RAP_686703 - Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur le Postulat Hadrien Buclin et consorts - Protégeons la santé de la population par des mesures d'urgence renforcées en cas de pic de pollution - et Renouvellement des arrêtés relatifs au plan d’action cantonal en cas de concentrations excessives.
Séance du Grand Conseil du mardi 19 septembre 2023, point 18 de l'ordre du jour
Documents
- Texte adopté par CE - RAP_CE POS Buclin 21_POS_14 - publié
- Rapport de la commission (RAP_686703) - Nicolas Suter
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourPermettez-moi encore une fois de remercier M. Cédric Aeschlimann, secrétaire de notre commission, pour son excellent travail. Le rapport montre que la qualité de l’air s’est significativement améliorée ces dernières années, notamment grâce aux innovations technologiques. En effet, les chaudières ont été assainies, les véhicules améliorés, les processus industriels revus via différentes législations. Le postulat portait sur les pics de pollution, notamment les particules fines en hiver et les pics d’ozone lors des canicules en été. Tous nécessitent des actions spécifiques. Le cas échéant, les actions s’inscrivent dans une stratégie plus vaste et globale de protection de l’air et de la lutte contre les émissions, dont l’impact sur la qualité de l’air n’est plus à démontrer.
En commission, il fut expliqué que la stratégie du Conseil d’Etat, comme celle du Conseil fédéral, vise à réduire les émissions à long terme. Ainsi, l’Ordonnance sur la protection de l’air (OPair) a été renforcée en matière de réduction des valeurs à long terme. Plusieurs mesures ont été rappelées, dont la récente mise en œuvre du contrôle systématique des chauffages à bois, car auparavant, seules les chaudières à gaz et à mazout étaient contrôlées.
Concernant les mesures à court terme, en cas de pic de pollution, leurs effets sont limités. En effet, si elles peuvent diminuer la montée en puissance du phénomène, des mesures prises pendant quelques jours ne permettront pas de descendre en dessous des valeurs limites. Pour y parvenir, un changement des masses d’air est nécessaire ; la météo joue un rôle important. La proportionnalité des mesures des arrêtés a été évaluée en termes de relations coûts-efficacité, notamment. Ces aspects sont documentés dans le rapport du Conseil d’Etat.
Le département a présenté à la commission l’épisode de montée en puissance du phénomène de smog hivernal en février 2023. Les concentrations de particules fines se sont élevées – davantage à Genève que dans le canton de Vaud – mais le plan n’a pas été déclenché, d’une part, parce que les valeurs seuil n’étaient pas atteintes, d’autre part, parce qu’un changement de météo était annoncé. Ce dernier critère constitue l’un des éléments importants pour le déclenchement desdites mesures.
Enfin, outre les discussions sur les seuils et l’emplacement des stations de mesure dans le canton et dans les cantons voisins, une bonne partie du débat s’est focalisée sur la question de l’efficacité d’une éventuelle gratuité des transports publics en cas de pic de pollution. La commission recommande au Grand Conseil d’accepter le rapport du Conseil d’Etat par 14 voix et 1 abstention.
La discussion est ouverte.
Je remercie le Conseil d’Etat et les employés de l’administration d’avoir travaillé sur ce dossier pour élaborer la réponse à mon postulat. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner lors de précédents débats, l’enjeu de santé publique est important, puisque la Confédération estime que la pollution de l’air cause plus de 2000 décès prématurés par an, ou sous un autre angle, plus de 20 000 années de vie perdues chaque année. Par conséquent, intervenir pour essayer de réduire la pollution représente un intérêt public fort, en particulier lors de pics. Cette problématique risque de s’accentuer avec le dérèglement climatique dans la mesure où les périodes de canicule de plus en plus longues que nous traversons favorisent la concentration de l’ozone dans l’air ; nous n’avons malheureusement pas fini d’entendre parler de ces pics de pollution.
Celles et ceux qui pensent que l’augmentation du parc automobile électrique nous tirera d’affaire souffrent certainement d’une forme de naïveté. En effet, l’augmentation de la proportion de véhicules électriques est finalement assez lente, puisqu’en 2022, ils constituent moins de 3 % du parc suisse ; la transition vers les moteurs électriques s’avère très lente. Par ailleurs – et il s’agit sans doute d’un aspect moins connu – par l’abrasion des pneus et des freins, les véhicules électriques contribuent aussi à la dispersion dans l’air de certaines particules fines, dangereuses pour la santé ; il ne s’agit donc pas d’une solution miracle. Ainsi, je suis heureux que le Conseil d’Etat ait pris des mesures pour répondre à ce postulat. Elles vont dans la bonne direction, même si, selon moi, elles auraient pu être plus ambitieuses.
Désormais, les mesures admettent des seuils d’intervention plus précoces en cas de pics de pollution. Cela signifie que l’Etat interviendra plus tôt par une réduction de la vitesse sur les autoroutes, notamment, décidées à partir d’un seuil d’émission plus faible ; une mesure qui a fait ses preuves. Néanmoins, par rapport aux recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les seuils fixés par la Confédération restent élevés. Toutefois, une réflexion est en cours au niveau fédéral pour les abaisser. J’espère que nous pourrons aller dans ce sens pour que l’Etat puisse intervenir encore plus rapidement.
