RAP_686323 - Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur le Postulat Pierre-André Romanens et consorts - L'hydrogène fait-il partie des énergies de demain pour le Canton de Vaud ?.
Séance du Grand Conseil du mardi 15 novembre 2022, point 15 de l'ordre du jour
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Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourLa commission s’est réunie le jeudi 16 juin 2022. En préambule, Mme la Conseillère d’Etat Béatrice Métraux a rappelé que l’hydrogène, comme l’électricité, est un vecteur énergétique produit par conversion d’une énergie. L’hydrogène est surtout utilisé comme composant chimique dans différents procédés industriels. Ce vecteur d’énergie pourrait, dans le futur, contribuer à décarboner certains secteurs industriels et de transports et assurer le stockage de l’électricité. Le procédé de fabrication d’hydrogène le plus adapté est celui de l’électrolyse de l’eau. Le rendement complet, électricité- hydrogène-électricité, est de l’ordre de 25 à 30 %. En comparaison, les processus utilisant l’électricité en direct, comme les véhicules à batteries ou les pompes à chaleur, sont nettement plus efficaces et sont de l’ordre de 70 %. Dans ces conditions, actuellement la production d’hydrogène se justifie seulement si elle se fait exclusivement à partir d’électricité d’origine renouvelable, et pour autant que cette électricité soit excédentaire.
Le Conseil d’Etat entend à ce stade soutenir uniquement des projets pilotes et de démonstration dans les applications qui ne présentent pas, ou très peu, d’alternatives. C’est notamment le cas de certains domaines industriels, du trafic poids lourds. La couverture de pointe de puissance dans les réseaux de chauffage ou la production conjointe de chaleur et d’électricité dans les bâtiments de grandes tailles par piles à combustible sont également des pistes envisageables. L’Etat de Vaud est aligné sur ce sujet à la position de la Confédération et des cantons, qui tous s’accordent à estimer que l’usage de l’hydrogène peut présenter une alternative intéressante dans le trafic des poids lourds et dans le trafic aérien, en partie aussi dans l’industrie, conformément aux perspectives énergétiques 2050.
Le postulant note que depuis le dépôt du postulat d’énormes évolutions dans les domaines de la biomasse et de l’hydrogène ont eu lieu. Il évoque une étude récente de l’Université de Genève qui met en exergue l’absolue nécessité de stocker de l’énergie à long terme pour faire face aux disparités de consommation/production entre l’été et l’hiver en Suisse. A ce jour, la biomasse et l’hydrogène sont deux solutions tout à fait intéressantes qui permettent ce stockage.
Lors de la discussion générale, il est précisé qu’une stratégie nationale est en cours d’élaboration. Au niveau du canton, la Direction de l’énergie (DIREN) accompagne différents projets et des études dans le domaine de l’hydrogène. Le développement de l’hydrogène vert est donc une thématique pour l’Etat qui y travaille avec les principaux concernés et les entreprises. Le canton peut soutenir tous les projets qui peuvent être intéressants pour cette production d’hydrogène par électrolyse. Toutefois, l’Etat doit gérer les montants disponibles pour faire face au plus urgent ; il pense notamment au Programme Bâtiments qui rencontre un fort succès actuellement. Cela n’empêche pas le soutien à des projets pilotes. L’hydrogène va certainement jouer un rôle important dans la décarbonisation de secteurs où d’autres alternatives sont difficilement envisageables, tel le trafic des poids lourds. L’hydrogène s’avère en revanche beaucoup moins efficient que d’autres modes de production d’énergie renouvelable sur les véhicules individuels ou sur les chauffages. Le postulant insiste sur le fait qu’il sera absolument nécessaire de stocker de l’énergie pour faire face à la problématique du déficit d’électricité durant la période hivernale.
