RAP_678477 - Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur le Postulat Florence Gross et consorts - Psychiatrie de la personne âgée, où en est-on ? (19_POS_161).

Séance du Grand Conseil du mardi 17 septembre 2024, point 27 de l'ordre du jour

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M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice

La Commission thématique de santé publique (CTSAP) recommande au Grand Conseil d'accepter le rapport du Conseil d'Etat sur le postulat Gross. Le dépôt du présent postulat, en 2019, était lié au contexte de la fermeture d'une unité de psychogériatrie, à Cery, en parallèle à la problématique récurrente des lits de soins aigus inadéquatement occupés au CHUV. Même si elle admet que le canton a depuis lors renforcé les équipes mobiles, ainsi que les services de nombreux partenaires assurant la prise en charge des patients concernés, la postulante reste quelque peu sur sa faim quant à l'organisation future des différentes missions de la filière psychiatrique. 

La conseillère d'Etat en charge de la santé relève que le rapport du Conseil d'Etat fournit de très nombreuses informations et données chiffrées, en lien avec les demandes formulées dans le postulat. Certaines données actualisées ont même été fournies en cours de discussion de la commission. Mon rapport en fait état et il mentionne également les nombreuses informations relatives à l'articulation des différentes missions de la filière psychiatrique fournies à la commission. La conseillère d'Etat tient également à rassurer la postulante sur les travaux en lien avec la réponse à la motion Vuillemin : les groupes de travail mis en place avancent bien, mais divers partenaires étant associés aux réflexions et les thématiques explorées s'avérant très larges, cela prend nécessairement du temps. 

L'objet que nous traitons aujourd'hui a suscité de très nombreuses questions et réflexions parmi les membres de la commission, mais compte tenu de la complexité technique de la matière, en faire état, ne serait-ce qu’en résumé, serait long et difficilement compréhensible. Je me contenterai donc de rapporter que la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) dit travailler énergiquement au développement de la mission de prise en charge. Elle a ainsi créé, au sein des EMS, des lits dédiés à l'accueil de personnes vieillissantes souffrant de troubles psychiatriques sans rapport direct avec l'âge. Ces lits sont gérés par des équipes disposant de connaissances à la fois en gériatrie et en santé mentale. L'outil de planification informatisée des soins infirmiers requis (PLAISIR) utilisé par les EMS pour l'évaluation régulière de la charge en soins de chaque résident révèle un accroissement des pathologies démentielles. Cela implique un renforcement des équipes mobiles, mais également la nécessité de l'acquisition de compétences de base en psychiatrie de l'âge avancé pour tous les professionnels actifs au sein des établissements, quelles que soient leurs fonctions. Tel est le cas des formations dispensées dans le cadre du projet CareMENS. Le rôle des infirmiers praticiens spécialisés en EMS, autorisés à prescrire des examens médicaux ainsi que des médicaments, s'en trouve également renforcé. Plusieurs commissaires tiennent d'ailleurs à saluer le travail des équipes mobiles. Un mandat d'évaluation de leurs besoins sera lancé par le département dans le courant de cette année 2024. Finalement, à la question de savoir s'il y a assez de médecins psychiatres afin de répondre à la demande des institutions, il est répondu que la pénurie ne porte pas sur les médecins psychiatres, de manière générale, mais concerne surtout les psychiatres spécialistes de l'âge avancé. 

Au vote, à l'unanimité des membres présents, la CTSAP recommande au Grand Conseil d'accepter le rapport du Conseil d'Etat au postulat de Mme la députée Florence Gross.

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

La discussion est ouverte.

Mme Florence Gross (PLR) —

Je déclare mes intérêts en tant que directrice d’EMS et membre du comité de la Fédération des prestataires de services de soins et d'aide à la personne (FEDEPS), mais mes intérêts n'étaient pas du tout les mêmes lors du dépôt du postulat, en 2019. 

Je remercie la conseillère d'Etat Ruiz ainsi que les collaborateurs de l'Etat, surtout pour leurs apports lors de la discussion de commission qui me satisfont plus que le contenu du rapport, que je vous propose toutefois d'accepter. A la base, M. le rapporteur l'a dit : la fermeture d'une unité de psychogériatrie à Cery créait un risque avéré de suroccupation de lits, au CHUV. Cinq ans plus tard, nous vivons une occupation de lits hospitaliers par des personnes âgées en attente de lits C ; les directeurs d'hôpitaux le disent, le répètent et nous le savons. La problématique est donc toujours d'actualité, alors qu’elle a des conséquences financières non négligeables pour les hôpitaux, et également en matière de prise en charge pour les patients, voire pour les résidents. Certes, l'Etat a fait un effort, notamment sur les Programmes d'investissements de modernisation des EMS et EPSM (PIMEMS), entre autres, pour résoudre le problème.

