24_LEG_122 - EMPL modifiant la loi du 20 juin 1995 organisant la Banque Cantonale Vaudoise (LBCV) (1er débat).
Séance du Grand Conseil du mardi 29 octobre 2024, point 16 de l'ordre du jour
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- Texte adopté par CE - EMPL modifiant la loi du 20 juin 1995 organisant la Banque Cantonale Vaudoise (LBCV) - publié
- Rapport de la Commission - RC - 24_LEG_122 - Didier Lohri
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Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourPermettez-moi de ne pas relire l’intégralité du rapport, mais de me concentrer sur les éléments clés qui ont guidé les travaux de la commission, c’est-à-dire les éléments suivants. Premièrement, la commission a examiné la question de la suppression de l’âge limite pour les membres du Conseil d’administration. Cette suppression a semblé aux membres incohérente et difficilement justifiable, en comparaison avec les autres lois cantonales qui imposent un âge limite aux employés de l’Etat ou aux juges cantonaux. Deuxièmement, la commission a également abordé le respect dû aux personnes atteignant la limite d’âge, en ne les obligeant pas à quitter leurs fonctions immédiatement. Elle propose, au contraire, de leur permettre de terminer leur mandat en cours, ce qui garantirait un meilleur suivi des dossiers au sein du Conseil d’administration. Concernant le comité de direction, je reviendrai ultérieurement plus en détail sur ce point.
Il est 16h19, et afin d’avancer efficacement, notons que la suppression de la limite d’âge de 70 ans pour le Conseil d’administration n’a pas recueilli l’adhésion de la commission. Une solution a été proposée par voie d’amendement à l’article 12, alinéa 5 : permettre l’élection et la réélection au Conseil d’administration des membres jusqu’à 70 ans révolus, tout en limitant la durée totale de leurs mandats à 12 ans. Ce compromis, par rapport au projet initial du Conseil d’Etat, a été accepté par 8 voix et 1 abstention.
La discussion sur l’entrée en matière est ouverte.
Le groupe PLR salue le projet de loi présenté ici modifiant la loi organisant la Banque cantonale vaudoise (BCV). La gouvernance de la BCV est primordiale, elle se doit d’être à la hauteur des enjeux complexes du domaine bancaire. Les responsabilités d’un Conseil d’administration sont toujours plus importantes, ainsi avoir des hommes et des femmes compétents est fondamental. Le groupe PLR salue la volonté du Conseil d’Etat d’harmoniser les pratiques dans sa gestion des participations. Ainsi, la limitation à 3 mandats de 4 ans – au lieu de 4 actuellement – va dans le sens de réunir des forces vives au sein du Conseil d’administration de la BCV. Le groupe PLR acceptera l’entrée en matière et soutiendra majoritairement la version du Conseil d’Etat, refusant ainsi les amendements proposés.
A la suite des discussions tenues tant au sein de la commission que dans le groupe UDC, il ressort que ce dernier est partagé entre le texte proposé par le Conseil d’Etat et l’amendement. Pour ma part, je tiens à préciser mes intérêts : j’ai participé aux travaux de cette commission, dont l’esprit et l’engagement ont été exemplaires, notamment dans la volonté de préserver une certaine égalité de traitement au sein des institutions où l’Etat est représenté. On peut penser, par exemple, aux fonctions des juges assesseurs ou aux Conseils de fondation, où la limite d’âge est fixée à 70 ans. A mes yeux, il est essentiel de soutenir la position de la commission en faveur de l’amendement – en l’occurrence, l’article 12a – qui a été largement validé par les membres de la commission ad hoc. Celle-ci a abordé le sujet avec sérieux et a pris en compte l’ensemble des recommandations et interventions de la conseillère d’Etat, Mme Isabelle Moret.
