23_POS_67 - Postulat David Vogel et consorts au nom des Vert'libéraux - De l’importance de lutter concrètement contre le travail au noir (Développement et demande de renvoi à commission avec au moins 20 signatures).
Séance du Grand Conseil du mardi 10 octobre 2023, point 7 de l'ordre du jour
Texte déposé
Le travail non déclaré est courant et extrêmement négatif pour plusieurs raisons. En voici trois :
- Le travail au noir est néfaste pour les employés eux-mêmes car ils ne sont pas assurés contre les accidents, les charges sociales dues ne sont pas payées et cela mène mécaniquement à des situations de précarité une fois arrivé à l’âge de la retraite.
- Cette somme échappe aux prestations sociales ce qui amène un manque à gagner très important pour l’Etat (on estime, en Suisse, à environ CHF 320 millions par année pour l’AVS).[1]
- Pour les employeurs qui ne déclarent pas leur employés, les risques de rattrapages peuvent s’avérer extrêmement coûteux et ils sont, eux aussi, dans l’illégalité.[2]
Le problème du travail au noir n’est pas anecdotique puisque selon les estimations du SECO, en Suisse, on estime qu’il représente environ 6,1 % du PIB (chiffre de 2023).[3] La seule économie domestique souterraine représenterait environ 1 milliard de francs.
Pour le secteur du ménage, on estime à plus de 25 % la part du travail au noir, ce qui représenterait environ 75'000 personnes.
Certes, pour lutter contre le travail au noir, il existe une procédure de décompte simplifiée[4] et des inspections peuvent être effectuées. Néanmoins, ces mesures sont notablement insuffisantes.
A mon avis, des incitatifs pragamatiques doivent être introduits afin de faire évoluer la situation. Pour cela, je propose 2 pistes :
- Une déduction fiscale
- Une amnistie pour le passé
En introduisant une déduction fiscale (avec un plafond CHF 5000.- annuel) pour les heures de ménage, on encouragera la régularisation des aides au ménage attendu que seul le travail déclaré sera déductible. Cela réduira le manque à gagner de l’Etat et ne coûtera pas plus cher au final pour l’employeur. Dans le même temps, les employés seront, eux, correctement assurés et cotiseront à l’AVS.
De plus, avec la baisse du travail au noir, l’Etat aura plus de facilité à poursuivre les éventuels fraudeurs qui persisteraient dans l’illégalité.
Afin d’éviter de sanctionner les personnes qui seraient nouvellement régularisées, je propose également de solder le passé avec une amnistie pour les deux parties.
Pour l’employeur, même s’il n’a pas cotisé correctement depuis des années, l’Etat ne sanctionnerait pas le passé à condition que le personnel soit désormais déclaré.
Pour les employés, même s’ils n’ont pas déclaré tout ou partie de leurs revenus dans le passé, je propose que, là aussi, l’Etat ne les sanctionne pas. Il s’agit de récompenser une situation nouvelle plutôt que de s’acharner sur ce qui a été fait.
Dès lors, par ce postulat, je propose au Conseil d’Etat d’étudier la solution suivante :
- Instaurer une exonération fiscale plafonnée à CHF 5’000.- par ménage employant du personnel de ménage déclaré (engagé en direct ou via une entreprise spécialisée).
- En cas de régularisation spontanée, instaurer une amnistie fiscale tant pour l’employeur que pour l’employé et ne pas revenir sur des montants indûment touchés dans le passé. L’amnistie devrait avoir une durée limitée dans le temps (à définir). Passé cette amnistie, les sanctions usuelles s’appliquent.
- Evaluer si les actions d’informations pour lutter contre le travail au noir auprès des employés devraient être perfectionnées ou mieux ciblées.
[1]https://www.blick.ch/politik/abstimmungen/studie-zum-bschiss-in-schweizer-haushalten-schwarzarbeit-von-putzfrauen-und-nannys-kostet-ahv-320-millionen-id7327081.html
[2]En cas de dénonciation ou de découverte fortuite du travail non déclaré effectué chez eux, on peut arriver à plus de 100'000 de rattrapage fiscal pour une seule personne employée (cas réel).
[3] Page 8 du document en lien : https://www.seco.admin.ch/dam/seco/fr/dokumente/Publikationen_Dienstleistungen/Publikationen_Formulare/Arbeit/Personenfreizuegigkeit_Arbeitsbeziehungen/Studien%20und%20Berichte/Berichte_massnahmen_bekaempfung_schwarzarbeit/bericht_bgsa_2022.pdf.download.pdf/Rapport%20LTN_2022_FR.pdf
[4]https://www.ahv-iv.ch/p/2.07.f
Conclusion
Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures
Liste exhaustive des cosignataires
Signataire | Parti |
---|---|
Jean-Louis Radice | V'L |
Andreas Wüthrich | V'L |
Michael Wyssa | PLR |
Olivier Petermann | PLR |
Aurélien Demaurex | V'L |
Circé Fuchs | V'L |
Jerome De Benedictis | V'L |
Jacques-André Haury | V'L |
Graziella Schaller | V'L |
Blaise Vionnet | V'L |
Pierre-André Romanens | PLR |
Regula Zellweger | PLR |
Guy Gaudard | PLR |
Elodie Golaz Grilli | PLR |
Sébastien Humbert | V'L |
Nicola Di Giulio | UDC |
Oscar Cherbuin | V'L |
Laurent Miéville | V'L |
Jean-François Chapuisat | V'L |
Cloé Pointet | V'L |
Josephine Byrne Garelli | PLR |
Documents
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourAu sujet du travail au noir, il y a trois certitudes. Tout d’abord, il concerne plus de 7000 personnes dans le canton, dans le seul domaine de l’aide au ménage. Ensuite, le travail au noir est mauvais – à peu près tout le monde s’accorde sur ce point – tant pour les employés, que pour l’Etat et les employeurs. Enfin, la lutte contre le marché noir dans ce domaine spécifique n’est absolument pas efficace.
Le but de ce postulat est d’essayer de lutter de manière efficace contre le marché noir. Ma proposition n’est ni théorique, ni morale, ni idéologique, mais simple, concrète et pragmatique. Je me réjouis d’en discuter avec vous en commission. Et pour celles et ceux qui partagent mon avis que le marché noir est un fléau, mais que la défiscalisation des heures de ménage dérange, je me réjouis d’écouter leurs propositions simples, concrètes et pragmatiques lors de la commission.
Retour à l'ordre du jourLe postulat, cosigné par au moins 20 membres, est renvoyé à l’examen d’une commission.