21_LEG_240 - EMPD sur la création d’un fonds permettant l’exercice du droit de préemption de l’Etat au sens de la loi du 10 mai 2016 sur la préservation et la promotion du parc locatif (LPPPL) (1er débat) (Suite des débats).
Séance du Grand Conseil du mardi 4 juin 2024, point 7 de l'ordre du jour
Documents
- TM1 (21_LEG_240) avant 1er débat au GC
- Texte adopté par CE - EMPD création d'un fonds droit de préemption - LPPPL - publié
- Rapport de minorité de la commission - RC min 21_LEG_240 - Philippe Miauton
- Rapport de majorité de la commission - RC maj 21_LEG_240 - Pierre Zwahlen
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourSuite du premier débat
Le débat est repris.
Art. 2. –
Nous reprenons l’examen du décret à l’article 2, alinéa 2. Il y a deux semaines, nous sommes entrés largement en matière. Nous avons également rejeté à une grande majorité un amendement en faveur d’une stratégie cantonale, et le fonds assurant l’exercice du droit de préemption de l’Etat est resté à 20 millions de francs, avec une voix d’écart lors du vote. Je rappelle mes intérêts : je suis membre du comité de l’ASLOCA Vaud ainsi que du conseil de Cité Derrière, une coopérative d’utilité publique, et je suis propriétaire d’une parcelle de dimension préemptable. L’alinéa 2 de l’article 2 concerne la seule source de financement prévue. Il n’est pas envisagé que l’Etat réalimente le fonds, si ce dernier devait se trouver momentanément à zéro en raison de l’achat récent de biens-fonds. Dans ce dernier cas de figure, le Conseil d’Etat devrait soumettre un autre décret en complément. Je rappelle la teneur de cet alinéa 2 : « Le compte est crédité du prix obtenu de la vente ultérieure des immeubles acquis par l’exercice du droit de préemption. »
Je n’ai pas grand-chose à rajouter aux propos du rapporteur de majorité. Par un vote certes un peu serré, nous sommes revenus à la proposition faite par le Conseil d’Etat, soit une somme de 20 millions de francs. Je n’ai rien à préciser sur l’alinéa 2 de cet article 2. En revanche, j’ai des amendements à proposer à l’alinéa 3. Pour la bonne forme, je déclare mes intérêts : je suis directeur de la Chambre vaudoise du commerce et de l’industrie (CVCI) et non de la Chambre vaudoise immobilière (CVI).
Concernant l’alinéa 3, qui se composerait en deux parties, la minorité estime que le Grand Conseil, par l’entremise de la Commission des finances (COFIN), doit avoir un pouvoir décisionnel en la matière. Les montants des opérations foncières peuvent être élevés et supérieurs au seuil de compétence du Conseil d’Etat fixé à 1 million, ce qui justifie cet amendement. Cette compétence couvre la décision d’user du droit de préemption. En revanche, lorsqu’il s’agira de céder un objet, une décision de la COFIN ne nous paraît pas nécessaire. C’est pour cette raison que l’amendement serait formulé comme suit :
« Art. 2. – Al. 3 (nouveau) : Sur saisine du Conseil d’Etat, la Commission des finances se prononce sur l’approbation de l’acquisition d’immeubles effectuée dans le cadre du présent décret. »
Ce changement implique la création d’un nouvel alinéa 4 qui reprendrait en partie l’alinéa 3 proposé par le Conseil d’Etat :
« Art. 2. – Al. 4 (anciennement 3) : Le Conseil d’Etat est dispensé de requérir l’approbation du Grand Conseil prévu à l’article 10, lettre a de la Loi sur les finances du 20 septembre 2005 (LFin) pour
l’acquisition etl’alinéation d’immeubles effectuéesdans le cadre du présent décret. »On supprimerait le mot « acquisition », lequel serait réglé dans ce nouvel alinéa 3. Je tiens également à préciser, cela ayant été un sujet de discussion au sein de la commission, que la question du délai imparti n’apparaît pas comme un frein aux yeux de la minorité, dans la mesure où la COFIN, en tant que commission de surveillance, a non seulement les compétences, mais surtout se réunit très régulièrement, ce qui lui permettrait de juger la qualité des dossiers soumis au regard de la stratégie dans le délai des 20 jours impartis.
La majorité de la commission n’a pas retenu cette proposition pour les arguments suivants. Le délai imparti pour que l’Etat exerce son droit de préemption est court, 20 jours, sauf à modifier la loi. Le décret proposé vise donc la célérité. Ajouter des obstacles à un processus de décision qui se veut rapide vide le décret de sa substance. L’acquisition de biens-fonds par l’Etat au titre du droit de préemption constitue un achat temporaire, et non pas définitif, en vue de la remise à un tiers. Les risques d’une telle opération, s’ils ne sont pas inexistants, s’avèrent relativement faibles, l’acquéreur évincé restant un acquéreur potentiel. En ce sens, l’approbation de la COFIN n’est pas nécessaire. Si l’Etat envisage de conserver le bien-fonds ou de le grever d’un projet de droit de superficie ou de droit distinct et permanent (DDP) en faveur d’un tiers, un exposé des motifs et projet de décret sera soumis au Grand Conseil. L’amendement a ainsi été refusé par 6 voix contre 6 et 1 abstention, avec la voix prépondérante de la présidence.
En préambule et pour l’entier des débats du jour, je déclare mes intérêts : je suis président du Conseil d’administration d’une société coopérative, propriétaire d’un grand immeuble qui pourrait un jour être concerné par l’application de cette loi, mais qui ne fait pas d’appel d’offre pour des droits de préemption. En outre, je suis membre désigné du Conseil d’administration de la Société immobilière pour le logement lausannois, laquelle est impliquée dans ce processus. Enfin, ce n’est pas un intérêt en soi, mais je suis membre de la Commission des finances.
Je souhaite tout d’abord revenir sur trois éléments de forme. Premièrement, je m’étonne de lire dans le rapport de minorité que la minorité consentirait à ne pas déposer cet amendement si la somme restait à 20 millions. Or, M. Miauton dépose un amendement, alors même que le montant est bien de 20 millions, puisque comme le rapporteur de majorité l’a mentionné, nous avons refusé l’augmentation de cette somme.
