur le financement respectif des différentes filières.

Le canton soutient déjà plusieurs projets dont notamment une pratique sur le domaine de Marcelin : le projet Bottleback soutenu par le Service de promotion de l’économie et de l’innovation (SPEI). Il met en évidence les limites à vouloir imposer la réutilisation du verre et des bouteilles de verre par une législation cantonale. La question de la standardisation se pose, avec un format qui n’est pas le même pour du coca ou du chasselas, ou même pour les bouteilles de vin qui se déclinent en nombreuses variantes – il existe plus de 22 bouteilles différentes pour le chasselas vaudois ! Les points de collecte et leurs logistiques sont aussi en question, de même que les installations logistiques pour laver le verre. Le postulat s’inscrit dans les démarches que le Conseil d’Etat souhaite renforcer et valoriser, et il est accueilli favorablement. Le cadre de la matière et le siège de la réponse pourraient être la Loi sur la gestion des déchets qui est en cours de révision.

Le postulant souligne que le but de son texte n’est pas de contraindre les communes à quoi que ce soit, mais il indique qu’elles ont, par exemple, la possibilité de récolter les bouteilles de la brasserie Dr Gabs. Un accord existe avec cette brasserie qui vient récupérer ses verres une fois par mois ; le système fonctionne plutôt bien et ne coûte rien à la commune. La commission propose de prendre en considération le postulat par 14 voix et 1 abstention.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. Alberto Mocchi (VER) —

Nous avons parlé tout à l’heure d’économie circulaire et de l’objectif de la mettre réellement en place dans le canton. Il s’agit ici d’une modeste contribution à la volonté de réutiliser les bouteilles en verre lorsque c’est possible, plutôt que de les jeter ou les recycler.

Mme Carole Schelker (PLR) —

Le PLR dans sa majorité a soutenu ce postulat, en espérant que le canton fournisse des instruments aux entreprises pour encourager la réutilisation du verre, tout en évitant de créer des dispositifs complexes qui pèseraient sur les municipalités ou sur l’Etat. Cette voie intéressante conjugue les intérêts économiques et écologiques. Le canton doit jouer ici un rôle de facilitateur, comme il a pu le faire pour le plastique, en appuyant des initiatives privées dans ce domaine. C’est dans ce cadre que je vous invite à soutenir le postulat.

M. Pierre-André Pernoud (UDC) —

Les anciennes générations étaient très sensibles à réutiliser les contenants d’une manière économique et responsable. Force est de constater que l’évolution des emballages de tous types, alimentaires ou non, a pris un essor irresponsable de la part des producteurs et des consommateurs. Ce postulat identifie cette problématique et vise à faire prendre conscience aux différents acteurs que l’on peut faire mieux. Le groupe UDC soutiendra ce postulat.

M. Jacques-André Haury (V'L) —

Je suis complètement convaincu qu’il est nécessaire et utile de recycler le plus possible de choses, et en particulier le verre. Comme l’a fait remarquer M. Perrenoud, j’appartiens à une génération qui est née avec des emballages que l’on retournait aux producteurs, des bouteilles que l’on rendait au vigneron, des verres de yoghourt que l’on rapportait à La Fermière – il y a d’ailleurs une entreprise à Rossinière qui le pratique. J’ai pourtant quelques doutes quant aux moyens d’intervention de l’Etat dans ce domaine et comme l’a dit Mme Schelker, c’est une affaire principalement ou presque exclusivement privée. C’est très bien qu’une marque de bière s’entende avec la commune de M. le député Mocchi et sa municipalité pour récupérer ses bouteilles, mais on pourrait ensuite se demander pourquoi la commune n’offre pas le même service à Coca-Cola puis à d’autres entreprises, car si elle ne le fait pas pour toutes, pourquoi le faire pour l’une, avec des problèmes de concurrence. Nous sommes typiquement là dans un domaine où le progrès écologique ne se fera que par les privés, et essentiellement par les producteurs. Quand on parle d’une campagne de sensibilisation auprès de la population, je veux bien qu’on la sensibilise, mais quand on ne peut pas rendre sa bouteille ou son verre, la sensibilisation ne sert pas à grand-chose. Je ne veux pas m’opposer à ce postulat, mais j’aimerais bien faire apparaître son côté probablement plus déclamatoire qu’efficient.