Comme vous le savez, la question des limites de mandat est un sujet d’importance pour le parti socialiste vaudois. A ce titre, les propositions du Conseil d’Etat concernant la Loi sur BCV ont retenu toute notre attention. Il est essentiel que la BCV puisse inscrire ses activités dans un cadre légal garantissant une gouvernance adaptée aux enjeux de 2025 et au-delà.
Si nous comprenons la complexité de renouveler le Conseil d’administration tout en respectant les directives de l’Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA), nous estimons que la proposition initiale du Conseil d’Etat va trop loin. Dans cette optique, l’amendement de compromis proposé par la commission, qui introduit la possibilité de prolonger un mandat au-delà de la limite d’âge de 70 ans, convainc une majorité du groupe socialiste. La question de l’âge limite pour la retraite de la direction suscite toutefois davantage de questionnements au sein de notre groupe. A cet égard, la proposition de la commission, qui inclut une dérogation permettant de prolonger la limite des 65 ans, nous paraît plus acceptable que le texte initial, bien que nous restions partagés sur la pertinence d’une telle mesure. La BCV, l’une des cinq ou six plus grandes banques du pays, devrait en effet être capable de recruter des profils de qualité pour le poste de directeur ou directrice générale.
En conclusion, le groupe socialiste soutiendra l’entrée en matière et les amendements proposés, mais réserve son vote final en fonction de l’issue des débats.
Pour cette discussion d’entrée en matière, il est utile de rappeler et de compléter les propos de M. le rapporteur Lohri. Le projet du Conseil d’Etat comporte quatre éléments principaux : la suppression de la limite d’âge et la réduction de la durée des mandats. Ce dernier point est salué par les Vertes et les Verts. Toutefois, il reste un aspect central qui, à titre personnel, me semble crucial : la délégation d’une compétence législative à une banque. Nous en parlerons plus précisément lors de l’examen du deuxième article et du deuxième amendement. Il est donc important de bien contextualiser nos débats : il ne s’agit pas seulement de la question des limites d’âge, mais également de savoir qui fixe cette limite et qui détient la compétence de faire évoluer cette réglementation. Comme l’a indiqué M. Cala, la position de la commission représente une synthèse entre ses préoccupations – ne pas supprimer toute limite d’âge de la loi ni donner un blanc-seing complet à la BCV pour fixer l’âge de départ à la retraite de ses hauts cadres – et le besoin de flexibilité exigé par le Conseil d’Etat pour répondre aux exigences de la FINMA. En ce sens, le groupe des Vertes et des Verts soutiendra l’entrée en matière ainsi que les deux amendements adoptés presque unanimement par la commission.
Le groupe vert’libéral soutiendra bien évidemment l’entrée en matière sur ce projet de loi. Concernant les amendements, la grande majorité de notre soutiendra la position du Conseil d’Etat en ce qui concerne la durée des mandats du Conseil d’administration de la BCV. Les enjeux liés à la sélection de ces membres, notamment en termes de profil, de connaissances et de compétences, nécessitent de la souplesse quant à une éventuelle limite d’âge pour ces nominations. Quant à la composition de la direction, le groupe vert’libéral dans sa grande majorité soutiendra l’amendement de la commission.
La BCV est la troisième banque universelle de Suisse après l’UBS et la Zürcher Kantonalbank (ZKB), la première banque de Suisse romande. Elle occupe une place essentielle pour notre canton, d’où l’importance de composer le Conseil d’administration de membres hautement compétents. L’enjeu ne consiste pas tant à attirer des candidats, mais plutôt à garantir un vivier suffisamment large pour répondre aux critères requis. Premièrement, les membres doivent posséder des compétences, notamment managériales et bancaires, reconnues par la FINMA. Deuxièmement, nous souhaitons qu’au moins la moitié des membres soient proches du tissu vaudois, évitant ainsi une prédominance de profils issus de la grande région zurichoise. A cela s’ajoute un critère qui me tient particulièrement à cœur : garantir une représentation féminine au sein du Conseil d’administration. Ainsi, ajouter une limite d’âge à ces exigences restreindrait encore davantage le vivier de candidats. En 20 ans, nous sommes passés de quatre grandes banques à une seule, et les compétences managériales bancaires se sont fortement centralisées autour de Zurich. L’UBS et la ZKB ne sont pas basées en Suisse romande et disposent du vivier zurichois. Dans le canton de Vaud, nous voulons que le Conseil d’administration soit composé de gens qui connaissent le tissu économique local, notre culture et qui soient proches du canton de Vaud.