Deuxièmement, les amendements de la minorité de la commission proposent deux fois la même chose. Le premier amendement indique que la COFIN doit se prononcer sur l’acquisition d’immeubles. Selon cet alinéa 3, la minorité de la commission souhaite que la COFIN se positionne dans tous les cas, ce qui dérogerait à la Loi sur les finances, puisque celle-ci laisse actuellement au Conseil d’Etat une marge de manœuvre jusqu’à 1 million, de manière générale. Il s’agit donc d’un amendement plus dur que le régime normal de la loi, alors que le Conseil d’Etat proposait un régime plus souple que la Loi sur les finances. Quant à l’alinéa 4, il renvoie au régime normal de la Loi sur les finances pour les acquisitions, puisqu’il n’y a plus d’exception. Je ne comprends dès lors pas très bien l’intérêt de l’alinéa 3 que vous mentionnez, l’alinéa 4 arrivant au même résultat, si ce n’est probablement l’idée de rendre encore plus compliqué l’exercice de droit de préemption. On pourrait en effet imaginer que pour un objet de moins d’un million, si tant est que cela existe, la Loi sur les finances soit suffisante.
Troisièmement, il y a la problématique des délais. Certes, la COFIN se réunit la plupart du temps une semaine sur deux en moyenne et le délai pour se prononcer est de 20 jours à partir du moment où l’Etat reçoit la notification et qu’il est potentiellement en mesure d’exercer son droit de préemption. Pendant ce délai de 20 jours, la commission d’experts doit se réunir et elle doit examiner, conformément à ce décret, si l’objet est éligible aux critères posés. Ensuite, cette commission d’experts doit transmettre son rapport au Conseil d’Etat pour décision. Ce dernier se réunit la plupart des semaines, mais pas toutes. Enfin, le Conseil d’Etat doit saisir la COFIN, qui, comme je l’ai dit, se réunit souvent, mais pas toutes les semaines. On voit bien que matériellement, il ne sera jamais possible de respecter ce délai de 20 jours. Dernier point, l’esprit de cette loi et du projet de décret vise la promotion de logements d’utilité publique par le Conseil d’Etat. L’objectif de la loi n’est pas de multiplier les instances devant intervenir dans le processus de décision. Pour ces différentes raisons, notre groupe vous invite à refuser cet amendement.
Je rappelle mes intérêts : je suis membre du Conseil d’administration d’une gérance immobilière et président d’une fondation, qui crée des logements d’utilité publique (LUP). Pourquoi un tel amendement à ce stade ? Comme cela ne vous aura pas échappé, nous n’en sommes qu’au premier débat. Il faudra donc voir si l’amendement voté précédemment est maintenu en deuxième débat, ou s’il est opportun de le retirer. Restons-en toutefois au premier débat. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire à cette tribune, le droit de préemption cantonal était, à l’origine et selon la volonté de la majorité qui soutenait le projet à l’époque, destiné à des projets d’une certaine ampleur. J’ai d’ailleurs pris acte du fait que notre collègue Eggenberger ne contestait pas cette appréciation. Il est ainsi hautement invraisemblable qu’il soit possible de préempter sur des objets de moins d’un million. Cette hypothèse peut clairement être écartée. Il devrait logiquement s’agir de terrains ou d’objets ayant une certaine importance et ampleur, d’où le principe de la saisine de la COFIN, ce qui n’a rien d’incompatible avec la Loi sur les finances.
En outre, nous estimons, au sein de la minorité, que le Grand Conseil a son mot à dire et que l’exécutif ne doit pas rester la seule autorité compétente. Il existe beaucoup de domaines pour lesquels le Grand Conseil devrait pouvoir exprimer son avis et cela ne paraît pas non plus incompatible avec le délai de 20 jours, une fois qu’on a la commission consultative, que l’objet est analysé et que la COFIN a donné son avis. Il y a un effet relativement important, avec de sommes sans doute relativement considérables pour quelques acquisitions par année. Si nous nous basons sur le montant de 20 millions et que nous estimons préempter des objets de l’ordre de 5 à 6 millions, cela fera entre trois et quatre objets par année. Il n’est dès lors pas invraisemblable que la COFIN représente le Grand Conseil, c’est-à-dire l’organe législatif, et donne son avis non seulement sur le montant, mais aussi sur l’opportunité d’une acquisition. Je vous invite dès lors à suivre la proposition de la minorité de la commission.
Je souhaite compléter les propos de mon collègue Buffat. Ces amendements prévoient deux étapes afin de souligner l’importance de la stratégie appliquée à ce droit sur des objets d’importance. Cela a été dit, il y en aura certainement très peu chaque année, avec des sommes qui dépasseront à chaque fois, je l’espère, le million, parce que cela signifierait précisément qu’il s’agit de projets importants et de valeurs qui concrétiseraient cette stratégie. Dans la mesure où il y a peu d’objets qui seraient choisis ou décidés, il n’est pas incongru que les processus législatif et exécutif soient appliqués. Une nouvelle fois, étant donné le peu de projets concernés, cela rentre totalement dans le calendrier. 20 jours, c’est court, mais si vous faites le calcul, un passage à la COFIN intervient toujours après une séance du Conseil d’Etat ou inversement, et cela rentre tout à fait dans le calendrier. L’objectif final de cette loi est de pouvoir soutenir des projets importants, dans la mesure où il y en aura peu, et de pouvoir choisir ceux qui répondent au mieux à la stratégie voulue. Il s’agit d’un processus dans lequel le législatif peut également donner sa vision sur des projets que l’on souhaite d’importance. Concernant le dernier paragraphe du rapport de minorité, ce n’est pas parce que je ne suis pas encore sec derrière les oreilles que je suis né de la dernière pluie : nous n’allons pas proposer cette option au premier débat, monsieur Eggenberger,
Il faut se rendre compte qu’un délai de 20 jours peut être très court. Le Conseil d’Etat, dans son décret, nous propose une commission d’évaluation qui doit se réunir et qui comptera entre 6 et 7 membres issus de plusieurs départements. Cette commission d’évaluation peut renoncer à son droit de préemption, mais si elle l’utilise, elle doit en faire la proposition au Conseil d’Etat. Dans un second temps, il faudrait encore revenir devant la COFIN, ce qui est tout de même acrobatique. De plus, les documents risquent d’être transmis avec une certaine improvisation, alors même que nous avons besoin de stabilité dans ce type de décision. La commission n’a dès lors pas retenu ce scénario. On pourrait imaginer une capacité de ratification par la COFIN après la période de 20 jours. Si cette dernière ne ratifie pas la préemption, le Conseil d’Etat ne va certainement pas s’acharner. Toutefois, la saisine de la COFIN reste très imprudente. La majorité de la commission vous invite à rejeter cette proposition.
