21_LEG_240 - EMPD sur la création d’un fonds permettant l’exercice du droit de préemption de l’Etat au sens de la loi du 10 mai 2016 sur la préservation et la promotion du parc locatif (LPPPL) (2e débat).

Séance du Grand Conseil du mardi 18 juin 2024, point 11 de l'ordre du jour

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M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

Projet de décret sur la création d’un fonds permettant l’exercice du droit de préemption de l’Etat au sens de la loi du 10 mai 2016 sur la préservation et la promotion du parc locatif (LPPPL) 

Deuxième débat

Il est passé à la discussion du projet de décret, article par article, en deuxième débat.

Art. 1. –

M. Pierre Zwahlen (VER) — Rapporteur-trice de majorité

Le deuxième débat sur l'exercice du droit de préemption cantonal en faveur de logements d'utilité publique (LUP) devrait être bref et, si possible, conduit d'une seule traite. Lors du premier débat, vous avez refusé une stratégie cantonale, maintenu le fonds de préemption à hauteur de 20 millions de francs, accepté que la Commission des finances (COFIN) se prononce sur les objets préemptés. Vous avez élargi la Commission d'évaluation à la direction en charge des finances avec un quorum à cinq membres. Vous avez exigé au moins quatre LUP sur un bienfonds préempté. Vous avez refusé d'allonger le délai à 40 jours pour insérer la COFIN dans la procédure. Vous avez accepté d'intégrer des investisseurs privés à une offre publique. Enfin, vous avez approuvé l'assainissement énergétique en dix ans des immeubles préemptés.

Voici un premier slide :

* introduire slide n°1

En tant que propriétaire d'une parcelle ainsi qu’administrateur d'une coopérative d'habitation – la deuxième du canton – et comme responsable cantonal de l’ASLOCA, je rappelle que le canton reconnaissait ce printemps plus de 2712 LUP depuis 2018 – dont plus de 1400 d'entre eux ont été reconnus entre 2020 et 2021 – selon une présentation provenant de Mme la présidente du Conseil d'Etat. 62 de ces logements sont issus d'une préemption. Cela infirme les propos tenus çà et là dans le cadre de nos débats précédents. 

Passons au deuxième slide :

* introduire slide n°2

La valeur du parc immobilier suisse a doublé en dix ans, selon une étude statistique de l'Office fédéral du logement publiée mi-mai. Cette valeur atteint près de 4000 milliards de francs. En général, pour savoir quelle est la valeur approximative dans notre canton, on divise les chiffres suisses par dix. Cela explique en partie la difficulté d'accès à la propriété ainsi que la forte proportion de locataires, d'ailleurs unique en Europe, et la difficulté à se loger à coût raisonnable. Subsidiaire à celui de la commune, le droit de préemption cantonal est l'un des outils de l'Etat pour atténuer la pénurie d'appartements. Je vous invite à entrer dans ce deuxième débat, en commençant en toute logique par son article 1.

M. Philippe Miauton (PLR) — Rapporteur-trice de minorité

Lors du premier débat, ce Grand Conseil a décidé de revenir à la somme initialement prévue par le Conseil d'Etat, a ajouté une vision d'un processus institutionnel entre le législatif et l'exécutif, a fait preuve d'ambition concernant l'assainissement des bâtiments, tout en posant des cautèles pour éviter que l'Etat, dans son rôle subsidiaire, ne s'immisce de façon prépondérante sur le marché, le but étant, selon nous, de créer des LUP. Aux yeux de la minorité, il manque encore une véritable stratégie sur laquelle s'appuyer. Il faut une vision de projet dans ce rôle subsidiaire de l'Etat qui, selon nous, doit dépasser l'aspect de quatre LUP pour que les projets pris en charge subsidiairement par le Conseil d'Etat et le canton présentent un intérêt à l'échelle cantonale. Cela va dans le sens d'un des slides présentés par mon préopinant dans la mesure où il faut agir aujourd'hui avec des projets d'envergure. La minorité déposera dès lors deux amendements, le premier à l'article 1 et le second à l'article 4.

Lors du premier débat, nous avons entendu la volonté du Grand Conseil de revenir à ce qui avait été proposé par le Conseil d'Etat. Nous avons peut-être été trop intrusifs, notamment concernant l'autonomie communale. Il nous apparaît toutefois nécessaire de s'appuyer sur un cadre légal et de le formuler comme suit à l'article 1, alinéa 2, nouveau :

« Art. 1. – Al. 2 (nouveau) : En application de l'article 10 de la loi sur le logement, le Conseil d'Etat définit les objectifs prioritaires de l'exercice de son droit de préemption cantonal. ».

M. Pierre Zwahlen (VER) — Rapporteur-trice de majorité

Cet amendement n'a pas été déposé sous cette forme en commission. Il reprend, dans son esprit, l'amendement qui avait été refusé en premier débat sur une stratégie cantonale. Il ne nous semble pas indispensable de fixer explicitement des objectifs prioritaires en matière de droit de préemption. Cela nous paraît être une cautèle supplémentaire, de manière à retarder l'exercice du droit de préemption par l'Etat. En ce sens, je me fais le porte-parole de la majorité qui s'était dégagée en commission et je vous suggère de ne pas accepter cet amendement.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

J'aimerais réagir brièvement aux propos du rapporteur de majorité, notamment par rapport au slide projeté qui reflète une réalité juridique. En revanche, le commentaire du rapporteur me paraît assez discutable, à savoir que ces LUP existaient bel et bien avant l’adoption de la LPPPL. Il s'agit d'une reconnaissance fondée sur l'entrée en vigueur de la loi, mais les LUP existent déjà depuis 20, 30 ou 40 ans. Le rapporteur de majorité doit le savoir puisqu'il siège dans des coopératives dont le parc immobilier est déjà ancien. La LPPPL n'a pas créé, au sens littéral de la loi, de nouveaux LUP. Il s’agit de LUP préexistants. La différence d'approche est fondamentale, certains estimant que lorsqu'on exerce le droit de préemption pour des LUP déjà préexistants, en les mettant finalement sous le chapeau de la nouvelle loi, on remplit déjà l'objectif poursuivi par la LPPPL. Or, tel n'est pas le cas, puisqu’on privilégie des droits acquis ainsi que des rangs de situation et qu’on oublie la fonction principale de la loi qui est de créer de nouveaux LUP. Or, notre canton a besoin urgemment de ce type de logement, en particulier les jeunes générations.

Cet amendement propose en deuxième débat une possible intervention du canton avec quatre LUP. C'est totalement dérisoire et, à mon avis, insuffisant. Je répète encore une fois que cela ne correspond pas aux travaux préparatoires de la LPPPL, tant dans le cadre des travaux entrepris lors de l'examen du projet de loi que lors des débats parlementaires, qui insistaient sur le fait que le canton ne voulait intervenir que très parcimonieusement pour développer avec la Fondation vaudoise sur le logement (FVL) – cela figure sur le site de la FVL – les modalités d'intervention du Conseil d'Etat. Il faut absolument cadrer l'intervention du Conseil d'Etat, respectivement l’utilisation du droit de préemption. Pour permettre, d’une part, aux communes qui voudraient éventuellement céder ce droit de savoir si oui ou non il est susceptible d'intéresser le Conseil d'Etat et, d’autre part, à la COFIN, lorsqu'elle examinera l'opportunité du rachat ou de l'exercice du droit de préemption, de pouvoir se déterminer en toute connaissance de cause et de vérifier la cohérence de ce qui est proposé. 

Enfin, le droit de préemption subsidiaire cantonal est une intervention forte et importante, dans une vente immobilière où deux acteurs souhaitent passer une transaction. Il est aussi intéressant de savoir si le droit de préemption subsidiaire du canton peut s’appliquer ou pas, ce qui rallonge les délais des transactions de plusieurs semaines, cas échéant. Il y a donc un intérêt du point de vue du droit privé, à savoir si le canton est intéressé ou non, plutôt que d'avoir systématiquement des propositions dont on sait à l'avance qu’elles n’intéresseront pas le canton. Il a été référé à l'article 10 de la Loi sur le logement – la base légale existe déjà – et qui concerne les possibilités d'intervention du Conseil d'Etat, ou en tout cas, sa possibilité de collaborer avec les communes, en leur fournissant des informations, des impulsions. 

Madame la conseillère d'Etat, même si cet amendement est rejeté, il sera prudent, à mon avis, de modifier l'article 8 de la Loi sur le logement, puisque ce texte législatif cadre également l'activité du Conseil d'Etat et du canton en matière de logement. Il faudra notamment ajouter une lettre d, prévoyant le droit de préemption cantonal subsidiaire. En l'état, cette base légale fait défaut, et il manque de coordination entre les deux lois, respectivement le décret qui vous est proposé. Quoi qu'il en soit, je vous invite à soutenir cet amendement. Comme l'a dit le rapporteur de minorité, cet amendement tient compte des remarques du premier débat, et se veut simplement une définition du cadre dans lequel le Conseil d'Etat souhaite exercer son droit de préemption cantonal. Je vous remercie de suivre cette proposition.

M. Sébastien Cala (SOC) —

Je prends note de la proposition d'amendement de M. Miauton, soutenue par M. Buffat. Je pourrais éventuellement vivre avec cet amendement, mais j'aimerais clarifier quelques points. Monsieur Buffat, vous nous dites vouloir cadrer le droit de préemption, afin de clarifier l'usage de ce dernier. C'était l'un des arguments en faveur d’un passage devant la COFIN, à la suite du premier débat. Si votre amendement est soutenu, il me semble que les objectifs seront clairement définis dans le texte. À ce moment, on pourrait éviter un passage devant la COFIN. En somme, nous faisons un pas vers vous, faites-en de même. 

Mme Yolanda Müller Chabloz (VER) —

Nous n’avons pas eu l'occasion de discuter de ce nouvel amendement en commission. Pour ma part, je suis un peu réservée quant à ces ajouts qui se réfèrent à plusieurs textes successifs. Je n’ai pas l’impression que l’article 10 de la Loi sur le logement constitue le siège de la matière puisqu’il indique : « Dans le cadre de son activité de coordination, l'Etat peut encourager des études ou des recherches sur des problèmes touchant au logement. ». Dans ce cadre, nous sortons un peu de la définition d'une stratégie cantonale. Je ne suis dès lors pas favorable à cet amendement qui se réfère à une autre loi et qui s’éloigne du sujet. Ne sommes-nous pas encore une fois en train d'accumuler des complications contre lesquelles certains pourront peut-être recourir par la suite ? Il me semble que la version du Conseil d'Etat convient tout à fait.

M. Philippe Jobin (UDC) —

Cinq points me paraissent assez intéressants. En acceptant cet amendement, nous pouvons accroître l'offre de logements sociaux. En outre, nous préserverions aussi la mixité sociale. Cet amendement serait aussi de nature à développer des infrastructures publiques, à réhabiliter des zones dégradées à l'époque, et à soutenir des projets d'urbanisme durable. Cet amendement vise ces cinq points afin que nous puissions aller de l'avant plus rapidement. Je vous encourage à l’accepter et à le voter massivement.