En conclusion, le postulant salue l’excellence du rapport en termes d’informations transmises. Il sent toutefois une timidité du Conseil d’Etat face au développement de l’hydrogène et de la biomasse, timidité qu’il déplore au vu de l’impératif imminent de devoir stocker les énergies. Mme la Conseillère d’Etat estime que l’Etat mène une action proactive sur ces questions de durabilité et d’énergie. Les services de l’Etat qui mettent en œuvre la politique énergétique fédérale et cantonale ne pourront en revanche jamais se substituer à des organismes de recherche. La commission recommande au Grand Conseil d’accepter le rapport du Conseil d’Etat par 8 voix contre 1 et 2 abstentions.
La discussion est ouverte.
Je ne vais pas essayer de redorer le blason du PLR, mais vous noterez qu’il se préoccupe aussi de sujets qui touchent l’énergie, le stockage en particulier. Je tiens à remercier la DIREN qui a accompli un intéressant travail de recherche relatif à l’hydrogène. Je déplore néanmoins que nous n’ayons pas ouvert la porte en direction de l’Université de Genève, où des professeurs – dont certains Vaudois – ont mené une étude tout à fait pertinente sur le stockage de l’énergie, surtout pendant les périodes estivales. Ce postulat date de 2019 – les préoccupations existaient alors déjà, et il m’était impossible de prévoir la pénurie. Je reste convaincu que nous sommes un grand nombre de députés à partager l’avis selon lequel toutes les politiques qui gèrent l’énergie ne devraient pas punir, mais plutôt proposer de construire les solutions de demain.
Pour ma part, il est une évidence à prendre en compte : celle portant sur le fait que nous allons produire de plus en plus d’électricité en été par la production d’énergie solaire. A ce sujet, je me permets de m’arrêter une petite minute sur la motion de M. Demaurex qui cible avec pertinence ce que nous devons entreprendre dans ce canton. En effet, nous avons un patrimoine au niveau arboricole et agricole qui peut aussi servir à la production d’énergie solaire simplement en remplaçant des filets blancs ou noirs anti-grêles par des panneaux solaires. J’appuierai à 100, voire à 1000 % la motion de M. Demaurex. L’hiver, nous connaissons un manque de production indigène, une situation qui nous pénalise et qui va s’accentuer. Par conséquent, ce postulat avait pour simple objectif d’ouvrir un champ de solutions ou d’opportunités que notre canton devrait absolument saisir : stocker de l’électricité en été pour en disposer en hiver.
Le rapport du Conseil d'Etat cite quelques exemples, dont celui de Founex qui me concerne de près et pour lequel je déclare mes intérêts comme habitant de la route de Founex. Prendre contact avec le Conseil d'Etat rejoignait aussi une demande de la municipalité de Founex pour la mise en œuvre de son centre communal incluant salle de gym, école, salle de spectacle, logements de fonctions, etc., et qui produit l’électricité par l’ensemble des toits recouverts de panneaux photovoltaïques – des milliers de mètres carrés en toiture. Ce courant est autoconsommé in situ et, pour le surplus, injecté dans le réseau ; jusque-là rien d’extraordinaire. Aujourd'hui, un arboriculteur de Founex désire remplacer ses fameux filets anti-grêle sur dix hectares par des panneaux solaires. Les services de l’Etat ont déjà donné des réponses plutôt positives. Vous comprendrez aisément où je veux en venir : dans cette commune, l’électricité sera trop importante en été. D’où la volonté d’un partenariat public-privé pour stocker cette électricité par la production d’hydrogène, un système en train d’être mis en place. Dieu sait si, dans l’esprit d’un partenariat intelligent, l’Etat doit être présent aux côtés de la commune et de ce privé. A quoi servira cet hydrogène ? Il est destiné à une utilisation plurielle : d’abord pour la mobilité. En effet, la commune dispose d’un parc de véhicules auquel les communes voisines sont également intéressées, les voiries, les réseaux dont l’usage pourrait être alimenté tout ou partie par ce stockage d’hydrogène.
