24_HQU_49 - Question orale Laure Jaton - La Convention internationale sur les droits de l’enfant s’applique-t-elle aux mineur·e·s non accompagné·e·s hebergé·e·s dans les centres fédéraux du canton de Vaud ?.
Séance du Grand Conseil du mardi 14 mai 2024, point 3.5 de l'ordre du jour
Texte déposé
Les médias se sont faits l’écho de possibles violences dans un centre d’accueil pour mineur·e·s non accompagné·e·s dans notre canton (MNA). Violences exercées par le personnel du centre sur des enfants ayant vécu des situations de violences extrêmes dans leur pays, sans parler de leur parcours migratoire.
Ces MNA sont hébergé·e·s dans une structure militaire transformée en centre fédéral d’asile, dont la sécurité est assurée par du personnel d’entreprises privées, qui devrait être formé pour savoir gérer des situations sans violence et dans le respect de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant.
Certes, la sécurité des centres fédéraux est sous la responsabilité de la Confédération, mais « Les Rochat » est sur sol vaudois. Dès lors, je pose la question suivante au Conseil d’Etat :
Les services de l’Etat ont-ils une quelconque marge de manœuvre pour que la Convention relative aux droits de l’enfant soit appliquée sur territoire vaudois et que la violence institutionnelle ne s’ajoute pas à la violence déjà vécue par les MNA ?
Transcriptions
Département de la jeunesse, de l’environnement et de la sécurité
Question orale Laure Jaton – La Convention internationale sur les droits de l’enfant s’applique-t-elle aux mineur-e-s non accompagné-e-s hebergé-e-s dans les centres fédéraux du Canton de Vaud ? (24_HQU_49)
Les médias se sont fait l’écho de possibles violences dans un centre d’accueil pour mineur-e-s non accompagné-e-s dans notre canton (MNA), violences exercées par le personnel du centre sur des enfants ayant vécu des situations de violence extrême dans leur pays, sans parler de leur parcours migratoire.
Ces MNA sont hébergés dans une structure militaire transformée en centre fédéral d’asile, dont la sécurité est assurée par du personnel d’entreprises privées qui devrait être formé pour savoir gérer des situations sans violence et dans le respect de la Convention internationale relative aux droits de l’enfant.
Certes, la sécurité des centres fédéraux est sous la responsabilité de la Confédération, mais le site des Rochat est sur sol vaudois. Dès lors, je pose la question suivante au Conseil d’Etat :
Les services de l’Etat ont-ils une quelconque marge de manœuvre pour que la Convention relative aux droits de l’enfant soit appliquée sur territoire vaudois et que la violence institutionnelle ne s’ajoute pas à la violence déjà vécue par les MNA ?
Je remercie Mme la députée pour sa question. La réponse est négative. En juillet 2023, la Direction générale de l’enfance et de la jeunesse (DGEJ) a été informée, par Caritas, de possibles violences dans un centre d’accueil pour MNA aux Rochat, à Provence. Les jeunes concernés ont déposé plainte, avec le soutien de Caritas.
En l’occurrence, il incombe à la justice d’établir les faits et de déterminer si des infractions ont été commises par le personnel du centre. Toutefois, la DGEJ s’est inquiétée, tout comme la députée, d’un manque possible de surveillance sur les centres fédéraux accueillant des MNA sur sol vaudois. Mon département a donc écrit à la conseillère fédérale qui avait alors la charge du Département fédéral de justice et police, Mme Elisabeth Baume-Schneider, pour lui faire part de son inquiétude et lui indiquer que la DGEJ n’a pas de moyen d’intervention, puisqu’elle n’autorise pas ces lieux d’hébergement, contrairement aux foyers gérés par l’Etablissement vaudois d’aide aux migrants (EVAM). En effet, l’Ordonnance fédérale sur le placement d’enfants ne s’applique pas dans ce type de situations, dans la mesure où les centres fédéraux entrent dans le champ d’application de la Loi sur l’asile.
J’ai pu avoir différents échanges avec Mme Baume-Schneider, qui m’a confirmé que des plaintes pénales avaient été déposées et que le Secrétariat d’Etat aux migrations (SEM) collaborait avec les autorités pénales vaudoises afin d’établir les faits. Elle m’a assuré qu’en ce qui concerne la surveillance et le contrôle à la suite d’incidents de sécurité, des enquêtes internes ont systématiquement lieu et que des rapports sont envoyés par les prestataires au SEM pour information et vérification. Par ailleurs, le centre fédéral pour requérants d’asile des Rochat, comme tout centre en Suisse, peut être soumis aux contrôles inopinés de la Commission nationale de prévention de la torture. La Confédération n’envisage donc pas de déférer la surveillance des centres fédéraux pour requérants d’asile aux cantons.
Sur la base de cet échange avec la conseillère fédérale, je peux donc dire, en réponse à la députée, que la Convention des droits de l’enfant s’applique bien à l’ensemble des lieux du canton de Vaud, que la DGEJ a la mission, selon l’Ordonnance fédérale sur le placement d’enfants, d’autoriser et de surveiller tous les lieux qui hébergent des enfants dans notre canton, mais que la responsabilité de surveiller la prise en charge des MNA dans les centres fédéraux pour requérants d’asile incombe à la Confédération, en l’occurrence au SEM. C’est donc une exception dans le dispositif de surveillance des lieux qui hébergent des enfants, et le Conseil d’Etat suivra avec attention le résultat de l’enquête à la suite des plaintes pénales, pour en tirer d’éventuelles conséquences et interpeller à nouveau la Confédération si nécessaire.
Je remercie le Conseil d'Etat pour sa réponse complète, dont je prends note, et je suis ravie de voir qu'une collaboration intense a lieu avec les autorités fédérales. Toutefois, les conditions d'accueil des mineurs non accompagnés continuent à préoccuper, la situation étant explosive sur le terrain de l'asile, et en particulier pour les mineurs. Je peux bien imaginer que certains MNA peuvent avoir des comportements répréhensibles qui ne peuvent pas être tolérés.
J’aimerais toutefois rappeler que la plupart de ces mineurs non accompagnés arrivent de pays où la violence est omniprésente, totalement banalisée et qu'elle devient le seul langage qu'ils et elles connaissent. Or, répondre à la violence par la violence n'est sûrement pas la bonne réponse. Au surplus, certains de ces mineurs non accompagnés seront sans doute – je mets des guillemets à ce terme qui me déplait particulièrement – « attribués » au canton de Vaud. Ce sera donc l'EVAM ou le Centre social d’intégration des réfugiés (CSIR) qui devront prendre en charge ces mineurs abîmés par la vie, écorchés en plus par leur séjour au centre d'asile.
D'où ma question complémentaire : quelle est la proportion de mineurs non accompagnés du centre des Rochat qui seront attribués au canton de Vaud ?
Retour à l'ordre du jourJe ne suis malheureusement pas en mesure de vous donner un chiffre, mais je vous le communiquerai volontiers lors d'une prochaine séance.