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Président-e du Conseil d’Etat

Je prends note de ce nouvel amendement qui vient à la suite de celui du premier débat. Cet amendement n'impose plus une stratégie cantonale en la matière, avec une planification des endroits où il aurait fallu créer des LUP, ce en violation de l'autonomie communale. Cette formulation est certes plus souple ; or, cet amendement est-il nécessaire ? J’ai quelques doutes. En matière d'exercice du droit de préemption, les objectifs sont déjà définis par la LPPPL : créer des LUP dans ce canton. Finalement, l'objectif visé par le Conseil d'Etat est bel et bien la mise en oeuvre de LUP qui peut passer soit par la création de nouvelles entités, soit par la pérennisation de logements d’abord non reconnus comme des LUP, et qui doivent offrir la garantie de rester des logements accessibles pendant un certain nombre d'années. L'objectif général ressort de la loi et c'est dans le cadre de l'examen de cette dernière que les objectifs ont été posés. 

En parallèle, s'agissant du droit de préemption de l'Etat, le décret précise la modélisation du système ainsi que les conditions liées à l'exercice du droit de préemption, ce qui définit aussi les cas dans lesquels ce droit doit pouvoir être utilisé par le Conseil d'Etat. Ainsi, il ne doit pas y avoir de changement d'affectation sur la parcelle concernée, il faut un minimum de LUP à construire – minimum que vous avez d'ailleurs très largement discuté au premier débat – et enfin une viabilité doit être définie dans le cadre de ce droit de préemption. Pour le reste, comme l'Etat intervient de manière subsidiaire, il agit en fonction des demandes provenant des communes sur ces conditions légales. Les communes seront tout à fait à même de savoir dans quel cas le Conseil d'État pourra utiliser son droit de préemption puisque les conditions d'exercice sont définies par le décret. 

Cela étant, si cet amendement venait à passer la rampe du plenum, alors même que le Conseil d'Etat n'y voit pas d'intérêt, la portée de ce texte serait déclamatoire, c'est-à-dire que ce n'est pas parce qu’il passerait la rampe que cela induirait un report de la possibilité pour l'Etat d'utiliser son droit de préemption. Le Conseil d'Etat devrait publier un document reprécisant les éléments que je viens d'indiquer, peut-être avec quelques éléments plus précis, mais dans tous les cas les conditions légales mises à exercice sont définies dans le décret. Contrairement à ce qu'a dit le président de commission, en cas d’objet intéressant sur le marché, cela n’empêcherait pas le Conseil d'Etat d'exercer son droit de préemption. Dans tous les cas, un document pourrait aussi préciser ces points dans les meilleurs délais. Une fois de plus, cet amendement n’est pas nécessaire, mais sa portée serait indicative et n’impliquerait pas, comme je l'ai dit, le non-exercice du droit de préemption cantonal. 

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

L’amendement de la minorité de la commission est refusé par 67 voix contre 66.

M. Philippe Jobin (UDC) —

Je demande un vote nominal.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres. 

Celles et ceux qui acceptent l’amendement de la minorité de la commission votent oui ; celles et ceux qui la refusent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, l’amendement de la minorité de la commission est accepté par 70 voix contre 68.

* insérer vote nominal

L’article 1, amendé, est accepté par 77 voix contre 49 et 11 abstentions.

Art. 2. –

M. Pierre Zwahlen (VER) — Rapporteur-trice de majorité

La majorité de la commission vous soumet l'amendement déjà déposé en premier débat pour doubler le fonds dédié à l'exercice du droit de préemption de l'Etat. Vous l'avez maintenu en premier débat à 20 millions de francs. La majorité de la commission vous propose de le porter à 40 millions de francs. En voici les raisons. Il a été indiqué en introduction que la valeur du parc immobilier a doublé en 10 ans pour une estimation dans le canton d'environ 400 milliards de francs. Un seul terrain non bâti dans l'Ouest lausannois – objet encore controversé du droit de préemption – a coûté plus de 62 millions de francs. Notre loi sur le parc locatif oblige les communes, et ce serait bien sûr le cas aussi de l'Etat, à verser un montant équivalent à la transaction entre un propriétaire de terrain et un acquéreur. Ce n'est pas le cas de la loi genevoise, mais c'est notre réalité vaudoise ; il faut en tenir compte. La valeur des prix du marché est en très forte augmentation ces dernières années. En 2019, déjà, le Conseil d'Etat avait amené une proposition d'un fonds de 20 millions de francs qui n'avait pas trouvé l'aval de la COFIN et du Grand Conseil. 

Cinq ans plus tard, les objets pouvant être préemptés ont nettement augmenté de valeur, notamment à la vente. Il s’agit d’éléments dont il faut tenir compte. Aujourd'hui, des communes telles que Le Mont, Morges, ou Paudex, à majorité bourgeoise, préemptent en faveur de LUP. Des communes moins citadines auront davantage besoin de préserver des habitantes et habitants en leur sein ainsi que des établissements, mais elles n'en auront pas toujours les moyens. Elles devront céder alors leur droit de préemption à l'Etat. C'est aussi pour cela que le montant à disposition du fonds cantonal doit être augmenté de l’avis de la majorité de la commission. Vous vous êtes prononcés à une voix d'écart il y a quelques semaines. Je souhaite pour ma part que ce résultat s'inverse aujourd'hui.

« Art. 2.– Al 1 : Le Conseil d'Etat est autorisé à ouvrir, dans la comptabilité de l'Etat, un compte spécial destiné à l'exercice du droit de préemption de l'Etat fondé sur les articles 35 et suivants LPPPL, exploité sous la forme d'un fonds dont le solde débiteur n'excède pas 2040 millions de francs. »

M. Philippe Miauton (PLR) — Rapporteur-trice de minorité

J’adopte une position totalement inverse à celle de mon voisin de majorité. Dans ce débat, nous sommes revenus à la proposition faite par le Conseil d'Etat d'une enveloppe de 20 millions de francs. Sauf erreur, lors du précédent débat, nous n'avons pas considéré ces 20 millions comme étant une enveloppe permettant un effet de levier. Les fonds propres s’élèvent à plus ou moins 20 %, ce qui permet de constituer une enveloppe globale plus importante. Le calcul est simple et, sur ces 20 millions, on peut facilement arriver à une somme globale d’approximativement 100 millions. On peut estimer qu'il faut passer de 20 à 40 millions et augmenter cette enveloppe. Il ne faut toutefois pas considérer ces 20 millions comme étant un élément fixe et qui ne présente pas des sommes supplémentaires. Nous vous encourageons dès lors à maintenir l'enveloppe à 20 millions, comme cela a été proposé par le Conseil d'Etat.

M. Hadrien Buclin (EP) —

Au nom du groupe Ensemble à Gauche et POP, je vous invite à soutenir l'augmentation du fonds à 40 millions comme acceptée par la commission. Le rapporteur de majorité l'a rappelé, nous nous trouvons dans un contexte d'augmentation très dynamique des prix des biens fonciers et immobiliers année après année. Avec 20 millions, de très nombreux biens restent totalement hors de portée d'un achat par l'Etat. J'ai quelques doutes par rapport aux arguments du rapporteur de minorité concernant la possibilité d'emprunter pour des LUP. La conclusion de tels emprunts est moins habituelle que pour des achats en marché libre. En outre, devoir contracter de grosses hypothèques a aussi un impact sur le prix des loyers ; ce n'est donc pas la solution idéale. Il faut autant que possible pouvoir acheter les biens qui sont sur le marché, premier argument en faveur de l’augmentation du fonds à 40 millions. 

La deuxième raison majeure : les locataires connaissent actuellement de grandes difficultés. Dans un contexte de pénurie de logements, tel qu'on le connaît dans plusieurs districts du canton, le marché libre a tendance à s'emballer au profit de grands propriétaires immobiliers qui utilisent la pénurie pour décider d'importantes hausses de loyers, non seulement lors de changements de locataires, mais aussi de plus en plus souvent en cours de bail. Depuis le début des années 2000, le prix des logements en location a quasiment doublé dans le canton. Inutile de préciser que les revenus des ménages n'ont pas suivi une telle évolution. Compte tenu de ces difficultés, des rendements abusifs qui sont de plus en plus souvent constatés, il nous paraît indispensable que les collectivités publiques jouent un rôle pour faire contrepoids efficace en créant des LUP. 

Dans certaines régions de Suisse alémanique, notamment dans la région zurichoise, les autorités ont fait et font toujours beaucoup plus que dans le canton de Vaud pour le développement de coopératives et d'autres formes de LUP. Nous devrions nous inspirer de ces politiques menées avec succès, notamment à Zurich, et augmenter par conséquent ce fonds à 40 millions. Avec 20 millions, de très nombreux biens ne pourront pas être acquis. A celles et ceux qui, à l'instar de M. Buffat, critiquaient l'idée qu'on puisse acheter des petites entités de 4 LUP en disant « c'est totalement marginal » : faites preuve de cohérence ! Si vous voulez des projets plus ambitieux que 4, 6 ou 8 LUP, il serait logique que vous dotiez l'Etat de moyens plus conséquents en passant le fonds à 40 millions. Pour toutes ces raisons, je vous encourage à accepter l'amendement proposé par M. Zwahlen et qui avait déjà été accepté en commission.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Je souhaite réagir aux propos tenus par notre collègue Buclin, parce que si j'applaudis des deux mains lorsqu'il parle de créer des LUP – c'est effectivement le sens de la loi – j'aimerais lui rappeler que lorsqu'on parle de coopératives, notamment zurichoises, ces dernières ne sont pas subventionnées et ne nécessitent pas l'aide de l'Etat. J'ai oublié de déclarer mes intérêts, mais vous les connaissez : je préside une fondation d'utilité publique qui gère environ 1300 LUP, lesquels ne bénéficient d'aucune aide publique ni aucun subventionnement. Dans ce cadre, il manque actuellement des terrains ainsi que des possibilités de créer et de construire des LUP. Le constat est général, que vous soyez les Retraites Populaires, un acteur privé, ou encore une fondation d'utilité publique. 

Il faut aussi constater les effets de la Loi fédérale sur l'aménagement du territoire (LAT) : des procédures de plan d’affectation communal (PACom), des redimensionnements, et des mesures provisionnelles pour geler provisoirement le territoire communal. Toutes ces mesures entravent la construction de logements, et en particulier de LUP pour les coopératives et les fondations. Vous pouvez doubler, tripler, quintupler, multiplier par dix le fonds que vous allouerez au canton, cela ne changera strictement rien, puisque finalement, ce qui manque le plus, c'est la disponibilité du terrain, et c'est là-dessus – je le dis les yeux dans les yeux à Mme la conseillère d'Etat – qu'il faut agir. Vous avez raison, monsieur Buclin, la pénurie est très forte et elle va s'accentuer encore cette année ainsi que l'année prochaine. Contrairement à ce que vous dites, la planification générale dans le marché de l'immobilier, ne s'emballe pas, elle stagne et l'offre de logements nouveaux sur le marché diminue, ce qui entraîne finalement – et sur ce point, je peux aussi vous donner raison, monsieur Buclin – une hausse des prix des loyers. 