Je me réjouis de constater que tous les groupes, ainsi que la commission – que je remercie – soutiennent l’entrée en matière. Deux propositions sont sur la table : celle du Conseil d’Etat, qui privilégie la flexibilité en mettant l’accent sur les compétences, s’inspirant de la Loi sur les participations de l’Etat de Vaud (LPEV) qui a déjà été modifiée et a supprimé toute limite d’âge – c’est le cas des Retraites Populaires. Pour sa part, la commission propose une solution de compromis. Le Conseil d’Etat maintient son projet et vous invite à vous rallier à la décision déjà prise dans le cadre de la LPEV.
La discussion est close.
L’entrée en matière est admise à l’unanimité.
Il est passé à la discussion du projet de loi, article par article, en premier débat.
Art. 12. –
Cet article 12, amendé par la commission, a été contrôlé par la Direction générale des affaires institutionnelles et des communes (DGAIC), qui n’a pas trouvé quelque chose d’illicite dans la formulation. Comme je l’ai dit en ouverture, cet amendement a été accepté par 8 voix et une abstention. L’article amendé a été accepté à l’unanimité.
« Art. 12.– Al 5 : Le président et les membres du Conseil d’administration sont nommés pour quatre ans. Ils sont rééligibles jusqu’à la limite de 70 ans révolus ; toutefois, la durée totale de leur mandat ne peut excéder douze ans. »
J’ai du mal à comprendre cet amendement, d’autant plus que Mme la conseillère d’Etat nous a rappelé que l’objectif est de mettre la BCV à niveau avec la LPEV, qui a déjà été votée, et qui concerne notamment les Retraites Populaires et l’Etablissement cantonal d'assurance contre l'incendie et les éléments (ECA). Pourquoi, dans ce cas, faudrait-il faire une exception spécifique pour la BCV ? Cela me paraît compliqué et peu logique. Les arguments en faveur de cet amendement me semblent insuffisants, et je vous invite donc à le refuser.
Quant à la remise en question des capacités de personnes d’un certain âge, de 70 ans, je tiens à rappeler que la pyramide des âges évolue et qu’aujourd’hui, les profils de 70 ans sont bien plus représentés que les jeunes. Bien sûr, il est essentiel de penser à la relève, mais ici, nous ne parlons pas d’un poste de chef de vente ou d’agence ; il s’agit de fonctions où les compétences et le savoir se développent avec des années d’expérience. Je rejette donc tout argument que l’on pourrait qualifier d’âgiste et vous invite à refuser cet amendement et à rester fidèle au texte du Conseil d’Etat, en gardant également à l’esprit le rôle important de l’Assemblée générale dans ces nominations.
Je vous invite à réexaminer le projet de la commission. Je note que Mme la conseillère d’Etat insiste avant tout sur la nécessité de flexibilité, et je comprends bien cette demande. Cependant, je ne vois pas en quoi cet amendement pourrait représenter un frein par rapport aux exigences de flexibilité du Conseil d’Etat. D’après le projet de loi et le rapport de la commission, il apparaît que l’essentiel des personnes qui constituent le vivier actuel sont en préretraite ou en seconde partie de carrière et que le Conseil d’Etat cherche à éviter des fins de mandat trop abruptes pour les administrateurs et administratrices de la BCV. Cet amendement ne contredit aucun de ces objectifs : il permet toujours de nommer des personnes en début de retraite et qui peuvent à l’évidence rester extrêmement compétentes après l’âge de la retraite. La seule restriction introduite par cet amendement réside dans le fait de ne plus pouvoir les nommer après 70 ans, alors que le mandat peut se prolonger au-delà de cet âge. En évitant les fins de mandat abruptes, comme celles qui pourraient survenir à 69 ans et 364 jours, cet amendement offre une véritable flexibilisation par rapport à la version actuelle de la Loi sur la BCV.