On le voit aujourd'hui : construire des lits d’EMS est très long. Il y a des oppositions, des problématiques d'aménagement du territoire et de nombreuses autres, alors que le nombre de lits qui est planifié ne suffit pas, et ne suffira pas. Toutefois, des efforts sont faits de la part du Conseil d'Etat, avec des renforcements des formations aux problématiques du milieu des soins et aux des nouvelles missions ; qu'il en soit ici remercié, Jusqu'ici, en EMS, on parlait beaucoup de gériatrie. Aujourd'hui, je peux vous le dire, car je le vis quotidiennement : la gériatrie n'existe quasi plus. Les entrées en EMS se font à des âges plus tardifs, souvent avec des comorbidités et des démences liées à l'âge, mais également des démences et des problèmes psychiatriques sans lien avec l'âge. Le développement de la psychiatrie vieillissante – la nouvelle mission dont parle le rapport – se fait, mais malheureusement toujours de manière trop lente, à mes yeux. 

Alors, prenons le temps de poser les bases pour des besoins en ligne, mais également et surtout pour de la formation. Mais comme vous le savez, retirer du personnel soignant pour suivre une formation, alors que les besoins qu’il doit assumer sont là 7 jours sur 7, 24 heures sur 24, n'est pas chose aisée. Des ébauches de solutions sont proposées, évidemment, alors relevons l'implication efficiente des équipes mobiles telles que les MPA qui permettent de soutenir les équipes – j'en fais l'expérience. La solution mise en place est efficiente ; au travers des supervisions, elle amène des compétences autant auprès des équipes qu’auprès des résidents concernés et leurs proches. Evidemment, à terme il y aura la révision des dotations, à laquelle je sais que l’on travaille déjà dans plusieurs cadres : la motion Vuillemin, Investpro et Vieillir 2030 – beaucoup de projets sont sur la table. La révision des dotations devra prendre davantage en considération la situation des pathologies et comorbidités. Il est clair que les évaluations PLAISIR évoquées par M. Mojon montrent un accroissement des pathologies de type démence, mais malheureusement, ces résultats n’amènent aucun ou que très peu d'impact sur la dotation ; il y en a encore moins d’impact pour les troubles psychiatriques qui ne sont pas liés à l'âge, alors même que ces résidents demandent souvent plus de charges en soins qu'une personne avec des troubles physiques. 

Je sais que les réflexions sont déjà en cours, mais il est vrai que je souhaite les voir accélérer, notamment afin d'améliorer la qualité de vie de nos personnes âgées, la motivation de nos professionnels de santé et également la santé financière de nos hôpitaux.

M. Blaise Vionnet (V'L) —

Pendant de nombreuses années, les soignants – auxquels je m’associe en tant que médecin traitant – nous avons pensé bien faire en hospitalisant très facilement – peut-être trop facilement ? – nos aînés, que ce soit en ambulatoire ou en EMS, en pensant résoudre plus facilement leurs problèmes de santé, mais avec la conséquence d’une surcharge de lits C dans les divisions hospitalières dont a parlé ma préopinante. Or, il a été démontré depuis plusieurs années qu'une hospitalisation chez un senior n'a pas que des effets positifs. En effet, un déconditionnement apparaît après quelques jours, avec une diminution de la musculature qui va augmenter le risque de chute. En plus, nos aînés sont souvent perdus et désorientés à l'hôpital, et le retour à domicile s'avère bien plus compliqué. 

Fort de ces constatations, je relève la stratégie du Conseil d'Etat, mentionnée dans ce rapport, qui veut favoriser la prise en charge de la personne âgée dans son milieu de vie – domicile ou EMS – le plus longtemps possible, en évitant si possible des hospitalisations parfois inadéquates. Je salue cette stratégie qui fait pleinement sens pour nous les soignants. Je relève aussi le développement des équipes mobiles, qu’elles soient psychiatriques, de l'âge avancé ou des soins palliatifs. Cela nous permet, de temps en temps, de vraiment accompagner les gens jusqu'à leur mort, à domicile. 

Je tiens aussi à relever la possibilité, pour certains CAT – les centres d'accueil de jour – comme celui d’Echallens, de pouvoir garder pendant une nuit ou deux des résidents, afin de les réhydrater, d'initier un traitement antibiotique intraveineux ou pour une surveillance courte. Avoir des lits d'accompagnement dans les CAT est une solution qui permet d'éviter des hospitalisations. Le développement d'alternatives à l'hospitalisation est nécessaire pour décharger nos hôpitaux et la réponse donnée à ce postulat s'inscrit dans cette démarche.

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

La discussion est close.

Le rapport du Conseil d’Etat est approuvé à l’unanimité.

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