21_POS_18 - Postulat Pierre Fonjallaz et consorts - Vers une viticulture durable en développant les cépages résistants.
Séance du Grand Conseil du mardi 21 décembre 2021, point 16 de l'ordre du jour
Texte déposé
En matière de cépages de résistants, un certain nombre d’essais sont en cours au niveau des stations fédérales, du canton de Vaud et de certains praticiens. Désormais pour évoluer vers une viticulture durable dans le canton de Vaud, il est nécessaire de renforcer les démarches existantes et le postulat poursuit ce but.
-Les vins des cépages piwi (pilzwiderstandsfähig =résistants aux champignons) commercialisés à partir de 1960 sont excellents. Dégustés à l'aveugle, ils sont placés à Bordeaux, en Alsace, en Espagne ou en Italie, alors qu'ils sont produits à Spiez, à Uesslingen à Wallenstadt t dans le canton de Vaud.
-Le bilan écologique des piwi est meilleur que celui des cépages traditionnels. Avec 0 à 4 interventions fongicides par saison au lieu de 6 à 10 en culture intégrée ou en bio, on réduit le tassement des sols, on diminue les émissions de CO2, on diminue les résidus de produits dans les sols, les eaux et les vins.
-Ces cépages peuvent se cultiver plus facilement sans l’utilisation du cuivre, classé en métal lourd et non favorables à certains organismes du sol. Ce qui pose problème même en culture biologique qui cherche à le remplacer.
-Il serait souhaitable dans le sens d’une viticulture durable, d’accompagner la culture de ces cépages résistants avec des pratiques viticole sans produits de synthèses, sans désherbants chimiques ni d’engrais minéraux, préservant ainsi les sols sur le long terme.
-Le personnel viticole, patron, patronne, y compris, ainsi que leurs familles ne sont plus sur exposés aux risques chimiques et aux dégâts sur leurs santé constatés depuis longtemps.
-Les cépages piwi sont mieux adaptés aux changements climatiques que les variétés européennes traditionnelles. Le déplacement des précipitations sur la période de maturation du raisin entraîne des traitements supplémentaires sur les variétés traditionnelles, que les piwis rendent inutiles par leurs résistances aux maladies.
Une liste de cépages résistants sont déjà répertoriés dans les cépages ayant droit à l'AOC.
Les Cépages résistants suivants ne sont pas encore à l'AOC, respectivement Sauvignon Soyhières, Sauvignac, Souvignier gris, pour les cépages blancs et cal 1-15, cal 1-28, Monarch, Cabernet carbon, Cabernet Jura, pour les rouges sont pour la plupart cultivés sur le plus grand domaine bio de Suisse, qui se trouve à Uesslingen dans le canton de Thurgovie. Ils peuvent être intéressant également pour le vignoble vaudois.
Pour les raisons exposées ci-dessus, il est important d’encourager et de promouvoir la culture des cépages résistants en pays de Vaud :
-dans les stations de recherches du canton (Cela permettra aussi aux apprentis vigneron.ne.s d’étudier les cépages en pratiques)
-dans ses différents domaines du canton (Hospices cantonaux sis dans le Chablais vaudois et sur le domaine de Marcelin)
-d’encourager la culture de ces cépages auprès de acteurs de la viticulture vaudoise, en particulier au travers des séances de formations et de vulgarisation avec les acteurs de la branche.
-d’accompagner les vignerons avec des conseils techniques pendant les premières années de plantations
- d’intensifier la recherche, déjà en cours, de nouveaux cépages résistants adaptés à nos conditions.
Pour les raisons exposées ci-dessus, le postulant a l’honneur de demander au Conseil d’Etat, un rapport proposant des pistes de mise en œuvre et une concrétisation des propositions susmentionnées.
Conclusion
Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures
Liste exhaustive des cosignataires
Signataire | Parti |
---|---|
Felix Stürner | VER |
Olivier Epars | |
Alice Genoud | VER |
Laurent Miéville | V'L |
Nathalie Jaccard | VER |
Monique Ryf | SOC |
Muriel Thalmann | SOC |
Anne Baehler Bech | |
Circé Fuchs | V'L |
Sabine Glauser Krug | VER |
David Raedler | VER |
Maurice Mischler | |
Jean-François Chapuisat | V'L |
Blaise Vionnet | V'L |
Léonard Studer | |
Cloé Pointet | V'L |
Cendrine Cachemaille | SOC |
Claude-Alain Gebhard | V'L |
Vincent Keller | EP |
Didier Lohri | VER |
Vassilis Venizelos | |
Rebecca Joly | VER |
Jean-Christophe Birchler | V'L |
Documents
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourLa commission examinant le « Postulat Pierre Fonjallaz et consorts – Vers une viticulture durable en développant les cépages résistants » s’est réunie le 18 juin dernier, par visioconférence. A l’exception de votre serviteur, tous les commissaires étaient en lien direct ou indirect avec le monde de la viticulture et étaient donc particulièrement éclairés pour traiter ce postulat. M. Leuba ayant dû s’excuser pour cette commission, il était représenté par des membres de son administration. En matière de cépages résistants, un certain nombre d’essais sont en cours et le postulat vise à renforcer ces démarches.
