25_POS_9 - Postulat David Vogel et consorts - De l'utilité - ou non - de boycotter des institutions ou pays qui mènent des guerres meurtrières, participent à celles-ci ou bafouent les droits humains ?.
Séance du Grand Conseil du mardi 4 février 2025, point 2.12 de l'ordre du jour
Texte déposé
Depuis quelques mois, la question du boycott d’universités ou institutions soutenant idéologiquement ou pratiquement des guerres en cours se pose. Par manque de vision d’ensemble, ou quelque oubli malheureux, seul Israël semble être concerné par ces demandes de boycott[1]. Or, cette problématique se pose de manière beaucoup plus large, au risque d’être accusé – à tort – de se focaliser sur un seul pays.
Dès lors, nous souhaitons que le Conseil d’Etat se positionne face à cette question. Puisque le soutien à une guerre – ou le fait de mener directement une guerre – est souvent invoqué, nous nous permettons de rappeler au Conseil d’Etat les faits suivants :
En République Démocratique du Congo (depuis 1998), un conflit oppose les forces gouvernementales congolaises, forces rwandaises et ougandaises.
Divers crimes de guerre ont été commis (meurtres, viols massifs, pillages et recrutements d'enfants soldats). Là aussi, les estimations divergent (puisqu’on évoque de 200'000 à 5,4 millions de morts) suivant que l’on compte les famines découlant du conflit ou si on ne compte « que » les massacres (et encore faut-il s’accorder sur les seuls massacres).
Voici la liste des Etats ayant participé à cette coalition meurtrière :
République Démocratique du Congo, Angola, Namibie, Zimbabwe, Tchad, Ouganda, Rwanda, Burundi.[2]
Même si nous ne pouvons pas nous tenir pour juge, n'y a-t-il pas lieu, par mesure de précaution et par cohérence avec nos principes, de cesser immédiatement toute collaboration avec de tels pays ?
Suite aux attentats du 11 septembre 2001, la Guerre en Afghanistan a été lancée par les Etats-Unis et une coalition. Divers crimes de guerre ont été relevée (bombardements indiscriminés, tortures dans des prisons comme celle de Bagram, violations des droits des prisonniers de guerre). Les actuels dirigeant d’Afghanistan sont également accusés de crime de guerre.
L’estimation des victimes est difficile mais on est entre 170 000 et 240'000 personnes qui ont été tuées, dont un nombre important de civils.
Par ailleurs, aujourd’hui, plus de 2,6 millions d'Afghans sont toujours des réfugiés et environ 4 millions ont été déplacés à l'intérieur du pays. Et depuis le départ catastrophique des Etats-Unis, les droits des femmes sont bafoués à un point inimaginable.
Voici la liste des Etats ayant participé à cette guerre lors de laquelle de nombreux crimes de guerre ont été commis :
Etats-Unis, Royaume-Uni, Canada, France, Allemagne, Italie, Portugal, Espagne, Danemark, Afghanistan.[3]
Même si nous ne pouvons pas nous tenir pour juge, n'y a-t-il pas lieu, par mesure de précaution et par cohérence avec nos principes, de cesser immédiatement toute collaboration avec de tels pays ?
Les Etats-Unis, sur la base d’informations erronées fournies par leurs propres services, ont menés une guerre en Irak dès 2003. Les Etats-Unis et leurs alliés ont été accusé de bombardements indiscriminés, de torture dans des prisons (Abu Ghraib de 2003 à 2004) et de détentions illégales (Guantanamo depuis 2001). Si les estimations divergent (on oscille entre 100'000 et 1 millions de victimes), dépendant du fait que l’on prend, ou pas, en compte les conséquences indirectes comme les destructions d'infrastructures, la famine et les maladies.
Voici la liste des Etats qui ont participé à cette coalition meurtrière:
Etats-Unis, Royaume-Uni, Australie, Pologne, Corée du Sud, Italie, Géorgie, Ukraine, Pays-Bas, Espagne, Roumanie, Japon, Danemark, Thaïlande, Bulgarie, Salvador, Honduras, République dominicaine, République tchèque, Hongrie, Azerbaïdjan, Albanie, Nicaragua, Mongolie, Singapour, Norvège, Lettonie, Portugal, Lituanie, Slovaquie.[4]
Même si nous ne pouvons pas nous tenir pour juge, n'y a-t-il pas lieu, par mesure de précaution et par cohérence avec nos principes, de cesser immédiatement toute collaboration avec de tels pays ?