Le groupe Ensemble à gauche et POP vous invite à refuser cette proposition d’amendement. Derrière tous les amendements déposés par le PLR dans ce débat, il y a la volonté de rendre le droit de préemption plus difficilement applicable, en proposant de complexifier à loisir la procédure. Il y a 15 jours, il a été proposé que le Conseil d’Etat produise une stratégie détaillée. Aujourd’hui, il est demandé un passage supplémentaire devant le législatif. Il s’agit donc bien d’une volonté de transformer ce décret en une construction la plus alambiquée possible. Pour notre part, nous considérons que le Grand Conseil a son mot à dire dans la politique du droit de préemption, puisque c’est nous qui avons édicté la Loi sur la préservation et la promotion du parc locatif (LPPPL). En outre, ce décret fixe un plafond financier, plafond qui est d’ailleurs très faible et qui risque, à ce stade déjà, d’empêcher le Conseil d’Etat d’agir pour de nombreux biens fonciers, ce d’autant que le prix augmente chaque année. Ce plafond de 20 millions permet donc d’agir de manière de plus en plus restreinte.
Pour toutes ces raisons, nous vous demandons de ne pas compliquer encore davantage l’application du droit de préemption, d’en rester à la proposition du Conseil d’Etat dans les modalités d’application et donc de rejeter cet amendement. Pour une fois, nous faisons davantage confiance au Conseil d’Etat que le PLR.
Monsieur Miauton, vous indiquez à juste titre que ce fonds concernera peu d’objets, voire bientôt aucun avec l’ensemble des cautèles que votre minorité souhaite ajouter à cet exposé des motifs et projet de décret. J’avoue d’ailleurs être un petit peu surpris du manque de confiance de votre minorité envers le gouvernement, puisqu’il s’agit de proposer un contrôle supplémentaire. Cela a été dit à plusieurs reprises, le délai des 20 jours est intenable, s’il faut en plus passer par la COFIN. Il faut aller très rapidement, ce qui implique une décision technique de la commission d’évaluation, qui fait le premier tri, puis une décision politique du Conseil d’Etat. Nous posons le cadre à travers la LPPPL, comme l’a dit M. Buclin, et le gouvernement exécute. A mon sens, c’est suffisant, et je vous encourage à rejeter cet amendement.
Je ne partage pas du tout les propos de notre collègue Eggenberger, qui connaît parfaitement le fonctionnement de la COFIN. Nous le savons tous très bien, même sur des dossiers récents, il a été possible de travailler rapidement. Dans le fond, M. Zwahlen indique qu’il faut intégrer une commission d’évaluation, certes, mais il est aussi possible de travailler en parallèle sur ce type de dossier. A partir du moment où l’on sait que le Conseil d’Etat souhaite acquérir un objet par l’intermédiaire du droit de préemption, ce dossier peut aussi être directement transmis à la COFIN avec un préavis qui se traite en parallèle. Les séances du Conseil d’Etat ont lieu le mercredi, la COFIN se réunit quant à elle le jeudi, il y a donc un jour de décalage. Etant membre de la COFIN depuis longtemps, je ne crois pas une seule seconde que nous louperions des achats à cause de cette dernière.
Quant au fait qu’il s’agit d’un amendement PLR, je souhaite rappeler que la commission ne regroupait pas que des députés PLR. Monsieur Zwahlen, le rapport de majorité représente l’ensemble des députés avec la voix prépondérante du président, notamment pour cet amendement. Je ne pense dès lors pas qu’il fallait l’expliquer de cette manière à nos collègues. Pour ma part, il ne s’agit pas d’une question de défiance, mais de responsabilité du Parlement relativement à cette politique publique : il doit dire si ou non une acquisition est intéressante. Finalement, cette manière de faire permet de ne pas critiquer le travail, mais de collaborer. La COFIN représente 10% du Parlement, elle se réunit régulièrement et peut travailler très rapidement. Chères et chers collègues, je vous propose de soutenir l’amendement de la minorité de la commission.
Je ne vais pas contredire mon collègue Berthoud sur l’efficacité du travail de la COFIN. Cela dit, le délai de 20 jours reste très court. Si la commission d’experts doit se réunir, il faut trouver des disponibilités et on ne sait pas à quel moment de l’année cela va arriver. Est-ce qu’il y a des séances prévues ? Ensuite, le Conseil d’Etat doit se réunir. Certes, il arrive que la COFIN soit avertie qu’une décision imminente du Conseil d’Etat est prévue, ce qui lui laisse l’opportunité de se prononcer. Toutefois, ni le Conseil d’Etat, ni la COFIN, ni la commission des experts ne se réunissent toutes les semaines. Or, il s’agit d’avoir une décision dans les 20 jours, ce que cet amendement rend pratiquement impossible.
Je m’étonne également de la réponse du rapporteur de minorité. Je n’ai jamais dit qu’il n’était pas sec derrière les oreilles. Au contraire, c’est une personne très avisée et au fait des procédures parlementaires. Il a tout à fait la possibilité, en deuxième débat, de déposer cet amendement, si tant est que le vote sur le montant soit renversé. Je souhaite lui adresser une question très facile, à laquelle il pourra répondre par oui ou par non, ce afin de ne pas allonger le débat. Si, en deuxième débat, le montant de 20 millions est définitivement validé, est-ce que vous vous engagez à retirer votre amendement sur le rôle de la COFIN ?