Je souligne également, comme notre collègue Dumartheray, l’importance de s’aligner sur d’autres entités de droit public qui gravitent autour de l’Etat de Vaud, qui, pour certaines, conservent des limites d’âge. Pour répondre notamment à Mme Gross : la différence ici réside dans le passage d’une limite stricte à 70 ans à l’absence totale de limite d’âge. En termes de contrôle et de transition, il aurait été possible de mieux faire. C’est pourquoi je vous encourage, encore une fois, à adopter la version proposée par la commission.
Je souhaite revenir sur ce point et soutenir les propos de notre collègue Florence Gross. Nous disposons aujourd’hui d’une LPEV, récemment modifiée, qui ne fixe plus de limite d’âge. Il est important de rappeler que la BCV est une banque soumise aux réglementations de la FINMA, qui prévoit un certain nombre de cautèles lors de la nomination d’administrateurs dans les banques. La FINMA surveille étroitement la composition des conseils d’administration et fixe des exigences spécifiques. Dans ce contexte, il semble peu probable que l’on puisse nommer un administrateur de 77 ans, par exemple.
En outre, il faut réaliser qu’occuper un poste d’administrateur dans une grande banque, de surcroît cotée en bourse, n’est pas un mandat à prendre à la légère. Ce rôle est bien plus exigeant que celui d’administrateur dans une petite société ou dans un conseil de fondation. Il s’agit d’un métier à part entière, qui exige un investissement conséquent sur plusieurs années. Cela signifie qu’une personne nommée à 62 ou 64 ans doit pouvoir exercer son mandat sur plusieurs années, idéalement au-delà d’un mandat unique, comme le propose le Conseil d’Etat, et potentiellement jusqu’à deux ou trois mandats. L’âge, au fond, n’est pas le point essentiel, car nous connaissons aujourd’hui des personnes de 70 ans qui sont parfaitement capables de mener des carrières actives et de gérer des responsabilités professionnelles. C’est pourquoi la proposition du Conseil d’Etat me semble être une bonne solution. Je pense qu’il serait prudent de ne pas introduire d’exceptions spécifiques dans la Loi sur la BCV, car cela risquerait de nuire à sa position dans le secteur bancaire.
Je partage pleinement les propos de Mme Florence Bettschart-Narbel. Je tiens à rappeler que c’est le Conseil d’Etat qui nomme une partie des administrateurs, tandis que l’autre partie est désignée par l’Assemblée générale. Pour les membres nommés par le Conseil d’Etat, il existe tout de même un processus de contrôle. Il paraît peu probable que le Conseil d’Etat nomme, pour un premier mandat, une personne de 70 ans en vue de trois mandats de quatre ans. Cependant, il est important de conserver une certaine flexibilité, car les candidatures pertinentes ne sont pas toujours aisées à trouver, comme cela a été évoqué en commission pour le Conseil d’administration de la BCV. En effet, certains profils requis, notamment ceux de cadres issus de directions bancaires, ne quittent pas nécessairement leur poste à 50 ans. Cette flexibilité accordée au Conseil d’Etat et à l’Assemblée générale est donc essentielle pour permettre la nomination des personnes les mieux qualifiées pour notre banque cantonale.