Notre canton et nous, parlementaires, devons soutenir immédiatement ce genre de projets, raison pour laquelle je me permets de reprendre les propos fort intéressants tenus mardi dernier par Mme Genoud : « les Vaudoises et les Vaudois se demandent ce que les député-e-s font comme action concrète pour le climat ! ». Ce à quoi je réponds : « nous faisons des choses », mais il s’agit de les soutenir.
Ainsi, même si je considère le rapport du Conseil d'Etat comme étant de très bonne tenue, je vais personnellement le refuser, afin d’encourager encore plus d’audace et de courage, pour pouvoir répondre aux Vaudoises et aux Vaudois que le Grand Conseil soutient et favorise des projets concrets dans le stockage d’électricité. Je vous encourage à m’imiter et à refuser ce rapport pour aller plus loin et donner un signe très fort, soutenir le genre de projets que j’ai décrits tout à l’heure.
Je remercie le député Romanens pour son postulat et pour ses observations sur la qualité du rapport, bien qu’elles vous amènent à le refuser, ce que je peine à comprendre… mais j’en prends bonne note ! En effet, l’hydrogène ne constitue pas une source d’énergie, mais un vecteur énergétique intéressant, même si, aujourd'hui, 95 % de l’hydrogène est produit via des énergies fossiles. L’hydrogène peut devenir intéressant si elle est produite à partir d’énergie renouvelable, or – tel que cela est indiqué dans le rapport du Conseil d'Etat – avec le procédé d’électrolyse de l’eau, le rendement moyen équivaut à 55 %. 55 % pour passer de l’électricité à l’hydrogène et ensuite de l’hydrogène à l’électricité – le but de l’opération – les rendements obtenus avoisinent 25 à 30 %. La perte d’énergie est donc massive. Toutefois, et nous nous rejoignons en cela parfaitement, cette technologie mérite évidemment d’être soutenue pour des projets spécifiques, notamment dans le domaine industriel, pour les poids lourds. Je me réjouis que vous saluiez le canton de Genève qui finance des études. Figurez-vous que le canton de Vaud, lui, soutient des projets concrets ; il ne se limite pas aux études. Vous-même avez cité le projet de Founex, bien qu’un autre exemple aurait pu être cité, celui de la Société électrique des forces de l’Aubonne qui est soutenue par l’Etat et qui a lancé un projet de fabrication d’hydrogène en utilisant l’électricité produite par la centrale hydroélectrique installée sur l’Aubonne, tout comme le soutien à l’entreprise Zwahlen et Mayr pour substituer l’hydrogène d’origine fossile utilisée dans les processus métallurgiques de l’entreprise par de l’hydrogène produit localement grâce à l’électricité issue d’une centrale solaire réalisée sur site. Nous aurions aussi pu mentionner les discussions qui sont en cours avec Gaznat qui souhaite installer sur son site d’Aigle une centrale solaire fabriquée grâce à l’électricité produite localement de l’hydrogène vert par électrolyse. En d’autres termes, le canton de Vaud soutient ces projets pilotes. A l’évidence, l’hydrogène fait partie des solutions technologiques qui nous aideront à affronter les enjeux et les défis qui nous attendent en matière de transition énergétique. Or, nous constatons via les rendements évoqués plus haut que cela doit être réservé à certaines activités. Cette technologie s’avère intéressante dès le moment où la production d’énergie devient excédentaire. Or, monsieur Romanens, aujourd'hui, il s’agit plutôt de pénurie d’électricité. Enfin, je transmettrai aux collaborateurs de la DIREN qui ont travaillé sur ce rapport vos félicitations et vos remerciements sur la qualité de ce dernier.
La discussion est close.
Le rapport du Conseil d'Etat est refusé par 69 voix contre 48 et 3 abstentions.
Je demande le vote nominal.
Retour à l'ordre du jourCette demande est appuyée par au moins 20 membres.
Celles et ceux qui acceptent le rapport du Conseil d'Etat votent oui ; celles et ceux qui le refusent votent non. Les abstentions sont possibles.
Au vote nominal, le rapport du Conseil d'Etat est refusé par 70 voix contre 59 et 4 abstentions.
*insérer vote nominal.