L’autre côté de l’hémicycle prétend que les amendements visent à détricoter le droit de préemption, mais je rappelle les assurances données par le Conseil d’Etat à l’époque sur l’exercice de ce droit, âprement discuté en commission et lors des débats au Grand Conseil, parce que certains y étaient opposés. Le Conseil d’Etat nous a donné des assurances claires sur l’aspect très limité de l’exercice de ce droit de préemption. C’est sur la base de ces assurances que la LPPPL a été votée également par le peuple, puisque certains, dont je fais partie, ont soutenu ce projet de LPPPL. Il ne faut donc pas venir aujourd’hui nous dire que l’on détricote ce droit. L’exposé des motifs et les travaux de commission indiquaient expressément que cela devait rester exceptionnel, pour des projets d’une certaine ampleur. Lors du précédent débat, vous avez rejeté le premier amendement qui visait précisément tout ce qui avait été publié à l’époque et qui figure encore sur le site de la Société vaudoise pour le logement. Vous avez aussi refusé que le Conseil d’Etat donne quelques objectifs généraux sur l’application de ce droit de préemption. Il ne restait plus dès lors que la possibilité que le Grand Conseil, représenté par la COFIN, puisse donner son avis lors de l’exercice de ce droit.
Je vais aussi vous répondre, monsieur Eggenberger. À partir du moment où l’on arrive à appliquer ce qui était prévu à l’époque – qui figure dans l’amendement déposé à l’article 1 – et que l’on a des lignes directrices, et que l’on sait à peu près quand, comment et avec quels objectifs le Conseil d’Etat pourra exercer son droit subsidiaire cantonal de préemption, on pourra discuter. De même, si en deuxième débat, l’enveloppe des 20 millions est maintenue, en ce qui me concerne, je renoncerai à soutenir l’amendement qui nous est actuellement proposé. Mais tant qu’on est dans le flou le plus absolu, tant sur l’enveloppe que sur les objectifs du Conseil d’Etat, l’amendement est parfaitement justifié. Je remercie M. Buclin de la confiance qu’il voue au Conseil d’Etat, à majorité de droite actuelle. Pour ma part, j’ai fait confiance au Conseil d’Etat de l’époque et à majorité de gauche. Vous voyez, je le regrette presque aujourd’hui.
Je pensais que mon collègue Buffat allait se faire mon avocat, mais je me suis trompé. Il a parlé pour lui, ce qui n’est évidemment pas grave. Monsieur Eggenberger, je me réjouis de pouvoir vous répondre lors du second débat, étant entendu que je ne parle pas uniquement en mon nom, mais au nom de la minorité, et que cela dépendra évidemment des votes qui suivront. Mais trêve de plaisanterie, il ne s’agit pas d’une histoire de confiance, mais de savoir quel est notre rôle en tant que législatif de ce canton. Quelle que soit la majorité au sein du Conseil d’Etat, je tiens en haute estime les prérogatives d’un député. En l’occurrence, les sommes seront, à mon avis, remplies dans tous les cas. Ces cas seront peu nombreux, et partant, cela me paraît être un droit des élus de ce Parlement, au travers de la Commission des finances dans laquelle tous les partis sont représentés, de pouvoir juger de cette stratégie. Cela ne me paraît pas être un frein particulier, si ce n’est de donner le droit aux députés de cet hémicycle de juger d’une politique publique importante, étant donné que les dossiers seront peu nombreux et justifieront dès lors de porter un jugement au moment de choisir lesquels seront pris en compte, dans la mesure où il pourrait tout à fait arriver, avec cette enveloppe, que le premier arrivé soit le premier servi, alors que l’on souhaiterait plutôt que les dossiers d’importance soient mis en avant.
Je remercie M. Miauton, qui reconnaît que l’enveloppe de 20 millions sera probablement trop basse. Nous reviendrons dès lors avec cet amendement en deuxième débat, puisque l’on voit bien que cela limite fortement les possibilités. J’ai écouté – comme je le fais toujours, avec beaucoup d’attention – l’intervention de M. Buffat, qui a dit des choses très intéressantes, comme à son habitude. Il a indiqué que si des lignes directrices étaient communiquées par le Conseil d’Etat, il pourrait se rallier à l’idée qu’il n’y a pas forcément besoin d’un passage en COFIN. C’est un chemin auquel on pourrait réfléchir pour le deuxième débat. L’amendement proposé prévoyait un plan de développement, dispositif relativement rigide. Si quelques lignes directrices permettent de clarifier dans quel but ce droit de préemption doit être élaboré, je n’ai pas d’objection à avancer dans cette direction si cela permet de renoncer à l’obstacle supplémentaire du passage à la COFIN. Il ne s’agit en aucun cas de dresser un organe contre un autre ou de critiquer le travail de la COFIN – je rappelle que j’en fait partie depuis 3 ans et que je trouve qu’elle fonctionne très bien. Il s’agit plutôt une d’une question de rythme et d’opportunité.
Au nom du Conseil d’Etat et à double titre, je vous invite à rejeter l’amendement de la minorité de la commission et d’éviter un passage à la COFIN. D’une part, cette acquisition de bienfonds par l’Etat au titre du droit de préemption est un achat temporaire, ce qui limite beaucoup les risques, notamment financiers. Ce d’autant plus que si l’Etat envisage de conserver le bienfonds ou de le grever d’un droit de superficie en faveur d’un tiers, un exposé des motifs et projet de décret sera soumis au Grand Conseil. D’autre part, la question des délais est essentielle. Il paraît extrêmement difficile de pouvoir tenir le délai de 20 jours, au vu de nos processus internes et parlementaires. Pour ces deux raisons, je vous invite à refuser cet amendement.
L’amendement de la minorité de la commission est accepté par 74 voix contre 59.
L’article 2, amendé, est accepté par 78 voix contre 50 et 8 abstentions.
Art. 3. –
Cet article porte sur la commission d’évaluation dont nous venons de parler tout à l’heure. La commission a amendé les alinéas 1 et 5 de cet article 3 en ajoutant un septième membre à la commission d’évaluation issue, en l’occurrence, de la direction en charge des finances. L’amendement a la teneur suivante :
« Art. 3. – Al. 1 : Une commission d’évaluation est constituée pour analyser les dossiers de cession du droit de préemption par les communes selon l’article 34 de la loi. Elle est composée de
sixsept membres, dont deux de la direction en charge des opérations foncières, deux de la direction en charge du logement, un de la direction en charge de la cohésion sociale,etun de la direction en charge de l’enseignement supérieur et un de la direction en charge des finances. ».Pour plusieurs commissaires, la commission d’évaluation n’a pas besoin de recourir à l’avis de la direction en charge des finances, puisque le décret institue une enveloppe financière fixée à l’avance et qui constitue une limite. Par ailleurs, l’évaluation s’effectue sous l’angle de l’opportunité en termes de réalisation de LUP. Cet amendement a été adopté par 7 voix contre 6 et 0 abstention.