Pour le postulant, les cépages résistants représentent de nombreux avantages : ils ont ainsi parfois plus de 50 ans et, pour la plupart, leurs facteurs de résistance sont stables. Un certain nombre de ces cépages sont par ailleurs déjà présents sur la liste cantonale des appellations d’origine contrôlée (AOC). Ces cépages connaissent du succès en Allemagne et en Autriche et se développent largement en Suisse alémanique, particulièrement avec le mouvement de la production biologique. Pour le postulant, promouvoir et encourager ces cépages dans le pays de Vaud est donc important. Pour ce faire, le Canton pourrait, par exemple, revoir la liste des AOC, planter ces cépages pour les observer, les intégrer dans la formation, soutenir la recherche, encourager la plantation de ces cépages et accompagner les vigneronnes et vignerons.
Du point de vue de notre administration, dans le contexte actuel de recherche de durabilité, de protection des sols et du climat, ce postulat est le bienvenu. La recherche a démontré que certains cépages résistants permettent de produire du raisin sans produits de synthèse, mais malheureusement ils ne donnent pas des vins appréciés du grand public. Lors de la préparation de la séance de commission, le conseiller d’Etat a pu exprimer toutefois quelques réserves sur le point du postulat relatif à l’encouragement, à l’incitation à planter des cépages résistants, car l’Etat ne peut pas être jugé responsable d’un éventuel échec tant au niveau de la production que de la vente des vins issus de ces cépages.
L’ensemble de la commission reconnaît l’intérêt du postulat et partage les préoccupations du postulant, entre autres face aux changements climatiques. Les commissaires soulignent l’importance de ne pas opposer viticulture traditionnelle et viticulture biologique. La thématique du postulat n’est pas l’usage des pesticides, mais la recherche de cultures alternatives pouvant faire face aux changements climatiques. Enfin, la commission relève l’importance de garantir aux viticulteurs une liberté totale dans le choix des plantations, point que le postulat ne met aucunement en péril. En conclusion, la commission recommande à l’unanimité de prendre en considération ce postulat et de le renvoyer au Conseil d’Etat.
La discussion est ouverte.
En tant que vigneron, mes intérêts sont en Lavaux. Ce postulat tombe au moment où l’on dresse le bilan de cette année viticole particulièrement difficile. Les importantes pluies de mai-juin-juillet ont nécessité beaucoup plus de traitements que lors d’une année normale. Le gel du printemps et la grêle se sont ajoutés et ont eu pour conséquence des pertes de récolte importantes dans plusieurs régions viticoles vaudoises. Nous espérons d’ailleurs toutes et tous que cette année extrême restera exceptionnelle, mais qui sait, changements climatiques obligent. En considérant l’évolution climatique et en additionnant les économies de carbone que l’on doit faire ainsi que les efforts nécessaires de durabilité, nous arrivons presque à une équation en direction des cépages résistants comme une bonne solution pour le futur des vignobles vaudois.
L’encépagement du canton a beaucoup évolué ces dernières décennies. Malgré une très longue tradition du Chasselas et du Pinot noir, de nombreux autres cépages sont venus compléter la gamme des vins proposés par les vignerons. Malheureusement, très peu de ces cépages ont une résistance aux trois maladies. J’en profite pour vous transmettre quelques informations sur la situation de ces dix dernières années. Depuis 1999, les années à très forte pression de maladies fongiques se sont multipliées et rapprochées dans le temps. Les années 1999, 2001, 2016 et 2021 ont été des années record en termes d’infection au mildiou. L’année 2016 a été la pire année en termes de virulence pour le milieu depuis 1952. 2021 a été encore pire avec 14 jours d’infection maximale sur les 17 premiers jours de juillet. 2010, 2011 et 2012 ont été des années record pour la virulence de l’oïdium, avec 2019 également. Pour la première fois depuis que les vignerons ont des produits de traitement éprouvés contre le mildiou, ils n’ont pas pu éviter des pertes de récolte entrainant des dégâts de l’ordre de 50 % dans l’Est vaudois. Nous subissons, cette année, des pertes totales sur certaines parcelles de Chasselas, Diolinoir, Merlot et Pinot noir et sur des surfaces conséquentes, et ce, en dépit d’applications fongiques à la cadence de deux fois par semaine. Les vignerons vont se trouver dans une situation difficile et auront besoin d’aide, pour certains en tout cas.