A ceux qui disent que les loyers sont trop élevés, je leur rappelle qu'en matière de droit du bail, il existe des instruments extrêmement efficaces pour limiter les augmentations de loyers lors de changement de locataire, ce n’est toutefois pas le débat. Le débat d’aujourd'hui porte sur la création de de LUP, dans un contexte de blocage en matière de construction dans notre canton. Je vous ai rappelé lors du dernier débat, l'échec cuisant du projet des Retraites Populaires qui prévoyaient 100 LUP à Montreux, et l'échec programmé au Mont-sur-Lausanne, où c’est une cinquantaine de LUP qui vont passer à la trappe. Ici réside le problème, mesdames, messieurs, mais si nous ne nous y attaquons pas, nous pouvons nous gargariser de grands mots pour dire qu'il faudrait avoir plus de LUP, la bouche pleine de moralines, pour finalement n’arriver à aucun résultat.

M. Hadrien Buclin (EP) —

Une brève réaction aux propos de M. Buffat. Quand je parlais d'emballement, je faisais référence au prix des loyers qui se sont emballés ces dernières années sous le coup de la pénurie et d'un marché du logement dominé par de grands acteurs privés. C'est dans ce sens que je faisais référence à un emballement. En outre, lorsque M. Buffat affirme qu'en Suisse alémanique, il n'y a aucun soutien public à la construction de coopératives, c'est totalement faux. Il existe une politique de soutien, y compris financier, au développement de LUP. Je suis rapidement allé sur le site de la ville de Zurich, plus précisément sur leur programme de logement, qui rappelle la chose suivante – je vous en cite un extrait grâce au logiciel de traduction : « La promotion de la construction de logements d'utilité publique par la ville de Zurich a une tradition de plus de 100 ans. Durant cette période, la ville et ses fondations ont construit des logements abordables pour de larges couches de la population. Toutefois, c'est surtout en cédant des terrains à des prix avantageux que la ville a permis la construction d'un grand nombre de logements coopératifs. Elle a en outre soutenu des coopératives en leur accordant des prêts avantageux ou sans intérêt et des participations au capital, ce qui leur a permis de construire leurs logements avec peu de fonds propres ». Les autorités zurichoises se sont fixées à un objectif très ambitieux de 30% de LUP dans la ville. Dans cette perspective, elles y mettent des moyens beaucoup plus conséquents que ceux qui nous sont proposés aujourd'hui. Si nous souhaitons vraiment le développement d'une politique de LUP, il faut s'en donner les moyens, y compris à l'échelon cantonal. Je vous invite encore une fois à soutenir la hausse du montant à 40 millions.

Mme Rebecca Joly (VER) —

Je souhaite réagir à une déclaration du rapporteur de minorité qui m'a un peu surprise. Il suggère d'utiliser ce fonds, soit cette ligne de crédit dans la comptabilité de l'Etat, comme une sorte de levier pour aller chercher d'autres fonds étrangers et acquérir des biens selon le droit de préemption. C'est ce que j'ai compris de ses propos. Je peine à comprendre ce mécanisme sous-entendant qu’il n’est pas grave que le fonds soit limité à 20 millions, puisqu’on pourra acheter des biens plus chers, avec des emprunts extérieurs. Or, il me semble que ce n'est absolument pas ce qui est prévu par le décret qui nous est soumis. Cette ligne de 20 millions reste un plafond, et on ne pourra pas le dépasser puisque la préemption sera conditionnée au fait que, dans cette ligne, le plafond n'est pas atteint. 

Il est prévu que les biens acquis par l'Etat soient revendus et que cette ligne soit à chaque fois réapprovisionnée du montant de l'achat. Concrètement, les biens qui pourront être achetés par l'Etat n'excéderont jamais 20 millions. C'est bien là le débat : prévoir des biens pour 20 millions reste peu ambitieux. En effet, cela représente peu de biens et ce n’est pas forcément ce qu'on veut. Cela entre d’ailleurs en contradiction avec d'autres amendements de la minorité qui voulaient augmenter le nombre de LUP minimum par projet. Finalement, on ne peut pas prévoir si peu d’argent et demander de faire le maximum. Arrive un moment où ce n’est pas possible. Concrètement, 40 millions ne représente pas une somme énorme. Compte tenu di prix des biens immobiliers qui s'échangent sur le marché, ce n’est pas gigantesque. Il faut désormais savoir quelles ambitions nous voulons nous donner : de petites ou un peu plus dignes de ce canton ? Si nous optons pour cette dernière proposition, il faut voter cet amendement et passer ce fonds à 40 millions pour permettre l’acquisition de biens, qui sont aujourd'hui des biens « normaux » sur le marché du logement et de l’immobilier.

Je n’avais pas prévu de prendre la parole, je me dois toutefois de réagir aux propos de M. Buffat qui impute le manque de LUP aux citoyens, parce qu'ils s’opposent aux projets de LUP. Or, il ne suffit plus de présenter des projets de LUP pour que les gens votent en leur faveur. Dans le cadre de projets d'urbanisation, les citoyens demandent désormais de la qualité, de la réflexion et du respect pour les espaces verts. Aujourd’hui, trop de projets vont dans tous les sens. Il faut vendre autre chose aux citoyens que se limiter à leur dire « Ah ben, vous n’avez pas voté des LUP, alors c'est votre faute s'il n'y en a pas ! ». Ce discours paternaliste finit par m'agacer. Il ne faut pas prendre les gens pour plus bêtes qu'ils ne sont. Il est important de construire des LUP et de les préserver. Il s’agit de biens qui existent et qui sont transmis à une autre main. Dans le cas présent, il retourne aussi de pouvoir acquérir du patrimoine immobilier qui existe déjà, et qui peut être rénové, parfois agrandi, mais d'une manière plus intelligente que de simplement revendre un immeuble, le détruire, reconstruire, faire des appartements très chers ; la pratique actuelle 

Concrètement, ce droit de préemption est aussi utile pour le marché et les bâtiments existants, les loyers actuels qui sont encore bon marché, parce que même si l’augmentation est grimpante, il y a encore des loyers bon marché dans ce canton, mais c'est vrai, de moins en moins. Ce n'est pas en disant aux gens que parce qu'ils ont voté non à tel plan de quartier, ils n'auront plus jamais de LUP, que nous parviendrons à résoudre la crise du logement. Ce discours m'agace un peu ; nous devons réfléchir de manière plus intelligente. Des projets ont passé la rampe du peuple, et je suis tout à fait à l'aise pour parler de cela. Par exemple, dans ma commune, un projet très important a passé la rampe de la votation populaire, parce que sur tous les fronts politiques, un compromis sur le type de quartier a été trouvé. En outre, devant la population, on a défendu un quartier de qualité sur une ancienne friche industrielle, et cela demande d'autres efforts en termes d'urbanisme que simplement de mettre des LUP pour que la balance penche du bon côté. Dire aux gens : « Vous avez refusé des LUP, donc tant pis pour vous », est un discours qui commence à sérieusement à m’agacer. (Brouhaha.) J’attendais cette réaction, mais elle a tardé.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Il y a aussi des agacements qui agacent. Je laisserai les députées et députés représentant tous les partis qui se sont fortement engagés sur la commune de Montreux – non pas seulement pour créer des LUP, mais pour créer tout un plan de quartier – apprécier la qualité des propos de Mme Joly lorsque cette dernière indique « on construit tout et n'importe quoi ». Je ne suis pas suffisamment bien placé pour en juger. Il y a effectivement un ras-le-bol de la population, tous partis confondus. Il n'y a pas une majorité issue d'un parti qui s'oppose aujourd'hui viscéralement à tout projet de construction. Il y a toutefois un ras-le-bol, une saturation. Ce débat est justifié. Il faut que le Conseil d'Etat puisse aussi entendre ce genre de propos. 

Madame Joly, nous sommes peut-être tous d'accord sur le constat, mais que proposez-vous ? Une urbanisation plus intelligente ? Il y a autant d'habitants dans ce canton que de spécialistes de l'urbanisme, d'après ce que j'ai pu constater. Nous vivons une phase de saturation, et vous trouvez adéquat que soit laissé en zone verte tout un quartier qui est, a priori et en fonction de la LAT, très bien placé pour accueillir des constructions. Il faudra dès lors bien construire ailleurs et autrement, mais je ne vois clairement pas d'issue pour construire des lieux. 

Monsieur Buclin, vous avez raison, il y a un historique à Zurich, on ne va pas refaire tout le débat sur les coopératives, qui est bien plus ancien, avec un style d'habitation. J’en ai visité de ces habitats collectifs : vous pouvez être 10-15 dans un appartement avec un certain nombre d'ensembles communs. Il s’agit d’une sorte de colocation, et cela fonctionne bien dans le canton de Zurich. A ce stade, je ne suis pas convaincu que cela fonctionnerait dans le canton de Vaud. Je peux entendre l'idée d’octroyer des prêts à taux zéro ou avec des encouragements pour l'acquisition de coopératives, cela s'est fait par le passé, et cela a plutôt bien fonctionné, je vous l'accorde. Toutefois, je le répète : la construction de LUP – le marché immobilier, le marché des LUP – n'a pas besoin de l'intervention de l'Etat, elle a besoin de l'intervention étatique uniquement pour accéder à des surfaces disponibles pour créer des LUP.

M. Pierre-André Romanens (PLR) —

Un débat fort intéressant – peut-être agaçant – mais finalement, nous avons une population vaudoise qui attend des décisions importantes par rapport à cette crise du logement qu'on connaît maintenant depuis beaucoup trop longtemps. Le fait est qu’il n’existe actuellement pas de lois permettant de développer du logement pour une tranche de population qui cherche des logements à des prix supportables. Le problème que nous avons tient de ce méli-mélo mis en place entre le foncier, la construction, la promotion. Enfin, on parle un peu de tout. On pourrait d’ailleurs aussi mentionner les caisses de pension qui financent ce processus. Ce sont des éléments qui doivent être coordonnés et présenter une certaine cohérence. Le coût de construction est un problème de bas coût au niveau de ce canton. Des entreprises vont fermer ; des grandes entreprises, même nationales, ont déjà annoncé qu'elles étaient en crise, et ont demandé un sursis concordataire. Ce sont des entreprises qui emploient des milliers de personnes. Une crise s'installe aussi parce que le coût de construction est assez bas actuellement. Dans le canton de Zurich, des procédures existent par rapport au foncier : pas forcément dans notre canton. Toutefois, ce n'est pas en dotant l’Etat de plus gros moyens que davantage de LUP seront créés. Avec plus d’argent, est-ce qu'on va faire baisser les prix du foncier, est-ce qu'on va trouver des solutions avec ce système ? Je vous garantis que plus il y a d'argent, moins il y a de discussions, moins il y a d'échanges et le foncier restera toujours à un prix trop élevé. 