La composition de cette commission d’évaluation me surprend un peu. Je m’étonne qu’il n’y ait aucune personne ayant une expérience de la construction, de la réalisation ou de la gestion de LUP. Pourquoi ne pas y intégrer, je prends un nom au hasard, M. Eggenberger, qui préside une coopérative de logements ? En effet, ce sont des personnes qui, dans leur fonction, ont certainement des compétences à apporter en matière d’évaluation d’un bien à préempter. En outre, je ne vois pas très bien ce que le représentant de la direction en charge de l’enseignement supérieur vient faire dans cette commission. J’ai cherché dans l’exposé des motifs et projet de décret, et cela n’est pas justifié. Pour ma part, je le remplacerai volontiers par le représentant de la direction en charge des finances. Je pose cette question avant d’être plus ferme dans ma position.
Il s’agit d’une commission d’évaluation interne formée de professionnels, de personnes spécialistes des questions immobilières faisant partie de la direction en charge des opérations foncières. Dans la direction du logement, il y a des spécialistes liés aux LUP qui sont tous les jours confrontés à la question des loyers et de la politique du logement dans le canton. A notre sens, ces quatre représentants ont les compétences professionnelles requises. S’agissant de la direction en charge de l’enseignement supérieur, la personne en question est là pour évoquer la question des logements pour étudiants. Il s’agit aussi d’avoir un axe lié à la question des jeunes et des étudiants, raison pour laquelle cette direction est représentée. Ce n’est pas un axe majeur de cette question, mais il convient de le prendre en compte.
L’amendement de la majorité de la commission (alinéa 1) est accepté par 69 voix contre 46 et 17 abstentions.
En cohérence avec la modification acceptée par votre Grand Conseil à l’alinéa 1, la majorité de la commission propose l’amendement suivant, à l’alinéa 5 :
« Art. 3. – Al. 5 : La commission se réunit en présence d’au moins
quatrecinq membres, dont un au moins de chacune des entités qui la composent. Aux mêmes conditions, la commission peut également prendre ses décisions par voie de circulation. ».La commission a adopté cet amendement par 7 voix contre 0 et 6 abstentions.
Le fonctionnement dans l’attribution des montants liés à ce fonds est très compliqué. Or, on ajoute encore une entité supplémentaire avec l’amendement précédent. Je reprends au bond la question de mon collègue Haury ; d’ailleurs, je tiens à préciser que je ne suis pas candidat à cette commission, étant déjà membre de la COFIN, j’aurai donc de toute façon, vu votre décision, l’occasion de me prononcer. Si techniquement un membre de la Direction générale de l’enseignement supérieur estime que ce projet ne l’intéresse pas et décide de ne pas venir à la séance, la commission ne se réunira pas. Dans ce cas, il faudra réfléchir à reformuler cet alinéa 5 pour le deuxième débat.
L’amendement de la majorité de la commission (alinéa 5) est accepté par 71 voix contre 62 et 4 abstentions.
L’article 3, amendé, est accepté par 74 voix contre 54 et 10 abstentions.
Art. 4. –
L’article 4 concerne la compétence de la commission d’évaluation. La majorité de la commission fait la proposition d’amendement suivante à la lettre b, de l’alinéa 2 :
« Art. 4. – Al. 2, lit. b : Le bien-fonds ne permet pas un minimum de
quatrehuit LUP avec un indice d’utilisation du sol (IUS) de 0,5. ».A l’appui de cette proposition est évoquée la nécessité de faire correspondre le nombre de LUP avec les 1500 m² au minimum hors périmètre compact d’agglomération de surface de la parcelle. Elle ouvre ainsi la possibilité d’exercice du droit de préemption selon l’article 31, alinéa 2 de la LPPPL.
Cette proposition de huit LUP ne satisfait pas encore la minorité. Dès lors que le canton n’intervient que de manière subsidiaire et dans la mesure où l’on souhaiterait qu’il s’appuie sur une stratégie privilégiant des zones prioritaires, il apparaît que le canton ne devrait entrer en matière que lorsque la création importante de LUP se concrétise. La minorité vous propose donc que le chiffre de huit soit augmenté à quinze LUP :
« Art. 4. – Al. 2, lit. b : Le bien-fonds ne permet pas un minimum de
quatrequinze LUP ».
J’aimerais saluer l’ambition du rapporteur de minorité qui vise à construire un maximum de LUP avec son amendement à quinze LUP. Je souhaiterais savoir pourquoi il ne propose pas tout de suite trente LUP, puisqu’avec un fonds à 20 millions, on pourra évidemment trouver facilement des terrains qui permettent de construire trente LUP. Trêve de plaisanterie, tout le monde comprendra que l’objectif politique est de créer le plus possible de LUP via ce décret, mais il s’agit aussi d’avoir des critères plus souples pour favoriser les meilleurs projets. C’est pourquoi nous vous invitons à en rester à la sagesse du Conseil d’Etat, c’est-à-dire quatre LUP au minimum, ce qui n’exclut évidemment pas, ce qui est extraordinaire, des projets à huit, quinze ou trente LUP, mais nous vous invitons à en rester à 4 LUP.
Au nom du groupe des Vertes et des Verts, je vous encourage également à vous opposer à cet amendement qui vise à augmenter le nombre de LUP nécessaires à l’exercice du droit de préemption. Pour rappel, cette notion de quatre LUP fait partie de la définition du LUP, comme c’est écrit à l’article 27 de la LPPPL. Il n’y a en soi aucune raison pour restreindre les conditions de cession du droit de préemption. Ces amendements visent avant tout à empêcher toute faisabilité de projet, puisqu’acheter quinze logements avec 20 millions restreint de fait l’exercice du droit de préemption. Je vous encourage à en rester à la version du Conseil d’Etat.