Je m’excuse de reprendre la parole, mais certaines choses me dérangent un peu dans les discours qui ont été tenus. Je tiens à préciser, en premier lieu, que nous ne remettons pas en cause les compétences que peuvent avoir des administratrices et administrateurs au-delà de 70 ans. Cela dit, je veux rappeler les assurances fournies par Mme la conseillère d’Etat lors de nos travaux en commission : il n’est nullement souhaité que le Conseil d’administration de la BCV soit composé uniquement de membres âgés. Toutefois, après avoir entendu les propos de Mme Bettschart-Narbel ou de M. Suter, si nous adoptons la version du Conseil d’Etat, cela permettra légalement de procéder à des nominations au-delà de cet âge. Je ne comprends donc pas pourquoi tout le monde dit qu’aucune nomination au-delà de 70 ans n’aura lieu, tout en défendant l’idée que cette possibilité devrait exister. Il s’agit d’un argument récurrent que j’ai du mal à saisir.
Enfin, pour rebondir sur les propos de Mme Gross concernant la mise à niveau, je souhaite dire que pour ma part mon rôle consiste à donner des impulsions politiques plutôt que de m’aligner sur les attentes d’autres autorités. En tant que législatif, il me semble que nous pourrions nourrir l’ambition de motiver et de faire en sorte que notre secteur bancaire vaudois puisse fournir des administratrices et des administrateurs compétents avant l’âge de 70 ans, sans attendre cet âge pour envisager leur entrée dans un Conseil d’administration. Il est de notre responsabilité d’être ambitieux et de soutenir la relève, en maintenant une limite d’âge, tout en travaillant à faciliter, à moyen et long terme, la nomination d’administrateurs plus jeunes, ce qui est actuellement compliqué.
Permettez-moi de rebondir sur les propos de Mme Bettschart-Narbel et de Mme Gross en soulignant deux points essentiels. Tout d’abord, il est important de rappeler que la FINMA n’a pas de compétence législative. Elle ne peut pas déclarer qu’un article de la loi que nous votons est ou non illégal ; son rôle se limite à la supervision des personnes qui adhèrent aux conseils d’administration. J’espère que l’on avait veillé avec soin à la sélection des membres du Conseil d’administration de Crédit Suisse, à l’époque.
Le deuxième point concerne l’âge, en particulier l’exemple donné par Mme Bettschart-Narbel. Il s’agit justement de l’amendement qui permet à une personne de 62 ans d’être élue pour un premier mandat, à 66 ans pour un deuxième et, comme elle est encore en dessous de 70 ans à la fin de son deuxième mandat, elle peut obtenir un troisième mandat. Ainsi, mécaniquement, il est possible d’avoir trois mandats pour une personne débutant à 62 ans. Nous n’avons pas examiné en détail la proportion des cadres bancaires qui prennent une retraite anticipée. Cet article est conçu pour permettre une gestion plus pragmatique et élégante des mandats. La force d’un canton réside dans sa capacité à intégrer des membres de toutes les couches d’âge au sein de ses conseils d’administration. Cela ne devrait pas être limité à une population âgée de plus de 70 ans. Il est crucial d’assurer un renouvellement des compétences et une diversité dans ces fonctions.
En tant que président de la commission qui a étudié ce projet de loi, je vous exhorte à soutenir fermement la position de la commission.
Personnellement, je me méfie des quotas, car si l’intention qui y est liée est bonne, les résultats ne sont pas toujours satisfaisants. Pour moi, le seul quota qui compte est celui de la compétence. Je ne suis pas convaincu, comme M. Lohri, qu’il soit nécessaire de représenter toutes les tranches d’âge. Ce qui importe, c’est de placer les personnes les plus compétentes aux postes clés. Comme il a été dit, l’expérience se construit avec le temps. Cela signifie que ce sont souvent des professionnels en fin de carrière, proches de la retraite, qui sont retenus pour ces postes.