Pour ce qui relève des compétences cantonales, j’estime qu’il aurait aussi été possible d’aller plus loin, notamment par la mesure de gratuité temporaire des transports publics durant les pics de pollution. D’autres collectivités en Europe recourent à cette mesure qui a montré une certaine efficacité. Par conséquent, je regrette que dans la panoplie proposée par le Conseil d’Etat cette mesure n’ait pas été retenue. Au-delà des réponses de court terme aux pics de pollution, un travail de moyen et de long terme est également à mettre en œuvre pour réduire la charge de trafic dans les agglomérations cantonales. A ce sujet, on notera que le plan OPair, qui vise à développer des mesures de réduction de la charge de trafic à moyen terme, est encore restreint à la seule agglomération Lausanne-Morges. A l’évidence, j’espère qu’il pourra être rapidement étendu à d’autres régions du canton qui souffrent aussi d’un fort trafic. Je souhaite aussi que le dossier de la Loi sur la taxe automobile soit un jour rouvert et prévoie des malus plus forts à l’encontre des véhicules les plus polluants.
Enfin, j’aimerais aborder un dernier point montrant qu’une marge d’action de la part du Conseil d’Etat est encore possible. En effet, le Programme de législature annonçait aussi des réductions ciblées des tarifs pour les transports publics afin de favoriser ce mode de transport auprès des jeunes ou des personnes âgées : ce sont des mesures de moyen terme qui préviennent les pics de pollution. Or, pour l’heure, je n’ai rien vu venir dans la concrétisation de cette mesure, nul exposé des motifs soumis au Grand Conseil ; j’ose espérer que cela se présentera sans devoir attendre la fin de la législature. Il me semble que nous perdons un temps précieux face aux mesures incitatives à prendre les transports publics. Pour toutes ces raisons, parce que cela manque d’ambition tout en allant dans le bon sens, à titre personnel, je m’abstiendrai lors du vote.
Au nom du groupe PLR, je remercie le Conseil d’Etat pour ce rapport que je vous invite à accepter. Nous prenons acte avec satisfaction du fait que la qualité de l’air s’est significativement améliorée ces dernières années, notamment grâce aux innovations technologiques. N’en déplaise à certains, ceci est bien la démonstration que des mesures sont prises, que des choses sont faites. Comme le rappelle à juste titre le Conseil d’Etat, la marge de manœuvre des cantons est finalement assez restreinte et les normes, bien souvent, sont fédérales, notamment avec l’OPair. Cependant, le canton souhaite profiter – et on s’en réjouit – de sa marge de manœuvre afin de lutter contre le phénomène des pics de pollution.
Afin de lutter contre les pics de pollution, le postulant proposait de prendre exemple sur le canton de Genève et de rendre ainsi gratuits les transports publics lorsque des pics de pollution sont avérés. A ce propos, il a été rappelé que le canton de Genève étant un canton ville, une telle mise en place est plus simple que dans le canton de Vaud, dont les valeurs de pollution de l’air au point A ne sont absolument pas identiques à celles au point B. Aussi, il est rappelé que cette mesure, certes pédagogiquement intéressante à Genève, reste inefficace sur le plan de la qualité de l’air.
Enfin, il est bon de rappeler que fondamentalement la gratuité des transports publics n’existe pas, puisqu’il y a toujours quelqu’un qui passe à la caisse à un moment donné. A cet égard, dans le canton de Vaud, ceux qui seraient désavantagés par une telle mesure, comme bien souvent, sont les personnes qui habitent hors des villes, dans les régions périphériques et rurales, et qui ne peuvent pas changer leur comportement, mais devraient financer la gratuité d’une telle mesure.
Je vous remercie pour ces échanges, tout comme je remercie le député Buclin pour son dépôt qui a permis au Conseil d’Etat de rappeler les différentes actions menées. Ce dernier a raison d’insister sur la nécessité de maintenir les efforts. Si la qualité de l’air s’améliore – j’y reviendrai tout à l’heure –certains gaz, notamment l’ozone, inquiètent par leur impact sur la santé, notamment celle des plus âgés. Cette situation exige que nous renforcions les efforts à tous les échelons. D’ailleurs, parmi toutes celles que vous avez exprimées, nous n’excluons aucune piste. Quant aux mesures affichées dans le Programme de législature, elles seront suivies d’effets par le truchement de propositions qui vous seront soumises.
Nous avons eu l’occasion de communiquer cette bonne nouvelle : la qualité de l’air n’a jamais été aussi bonne depuis 70 ans. Je vous invite d’ailleurs à vous rendre sur le site de l’Etat de Vaud pour mettre la main sur la très belle brochure riche d’une magnifique couverture qui plaira sans doute au député Dessemontet (n.d.l.r la couverture représente une rue d’Yverdon), en tout cas qui me plaît aussi, puisqu’on y voit une des plus belles places d’Europe ! Cette amélioration montre tout de même que les différentes mesures prises ces dernières années sont efficaces, que ce soit en matière de mobilité ou de contrôle des différents chauffages. Ainsi, nous possédons les recettes et les leviers pour améliorer la qualité de l’air. Toutefois, monsieur Buclin, vous avez raison de le rappeler : nous devons maintenir ces différents efforts, d’autant plus quand l’OMS préconise de nouveaux seuils et normes qui nécessiteront aussi probablement une révision des normes OPair à l’échelon fédéral et des actions au niveau cantonal. En matière d’environnement, il est plus souvent qu’à son tour question de mauvaises nouvelles. Dans ce contexte, et bien que l’information ait été très peu relayée par les médias, il est important de rappeler que la qualité de l’air n’a jamais été aussi bonne depuis les années 70.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
Le rapport du Conseil d’Etat est approuvé avec plusieurs abstentions.