20_INI_2 - Initiative Cédric Weissert et consorts - Rendre le port du casque obligatoire à tous les cyclistes.
Séance du Grand Conseil du mardi 29 juin 2021, point 36 de l'ordre du jour
Texte déposé
Depuis de nombreuses années le développement du vélo dans toutes ses variantes (Vélo de loisir, moyen de transport entre domicile et travail ou encore comme activité sportive) n’a cessé de prendre de l’ampleur. Si l’on peut se féliciter de son essor tant d’un point de vue de l’activité sportive générée et donc de ses bienfaits sur la santé mais aussi de l’aspect écologique, un point ne peut être occulté : La sécurité
En effet, un nombre non négligeable de cyclistes roulent sans casque. Avec l’arrivée des vélos électriques et le développement des bandes cyclables et autres pistes réservées aux cyclistes, il est facile de constater la dangerosité de rouler sans le casque. De plus, une part de ces mêmes cyclistes, ne respecte pas les règles de circulation. En pèle mêle on peut citer le non-respect des signalisations, des sens-interdits voir du contre-sens. C’est un danger en premier lieu pour le cycliste lui-même mais aussi pour les autres usagers comme les piétons ou les automobilistes. Si pour ces derniers le danger physique est moindre, le risque psychologique n’est pas négligeable en cas d’accident. Comment vivre en ayant blessé grièvement voir tué un cycliste car ce dernier ne portait pas le casque et venait de griller un feu rouge, alors qu’avec un casque il n’aurait peut-être subi qu’une blessure légère ou une forte commotion. En termes de chiffres, rien que pour 2018 ce ne sont pas moins de 27 morts en Suisse qui circulaient en vélo dont 12 qui étaient en vélo électrique. Au niveau des blessés graves ce sont 877 cyclistes en vélo « standard » (+7 %) et 308 cyclistes en vélo électrique (+38 %). La plupart des personnes tuées ou grièvement blessées le sont avec des vélos électriques de type « lent » (236 personnes vs 85 avec des vélos électriques rapides). De part ces constats, je dépose ce jour une initiative cantonale à l’intention des instances fédérales afin de les enjoindre à rendre le port du casque obligatoire et de façon généralisée à tous les cyclistes et sur l’ensemble du territoire.
Conclusion
Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures
Liste exhaustive des cosignataires
Signataire | Parti |
---|---|
Céline Baux | UDC |
Jean-Bernard Chevalley | UDC |
Philippe Ducommun | UDC |
Dylan Karlen | UDC |
Philippe Liniger | UDC |
Julien Cuérel | UDC |
Nicolas Glauser | UDC |
Jean-Luc Chollet | UDC |
Maurice Treboux | UDC |
Yann Glayre | UDC |
Yvan Pahud | UDC |
Sacha Soldini | UDC |
Pierre-André Pernoud | UDC |
Philippe Jobin | UDC |
Denis Rubattel | UDC |
Werner Riesen | UDC |
Nicolas Bolay | UDC |
Fabien Deillon | UDC |
Pierre-Alain Favrod | UDC |
Jean-Marc Sordet | UDC |
Aliette Rey-Marion | UDC |
Jean-François Thuillard | UDC |
José Durussel | UDC |
Sylvain Freymond | UDC |
Documents
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour(remplaçant Sergei Aschwanden, rapporteur) L’initiant a indiqué ne pas être opposé au vélo, son initiative ayant un but sécuritaire. Chaque année, un ou plusieurs accidents mortels surviennent en Suisse et dans le canton de Vaud. Les infrastructures qui permettraient de limiter les accidents ne sont pas assez développées ni en Suisse ni dans le canton de Vaud. L’essor du vélo, surtout du vélo électrique ces dernières années, a conduit à une augmentation de près de 15 % des accidents graves entre 2018 et 2019. Les accidents graves concernent davantage les vélos électriques que les vélos traditionnels. Vous trouverez les chiffres dans le rapport de commission. Des cours de prévention sont donnés dans les établissements scolaires. L’initiant estime que c’est insuffisant. Il en veut pour preuve le nombre de parents qui pratiquent le vélo, sans casque, avec leurs enfants. Le port du casque est obligatoire en vélomoteur ; or, les vélos électriques atteignent presque la même vitesse. De plus, attacher sa ceinture est obligatoire en voiture. Le port du casque devrait donc être obligatoire à vélo. Par ailleurs, selon le Bureau de prévention des accidents (BPA), près de 75 % des citoyennes et citoyens sont favorables au port du casque à vélo. Il y a une prise de conscience, à l’instar de ce qui se passe sur les pistes de ski. Finalement, l’initiant cite la motion déposée par le conseiller national Buffat en faveur du port obligatoire du casque pour les vélos.