Prenons l’exemple de Warren Buffett, qui possède une fortune de 115 milliards et qui a 94 ans aujourd’hui. Il est l’un des investisseurs les plus performants en bourse depuis des décennies. Si Warren Buffett souhaitait rejoindre le Conseil d’administration de la BCV, nous risquerions de nous en priver simplement en raison de son âge. Contrairement à ce que certains pourraient penser, il n’en va pas de l’âge des administrateurs comme celui des yaourts de la Migros : il n’y a pas forcément de Migros Data. La seule question qui se pose est : sont-ils compétents et font-ils bien leur travail ? Si oui, nous les conservons ; sinon, nous les remplaçons.
Nous avons évoqué la nécessité de donner des impulsions politiques, mais je plaide plutôt pour des impulsions basées sur la compétence. Il ne faut pas non plus faire de procès d’intention au Conseil d’administration de la BCV. Ce n’est pas parce que le Conseil d’Etat est autorisé – et non pas poussé – à choisir des candidats pour trois mandats et qui dépasseraient les 70 ans que le Conseil d’administration de la BCV va s’empresser de ne recruter que des vieux ! Cela n’a absolument aucun sens. Par conséquent, conservons la proposition du Conseil d’Etat.
Je souhaite commencer par déclarer mes intérêts. J’ai été membre de la commission qui a soutenu les amendements. C’est facile à comprendre, car nous y étions presque tous favorables. J’aimerais expliquer les raisons qui nous ont conduits à cette réflexion. Il est légitime de nous demander de réfléchir à ce projet de loi, car le principe même des commissions est de soumettre un projet et de tenter de l’optimiser avec les éléments à notre disposition.
Quant à savoir s’il n’existe qu’une seule réponse à ce projet de loi, je l’ignore. Cependant, notre raisonnement, le mien en tout cas, reste constant. Nous avons souvent abordé la question des compétences en lien avec les limites d’âge. Il existe des personnes très compétentes, comme nous venons de l’entendre, qui gèrent leurs affaires avec brio même à un âge avancé, tandis que certains jeunes de 20 à 30 ans, considérés comme des génies, ont déjà accumulé des milliards grâce à des raisonnements similaires. Cela rend difficile la détermination d’un curseur. Toujours est-il que je me méfie de l’idée que la compétence soit directement proportionnelle l’âge. Ce raisonnement me semble trop simpliste. Certains cadres peuvent partir à la retraite après une longue carrière bancaire, et il est compréhensible de partir à 62 ans. Cet âge permet en effet de compléter les trois mandats proposés par le Conseil d’Etat pour atteindre 74 ans.
Ainsi, plutôt qu’un plafonnement, les amendements de la commission offrent un déplafonnement qui permet de trouver un terrain d’entente, une solution alternative à la proposition initiale du Conseil d’Etat. Malgré les divergences d’opinions au sein de mon groupe – ce qui montre qu’il existe une pluralité d’avis dans les partis – je pense qu’en permettant aux cadres de la BCV d’atteindre techniquement 74 ans pour une fin de mandat, nous faisons une proposition tout à fait soutenable.
Pour répondre à M. Lohri, je reconnais que l’exemple que j’ai donné n’était peut-être pas le plus approprié. Toutefois, supposons qu’il existe une personne extrêmement compétente qui prenrait sa retraite à 66 ou 67 ans et qui serait un excellent candidat pour la BCV. Dans ce cas, cette personne pourrait être nommée une fois, mais elle ne pourrait pas être réélue deux ou trois fois, ce qui soulève des préoccupations. En effet, même un candidat prometteur âgé de 66 ans et demi ne pourrait effectuer qu’un seul mandat, ce qui est problématique.
En ce qui concerne votre argument selon lequel la FINMA ne s’intéresse pas à notre loi, il est vrai qu’elle ne se prononce pas sur celle-ci. Cependant, si vous consultez le guide pratique relatif aux modifications concernant les personnes chargées de l’administration et de la gestion des banques, vous constaterez que cette directive fournit des indications détaillées sur la nomination des membres du conseil d’administration. Il est donc plutôt complexe de trouver des candidats qui doivent remplir un certain nombre de critères, notamment celui d’une activité irréprochable, ce qui est normal dans le secteur bancaire, mais qui exige également des compétences pointues.