Par ailleurs, j'aimerais dire deux choses par rapport à nos débats d’aujourd'hui. Il est question de construction dans des zones plutôt urbaines, mais il faut savoir que nous avons mis en place des lois qui demandent d'avoir un indice de pleine terre, ce même dans des zones urbaines, qui correspond à 40 ou 50 % de la surface de la parcelle. Cela implique que la moitié de la parcelle devient inconstructible et que l’on ne peut construire que sur une demi-parcelle, ce qui devient compliqué. 

En outre, on se refuse à des hauteurs de bâtiments dépassant trois ou quatre étages, cela devient compliqué aussi. Nous sommes donc face à beaucoup de paradoxes. Or, nous voulons tous la même chose : amener du logement accessible pour toutes les bourses, mais en même temps, des contraintes nous empêchent d’aller de l’avant. Il nous faudra dès lors bien avoir des discussions sur le logement. Des Assises du logement ont été mises en place il y a quelque temps, et ces discussions ont fait partie de l’ordre du jour. Il faudra tous se mettre d'accord, tous partis confondus, pour mettre en œuvre une politique du logement cohérente et ce ne sont pas 20 millions de plus qui vont aller dans cette direction. Je vous propose d’en rester à l'amendement de 20 millions. 

M. Guy Gaudard (PLR) —

Je partage les propos de mon collègue Buffat concernant la responsabilité de la LAT face à cette pénurie de terrain qui nous permettrait de construire des LUP. Ce week-end, une fête de quartier a eu lieu à Vers-chez-les-Blanc, réunissant cette dernière, Montblesson et Chalet-à-Gobet. La majorité des gens s'inquiétaient du dézonage de certains biens fonciers et qui les privaient de revenus futurs. Ils étaient également très étonnés du fait que tous ces terrains étaient situés près d’écoles, d’arrêts de bus, ou encore proche de structures publiques disponibles dans cette zone du nord de Lausanne. 

On peut aussi se poser une autre question : la périphérie de Lausanne est composée de Bussigny, Prilly, Renens, Crissier, et j'en passe, soit où se trouvent beaucoup de bâtiments industriels, commerciaux, artisanaux, administratifs qui sont construits sur deux étages avec de beaux toits plats. Or, le seul souci rencontré est celui de la volonté de la pose de panneaux solaires. Il faudrait donc réfléchir à l’opportunité de faciliter le rehaussement de ces bâtiments industriels, commerciaux, administratifs, de deux niveaux avec de la construction légère, afin de créer des LUP accessibles à certains locataires. C'est une question à creuser et je pense qu'elle mérite qu'on s'y arrête. 

Enfin, concernant le financement variant de 20 à 40 millions : comment allons-nous financer ce fonds ? Cette information ne figure pas dans l’exposé des motifs et projet de décret. Je vous remercie de votre réponse.

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Président-e du Conseil d’Etat

Une fois de plus, au détour de cet article, nous évoquons l'ensemble de la politique du logement cantonal. Nul doute que cet objet méritera une discussion ; j'y reviendrai. Nous sommes en train de parler du droit de préemption cantonal avec les moyens financiers qui y sont alloués. Par rapport à cela, le Conseil d'Etat avait prévu un financement de l'ordre de 20 millions en ligne avec ce qui a été fixé comme objectif, étant donné que ce droit de préemption est subsidiaire au droit de préemption des communes. 

Quelques éléments sur la politique du logement, tout en sachant que nous y reviendrons certainement d'ici la fin de l'année parce qu'une fois de plus, et je l'ai déjà dit lors du premier débat, nous avons déjà eu des discussions similaires. Sur la question de la pénurie de logement, les fronts sont extrêmement tranchés avec parfois aussi un peu de dogmatisme de part et d'autre et, disons, une possibilité de discussion et de recherche de compromis qui est parfois un peu altérée entre les différents milieux politiques et acteurs, qu'il s'agisse des propriétaires, des locataires ou des bailleurs. Ce qui demeure certain, c'est qu'au-delà du constat, s'il n'y a pas une possibilité de discussion constructive autour de ces questions, nous sommes à peu près sûrs qu'il n'y aura aucune construction supplémentaire ou de mise à disposition de logements dans le canton. Lorsqu’il s'agira de discuter de cette politique du logement de manière objective et documentée, ces éléments devront être à l'esprit de chacune et de chacun, sinon il sera relativement compliqué de trouver des chemins pour faire mieux qu'aujourd'hui. 

Actuellement, la pénurie est réelle, pas seulement dans le cadre de LUP, mais aussi pour toutes sortes de logements, que ce soit en propriété et en location. Il nous manque des constructions dans le canton et cela a été clairement objectivé puisque nous devrions avoir à peu près 5000 constructions de nouveaux logements par année pour faire face, et nous sommes plutôt autour de 4000. C'est dans ce cadre qu'il y a eu des tables rondes, notamment au niveau fédéral puisque le phénomène est national, mais aussi au niveau cantonal pour étudier comment rassembler les différents acteurs autour de la table et cela va se traduire avec un plan d'action qui devrait sortir d'ici la fin de l'année et dont j'espère qu'il pourra être porté par toutes les parties prenantes, publiques et privées qui ont affaire à la question du logement. S'agissant des freins au logement, et je vous parle uniquement de ce qui ressort du terrain, on nous indique qu’il ne s’agit pas d’une question du financement. Il faut bien sûr un financement pour construire et, dans ce cadre, il y a toujours des questions à se poser, mais le financement n'est pas le problème principal. Nous avons des aides qui ressortent de la loi sur le logement, et il y a aussi toute la question de la LPPPL. 

Pour les coopératives, nous cautionnons les emprunts, mais pourquoi ne le faisons-nous pas aujourd’hui ? Parce qu'il manque de terrain, donc ce n'est pas la problématique du financement, mais celle des terrains qui sont à disposition. Pour les LUP, ce qui est déterminant, ce n'est pas le fait d'avoir une coopérative ou un acteur public ou privé, c'est bien la typologie de logement qui fait foi de par la loi. C’est indispensable d’en être conscient parce que tous les types d'acteurs privés ou publics sont aptes à créer des LUP. S'agissant de ces tables rondes avec des acteurs de terrain, si le financement n'est pas le problème principal, on déplore plutôt le fait d'avoir des terrains disponibles, non thésaurisés mais qui doivent aussi être légalisés. En outre, il y a aussi la problématique de la durée des procédures au niveau étatique, en lien avec les potentiels oppositions et recours. Par rapport à la densification, le phénomène du « pas dans mon jardin, not in my backyard » s'amplifie non pas sur des terrains empiétant sur de la zone agricole, mais bel et bien sur des terrains disponibles en vertu de la LAT.

Cela a été dit, il y a des dézonages dans le canton, mais nous avons aussi des terrains qui sont proches des services, des gares et qui sont aujourd'hui remis en question dans le cadre du zonage par les autorités ou par la population. Or, cela nous pose de graves difficultés, lorsqu’il s’agit de procédures qui peuvent durer de très longues années. Ce sont des éléments sur lesquels nous devons travailler parce que ce ras-le-bol est perceptible indépendamment de la qualité des logements qui pourraient être fournis à la population. Nous devons donc travailler sur ces éléments et cela est reconnu par l'ensemble des acteurs, de même que la question de la mise en œuvre des déséquilibres entre des intérêts publics divergents. Si vous avez d'un côté le logement, vous avez aussi la protection du bâti, des terres agricoles et les questions des surfaces d’assolement (SDA) ainsi que de la mobilité, etc. Il est parfois très compliqué de faire converger l'ensemble de ces intérêts publics. Une fois de plus, indépendamment de la LPPPL et du présent décret, ces éléments devront faire l'objet de discussions avec les acteurs concernés et respectivement dans le cadre des débats au Grand Conseil, vraisemblablement encore d'ici la fin de l'année ou l'année prochaine, à l’aune d’un plan d'action que le Conseil d'Etat souhaite mettre en œuvre ces prochains mois.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

L’amendement de la majorité de la commission est refusé par 70 voix contre 66 et 1 abstention.

M. Alexandre Démétriadès (SOC) —

Je demande un vote nominal.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres. 

Celles et ceux qui acceptent l’amendement de la majorité de la commission votent oui ; celles et ceux qui le refusent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, l’amendement de la majorité de la commission est refusé par 70 voix contre 66 et 1 abstention.

* insérer vote nominal

M. Sébastien Cala (SOC) —

A l'article 2, alinéa 3, je dépose un amendement pour un retour au texte du Conseil d'Etat. En effet, l'amendement introduit lors du premier débat incluant un passage par la COFIN constitue une cautèle supplémentaire qui rend l'usage de ce fonds quasiment impossible. Ainsi, rendre inutile ce fonds de préemption revient à aller à l'encontre de la volonté populaire et faire fi de la pénurie de logements dans notre canton – rappelons que deux tiers de la population est locataire. Ces personnes, dont beaucoup de familles, attendent des actes concrets plutôt que de simples déclarations d'intention. Ainsi, les délais étant déjà très difficiles à tenir, nous devons simplifier la procédure. La Commission d'évaluation prend une décision technique, le Conseil d'Etat prend la décision politique, nous posons le cadre, le gouvernement exécute. Nous avons imposé au Conseil d'Etat de définir des objectifs prioritaires qui cadrent la décision politique : laissons-le agir. A mon sens, cela est suffisant. Je suis d'ailleurs surpris du peu de confiance accordée à l'exécutif dans ce cadre. Par conséquent, je vous encourage à soutenir le retour au texte du Conseil d'Etat, la minorité s’y étant également engagé lors du premier débat, si le fonds restait à 20 millions – ce qui est malheureusement le cas. 

« Art. 2.– Al. 3 : Retour au texte du Conseil d'Etat. » 

M. Philippe Miauton (PLR) — Rapporteur-trice de minorité

La notion de cautèle me paraît disproportionnée dans la mesure où cet amendement ne visait qu'à respecter une procédure de l'exécutif nantie d’une validation du législatif via la Commission des finances, dont les réunions sont régulières. Fondamentalement, cette cautèle reste impartie, donc ne vient en rien alourdir le projet. Monsieur le chef de groupe, ce que le rapport de minorité avait signalé l’était au mode conditionnel. En outre, je ne m'attendais pas à ce que cette proposition de respect des procédures rencontre un tel succès. Le seuil de compétence fixé à un million justifie cet amendement. Ainsi, selon moi, il ne s’agit pas d’une cautèle. En effet, si le représentant du législatif – le député – s’avère être une cautèle aux décisions du Conseil d'Etat, il me semble que cela remet complètement en cause notre présence dans cette salle. Par conséquent, l’usage de ce terme est disproportionné. Le Grand Conseil a adopté cet amendement à une grande majorité. Que la COFIN soit saisie – toujours dans le respect du délai de 20 jours – a eu l'heur de plaire à la majorité des députés. S’il est vrai que le délai est court, cela n’en demeure pas moins un processus réalisable, tout comme cela l'est d'ailleurs dans une multitude d'autres dossiers soumis aux honorables membres de ladite commission. 