Mme la conseillère d’Etat rappelle que le Conseil fédéral avait proposé l’obligation du casque à vélo dans le cadre de la consultation du programme de sécurité ViaSecura. Par ailleurs, dans le cadre de la consultation sur la révision partielle de la Loi fédérale sur la circulation routière (LCR), de la Loi sur les amendes d’ordre (LAO) et de huit ordonnances qui courent jusqu’au 12 décembre 2020, le Conseil fédéral propose plusieurs mesures destinées à augmenter la sécurité des conducteurs de vélos électriques. Vous trouverez les détails de cela dans le rapport de commission. En conclusion, le Conseil fédéral a proposé de rejeter la motion du conseiller national Buffat.
Lors de la discussion générale en séance de commission, les points principaux suivants sont ressortis. Tout le monde est favorable à ce qui réduit les risques, à l’instar du port du casque. Cependant, l’obligation à porter ce dernier divise la commission. Pour certains commissaires, le casque protège et son port doit absolument être encouragé, mais il n’est pas la clé principale de la sécurité des cyclistes. La sécurité des cyclistes, comme celle des piétons ou des automobilistes, relève en premier lieu des aménagements à disposition. En la matière, la séparation du trafic est la mesure clé d’une réelle sécurité. C’est d’ailleurs dans cette optique que la Loi fédérale sur les voies cyclables entrera en vigueur en 2023. Il importe également de veiller à la continuité des pistes. S’il n’est pas simple de proposer des aménagements en site propre partout ou de séparer les flux, des améliorations substantielles sont parfaitement envisageables et surtout indispensables. Un autre commissaire ajoute que la sécurité se fait par le nombre. Plus il y a de cyclistes sur la route, plus elles et ils sont en sécurité, car les autres usagères et usagers s’y habituent. Une partie des commissaires estime que l’initiative n’est pas le bon outil, sachant que la motion Buffat a été refusée sur le plan fédéral. Un postulat semble plus adéquat pour accéder à une vision d’ensemble.
Les services de Mme la conseillère d’Etat complètent la discussion par les propos suivants : les questions de sécurité sont déterminantes pour l’usage du vélo ; toute la littérature scientifique converge en ce sens. Le sentiment de sécurité et la sécurité objective expliquent que certaines régions soient plus « cyclophiles » que d’autres. La sécurité et le niveau des équipements cyclables sont corrélés sur le réseau routier. Il convient d’œuvrer à éviter le nombre d’accidents et de collisions au lieu d’atténuer leurs conséquences, et cela passe par des infrastructures adaptées. Le canton de Vaud s’y active. La manière d’améliorer la sécurité des cyclistes est double : d’une part par la création d’infrastructures dédiées aux cyclistes et, d’autre part, par l’amélioration des conditions de circulation en cas de mixité de trafic.
Je me permets d’ajouter que le canton de Vaud, par l’intermédiaire de la Division générale de la mobilité et des routes (DGMR), est en train d’actualiser sa stratégie cantonale de promotion du vélo. En effet, notre canton est en retard par rapport à d’autres cantons. Au vu de tous ces éléments, la commission recommande au Grand Conseil de ne pas prendre en considération l’initiative par 5 voix contre 3 et aucune abstention.
La discussion est ouverte.
Je remercie le rapporteur pour son rapport et souhaite revenir sur quelques points soulevés dans celui-ci. L’initiative ne vient pas d’une position anti-vélo. Au contraire, l’angle que j’ai choisi est celui de la sécurité. L’essor du vélo, surtout électrique, ne va pas de pair avec le développement des infrastructures qui permettraient de dissocier les routes destinées aux véhicules à moteur de celles destinées à la mobilité douce. Il est donc nécessaire de renforcer la sécurité des cyclistes en obligeant le port du casque. Habituellement, je ne suis pas le premier à monter aux barricades lorsqu’il s’agit d’obligation. Toutefois, pour les aspects sécuritaires, il est nécessaire de faire cet effort – d’autant qu’on voit encore des enfants mineurs circulant avec leurs parents sans casque.