Je pense que nous, en tant que députés, ne réalisons peut-être pas à quel point ces candidats ne courent pas les rues dans notre canton. Il est donc essentiel de garantir une certaine flexibilité et des possibilités qui nous permettraient de recruter les meilleurs candidats possibles. La limite d’âge, à mon sens, restreint le nombre de ces candidats potentiels. C’est pourquoi je crois qu’il est impératif de rejeter cet amendement.
Je souhaite revenir sur les dernières paroles du député Gafner, qui a souligné la nécessité de soutenir la relève. Bien sûr, il est essentiel de promouvoir la relève, et c’est ce que nous tentons de faire au sein de nos partis et dans toutes les entreprises, y compris à la BCV. Cependant, il ne s’agit pas de soutenir la relève uniquement au sein du Conseil d’administration. Il est vrai qu’il existe peut-être des personnes de 30 ans parfaitement capables de siéger au Conseil d’administration, mais ces individus ont souvent d’autres engagements professionnels et ne sont pas disponibles pour assumer un tel rôle. Ils poursuivent généralement un autre parcours de carrière. C’est pourquoi je vous propose de rejeter cet amendement.
Je voudrais reprendre les propos de M. Gafner, qui évoque une politique d’ambition. Monsieur Gafner, si pour vous, cette politique d’ambition signifie faire une exception pour la BCV tout en imposant des limites d’âge aux autres, cela démontre une approche qui interdit et restreint plutôt qu’elle ne promeut. Cette vision ne correspond pas à celle d’une partie de ce Parlement, et heureusement. Tout comme M. Vogel, je considère que les quotas n’ont jamais produit de bons résultats. Nous avons largement discuté de l’importance de l’expérience et de la compétence. A 70 ans, une personne n’est pas dans le même état de santé que quelqu’un du même âge il y a un siècle. Je souhaite également souligner l’évolution de la pyramide des âges et celle de l’âge de la retraite, tant chez nous que dans les pays voisins. Il est temps d’arrêter de considérer une personne de 70 ans comme « vieille ». Au contraire, profitons de son expérience, qui peut bénéficier à des entreprises essentielles pour notre économie. Je pense qu’il est important de reconnaître et de valoriser ces individus, plutôt que de les limiter.
Nombre de mes préopinants ont mentionné des directives ou des conditions-cadres établies en partie par la FINMA pour justifier les modifications soutenues par le Conseil d’Etat. Il est intéressant de rappeler que la FINMA fixe également des directives pour ses propres collaborateurs. A cet égard, je vous invite à consulter l’article 12 de l’Ordonnance sur la FINMA, qui impose une limite d’âge à 70 ans. Plutôt que de s’adonner à de la sculpture sur nuages quant aux intentions de la FINMA, je pense qu’il est plus pertinent d’examiner les règles qu’elle s’applique à elle-même. Ces mesures ne visent pas à restreindre les ambitions, mais plutôt à établir des précautions nécessaires. Je vous propose donc de nous aligner sur cette pratique et de ne pas suivre le Conseil d’Etat dans ses largesses.
Je voudrais vous rappeler l’article 15 de la Loi sur la Banque cantonale de Zurich (ZKB), qui a été mentionnée en comparaison avec la BCV. Cet article stipule que la durée du mandat est de quatre ans, et il se termine en tous les cas à l’âge de 70 ans. Cette règle s’applique actuellement dans notre canton. La commission propose une solution intermédiaire qui semble raisonnable. Je vous encourage donc à soutenir son amendement.