M. Julien Eggenberger (SOC) —

Tout de même, et c’est un euphémisme, je m’étonne de l'intervention du rapporteur de minorité. Comme mentionné en premier débat, ce rapport contenait des amendements qui n'ont pas été discutés en commission, ce qui paraît particulièrement original du point de vue institutionnel. Il contient une affirmation extrêmement claire : en cas de refus de l'amendement de la majorité de la commission, l’amendement demandant un passage par la COFIN serait retiré. Par conséquent, j'en déduis que la minorité de la commission s'est réunie depuis le dernier débat et a pris une décision différente. Ceci m’appelle à inviter le président du Grand Conseil à demander à la minorité de la commission d’émettre un rapport complémentaire suite à cette nouvelle décision, le rapport de minorité n'étant pas signé du seul M. Miauton. Ce dernier prend des engagements différents du rapport qu'il a signé. J’estime que cet élément devrait faire l'objet d'une communication formelle au Grand Conseil, sans quoi ce dernier ne peut pas travailler dans des conditions sérieuses.

Enfin, lors de la première lecture de l'article 5, il a été mentionné que ce passage à la COFIN n'était pas garanti, puisque la question du montant – 40 ou 20 millions – était encore en suspens, ce qui avait motivé un vote sur l'amendement à l'article 5. Or, maintenant, la minorité de la commission souhaite opter pour une version dure qui rend la possibilité d'user de ce fonds encore plus difficile. Par conséquent, je vous invite à soutenir l’amendement du député Cala. Enfin, j'invite M. Miauton à revoir son rapport de minorité tout comme j'invite le Bureau du Grand Conseil à se positionner sur les éléments susmentionnés que j’estime absolument inadmissibles. 

Mme Yolanda Müller Chabloz (VER) —

Au nom du groupe des Verts, je soutiendrai le retour à la version du Conseil d'Etat. Comme certains de mes préopinants, je suis également étonnée de cette méfiance apparente vis-à-vis du Conseil d'Etat quant à l'utilisation de ces fonds. Quand nous votons des fonds qui soutiennent les infrastructures touristiques dans le cadre de l'aide au développement économique, nous n’assistons pas à cette forme de méfiance. Quand nous soutenons des dizaines de millions pour des améliorations foncières, ce ne sont pas non plus les mêmes mécanismes qui visent à ce que chaque décision soit obligatoirement validée par la COFIN. Par conséquent, je ne comprends pas pourquoi ce fonds, particulièrement, doté de 20 millions – c’est-à-dire nettement inférieur à d'autres fonds dont la décision d'utilisation est laissée au Conseil d'Etat – serait différent. Il s’agit plutôt de deux poids deux mesures ; cela dépasse simplement la question des mécanismes financiers et des procédures, et retourne plutôt d’arguments idéologiques sous-jacents. 

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

L'architecture du projet va au-delà de ce qui a été voté en 2018. Alors, certes, les choses évoluent, et ce Grand Conseil peut défaire ce qu'il a fait. Mais, enfin, à l'époque, le Conseil d'Etat à majorité de gauche avait donné des assurances qu'on veut aujourd'hui passer sous silence en arguant du fait que les choses peuvent être perçues différemment – tempipassati. Dont acte. Il n'en demeure pas moins que les travaux préparatoires servent souvent de modalité d'interprétation de la loi, en particulier devant les tribunaux ; ils sont assez clairs sur les intentions du Conseil d'Etat. Nous avons déjà modifié de façon assez sensible l'objectif institué à l'époque par le législateur. Chers collègues de la gauche, vous refusez de le voir, mais c'est une réalité par rapport aux propos de vos propres conseillers d'Etat de l'époque.

Ensuite, nous pouvons aussi vous renvoyer la balle : il peut paraître surprenant de voir la méfiance qu'affiche le Grand Conseil vis-à-vis de la COFIN. Que diable ! Un passage devant la COFIN n'est pas une opération à ce point complexe qu'il faille absolument l'exclure. D'autant moins que dans l'architecture du décret proposé, nous voterons finalement tout à l'heure un article 4 qui, aujourd'hui, dans sa teneur, prévoit une possibilité exorbitante, je le dis, je le répète et je le maintiens, de procéder à un droit de préemption pour 4 LUP. Nous y reviendrons tout à l'heure. Le débat sera riche. Mais pour l’heure, l’ordonnancement des articles nous amène à voter ce passage à la COFIN avant de nous prononcer sur les 4, 8, 12 ou 15 LUP. Toujours est-il qu'aujourd'hui nous votons sur ce texte. Ainsi, en l'état, j'estime tout à fait fondé de maintenir la première version votée par le Grand Conseil et que le passage devant la COFIN soit maintenu. 

Quant aux propos de M. Eggenberger, il faut bien dire que c'est un peu la chouette qui dit au moineau qu'il a une grosse tête ! Lorsque vous amenez un amendement qui s'intitule dérogation à l'article 8 de la LPPPL pour supprimer le délai imparti au canton… comme opération osée, on fait difficilement mieux. Nous aurons l'occasion d'en parler tout à l'heure. Enfin, lors de débats complexes, impliquant des oppositions gauche-droite très marquées, il apparaît assez normal que les débats et les rapports de minorité/majorité évoluent ; sinon cela ne sert à rien de siéger. 

M. Philippe Miauton (PLR) — Rapporteur-trice de minorité

Monsieur Eggenberger, vous pouvez tirer sur le messager, même si je ne suis pas certain que cela soit admis par les conventions de Genève. J’ose espérer que je n’ai pas besoin de vous expliquer la nuance entre le conditionnel et le futur. Les choses auraient pu se passer différemment. Toutefois, si à chaque fois que nous assistions à un revirement de situation, il fallait réécrire le rapport de minorité, nous ne nous en sortirions guère. Ce n'est pas quelque chose qui sort du chapeau, de nulle part, cela a fait l’objet de débats. Pour rappel, en commission, cet objet a été refusé avec la voix prépondérante du président, les choses n’étaient donc pas totalement claires. Par conséquent, je peine à voir ce que vous voulez que je réécrive dans ce rapport de minorité. Compte tenu de la majorité très fine au sein de la commission, je vous le répète, je ne m'attendais pas à ce que les résultats en plénum soient aussi clairs. Ce qui rend d’ailleurs cette proposition tout à fait viable et crédible, avec des représentants dont vous faites partie au sein de la COFIN, et qui a une simple portée institutionnelle. Pour les deux poids deux mesures, je peux l'entendre, mais à mon avis nous ne sommes pas en train de créer un incroyable précédent en passant par la COFIN. 

Enfin, en termes de règles, ce conditionnel aurait pu avoir un tout petit peu plus de poids si votre groupe avait voté oui aux 20 millions : un gage de sincérité qui aurait peut-être poussé certains au sein de la minorité à revoir leur position.

Mme Rebecca Joly (VER) —

J’ai de la peine à croire ce que j'entends. Monsieur le président, j'avoue que je suis complètement abasourdie par ce débat. Vous rendez-vous compte du spectacle que nous offrons collectivement d'un Parlement qui n'arrive même pas à s'écouter, à s'entendre et à trouver un accord ? Voilà l'image que nous donnons. Pendant le premier débat, annonce est faite que l’amendement sera retiré, si en deuxième débat les 20 millions sont confirmés, puis, finalement, cette position est revue. Pour quelle raison ? Parce qu’il existe un autre article plus loin. Selon moi, cela relève du ridicule. Bien entendu, cela n’est pas fondamentalement surprenant, mais suffisamment grave pour être souligné, car cela démontre les problèmes que nous rencontrons à nous parler au sein de ce Parlement. Personnellement, cela m’attriste, sans même mentionner que vous nous reprochez un vote de conviction en arguant qu’il s’agissait d’une condition pour le retrait de votre amendement. 

En outre, nous prêter des propos qui ne nous appartiennent pas ? Cela s’avère vraiment pénible. Nul d’entre nous n’a dit que nous n’avions pas confiance en la COFIN ni en nos représentants au sein de cette dernière. Nous caricaturer de la sorte est largement ridicule. Que persistons-nous à dire ? Que selon nous, les 20 jours donnés à l'Etat pour exercer son droit de préemption constituent un délai trop court pour pouvoir consulter deux commissions différentes dont une commission institutionnelle du Grand Conseil qui ne se réunit pas à certaines périodes. Il retourne d’une question de délai, de praticabilité de la loi et du décret. 

Maintenant, si votre volonté consiste à rendre ce décret impraticable, il faut le dire. Au moins, cela serait clair et nous pourrions partir sur des bases honnêtes. Ensuite, chacun vote en son âme et conscience. Concrètement, saisir la COFIN dans le délai demandé constitue la raison pour laquelle nous nous opposons. Ce n'est ni un manque de confiance en nos représentants ni en cette commission. Cette déformation des propos est pesante à la longue et n'est pas, à mon avis, pertinente dans des débats parlementaires. 

M. Alexandre Berthoud (PLR) —

Lors du premier débat, nous avons beaucoup discuté de ce sujet. Ce texte met à disposition un montant de l'ordre de 20 millions pour le droit de préemption du canton ; il s’agit du point sur lequel nous devons nous prononcer. Nous ne sommes pas en train de remodeler la politique cantonale du logement. Contrairement à ma collègue, je considère – à titre personnel aussi – que la COFIN possède les compétences et la rapidité de travail lui permettant d'exécuter la mission qui lui serait confiée. Je vous propose de voter et de calmer un petit peu le débat. 

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Président-e du Conseil d’Etat

Effectivement, il s’agit uniquement du droit de préemption de l'Etat et non de l'ensemble de la politique du logement. Je crois que nous aurons l'occasion d'y revenir en temps utile. Pour circonscrire le débat, il s’agit uniquement de savoir si un passage à la COFIN est nécessaire. A cette question, le Conseil d'Etat a répondu que cela était inutile. Pourquoi ? Parce que les prérogatives du Grand Conseil sont préservées. En effet, si le Conseil d'Etat avait envie de garder l'objet – c’est-à-dire de ne pas le revendre – alors le Grand Conseil aurait le dernier mot. Fondamentalement, le Conseil d'Etat ne serait compétent que dans les cas d’acquisition pour revente, c’est-à-dire sans maintien de l'objet au sein de l'Etat. Cela signifie que le risque est limité, puisque l'objet en question est censé ressortir du portefeuille de l'Etat. En d’autres termes, il s’agit d’une opération « neutre » pour le canton, puisque la viabilité du projet est l’une des conditions de l'exercice du droit de préemption. 

Ensuite, quant au deuxième aspect et au délai imparti pour passer devant la COFIN, beaucoup d'objets passent devant cette dernière. Or, pour le droit de préemption, le problème réside dans le fait qu’il peut aussi s'exercer en plein été, pendant les vacances scolaires, etc. Par conséquent, cela signifie que si le passage devant la COFIN est confirmé, il s'agira pour cette dernière d'être extrêmement réactive, indépendamment de la temporalité et du moment de l'année. Cela implique aussi que cette commission soit en mesure de siéger à peu près en tout temps – même s'il faut préciser et remettre en contexte le fait que les cas de droit de préemption de l'Etat sont extrêmement limités, que cela reste un outil parmi d'autres en termes de politique du logement. En conclusion, nous vous invitons à conserver la version du Conseil d'Etat. 