Je souhaite revenir sur les points soulevés par les personnes s’opposant à la prise en considération de mon initiative. J’entends que le port du casque freinerait l’essor du vélo : j’aimerais que l’on me démontre que l’obligation du port de la ceinture de sécurité, il y a bien des années, a freiné l’essor des véhicules à moteur. Il a également été fait mention des cours de prévention et d’éducation routière donnés dans nos écoles. C’est très bien, mais ces cours, que je suivais lorsque j’allais à l’école, existent depuis vingt ans au moins. Ces démarches sont à saluer, mais le nombre d’accidents reste élevé. Il faut donc aller plus loin. Je vous remercie de votre attention et j’espère que vous serez sensibles à la sécurité des cyclistes et accepterez donc la prise en considération de mon initiative.
Je suis opposé aux obligations. On voulait rendre obligatoire le port du casque à ski, mais il n’y en a pas eu besoin. Les 90-95 % des personnes portent le casque, parce que c’est à la mode, qu’elles ont envie de le porter et qu’elles sont conscientes des questions de sécurité. Les obligations dans les lois et règlements sont une atteinte à la liberté individuelle. Les gens sont normalement assez intelligents et se casquent d’eux-mêmes. On n’a pas besoin d’obligation. Si l’on continue avec ces obligations, je ne sais pas dans quels pays et canton nous vivrons. Gardons la liberté. Tout le monde doit être conscient. Je porte un casque presque à chaque fois, car il m’arrive de l’oublier. Et si je vais au village sans avoir envie de porter le casque, je ne le mets pas. C’est ma liberté, mon choix. J’en assume les risques et je prends mes responsabilités. Je ne vois pas pourquoi on nous obligerait à porter un casque. On va bientôt nous mettre dans des cages pour nous donner à manger.
Je me situe parfaitement dans la ligne des propos de M. Volet – pour une fois – en matière de mobilité. Je déclare mes intérêts : je suis président de l’Association transports et environnement (ATE Vaud) et cycliste aux cuisses musclées, puisque je fais du vélo tous les jours pour mes déplacements personnels et du point de vue sportif. Ce qui importe est la question entre sentiment et efficacité. Toutes et tous avons le sentiment justifié et fondé que le casque est utile et nécessaire. Comme M. Volet, dans 99 % de mes déplacements, je porte un casque, car les têtes intelligentes se protègent. Le problème est l’obligation. Le casque est déjà obligatoire lorsque l’on circule sur un vélo à assistance électrique à 45 km/h. Ces vélos vont vite et leurs utilisateurs et utilisatrices ne sont pas toujours habitués au vélo. En l’état, il a été décidé de rendre le casque obligatoire. Dans le futur, le Conseil fédéral entend rendre obligatoire le casque pour les vélos à assistance électrique de 25 km/h, en raison de l’augmentation des accidents – non en chiffres absolus, mais parce qu’il y a davantage d’utilisateurs et utilisatrices. Il faut souligner, comme le fait le rapport de commission, que les solutions contre les accidents de vélo consistent surtout en des aménagements séparés. Cela viendra avec la Loi sur les voies cyclables en 2023. Cela permettra d’assurer la sécurité concrète des cyclistes vis-à-vis des autres usagers de la route.
Bien sûr, il y a aussi toutes les autres mesures pour favoriser le vélo, car la sécurité s’obtient par le nombre. En effet, plus il y a de personnes à vélo, plus il y a un sentiment de sécurité et une réelle sécurité, en raison de la place prise sur la route. Dans ce contexte, si l’on compare ce qui se fait dans les autres pays, un seul pays au monde a rendu le casque obligatoire également pour les cycles mécaniques : l’Australie. Toutefois, on n’y constate aucune réduction du nombre de morts et de blessés à la suite de cette obligation. Comme l’a dit M. Volet, il y a une responsabilité et une considération individuelles, mais il n’y a aucune raison d’introduire une obligation pour toutes et tous, qui s’appliquerait dans tous les cas, y compris pour aller acheter du pain à l’autre bout du village. Pour ces motifs, il convient de rejeter cette initiative.
Je fais du vélo… moins souvent que mon collègue Raedler, même si cela me ferait du bien. (Rires.) Je rejoins les propos de MM. Volet et Raedler : si l’on devait faire quelque chose pour la sécurité des cyclistes, on devrait les obliger à porter un gilet pour qu’on les voie. Certains vélos ne sont pas équipés d’éclairage et roulent de plus en plus tard dans la journée, voire à la tombée de la nuit. Il faudrait agir sur ce point.