Sans surprise, je vous invite à soutenir l’amendement de la minorité de la commission, à savoir un texte prévoyant quinze LUP. Toujours pour les mêmes motifs, à savoir que le droit de préemption subsidiaire cantonal – avec l’architecture qui se dessine, la saisine de la commission d’évaluation et de la COFIN – doit s’inscrire dans des projets ambitieux. Oui, monsieur Eggenberger, nous avons l’ambition de créer des LUP, non pas de maintenir ceux qui existent déjà, mais bien d’en créer de nouveaux. C’était, à mon sens, le but premier de la loi, même s’il faut bien admettre qu’aujourd’hui, il ne s’est pas passé grand-chose. Restons tout de même ambitieux et positifs, raison pour laquelle quinze LUP paraît être un minimum pour des projets d’une certaine ampleur. Un texte avec quatre LUP – je le répète, mais vous ne voulez pas l’entendre – n’a aucun sens et ne respecte pas la volonté du législateur de l’époque quant à la création de LUP et aux prérogatives cantonales. Ce nombre de huit LUP paraît, là encore, un peu limité. L’amendement de quinze LUP répond aux objectifs qui avaient été déployés à l’époque, soit d’avoir des projets stratégiques d’une certaine ampleur. Mme la conseillère d’Etat citait tout à l’heure les logements estudiantins à juste titre.
Pour préparer également le deuxième débat, on pourrait s’interroger sur le coefficient qui devrait être appliqué, 0,5 n’étant pas un indice très élevé. Le rapport de majorité rappelle que le canton applique un coefficient minimal de 0,625 pour ce type de logement. Je ne dépose pas formellement un amendement à ce stade, mais je me réserve le droit de le faire en deuxième débat, parce que cela me paraît aussi être un élément sur lequel on devrait réfléchir. A ce stade, je vous invite à soutenir l’amendement de minorité, à savoir la construction de quinze LUP, ce qui répond parfaitement à la volonté du législateur et du peuple lorsqu’ils ont voté la LPPPL.
Je remercie mon collègue Marc-Olivier Buffat de nous expliquer que, lors la votation de la LPPPL, le peuple ne souhaitait pas la création de projet de moins de quinze LUP. J’ai appris quelque chose aujourd’hui. Je suis loin d’être d’accord avec lui. Je vous invite à refuser les deux amendements de la majorité et de la minorité de la commission. Pour quelle raison ? On pourrait effectivement envisager que seuls des grands projets stratégiques et d’envergure devraient être préemptés par le Conseil d’Etat. Dans ce cas, l’enveloppe que nous lui donnons n’est pas suffisante pour des projets d’envergure et stratégiques. Il faudrait donc une enveloppe digne de ce nom. On ne parle pas de 20 ou de 40 millions, mais plutôt du double, soit de 80 à 100 millions, si on veut vraiment avoir des projets stratégiques et d’envergure. Ce n’est visiblement pas le cas. On voudrait avoir des projets emblématiques et intéressants, mais qui pourraient surtout pallier le manque de logements. Il est important de rappeler que le droit de préemption du Conseil d’Etat est subsidiaire au droit de préemption des communes. L’idée est de pouvoir créer des LUP dans des localités ou dans des endroits du canton où les communes n’ont pas la capacité de le faire. Ceci est malheureusement le cas dans des communes plus petites, plutôt dans l’arrière-pays ou dans les campagnes, et pas dans les centres urbains où les municipalités ont un peu plus de moyens.
Concrètement, si on limite, pour les petits villages ou communes – les communes de moyenne importance qui ont quelques milliers d’habitants – le droit de préemption de l’Etat à la création de quinze LUP, on n’aura pas de LUP dans des communes de taille moyenne entre 5000 à 6000 habitants, parce qu’on n’a pas forcément les moyens. Il existe des communes de 5000 à 6000 habitants qui ont beaucoup de moyens, mais ce n’est de loin pas le cas de toutes. L’Etat ne pourra pas jouer un rôle subsidiaire, alors même que son objectif est de créer des LUP là où c’est nécessaire, mais où les collectivités territoriales ne peuvent pas répondre à ce besoin. Le but du droit de préemption cantonal subsidiaire est de pouvoir créer des LUP là où on en a besoin et où on n’arrive pas à en construire. Si on limite les projets à quinze LUP, on ne pourra les mettre en œuvre que dans des localités assez grandes, avec des immeubles d’au moins quinze appartements. Seules les communes suffisamment grandes qui ont déjà la capacité de mettre en œuvre le droit de préemption communal seront concernées. Ces deux amendements limitent le droit de préemption et le rendent complètement inutile dans un contexte cantonal de création de LUP là où c’est nécessaire, c’est-à-dire aussi dans des plus petites communes qui n’ont pas forcément beaucoup de moyens, et où l’Etat a ce devoir de subsidiarité.
Je vous invite donc à en rester au texte du Conseil d’Etat, ce pour pallier les besoins en logements à loyer abordable et en LUP de tout le canton, et non pas seulement de quelques communes un peu plus grandes et plus denses.
Je vous invite également à refuser cet amendement pour fixer le nombre minimal de LUP à quinze, et même, comme cela a été proposé, à revenir à quatre. En effet, l’intention de ces propositions est de créer des LUP, finalement peu importe combien. On a beaucoup parlé des petites communes, mais j’aimerais citer l’exemple de Lausanne qui essaie de densifier dans certains quartiers, et pas seulement en créant des énormes bâtiments, mais aussi en remplaçant de petites villas. Il y a beaucoup d’oppositions. Faire accepter des projets de LUP de quatre bâtiments dans un quartier de villas est très difficile, alors que la création d’un petit immeuble passera plus facilement. En revanche, vouloir densifier et construire un minimum de quinze LUP ne passera jamais. Rappelons-nous, le but de cette loi était de créer des LUP. Finalement, peu importe le nombre, l’important est d’en créer. Il est donc problématique d’augmenter ce nombre. Je vous propose de revenir à la proposition du Conseil d’Etat, c’est-à-dire un minimum de quatre LUP.
