23_INT_181 - Interpellation Jacques-André Haury et consorts au nom du groupe vert'libéral - Contradiction 5 : revaloriser la formation professionnelle tout en appliquant une ordonnance qui dévalorise les apprentis. (Développement).
Séance du Grand Conseil du mardi 5 décembre 2023, point 4 de l'ordre du jour
Texte déposé
Vivons heureux et pleins de contradictions !
« On a un bien joli canton :
Des veaux, des vaches, des moutons »
et même de belles contradictions
Voici, le vers que l’on pourrait ajouter à la Venoge de Jean Villars-Gilles.
En effet, nous constatons que le Canton de Vaud vit (consciemment, ou non) en pleines contradictions sur plusieurs questions. Dès lors, nous nous permettrons de les relever et de les notifier au Gouvernement lorsqu’il nous semble que les contradictions sont telles qu’elles méritent d’être interrogées, diminuées voire abolies.
Contradiction 5 : revaloriser la formation professionnelle tout en appliquant une ordonnance qui dévalorise les apprentis.
La valorisation de la formation professionnelle est une priorité du Conseil d’Etat inscrite dans son programme de législature. Dans ce but, le Département de l’enseignement et de la formation professionnelle (DEF) a établi un plan d’action en 16 mesures, visant à renforcer les liens entre l’école et la formation professionnelle.
Dans le même temps, la Confédération a édicté diverses ordonnances, et notamment une sur la « Formation professionnelle initiale de gestionnaire du commerce de détail avec certificat fédéral de capacité CFC » qui définit les objectifs et les exigences de la formation en terme de compétences opérationnelles :
Art. 5 Compétences opérationnelles
1 La formation comprend les compétences opérationnelles ci-après dans les domaines de compétences opérationnelles suivants:
a. gestion des relations avec les clients:
1. créer le premier contact avec le client du commerce de détail,
2. analyser le besoin du client du commerce de détail et présenter des solutions,
3. conclure l’entretien de vente et assurer le suivi,
4. traiter les demandes des clients du commerce de détail sur différents canaux,
5. construire et entretenir les relations avec les clients pour le commerce de détail sur divers canaux,
6. communiquer avec les clients dans des situations exigeantes du commerce de détail;
b. gestion et présentation des produits et prestations:
1. mettre en œuvre les tâches du processus de gestion de marchandises,
2. présenter les produits et prestations pour le commerce de détail en étant sensible aux besoins des clients,
3. traiter les chiffres-clés de l’entreprise, les données relatives aux clients et les informations;
c. acquisition, intégration et développement des connaissances sur les produits et prestations:
1. s’informer sur les produits et prestations proposés dans la branche,
2. élaborer des produits et fournir des prestations de la branche en étant sensible aux besoins des clients,
3. identifier les dernières évolutions dans la branche et les intégrer dans le quotidien professionnel;
d. interactions au sein de l’entreprise et dans la branche:
1. assurer le flux des informations du commerce de détail sur tous les canaux,
2. organiser la collaboration avec différentes équipes du commerce de détail,
3. identifier les évolutions opérationnelles du commerce de détail et assumer de nouvelles tâches,
4. organiser et coordonner ses propres tâches du commerce de détail,
5. déléguer une partie des tâches dans son domaine de responsabilité;
e. conception et réalisation d’expériences d’achat:
1. mener des entretiens de vente exigeants avec des clients du commerce de détail,
2. organiser des expériences d’achat relatives à des produits et des prestations du commerce de détail,
3. contribuer à l’organisation d’événements pour les clients ou de ventes promotionnelles;
f. gestion de magasins en ligne:
1. gérer les données des articles pour le magasin en ligne,
2. analyser les données relatives aux ventes en ligne et au comportement des clients,
3. gérer la présentation des produits et les processus du magasin en ligne.
En découvrant cette liste d’objectifs, on remarquera à quel point la formation visée est réduite à des compétences purement techniques, sans aucune ouverture plus large à un engagement dans la société. On y rechercherait en vain des compétences en matière de maîtrise de la langue française (ou d’une autre langue) ou des mathématiques, par exemple. Sans forcer beaucoup le trait, on peut considérer que ces objectifs sont ceux qu’on fixerait à un robot de vente… Nous n’avons pas étudié les autres ordonnances sur la formation professionnelle, mais tout porte à croire que la tendance soit la même.
Et pourtant la loi fédérale sur la formation professionnelle précise à son article 9 al. 1 :
« Les prescriptions sur la formation professionnelle garantissent la plus grande perméabilité possible au sein de la formation professionnelle ainsi qu’entre la formation professionnelle et les autres secteurs du système éducatif. »
Former des « robots de vente » est à l’évidence contraire à cet article de loi ; à nos yeux, c’est exprimer du mépris pour les apprentis concernés. Tout le contraire d’une revalorisation de la profession et en contradiction avec les affirmations du Conseil d’Etat qui dit vouloir promouvoir la formation professionnelle. D’autant plus que ce type de formation en « robots » est totalement inadapté au marché du travail dans lequel environ 50% des détenteurs d’un CFC sont appelés à changer de profession au cours de leur carrière. Sans oublier que ce "formatage" ne prépare pas à une éventuelle entrée en HES, l'une des perspectives que l'on offre souvent pour mettre en valeur la filière de la formation professionnelle.
Nous nous permettons dès lors de poser au Conseil d’Etat les questions suivantes :
- Le Conseil d’Etat a-t-il fait observer au Conseil fédéral que son ordonnance s’opposait à sa volonté de revaloriser les formations professionnelles ?
- Le Conseil d’Etat impose-t-il aux responsables de la formation professionnelle concernés le respect strict les objectifs opérationnels cités ci-dessus ?
Conclusion
Souhaite développer
Liste exhaustive des cosignataires
Signataire | Parti |
---|---|
Valérie Zonca | VER |
Oscar Cherbuin | V'L |
Denis Dumartheray | UDC |
Nicolas Bolay | UDC |
Felix Stürner | VER |
Julien Eggenberger | SOC |
Aurélien Demaurex | V'L |
David Vogel | V'L |
Cédric Weissert | UDC |
Blaise Vionnet | V'L |
Michael Wyssa | PLR |
Guy Gaudard | PLR |
Documents
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourLe Conseil d’Etat dans son ensemble ainsi que, je crois, l’ensemble des membres de ce Parlement, souhaitent la revalorisation de la formation professionnelle. Or, la Confédération a édicté au moins une ordonnance dont j’ai cité l’essentiel dans le développement de mon interpellation, qui donne pour la formation de ce qu’on appellerait les vendeurs, mais qui portent maintenant un autre titre, une liste d’objectifs à atteindre épouvantablement réducteurs. On en fait des robots de vente alors que la loi sur la formation professionnelle doit viser au contraire à former des gens qui pourraient être polyvalents et peut-être un jour entrer dans une HES. Je demande au Conseil d’Etat s’il applique cette ordonnance et s’il a indiqué à la Confédération à quel point cette ordonnance était malvenue.
Retour à l'ordre du jourL’interpellation est renvoyée au Conseil d’Etat qui y répondra dans un délai de trois mois.