Je ne rejoins absolument pas les propos de M. Volet, quant à leur forme, et rejoins davantage ceux de M. Raedler. En effet, je suis peu favorable au port obligatoire du masque… (Rires.) pardon, du casque. On peut tout à fait porter un casque à vélo, sans considérer qu’il faille l’imposer à tout le monde pour tous les trajets. Le casque est utile pour réduire les risques de blessures graves à la tête en cas de chute. Toutefois, la probabilité d’avoir un choc crânien lors d’un accident touche aussi les piétons. Or, on ne les oblige pas à porter un casque. Peut-être que certains d’entre nous ont malheureusement – je le pense sincèrement – été touchés par la douleur d’avoir un proche accidenté, qui s’en serait mieux sorti avec un casque. Toutefois, sans investir massivement dans les infrastructures cyclables, nous ne lutterons pas efficacement contre ces drames. Plusieurs pays ont rendu le port du casque obligatoire dans certaines zones, pour les vélos électriques ou pour les cyclistes en dessous d’un certain âge, comme en France. Une règle est observée dans plusieurs grandes villes européennes : quand la pratique du vélo augmente, les risques d’accident diminuent. La sécurité par le nombre fonctionne aussi bien pour les cyclistes que pour les piétons. Les villes ont choisi différentes méthodes pour apaiser le trafic : création de pistes cyclables sécurisées distinctes de celles destinées à la circulation motorisée, création de zones à 30 km/h et de zones de rencontre, etc. Les études montrent que forcer les gens à porter un casque rend la pratique du vélo moins attractive et semble réduire le nombre d’usagers. Par ailleurs, une masse de preuves accablantes montre que les bénéfices tirés par la pratique du vélo en surpassent les risques. Vouloir imposer le port du casque à vélo est un contresens historique, une marche en arrière. Pour se développer, le vélo a besoin d’aménagements continus et sécurisés, ainsi que de services qui inciteront un plus grand nombre de personnes à passer au vélo. En privilégiant la lutte contre les blessures à la tête, l’effet pervers sera de décourager les citoyens à pratiquer une activité physique. Bref, cette initiative ne répond pas aux besoins de santé publique et de sécurité. Je ne la soutiendrai donc pas et vous encourage à faire de même.
J’entends le même discours, aujourd’hui, que celui sur la ceinture de sécurité en voiture, il y a très longtemps : cela ne sert à rien, c’est contraignant, on n’a jamais prouvé son utilité, etc. D’ailleurs, certains arboraient l’insigne « je ne porte pas ma ceinture de sécurité ». Bravo, très bien ! Personnellement, je reste littéralement marqué par la vision d’une jeune femme descendant à tombeau ouvert la route de Berne avec un enfant à l’arrière : zéro sécurité. Tant mieux s’ils sont arrivés en bas en bon état. Toutefois, si vous ne portez pas de casque et que vous vous fracassez sur le sol, rédigez au moins vos directives anticipées pour que l’on sache au bout de combien de mois on pourra vous débrancher. Cela fera gagner de l’argent.
J’entends ici des choses incroyables. Pourrait-on disposer d’autre chose que des études australiennes sur l’efficacité du port du casque ? Franchement, je tombe des nues. Nombre de confrères et consœurs et de soignants qui s’occupent des conséquences de la route – non seulement des voitures, mais aussi des vélos – doivent penser être en train de rêver. Il a fallu passer par le discours des anti-ceintures de sécurité pour finalement les porter. Ne vous faites pas de souci, vous finirez par porter le casque en tout cas pour les vélos électriques. C’est la moindre des choses. Quand on roule à 45 km/h et que l’on tape le sol, croyez-vous que c’est le goudron qui se fend ?
Je me demande s’il faudra bientôt placer une nounou derrière chaque individu dans ce pays ou ailleurs. Ne serait-il pas temps d’arrêter de déresponsabiliser les gens ? On ne fait pas le bonheur des gens malgré eux. La liberté des uns s’arrête là où elle atteint celle des autres, mais en l’occurrence, ce n’est pas le cas, car on ne touche à la liberté de personne si on ne porte pas de casque. Pour donner un exemple de la dérive à laquelle on assiste : à Vevey, nous avons un bassin de 60 cm de profondeur. En raison de la jurisprudence, on va nous demander d’instaurer la surveillance du bassin ou d’installer une barrière pour empêcher les gens d’y pénétrer parce que les enfants risquent de s’y noyer. A côté, il y a le lac, dans lequel il est extrêmement facile de se noyer. Pourtant, on peut y aller. On est en train de dérailler. La ceinture de sécurité a apporté quelque chose, mais il y a une limite à ne pas dépasser. Pour moi, la question du port du casque à vélo relève de la responsabilité individuelle.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
Le Grand Conseil refuse la prise en considération de l’initiative par 61 oui, 28 non et 19 abstentions.