Mmes Joly et Schaller ont dit l’essentiel. Monsieur Buffat, en indiquant de manière un peu méprisante qu’un projet de quatre LUP n’a aucun sens, vous raisonnez un peu trop à travers le prisme « agglomération lausannoise » et vous ne tenez pas compte de la réalité des villages pour lesquels il pourrait être opportun d’avoir un projet de quatre LUP, par exemple, dans une ancienne ferme restaurée. Ces communes villageoises peuvent manquer de ressources financières pour activer le droit de préemption, ce qui rend le rôle subsidiaire du canton pertinent. Mme Joly a aussi bien pointé du doigt votre contradiction lorsque vous prétendez que vous avez l’ambition de grands projets. Avec une enveloppe que vous avez restreinte à 20 millions, les grands projets restent complètement hors de portée. Pour toutes ces raisons, je vous invite à laisser ouverte la porte aux petits projets de LUP.
Mme Schaller a aussi souligné le fait que de tels projets pouvaient permettre une densification à taille humaine, capable d’être soutenue par la population. Contrairement aux grands projets de densification récemment refusés en votation populaire à Crissier et Montreux, les petits projets peuvent aussi avoir du sens et faire l’objet d’une meilleure acceptabilité de la part de la population.
Je voudrais revenir sur deux notions importantes présentes dans cet amendement. La première concerne l’IUS, pour lequel on donne un chiffre, en proportion des m2 de terrain. Quatre logements de 70 m2 environ en LUP égalent 280 m2 de logement, y compris tous les services par rapport aux circulations à l’intérieur de l’immeuble. Cela nous amène à 560 m2 de terrain. Une commune n’a pas les moyens d’acquérir temporairement une surface de 560 m2. Je ne pourrais pas reprendre l’expression d’arrière-pays, mais pour une petite commune, cela représente 200’000 francs d’investissement qu’elle ne va pas garder en son sein et qu’elle va certainement remettre à d’autres entités – fondations et autres – en vue de la construction. C’est juste incroyable. On passerait à quinze logements, ce qui est intéressant dans ce rapport IUS-logement, nombre d’entrées, hauteur du bâtiment. On ne construira donc pas un bâtiment de douze étages dans une petite commune. Trois niveaux, certainement, et pas plus. Combien d’entrées ? Quel coût ? Quelle surface pour les appartements ? Vous devez prendre en compte ces questionnements. Cela nous amène à des surfaces de 2000 ou 2100 m2 de terrain en zone village ou en zone constructible avec un IUS de 0,5. C’est un million d’investissements – je suis très large – sur le foncier provisoirement pour une commune avant de passer la main à l’Etat. On n’est pas dans des proportions complètement folles. C’est tout à fait possible. Je ne vois pas comment une commune pourrait emprunter un million pour acquérir plus de 2000 m2 de terrain pour construire du logement. C’est facile, il faut arrêter de compliquer les choses. Je le répète, prenez les notions de proportion du bâtiment, de nombre d’entrées, de hauteur du bâtiment et de surface du terrain et cela nous amènera très rapidement à quinze logements.
Je m’interroge sur l’argumentaire et le raisonnement proposé par la minorité, MM. Miauton et Buffat notamment. Lors du précédent débat, vous nous avez parlé de réalisation de projets de 2 à 3 millions. Désormais, vous nous indiquez qu’il faut mettre 15 LUP dans ces projets. Monsieur Buffat, vous êtes actif dans le milieu de l’immobilier, vous nous l’avez dit précédemment, vous connaissez certainement mieux que moi les prix du marché, mais s’il s’agit de racheter un bâtiment à 2-3 millions, je doute qu’on puisse mettre 15 LUP à l’intérieur. Cela me paraît peu crédible. Dans votre prise de parole, vous nous avez également indiqué qu’il fallait soutenir des projets d’envergure, des projets stratégiques, et en même temps, vous refusez d’augmenter l’enveloppe budgétaire allouée à ce fonds à 40 millions, vous préférez la laisser à 20 millions. Là aussi, ce n’est pas très cohérent. Soit on soutient des projets d’envergure, et on met le paquet même au-delà des 40 millions ; soit on se restreint, mais on adapte aussi les critères et on met moins de LUP.
Le nombre de quatre LUP me paraît tout à fait crédible. Cela répond à un besoin, Mme Joly et M. Buclin l’ont dit. Dans des communes de plus petite importance, on peut tout à fait se porter acquéreur de bâtiments, de bâtisses villageoises. Cela permettra aussi de renforcer la cohésion sociale. Cela peut permettre à des jeunes de trouver un logement dans les villages, l’immobilier augmentant à proximité des villes et forçant les jeunes à partir. Créer quelques loyers abordables dans ces communes peut aussi être intéressant pour la jeunesse. Dans tous les cas, je me questionne sur la finalité. Une fois de plus, on ajoute une cautèle supplémentaire pour ne pas utiliser ce fonds et ne pas réaliser de LUP. Je vous encourage vivement à refuser cet amendement.
Par où commencer ? Bien que j’aie le cuir relativement épais depuis que je participe aux débats du Grand Conseil, je n’apprécie que très modérément que les gens déforment mes propos. Je n’ai jamais dit que c’était au minimum quinze LUP. J’ai uniquement parlé du droit de préemption cantonal. C’est l’objet qui nous occupe aujourd’hui, et rien d’autre. Dans ce cadre, Mme Métraux, me semble-t-il alors représentante du parti des Verts au Conseil d’Etat, avait indiqué que le droit de préemption cantonal devait s’exercer sur des projets d’une certaine ampleur, ce qui exclut à l’évidence quatre LUP et peut-être même aussi huit. Dès lors qu’est-ce qui nous manque ? Je le répète encore une fois, ce sont les terrains. Je peux imaginer qu’avec le droit de préemption cantonal et une enveloppe de 20 millions, on pourra acquérir un certain nombre de terrains qui ne sont pas forcément chers.