Tout d’abord, je tiens à rappeler que j’étais membre de cette commission. Je suis réellement surpris par la tournure des débats. Au sein de la commission, la cheffe de département a lancé un appel à un débat apaisé sur cette question, et je pense que chacun a respecté cette intention pour garantir une discussion sereine, affirmant ainsi notre confiance envers notre Banque cantonale. C’est pourquoi je suis d’autant plus étonné de voir le débat d’aujourd’hui remettre en question le travail patient réalisé au sein de la commission, où coexistaient des opinions très divergentes, avec certains membres souhaitant maintenir le texte actuel de la loi et d’autres prônant une révision complète de la question.
Un grand effort a été fourni des deux côtés, notamment grâce à l’impulsion de notre président de commission, qui a accompli un excellent travail et a produit un rapport de qualité, permettant d’aboutir à cette proposition de compromis. Ce compromis vise à offrir une certaine souplesse tout en respectant des principes fondamentaux. Si j’avais su que le débat prendrait cette tournure, je dois avouer que je n’aurais pas investi autant d’énergie dans la recherche de cet accord avec mes collègues. Je suis même soulagé, monsieur le président, que nous ne puissions pas voter aujourd’hui, car je pense qu’il est essentiel de laisser le temps aux émotions de se calmer afin de reprendre cette discussion dans un climat de sérénité.
Il a été suggéré qu’il serait avantageux d’avoir des personnes de 50 ans au sein du Conseil d’administration. Toutefois, je tiens à rappeler qu’un Conseil d’administration de banque nécessite la présence de membres ayant une expérience managériale bancaire validée par la FINMA. Or, les professionnels de 50 ans sont souvent encore actifs dans des fonctions opérationnelles, où leurs revenus sont généralement plus élevés que ceux d’un poste au sein d’un Conseil d’administration. Si ces individus ne sont plus dans l’opérationnel, cela soulève des inquiétudes quant à leur nomination au Conseil, car leur expertise pourrait ne plus être à jour. De plus, s’ils occupent des postes opérationnels dans d’autres banques, cela pourrait créer des conflits d’intérêts, les rendant inéligibles à siéger au Conseil d’administration de la BCV.
Vous avez mentionné, monsieur Bouverat, la comparaison avec les employés de la FINMA. Les professionnels de la FINMA travaillent exclusivement dans l’opérationnel, ce qui est leur rôle principal. Si l’on veut établir une comparaison entre l’âge des membres de la FINMA, il s’agit de le faire par rapport à ceux de la direction de la BCV. Je doute que vous proposiez un amendement permettant à la direction de la BCV de travailler jusqu’à 70 ans, comme c’est le cas pour les employés de la FINMA.
Les personnes possédant une compétence managériale bancaire tendent à envisager la transition du domaine opérationnel vers le Conseil d’administration plutôt après l’âge de 60 ans. Auparavant, cela se faisait dès 62 ans, mais les choses ont évolué. Il est donc essentiel de garder ces éléments à l’esprit. Pour moi, la grande différence entre les deux propositions actuellement sur la table concerne la flexibilité. Il ne s’agit pas d’imposer des membres de 82 ans… toutefois, quand on établit une limite, cela peut s’avérer arbitraire. Par exemple, une personne de 69 ans et 11 mois pourra se présenter pour un deuxième mandat, tandis qu’une personne de 70 ans et 1 mois ne le pourra pas. Quelle est la réelle différence entre ces deux cas ? Deux mois. Le message que nous devrions envoyer est de laisser la flexibilité au Conseil d’administration, au Conseil d’Etat et à l’Assemblée générale pour élire ses membres.
Enfin, en comparant avec Zurich, il convient de rappeler que la ZKB n’est pas cotée en bourse. Son Conseil d’administration est composé de 24 membres, souvent issus de milieux politiques, conformément à la représentation du Grand Conseil. Nous ne sommes par conséquent pas du tout dans la même situation.
La FINMA possède également un Conseil d’administration et pas simplement une direction.
Retour à l'ordre du jourL’amendement de la commission est refusé par 70 voix contre 53 et 7 abstentions.
L’article 12 est accepté par 79 voix contre 42 et 9 abstentions.
Le débat est interrompu.