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

L’amendement Sébastien Cala est refusé par 78 voix contre 59 et 1 abstention.

L’article 2 est accepté tel qu’admis en premier débat par 77 voix contre 57 et 4 abstentions.

Art. 3. – 

M. Jacques-André Haury (V'L) —

Je vous propose un amendement qui n'est pas vraiment politique et qui n’a pas été déposé lors du premier débat. Or, la portion de phrase suivante me gêne : « dont un au moins de chacune des entités qui la composent ». Cette commission comporte notamment un représentant de la Direction en charge de l'enseignement supérieur. Il nous a été expliqué que sa présence était liée aux cas où la préemption concernerait un terrain ou un bâtiment destiné à des logements estudiantins. Son absence empêcherait la commission de siéger. Et il en est de même pour l'autre – la liste se trouve à l’alinéa 1 – un représentant de la direction en charge des finances, un représentant de la direction en charge de la cohésion sociale. J’estime que cette exigence est excessive et qu'il suffirait que les deux directions nommées en premier, c'est-à-dire la Direction en charge des opérations financières qui a deux membres au sein de la commission d'évaluation et la Direction en charge du logement – aussi deux membres – aient au moins un membre présent pour que la commission siège. Ce qui amène la proposition suivante :

« Art. 3.– Al. 5 : La commission se réunit en présence d’au moins cinq membres, dont un au moins des deux premières directions citées à l’alinéa 1de chacune des entités qui la composent (…) »

Une manière d'éviter que cette commission ne puisse finalement pas siéger valablement. Il suffirait que l’un des représentants des trois dernières entités ne puisse venir pour que la commission soit incapable de siéger. Enfin, je vous invite à réfléchir à la profonde sagesse de cet amendement et à le soutenir. 

M. Julien Eggenberger (SOC) —

L’amendement de notre collègue Haury fait effectivement preuve d’une très grande sagesse, et je vous invite à le suivre. 

M. Pierre Zwahlen (VER) — Rapporteur-trice de majorité

La commission n'a pas été saisie de cet amendement. J'aimerais dire en mon nom personnel qu'elle me paraît être dans l'esprit d'origine de ce qu'avait proposé le Conseil d'Etat, une volonté d'équilibre. Il semble que les discussions avaient d'ailleurs déjà commencé lors de la précédente législature. Je pense que la proposition de notre collègue Haury a le mérite d’incarner une légère simplification, notamment pour la question du quorum. Cela permettra de gagner en efficacité et en rapidité, puisqu'il semble bien que les jours soient décidément comptés pour exercer le droit de préemption cantonale. 

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Je ne puis qu'abonder dans le sens de mes préopinants, puisqu’il s’agit d’une proposition tout à fait pertinente. Je serais même allé jusqu'à supprimer complètement la deuxième phrase, mais cela me convient très bien ainsi. On aurait pu imaginer que la commission se réunisse en présence d'au moins quatre membres, à charge pour le Conseil d'Etat de procéder comme il l'entend. 

La proposition de notre collègue Haury me convient parfaitement. A titre personnel, je vous invite à suivre cette proposition. 

Mme Graziella Schaller (V'L) —

Pour m’assurer de bien comprendre, j'aimerais simplement obtenir une petite clarification. L'amendement engendrerait l’absence de nécessité de la présence d’un membre de la direction en charge des finances, alors que cet élément a été ajouté comme condition de composition de cette commission. La commission pourrait-elle par conséquent se réunir sans représentant de la direction en charge des finances ? Cela ne vous semble-t-il pas un peu bizarre ? 

M. Jacques-André Haury (V'L) —

Effectivement, il pourrait se trouver que le représentant de la direction en charge des finances ne puisse pas participer à la séance de la commission et que néanmoins la commission siège. Mais comme, de toute manière, la COFIN se sera saisie du projet, elle aura eu l'occasion d'entendre la direction des finances. 

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

L’amendement Jacques-André Haury est accepté avec 3 avis contraires et 2 abstentions.

L’article 3, amendé, est accepté avec 2 avis contraires.

Art. 4. –

M. Philippe Miauton (PLR) — Rapporteur-trice de minorité

Je vous propose un amendement à l'article 4, alinéa 2, lettre b, pour revenir non pas à la proposition portant sur un minimum de 15 LUP, mais bel et bien à celle de la majorité de la commission avec son minimum de 8 LUP et un indice d'utilisation du sol (IUS) de 0,5. 

« Art. 4. – Al. 2, lit. b : le bien-fonds ne permet pas un minimum de 48 LUP avec un indice d’utilisation du sol (IUS) de 0,5. »

M. Pierre Zwahlen (VER) — Rapporteur-trice de majorité

Je remercie la minorité de se rallier à la majorité sur ce point et signale qu’effectivement 8 LUP avaient rencontré l'adhésion d'une majorité au sein de la commission. 

M. Didier Lohri (VER) —

Sans répéter les propos du premier débat, j’aimerais insister sur le fait que cet IUS de 0,5 demeure problématique, car il s’agit d’une limite qui ne correspond à rien ni en termes de Loi sur l’aménagement du territoire (LAT) ni par rapport aux communes dans les zones périurbaines. Cela revient quasiment à empêcher tout le canton et son arrière-pays de disposer de LUP – ce même avec 8 – parce que l'IUS de 0,5 n'existe pas. Par conséquent, il ne faut surtout pas accepter cet amendement et revenir à la version proposée par le Conseil d'Etat pour le bien de tous et pour tous les contacts intergénérationnels que peut proposer un LUP dans une commune où l’IUS n’équivaut même pas à 0,4 – tous les plans ne parlent d’ailleurs pas d'IUS. 

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Il aurait peut-être été judicieux d’inscrire « avec un indice minimum » d'utilisation du sol de 0,5. En effet, il existe un certain nombre de cas où l’IUS est supérieur. Ainsi, cela ne doit pas être bloquant au chiffre près, mais plutôt retourner d'un minimum de 0,5, puisque le but consiste à en créer le plus possible sur une surface la plus restreinte possible, répondant ainsi aux objectifs de densification de la LAT. 

Quant aux propos de notre collègue Lohri et d’une petite commune qui souhaiterait faire 4 LUP, il s’agit d’une image d’Épinal… une vue de l'esprit ! Aujourd'hui, les petites communes sont surtout confrontées à des dézonages massifs, en proie à des sacrifices importants impliquant des pertes de surface. Trouver des surfaces où potentiellement le canton préempterait à titre subsidiaire sur des surfaces qui ne prévoient que la construction de 4 LUP est à mon avis complètement illusoire. 

Quant aux 8 LUP, il s’agit d’un strict minimum, plutôt bas, une limite très inférieure relativement aux aspects générateurs de reproches exprimés relativement aux 20 millions, au passage à la COFIN. Pour laisser une empreinte, cela me paraît insuffisant, même si cela est peut-être le prix d'une certaine forme de paix politique. Si vous voulez vraiment que cet instrument incarne une certaine forme de levier, il en faudrait au moins entre 12 et 15. Cependant, il faut parfois effectivement faire preuve de compromis politique, une sorte de juste milieu – même s’il ne s’agit nullement d’un juste milieu. Nous pouvons néanmoins nous en satisfaire. 

M. Alberto Mocchi (VER) —

Je m’oppose aux propos de M. Buffat. Un certain nombre de communes, dont la mienne – je déclare mes intérêts comme syndic d'une commune d'un peu plus de 1000 habitants – possède des règlements empêchant la construction de nouveaux bâtiments avec plus de 5 ou 6 appartements. Avec ce genre de cas de figure, la possibilité de concevoir des LUP disparaîtrait. Certes, le cas de figure est relativement peu fréquent, j'en conviens. Toutefois, laisser dans la loi ce que proposait le Conseil d'Etat ne mange pas de pain. Je ne vois pas à quoi est rattachée la crainte de se retrouver avec des projets de plus petite ampleur, mais qui permettent à de petites communes de développer ce type de logements. Or, si cela est inexistant, que cela soit 4 ou 8 ne change pas grand-chose finalement. 

M. Pierre-André Romanens (PLR) —

Nous nous retrouvons au cœur du sujet. Il faudrait revenir au texte du Conseil d'Etat. Le Conseil d'Etat va remplacer la commune pour acquérir du foncier lorsque la commune ne le peut pas. L'Etat de Vaud acquiert une parcelle dans une commune – si possible avec un IUS de 0,5 pour 4 logements. Pour 4 logements LUP, un IUS à 0,5 équivaut à 70m2 en moyenne. Ainsi, 4 multiplié par 7 donnent 28 puis à nouveau multiplié par 2, c’est-à-dire 560 mde terrain dans une commune. Nous sommes en train de demander à l'Etat de Vaud de venir remplacer l'autorité de la commune pour acquérir une parcelle de 560 m2. Je vous laisse procéder à une multiplication par rapport au prix du terrain au sein de votre commune. Vous constaterez que si la commune n'a pas les moyens d'acquérir cette parcelle dans le but de construire des LUP ou de participer avec d'autres partenaires à leur construction, cela me paraît extrêmement étonnant, voire impossible. Je vois mal l’Etat entrer en matière. En outre, il est dit qu’on veut développer des LUP dans une commune. Monsieur Mocchi, c'est votre commune qui s’en chargera, pas l'Etat de Vaud ; on se trompe complètement de débat. 

Enfin, la règle idéale qui n’a pas été débattue en premier débat – un brin en commission – et qui a abouti à ces 8 LUP équivaudrait plutôt à 12. C’est un peu ennuyeux d’amener cet élément en deuxième débat, néanmoins j’aimerais m’exprimer sur cet aspect. Pourquoi 12 ? Dans un bâtiment, une entrée est égale à 6 logements ; ainsi, logiquement, deux entrées débouchent sur 12 logements. Or, si je commence à construire quelque chose de boiteux, c’est-à-dire nanti d’un nombre de logements qui n'est pas réparti en fonction d'une architecture simple, cela s’avère plus cher et plus compliqué. Ainsi, construire des LUP pour que cela soit compliqué et onéreux paraît absurde. Par conséquent, je soutiendrai 8 LUP, car il s’agit d’un seuil cohérent relativement à l'implication de l'Etat. Toutefois, je vous prie de ne pas aller au-dessous de 8, sans quoi le sens poursuivi serait perdu. Enfin, ne nous immisçons pas dans la cuisine propre aux communes.  