M. Laurent Balsiger (SOC) —

Au nom du groupe socialiste, je vous invite également à soutenir ce postulat. En complément au questionnement de M. Haury, je tiens à dire que le canton soutient déjà des projets et notamment celui porté par une équipe de vigneronnes et vignerons qui testent pendant deux ans le retour d’une bouteille de vin lavable. Il existe donc des projets que l’Etat soutient et qui ne se feraient peut-être pas sans ce petit coup de pouce. Un des rôles est de revenir à ce que l’on a connu par le passé et cela demande parfois un petit coup de pouce de l’Etat et des communes, pour revenir à de bonnes pratiques. C’est le but de ce postulat et nous ne pouvons que le soutenir.

M. Maurice Neyroud (PLR) —

Je déclare mes intérêts : je suis vigneron-encaveur et je recycle une partie de mes bouteilles en les lavant. Nous avons voté tout à l’heure un soutien à l’entreprise Vetropack, qui ne va pas tout à fait dans le même sens que ce postulat puisque cette entreprise fabrique du verre à partir de bouteilles qu’il faut refondre à 1600 degrés, comme cela a été dit. Ici, nous parlons de lavage. Je lave une partie des bouteilles, mais il faut se rappeler que si le lavage des bouteilles a été abandonné, c’est en grande partie à cause des différents systèmes de fermeture. La majorité des bouteilles de chasselas vendues dans ce coin de pays sont des bouteilles à vis, qui ne sont pas lavables en raison du grand risque qu’elles coulent et posent des problèmes de conservation.  

Je vais exactement dans le même sens que M. le député Haury qui m’a enlevé les mots de la bouche : c’est d’abord une question d’économie privée et ce sont des initiatives privées qui voient le jour et ont un certain succès. Bien sûr, le canton et les communes pourraient mettre en place des outils pour simplifier l’opération, mais selon moi, ce n’est ni à l’Etat ni aux communes de le faire pour pousser, voire obliger les producteurs à faire ce travail. J’estime qu’ici, il faut laisser l’économie privée faire son travail.

M. Pierre-André Romanens (PLR) —

Sous forme de boutade, après la résolution de notre collègue Suter, nous devrions casser toutes les bouteilles et de nouveau en produire à Saint-Prex, ce serait peut-être une bonne chose pour l’industrie du verre ? A part cette boutade, je rejoins les propos sur l’économie privée qui doit prendre en considération ce recyclage, soit le retour du verre et son réemploi. Il existe aussi une filière privée du verre très intéressante, en Suisse. Plus de la moitié du verre récupéré est utilisé dans les isolations, avec du verre soufflé de fabrication suisse. Deux usines, en Suisse, récupèrent le verre, le soufflent et le placent ensuite dans des parties d’isolation, en particulier en sous-sol, dans des parties de bâtiments qui sont enterrées, mais aussi sur les toitures de type parking ou toitures plates. Les quantités sont très importantes et cette matière remplace le polystyrène. On voit donc qu’il existe aussi une filière du verre récupéré non seulement pour lui-même et son contenant, mais aussi pour l’industrie de l’isolation, qui est une très bonne filière. Ainsi, récupérer une partie par les privés est une bonne chose et je vais soutenir le postulat, mais n’oubliez pas que toute démarche de récupération du verre est très intéressante économiquement et écologiquement.

M. Vassilis Venizelos (C-DJES) — Conseiller-ère d’Etat

Le rapport le rappelle : la marge de progression est intéressante en matière de réutilisation du verre. En effet, selon l’EPFZ, seul 1 % est réutilisé sans transformation au préalable. Au niveau réglementaire, c’est probablement au niveau fédéral, voire européen que des normes devraient être édictées pour influencer le marché. Toutefois, il y a probablement une opportunité, pour le canton, de soutenir des projets pilotes et c’est précisément ce que fait le canton, notamment au travers de son fonds pour l’économie durable. En effet, des contributions à hauteur de 187'500 francs soutiennent des projets de réutilisation de ce type, d’une part. D’autre part, il existe des projets exemplaires comme celui de Marcelin qui se déploient sur le territoire vaudois et qui montrent qu’il est possible d’aller dans cette direction. C’est ainsi que le canton agit, par le biais de projets-pilotes. Avec ce postulat, je vois un moyen de reconnaître les différentes démarches et projets-pilotes déjà engagés, ainsi qu’un moyen pour le Conseil d’Etat de faire le point sur les succès et échecs rencontrés avec ces différents projets-pilotes.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil prend le postulat en considération avec 6 avis contraires et de nombreuses abstentions.

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