Je vais vous donner un exemple, monsieur Cala, puisque vous avez eu l’amabilité de me poser la question tout à l’heure. La fondation que j’ai l’honneur de présider – vous allez recevoir le rapport sur l’exercice 2023, j’ai demandé qu’on l’envoie à tous les députés – a construit des LUP à Cudrefin. Quand on m’accuse d’égocentrisme lausannois, je rappelle que Cudrefin est la dernière commune avant le canton de Berne. On peut difficilement faire plus excentré que Lausanne. A travers ce projet, on a créé treize LUP. C’est moins que quinze, mais je vous assure que la taille du bâtiment ne résout pas le problème des LUP dans la commune de Cudrefin. C’est une évidence. Ce n’est pas avec 13 LUP qu’on arrive à mettre en place une politique volontariste. Toutefois, un nombre de quinze LUP me paraît être un minimum pour avoir un immeuble d’une certaine ampleur, avec des coûts raisonnables, le prix du terrain à Cudrefin étant évidemment différent de celui de la région lausannoise.
En outre, je suis surpris que certains de mes collègues oublient complètement la Loi sur l’aménagement du territoire (LAT). C’est fini la densification dans les centres-villes. On veut faire des LUP dans les petits villages. On veut créer quatre LUP dans une ancienne ferme sans même se poser la question de savoir qui va y habiter, quels sont les problèmes éventuellement de zones constructibles qui se posent, sans même parler du coût. La rénovation d’une ancienne ferme ou d’un ancien hangar pour créer des LUP n’est guère judicieuse d’un point de vue économique. Les LUP sont faits pour être utilisés dans le cadre de la densification des sites urbains. Je regrette sincèrement les échecs qu’on a connus à Montreux avec une centaine de LUP. Ce sont ces projets qui devraient obtenir notre soutien et c’est dans ce cadre que le canton a aussi un rôle à jouer. Pour le reste, je maintiens qu’un nombre de quinze LUP est exactement dans la cible de ce que le Conseil d’Etat voulait à l’époque, et que ce que le Grand Conseil avait voté. Monsieur Cala, cela permet un certain nombre de réalisations d’immeubles dans ce canton, même dans des lieux excentrés, avec des prix tout à fait raisonnables pour les gens qui y habitent.
Je ne vais pas répéter tout ce qui a été dit par mes préopinants. Il faut revenir à l’exposé des motifs et projet de décret proposé, parce que la proposition de quatre LUP est la plus adaptée. Comme l’a rappelé M. Buffat, la LAT a été adoptée et cela a entraîné des conséquences dans les communes. Or, fixer une valeur à 0,5 va à l’encontre de la LAT et rend les choses plus difficiles pour les petits villages qui n’ont pas la possibilité d’adapter leur centre de vie à 0,5. Les buts des LUP sont de garantir des revenus fiscaux aux communes périphériques et d’offrir la possibilité à la jeunesse d’occuper des maisons. C’est le cas, par exemple, lorsque des grands-parents occupent un 120 m2, mais qu’ils aimeraient rester dans un village afin à ne pas couper les liens familiaux avec leurs enfants et petits-enfants scolarisés. Je vous invite à revenir à l’exposé des motifs et projet de décret.
M. Buffat a bien visé en allant à Cudrefin qui a un taux d’imposition à 59 avec douze logements, mais je l’encourage à aller à Pailly qui a un taux d’imposition à 78 et 9 points d’impôt avec la nouvelle péréquation.
Je suis heureuse à double titre, tout d’abord, de voir que M. Lohri peut parler de péréquation avec tous les sujets. Plus sérieusement, je suis aussi heureuse de voir qu’au-delà des questions de chiffres, l’ensemble de l’hémicycle paraît attentif aux questions de logement. Notre canton connaît une situation de pénurie, ce qui l’incite à se mettre autour de la table pour discuter de ces questions de logement avec les collectivités publiques locales et l’ensemble des partenaires privés et publics. D’ailleurs, nous avons eu une première table ronde au mois de mars, et une deuxième est prévue au mois d’octobre. Le droit de préemption est un des outils, mais ce n’est pas le seul. Comme le disait M. Buffat, on constate parfois le refus de nouveaux plans de quartier. Or, nous aurons besoin d’un effort collectif pour faire passer le message de la mise à disposition de logements pour l’ensemble de la population.
S’agissant de cet amendement, il faut faire preuve de cohérence. Le Conseil d’Etat propose un minimum de quatre LUP, mais aussi des moyens financiers fixés à 20 millions. Si on augmente le nombre de LUP à quinze, on a un problème avec les 20 millions. Si on augmente à 40 millions, la discussion est un peu différente. La problématique est liée à la cohérence entre le nombre de LUP minimaux et les moyens mis à disposition si on souhaite que le Conseil d’Etat puisse agir subsidiairement, en activant ce droit de préemption. Il s’agit d’une question de mesure. Il faudra aussi revoir tout ceci au deuxième débat, cas échéant, pour mettre les choses au point. On peut admettre quatre LUP pour 20 millions, ou huit LUP pour 20 millions. Toutefois, il est compliqué d’avoir un projet qui tienne la route avec quinze LUP pour 20 millions. Avec les amendements visant à augmenter la somme à 40 millions, cela aurait été moins compliqué. Quelle que soit l’issue de cet amendement, il faudra rediscuter de la cohérence du texte en vue du deuxième débat. Je vous invite à en rester à la version du Conseil d’Etat.
L’amendement de la majorité de commission, opposé à celui de la minorité, est choisi par 70 voix contre 68.
Je demande un vote nominal.
Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.
Celles et ceux qui acceptent la proposition de la majorité de la commission (huit LUP) votent oui ; celles et ceux qui privilégient la proposition de la minorité de la commission (quinze LUP) votent non. Les abstentions sont possibles.
Au vote nominal, l’amendement de la majorité de commission, opposé à celui de la minorité, est choisi par 72 voix contre 69.
* insérer appel nominal
L’amendement de la majorité de la commission est refusé par 74 voix contre 66 et 2 abstentions.
Je demande un vote nominal.
Retour à l'ordre du jourCette demande est appuyée par au moins 20 membres.
Celles et ceux qui soutiennent l’amendement de la majorité de la commission votent oui ; celles et ceux qui le refusent votent non. Les abstentions sont possibles.
Au vote nominal, l’amendement de la majorité de la commission est refusé par 73 voix contre 69.
* insérer appel nominal
L’article 4 est accepté par 73 voix contre 69.
Le débat est interrompu.