M. Sébastien Cala (SOC) —

Pour ma part, je rejoins les propos de M. Lohri, car selon moi un IUS à 0,5 n'est vraiment pas adapté à l'ensemble des communes, notamment pour les périurbaines. Par rapport au texte, je nourris les mêmes réflexions que M. Buffat, c’est-à-dire que l’IUS doit être de 0,5. En effet, un IUS à 0,48 ou à 0,55 constitue une barrière. Voter un texte sous cette forme paraît absurde, à moins que l’on souhaite complètement bloquer l'utilisation de ce fonds, ce qui justifierait cet amendement. En outre, il s’agit ici d’une question qui touche à l'autonomie des communes et à leur politique de logement ou plutôt à leur politique d'aménagement du territoire, notamment via les Plans d’affectation communaux (PACom). Comme M. Mocchi l’indique, dans sa commune, on ne peut pas construire d’immeubles qui accueillent plus de cinq appartements. A mon avis, il faut tout simplement oublier cet amendement et revenir au texte du Conseil d'Etat qui s’avère beaucoup plus simple et flexible et qui répondra aux besoins. Comme exprimé lors du premier débat, cela peut aussi constituer une opportunité pour des communes périurbaines d'acquérir de vieilles bâtisses villageoises pour y aménager quelques appartements avec des loyers modérés, qui peuvent profiter notamment aux jeunes du village et de la commune pour rester dans la localité ou à certaines familles de s'installer. C'est une marge de manœuvre qu’il s’agit de conserver. Je vous encourage à revenir à la version du Conseil d'Etat.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Le Parlement est un organe législatif qui s’occupe de promulguer des lois ou des décrets qui évoluent au fur et à mesure des débats. Selon moi, la façon dont est rédigé l'amendement est effectivement bloquante. Par conséquent, je propose un sous-amendement mentionnant « de 0,5, au minimum »

Quant aux interventions de MM. Cala et Mocchi, les déclarations du Conseil d'Etat de l'époque portaient sur des parcelles de 3’000 m2 et plus – ce qui était visé lorsque nous avons voté le droit de préemption subsidiaire du canton. C’est aussi de cette façon que cela a été validé par le peuple en votation populaire. Monsieur Mocchi, le cas de figure que vous avez présenté ne concernait pas le droit subsidiaire du canton. A l’évidence, les communes sont libres d’agir différemment. Selon moi, avec 8 LUP, nous trahissons déjà d’une certaine manière la loi telle qu'elle avait été conçue à l'époque. En effet, le canton va pouvoir exercer son droit sur des parcelles qui seront inférieures à ce qui fut indiqué à l'époque. Dans l'équilibre général de ce projet de décret, je peux vivre avec ça. Toutefois, on ne peut pas dire que ce qui fut fait à l'époque a été restreint. Au contraire, il me semble que nous allons plutôt largement au-delà. 

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

En effet, après discussion avec M. Miauton, le porteur de l'amendement initial, ce dernier se rallie à cette proposition. L'amendement proposé est le suivant : 

« Art. 4. – Al. 2, lettre b : le bien-fonds ne permet pas un minimum de 48 LUPavec un indice d’utilisation du sol (IUS) de 0,5, au minimum. »

M. Pierre Zwahlen (VER) — Rapporteur-trice de majorité

Je confirme que la commission a travaillé dans l’esprit d’un IUS minimal de 0,5. Je vous invite aussi à suivre cette formulation. 

M. Sébastien Humbert (V'L) —

Je déclare mes intérêts comme municipal d’une petite commune. On peut se montrer favorable ou défavorable aux LUP ou au droit de préemption. Je souhaite soutenir les arguments de mes collègues Lohri, Mocchi et Cala relatifs aux petites communes. Ainsi, voter un amendement sans bien comprendre les conséquences engendrées sur ces dernières dont l’IUS est de 0,4 au maximum ou de petites parcelles ne permettant pas de mettre en œuvre plus de 4 LUP ne me paraît pas prudent. Raison pour laquelle, je suggère que nous conservions la version du Conseil d'Etat.

M. Julien Eggenberger (SOC) —

Dans le concours des entraves pour réaliser le droit de préemption, je suggère au rapporteur de minorité d'imposer aussi la couleur du projet, sur la base par exemple des codes RAL. Nous serions au moins sûrs de ne pouvoir que très peu utiliser ce décret. Trêve de plaisanterie, je vous invite à refuser cet amendement.

M. Didier Lohri (VER) —

Nous discutons de ce point depuis un moment. Je souhaite relever deux choses. D’abord, ce qui ressort du discours de M. Romanens me surprend, parce qu'en définitive, son message tend à dire que le canton ne veut pas aider les petites communes. Depuis quelques années, pour les communes périurbaines tout a changé : tant la LAT que la péréquation. La règle exprimée par M. Buffat sur les 3000 m2 est antérieure. Or, il s’agit de se préoccuper d’une loi destinée au futur. Ainsi, une loi pour le futur doit se fonder sur un compromis. Je déposerai par conséquent à la suite de notre collègue Buffat, un amendement nanti d’un IUS de 0,4 et 4 LUP. Ainsi, le message serait clarifié pour tout le monde. A l'avenir, les communes périurbaines n’en auront peut-être pas les moyens, et elles auront intérêt à s'adresser au canton, de trouver un financement plus simple et plus rassurant pour la population plutôt qu’un fonds privé qui ne correspondra pas à ce que veut la population. On peut envisager la création d’un centre d’Etablissement vaudois d’accueil des migrants (EVAM) dans une commune, avec 4 LUP, ce pour pouvoir aider la population périurbaine en détresse. Et ne me faites pas rire avec vos calculs de mètres carrés de surface. Dans les petits villages périurbains, nous avons besoin de logements, d'intergénérationnel. 

« Art. 4. – Al. 2, lettre b : le bien-fonds ne permet pas un minimum de 4 LUP avec un indice d’utilisation du sol (IUS) de 0,4 au minimum. »

M. Pierre-André Romanens (PLR) —

Il ne s’agit pas des petites communes, mais de celles qui n'auraient pas les moyens d'acquérir du foncier et qui demandent à l'Etat de le faire. Monsieur Lohri, je vous parle d’une densification qui me paraît souhaitée de tout le monde – un tant soit peu, même dans les communes dites petites, parce que nous avons besoin de logements. Dans beaucoup de communes, l’indice de pleine terre limite la construction sur la parcelle. Or, si de surcroît, l'IUS est encore limité, cela me paraît accumuler beaucoup de cautèles pour mettre en œuvre des LUP. Pour construire un bâtiment, des logements à louer relativement accessibles ou bon marché, il faut en construire un certain nombre. Et, à ce stade, les critères sont très clairs. J’ignore si dans ce Parlement certains travaillent dans le milieu bancaire ou dans l'immobilier et comprennent que moins il y en a, plus ils seront chers – il s’agit d’une règle très simple à comprendre. Par conséquent, il n’est pas question d’une notion de plus ou moins petite commune, mais d’indices et d'augmenter un tant soit peu la proportion de logements sur une parcelle pour obtenir des logements bon marché, petites communes ou pas. Et l'indice de pleine terre constitue déjà un frein énorme. Par conséquent, arrêtons de mettre des freins, parce que la population vaudoise – comme indiqué par tous les partis aujourd'hui – qui nous écoute ou nous regarde en a assez, éprouve un grand ras-le-bol. Je déclare mes intérêts : mon métier est de construire. A cet égard, je vous garantis que construire des logements dits bon marché, sur l'arc lémanique en particulier, c'est tout bonnement mission impossible. Ainsi, lorsqu’on parle d'un indice à 8 logements avec un minima de 0,5 IUS, je vous garantis qu’il ne s’agit pas d’une densification très forte, il s’agit d’une utilisation rationnelle, juste et judicieuse de notre territoire demandée par l'entier de la population.

M. Didier Lohri (VER) —

Vous me voyez quelque peu surpris par les propos de mon collègue Romanens avec qui je m'entends du reste assez bien, de par son parcours d'ancien syndic, mais je dois avouer qu'il m'époustoufle avec ses 0,5 et 8. Car il ne s’agit pas de cela. En revanche, nous souhaiterions que le texte permette l’élaboration de 4 LUP avec un IUS à 0,4. Ce n'est absolument pas un frein. Il retourne de la possibilité offerte à l'ensemble du territoire vaudois, et en collaboration avec l'Etat, de construire des LUP dans des zones qui permettent à la population d'accéder à des appartements à loyer abordable. Vous citez l’arc lémanique ? Bien d’autres régions peuvent être mentionnées. Comme vous l’indiquez, il faut enlever ce frein, voter cet amendement et cesser ces savantes projections sur vos rentabilités financières et autres aspects économiques qui n'ont rien à voir avec une loi. 

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Au niveau de la pure technique législative, il me paraît que l'amendement Lohri constitue un amendement du texte du Conseil d'Etat, puisqu’il s’agit en l'état de l’article 4 de la version du premier débat, alinéa 2, lettre b : « le bien-fonds ne permet pas un minimum de 4 LUP » auquel serait ajouté « avec un indice d'utilisation de 0,4 ». Par conséquent, il s’agit d’un amendement du texte du Conseil d'Etat, versus l'amendement de la minorité qui, lui, a une autre envergure, puisqu'il introduit 8 LUP avec un indice d'utilisation de 0,5 au minimum. Je me permets cette suggestion pour le vote qui interviendra tout à l'heure. 

M. Sébastien Cala (SOC) —

J'aimerais revenir sur les propos tenus par M. Buffat concernant l'ancien gouvernement en place. Je vois d’un bon œil que M. Buffat s'intéresse aux propos de l'ancienne majorité de gauche et qu’il les remette régulièrement en avant ; j'espère que cela l'inspirera. J'aimerais néanmoins rappeler la nécessité qu’il remette en perspective l'ensemble de la discussion d'alors. En effet, il nous parle de surface de 3'000 m². Or, à l'époque, il s’agissait aussi d'un fonds de 100 millions et de l’ajout d’un montant au fonds pour l'acquisition de droits réels et d'immeubles de réserve (FAIR). Par conséquent, il s’agissait de 100 millions et non de 20 millions comme aujourd'hui. Ainsi, la proposition de la nouvelle majorité, me semble-t-il, est malheureusement beaucoup moins ambitieuse, plus restreinte. Dans ce cadre, il me paraît logique de parler d'acquisition de parcelles beaucoup plus petites relatives à des projets plus restreints, notamment les projets cités précédemment dans des villages ou des communes hors centres urbains. 

Enfin, la proposition de notre collègue Lohri s’avère déjà plus intéressante que celle de la minorité, bien que je trouve difficile d'intégrer la notion d'IUS au sein du texte, puisque cette notion n'existe pas dans la LPPPL qui ne mentionne que le nombre de 4 LUP. Selon moi, nous devons nous référer à la LPPPL, conserver ces 4 LUP, soit le résultat du premier débat.

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Président-e du Conseil d’Etat

Je souhaite d'abord amener certains éclaircissements relatifs au positionnement du Conseil d'Etat, puisque ce dernier a été interpellé dans ses différentes majorités égrenées au fil du temps. Et j'aimerais peut-être que M. Buffat m'écoute aussi sur ce point ! La question des 3’000 m2 constitue un élément qui a été complètement abandonné après avoir été évoqué dans les échanges de 2016. Soyons clairs : ce sont les 1’500 m2 qui ont été retenus plutôt que 3'000, nulle entourloupe du Conseil d'Etat en la matière. De façon similaire, quant aux montants et à l’évocation de 100 millions, j’aimerais préciser que la première version du Conseil d'Etat, qui date d'avant 2022 – par le traitement via le fonds FAIR – proposait bel et bien un montant de 20 millions et non pas de 100 millions. Ainsi, quelle que soit la majorité, finalement, la volonté était la suivante : 1'500 m2 et 20 millions. Vous constaterez une totale continuité de la part du gouvernement.  