Les cépages résistants aux maladies fongiques de la vigne n’ont pas souffert de la pression du mildiou, au rythme d’infections quotidiennes en juillet de cette année. Trois applications de fongicide autour de la floraison de la vigne ont suffi à les protéger. Les cépages résistants permettent de réduire de 70 % les traitements fongiques sur le mildiou et l’oïdium, dans les conditions du vignoble vaudois, avec comme avantages des réductions des intrants de synthèse et leur pollution potentielle, mais aussi des gaz à effets de serre, du tassement des sols, du dégagement de temps supplémentaire pour la promotion des vins et l’accomplissement d’autres travaux viticoles, notamment une gestion plus écologique de l’entretien des sols. La recherche est en cours, de nombreux cépages résistants existent déjà et c’est sur ce dernier point que j’aimerais insister. Il est nécessaire de dresser un bilan de l’existant afin de répertorier ce qui pourrait être intéressant pour les vignerons vaudois.
Il est important d’effectuer ce travail et de ne pas se limiter à la collaboration avec Agroscope, qui entretient un lien fort avec le vignoble. Il existe de nombreux cépages résistants qui ont du succès en Europe, qu’ils viennent de sélectionneurs privés ou d’autres stations de recherche allemandes, autrichiennes, françaises ou italiennes. Dans ce contexte, on peut citer un célèbre sélectionneur suisse, M. Valentin Blattner, créateur du Cabernet Jura – d’ailleurs dans la liste des AOC – qui collabore avec d’autres sélectionneurs depuis 1985 déjà. Il est temps que les vignerons vaudois aient une meilleure connaissance de ces cépages. M. Raphaël Piuz, à Hermance, qui a planté quelque soixante de ces cépages, illustre bien ce travail qui n’est pas effectué par nos institutions et pris en charge par les vignerons. J’insiste sur ce point qui se place en amont des autres cités dans le postulat dans le but d’éviter les querelles de clocher. Le but est de pouvoir s’adapter rapidement au changement climatique, que le canton y participe le plus activement possible, et ce, au service de la viticulture de notre canton et de son avenir. Au nom des Verts, je vous invite à prendre en considération ce postulat et de le renvoyer au Conseil d’Etat.
L’année particulière que la viticulture a subie montre bien la difficulté de la lutte contre les maladies. Le mildiou a occasionné de grands dégâts dans certaines parcelles, cela a été dit, et seuls des traitements efficaces et nombreux ont permis de sauver les récoltes. Je déclare mes intérêts : je suis un de ces viticulteurs qui a dû beaucoup traiter pour pouvoir ensuite récolter un raisin de qualité, exempt de mildiou. On estime que la récolte sera la plus petite de ces trente dernières années et que la perte de récolte dans le Canton de Vaud se situera probablement entre 30 à 50 %. Si l’entier de la surface viticole vaudoise était planté avec des cépages résistants, la situation serait différente et les pertes bien moindres. Toutefois, pour y arriver, il faudrait abandonner nos cépages traditionnels et il s’agira de la difficulté principale. Si, dans les cépages rouges, le consommateur pourrait encore se laisser convaincre d’abandonner nos célèbres Pinot, Gamay, Gamaret, Merlot et autres, en revanche, le jour où il abandonnera notre cépage roi qui fait partie de nos traditions, celui dont on parle dans le patrimoine immatériel du canton, soit le Chasselas, est encore bien loin. A moins de lui enlever le gène de la sensibilité au mildiou et l’oïdium, le Chasselas devra continuer à être traité et ce n’est pas pour le plaisir des viticulteurs. Le postulat de notre collègue est une incitation à la recherche pour faire évoluer la liste des cépages avec de nouvelles espèces résistantes. Le secteur privé s’y emploie déjà, mais le canton peut effectivement jouer un rôle de pilote et d’incitateur. Membre de la commission, j’ai voté pour l’acceptation de ce postulat et je vous propose d’en faire de même.
Je déclare mes intérêts : je suis municipale d’une commune viticole. Nous avons tout à l’heure soutenu l’agriculture ; soutenons donc désormais la recherche dans la viticulture, afin de lui permettre de faire face aux défis de l’avenir liés notamment aux modifications climatiques. Au nom du groupe socialiste, je vous invite donc à soutenir ce postulat.
Ce postulat illustre combien la recherche agronomique est importante ; elle recèle probablement des mesures qui seront à même d’affronter les changements climatiques auxquels nous et le secteur primaire sommes confrontés. Il illustre également la pertinence du combat que nous avons mené pour conserver le site de Changins et les montants que nous allouons notamment à la recherche agronomique et à la politique agricole au sens large. Je suis personnellement convaincu que cette recherche constitue l’une des solutions que nous devrons mettre en place si l’on veut conserver une production viticole et agricole qui soit réelle ainsi que productive, tout en pouvant affronter les changements climatiques. M. Neyroud a expliqué les difficultés de l’année viticole qui vient de s’écouler et la nécessité de traiter. Celles et ceux qui ont vanté – pas dans cet hémicycle, mais ailleurs – les bienfaits du bio doivent percevoir le fait que si tout le vignoble avait été en bio, nous aurions probablement plus grand-chose, y compris pour fêter Noël.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
Le Grand Conseil prend le postulat en considération avec quelques abstentions.