Si on continue cette liste non exhaustive, on pourrait encore penser à la Russie ou au Yémen (ce qui implique l’Arabie saoudite et l’Iran).
Par ailleurs, si on prend en compte les violations des droits humains ailleurs dans le monde, on ne peut passer sous silence les Ouïghours, minorité musulmane turcophone vivant principalement dans la région autonome du Xinjiang qui subissent des persécutions de la part des autorités chinoises ( détentions arbitraires de masse, des actes de torture, des disparitions forcées, une surveillance de masse, des persécutions culturelles et religieuses, la séparation des familles, le travail forcé, des violences sexuelles et des atteintes aux droits reproductifs). Ces actions ont été qualifiées de crimes contre l'humanité par plusieurs organisations de défense des droits humains.
On estime qu’entre 1 et 1,8 million d'Ouïghours et d'autres minorités musulmanes auraient été détenus dans des camps dits de "rééducation" depuis 2017. Par ailleurs, le taux de natalité dans certaines régions du Xinjiang aurait chuté de près de 50% en moins de 3 ans.
Même si nous ne pouvons pas nous tenir pour juge, n'y a-t-il pas lieu, par mesure de précaution et par cohérence avec nos principes, de cesser immédiatement toute collaboration avec la Russie, la Chine, l’Arabie Saoudite et le Yémen ?
Afin de clarifier la situation, le présent postulat demande au Conseil d’Etat de présenter, sous forme de rapport des réponses aux interrogation suivantes :
- évaluer la pertinence d’une mise en place d’une liste de pays nommés comme étant « infréquentables » car ils mènent directement ou soutiennent ou contribuent matériellement à une guerre d’une manière ou d’une autre.
- évaluer la pertinence d’une mise en place d’une liste d’institutions (Universités, Hautes Ecoles, Ecole d’Ingénieur, etc.) avec qui ne plus collaborer car elles soutiennent idéologiquement ou contribuent matériellement à une guerre d’une manière ou d’une autre.
- évaluer la pertinence d’une mise en place d’une liste de pays nommés comme étant « infréquentables » sur des conceptions du monde qui sont trop éloignées des nôtres en termes de respect des peuples, de la diversité des cultures, de la liberté d’expression, de la liberté de religion et de d’égalité entre homme et femme.
- évaluer la pertinence d’une suspension immédiate des accords institutionnels avec toutes ces institutions ou pays concernés.
- évaluer s’il n’y aurait pas une opposition possible entre les propositions de boycott et d’exclusion de pays et d’institutions diverses et la pratique de neutralité qui est celle conduite par la Suisse depuis de longues années.
[1] https://vaud.ssp-vpod.ch/secteurs/hautes-ecoles-et-universite-2/pourquoi-le-personnel-des-hautes-ecoles-doit-prendre-position-en-faveur-du-boycott-institutionnel-des-universites-israeliennes/
[2] Tous ces pays n’ont pas été accusés de crimes de guerre mais on ne peut pas être membre d’une telle coalition innocemment.
[3] Tous ces pays n’ont pas été accusés de crimes de guerre mais on ne peut pas être membre d’une telle coalition innocemment.
[4] Tous ces pays n’ont pas été accusés de crimes de guerre mais on ne peut pas être membre d’une telle coalition innocemment.
Conclusion
Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures
Liste exhaustive des cosignataires
Signataire | Parti |
---|---|
Denis Dumartheray | UDC |
Philippe Jobin | UDC |
Grégory Bovay | PLR |
Blaise Vionnet | V'L |
Florence Bettschart-Narbel | PLR |
Nicolas Suter | PLR |
Aurélien Demaurex | V'L |
Circé Fuchs | V'L |
Guy Gaudard | PLR |
Sébastien Humbert | V'L |
Jacques-André Haury | V'L |
Jean-Claude Favre | V'L |
Jean-Louis Radice | V'L |
Monique Hofstetter | PLR |
Olivier Petermann | PLR |
Olivier Agassis | UDC |
Valentin Christe | UDC |
Oscar Cherbuin | V'L |
Nicolas Bolay | UDC |
Pierre-André Romanens | PLR |
Jerome De Benedictis | V'L |
Michael Demont | UDC |
Pierre-François Mottier | PLR |
Stéphane Jordan | UDC |
Cédric Weissert | UDC |
Loïc Bardet | PLR |