Quant aux amendements – pour autant que j'arrive encore à m'y retrouver, ce qui n’est pas chose aisée – il s’agit de placer le curseur entre 4 – ce qui ressort de la loi – et 8 LUP. Il m’apparaît que le problème principal n’est pas tellement le nombre de LUP, mais plutôt le mélange entre le nombre de LUP et l'IUS. Il est plutôt compliqué de s’y retrouver puisqu’effectivement un grand nombre de LUP peut se retrouver sur un IUS plus faible. Le double calcul s’avère compliqué ; il avait d'ailleurs été évité dans le cadre du décret. Pour ces raisons, je vous invite plutôt à en rester à la version du Conseil d'Etat. 

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

L’amendement Didier Lohri, opposé à celui de la minorité de la commission, est préféré par 67 voix contre 66 et 3 abstentions. 

M. Philippe Jobin (UDC) —

Je demande un vote nominal. 

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres. 

Celles et ceux qui soutiennent l’amendement de la minorité de la commission votent oui ; celles et ceux qui préfèrent l’amendement Didier Lohri votent non. Les abstentions sont possibles. 

Au vote nominal, l’amendement Didier Lohri, opposé à celui de la minorité de la commission, est préféré par 68 voix contre 67 et 1 abstention. 

*insérer vote nominal

L'amendement Didier Lohri est refusé par 132 voix et 6 abstentions.

Lors du vote, 68 membres acceptent l'article 4 tel qu'admis en premier débat et 68 s'y opposent.

L'article 4 est accepté tel qu'admis en premier débat, le président ayant tranché en sa faveur.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Je demande un vote nominal. 

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres. 

Celles et ceux qui acceptent l'article 4 non amendé votent oui ; celles et ceux qui souhaitent son abrogation votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, l'article 4 est abrogé par 70 voix contre 68.

*insérer vote nominal

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Président-e du Conseil d’Etat

Je prends acte de ce vote qui signifie fondamentalement que l’article 4 n’existe plus. Le décret continue à vivre sa vie, mais sans fixer de conditions ou de limites au Conseil d'Etat. Par conséquent, le Conseil d'Etat aura toute latitude de faire ce qu'il veut en termes de droit de préemption. (Réactions.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

Art. 5. –

M. Julien Eggenberger (SOC) —

Je souhaite à nouveau déposer l’amendement que j’avais déposé lors du premier débat, qui vise à créer un nouvel alinéa 1bis. Il s'agit de prendre acte de la position de la majorité du Parlement et de rendre compétente la COFIN, en décision finale, de modifier le délai total. Cela permettra à la COFIN de fonctionner de manière effective. En effet, je vous rappelle que, aujourd'hui, la COFIN a un délai de 20 jours pour se réunir, entendre le propriétaire concerné, obtenir une décision du Conseil d'Etat puis rendre sa décision, et ce, durant 52 semaines par an. Tout le monde conviendra que ces quatre réunions successives ne peuvent matériellement pas se tenir en 20 jours. Dès lors, nous vous proposons une variante à 40 jours. Lors du premier débat, nous avons déjà discuté pour savoir si cela était fondé juridiquement et la présidente du Conseil d'Etat a donné une réponse extrêmement éclairante sur ce point. Il s'agit maintenant de décider si l’on souhaite que ce fonds puisse fonctionner. Ceux qui s'opposeront à cet amendement montreront qu'ils ne souhaitent pas que l'Etat puisse exercer son droit de préemption. 

« Art. 5. – Al. 1bis (nouveau) : En dérogation à l'article 34, alinéa 3 LPPPL, le délai dont il dispose pour exercer le droit de préemption est de 40 jours suivant la notification de l'annonce de la cession par la commune. »

M. Pierre Zwahlen (VER) — Rapporteur-trice de majorité

La commission ne s'est pas prononcée sur cet amendement. Elle était très équitablement partagée sur la question de saisir la COFIN. Je n'ai donc pas pris la parole au nom de la commission lorsque vous avez tranché cette question. Toutefois, il s'agit de rendre réaliste la prise de position souhaitée par la COFIN. Notre collègue Eggenberger a souligné à quel point un délai de 20 jours serait difficile à respecter. Dans les faits, les documents parviendraient souvent aux membres de la COFIN quelques jours, voire quelques heures seulement avant de devoir se prononcer. C'est tout à fait le type de proposition qui agace – ou qui met en colère – les commissaires. Je vous invite à ne pas systématiser la colère des futurs membres de la COFIN qui seront appelés à une décision de préemption. La seule décision raisonnable est de lâcher un peu de lest. Les juristes de l'Etat ont agréé la formulation portée par Julien Eggenberger. Elle simplifiera un peu la tâche du gouvernement dans un contexte compliqué. Il serait tout à fait raisonnable d'adopter l'amendement proposé. 

M. Philippe Miauton (PLR) — Rapporteur-trice de minorité

Je ne m'exprime pas au nom de la minorité, vu que ce point ne figurait pas dans le rapport, mais en mon nom personnel. C'est une dérogation sur un article qui figure dans la LPPPL et qui stipule précisément que cette durée est de 20 jours. Dès lors, vous demandez une dérogation sur un objet spécifique à cet élément. Il ne faudrait donc pas faire une dérogation, mais plutôt une motion sur la loi en question. Je comprends la démarche, mais je ne comprends pas la méthode. 

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Cet amendement est erroné, car on ne parle pas d'une dérogation, mais de la suppression d’un article de la LPPPL, puisque cet article stipule clairement que « L'Etat doit alors exercer son droit dans les vingt jours suivant la notification de l'annonce de la cession. » Une dérogation est une exception à une règle générale. Or, en l'espèce, on supprime purement et simplement la règle générale, puisque la loi est parfaitement claire quant au système mis en place et voté par le peuple – à savoir un délai de 20 jours. La seule procédure éventuellement recevable serait de déposer une motion pour demander la suppression de l'article 34, alinéa 3, de la LPPPL. Or, ce n'est pas le cas, et il ne s’agit en tout cas pas d’une dérogation. 

Le texte devrait plutôt dire « l'article 34, alinéa 3, de la LPPPL est modifié en ce sens que le délai pour exercer le droit de préemption est porté à 40 jours ». C'est ce que l'on devrait théoriquement voter, mais ce n'est pas ce qui nous est proposé. Je ne sais pas si la Commission de rédaction du Grand Conseil, dont j'ai l'insigne honneur d'être un des deux membres, a les prérogatives pour dire quoi que ce soit à ce sujet, mais au niveau rédactionnel, cette proposition ne veut strictement rien dire. 

La semaine dernière, on nous a parlé d'un avis de droit fantôme qui nous disait : « ce que le Grand Conseil a fait, le Grand Conseil peut le défaire » ; c’est évident, mais on ne peut pas le faire n'importe comment. Ce terme de dérogation est selon moi clairement irrecevable. Si on ne veut pas mettre en péril ce qu'on a péniblement réussi à voter, y compris ce qui sera voté au troisième débat, il ne faut pas voter cette espèce « d'ornithorynque politique et juridique et de dérogation ». 

Je vous invite à rejeter fermement cet amendement. Je vous invite également à faire preuve d'un peu de sérieux législatif. Nous sommes l'organe délibérant et légiférant de ce canton. Nous ne pouvons pas adopter n'importe quel texte ou prétexte ni modifier la loi au dernier moment. 

M. Julien Eggenberger (SOC) —

Je ne vais pas répondre aux métaphores zoologiques de M. Buffat... Toutefois, j’aimerais revenir sur mes propos. J'ai dit quelque chose d'erroné quand j'ai parlé de quatre étapes en 20 jours, puisqu’il y en a en réalité cinq. En effet, l'article 4 prévoit que sont entendus le propriétaire, mais aussi le tiers acquéreur. Dès lors, en 20 jours, il faut que la commission d'experts entende le propriétaire, le tiers acquéreur, puis qu’il y ait une décision du Conseil d'Etat et de la Commission des Finances. Or, pour une procédure plus simple, la LPPPL donne 40 jours aux communes. Je vous invite donc à soutenir cet amendement et à augmenter ce délai à 40 jours. 

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Président-e du Conseil d’Etat

J’ai déjà dit ce que je pensais, en termes de délai, du passage à la COFIN. Pour les services de l’Etat, cette possibilité terminologique est tout à fait légale, d'après les examens qui sont faits à l'interne. Je vous laisse vous prononcer sur cet amendement, mais il est vrai que le délai de 20 jours sera compliqué à tenir pour la COFIN.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

L’amendement Julien Eggenberger est refusé par 70 voix contre 66 et 2 abstentions. 

M. Sébastien Cala (SOC) —

Je demande un vote nominal.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui soutiennent l’amendement Julien Eggenberger votent oui ; celles et ceux qui le refusent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, l’amendement Julien Eggenberger est refusé par 72 voix contre 64 et 3 abstentions.

*Insérer vote nominal

L’article 5 tel qu'admis en premier débat est accepté avec quelques avis contraires et abstentions.

Art. 6. –

M. Pierre Zwahlen (VER) — Rapporteur-trice de majorité

Je vous propose de revenir au texte du Conseil d’Etat et de renoncer à l’appel d’offres public à disposition d’investisseurs privés et publics. Cette formule n’est pas dans l’esprit de ce qu’avait proposé le Gouvernement ; ce dernier souhaitait une adjudication publique, conformément à l’article 35 de la LPPPL. Il souhaitait également, en cas de revente du bienfonds acquis ou s’il devait être grevé d’un droit de superficie, qu’un décret spécifique soit soumis au Grand Conseil. Cette manière de faire préserve également les droits du Grand Conseil, ce qui n’est pas le cas de l’amendement retenu lors du premier débat. Je vous invite donc à revenir au texte original proposé par le Conseil d’Etat.

« Art. 6. – Retour au texte du Conseil d’Etat. »

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

L’amendement demande donc de revenir au texte de l’article 6, alinéa 2, proposé par le Conseil d’Etat et de supprimer l’alinéa 3 qui avait été voté en premier débat.

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Président-e du Conseil d’Etat

Le terme « adjudication publique » est plus souple que ce qui avait été souhaité par d’aucuns avec ce nouveau texte. A titre personnel, je préfère donc la version du Conseil d’Etat et vous invite à soutenir l’amendement de la majorité de la commission.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

L’amendement de la majorité de la commission est refusé par 71 voix contre 60 et 3 abstentions.

L’article 6 est accepté tel qu'admis en premier débat par 76 voix contre 57 et 3 abstentions.

Les articles 7 et 8, formule d’exécution, sont acceptés tels qu'admis en premier débat.

Le projet de loi est adopté en deuxième débat.

Le troisième débat interviendra ultérieurement.

 

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