24_LEG_32 - EMPD accordant au Conseil d'Etat un crédit d’étude complémentaire de CHF 12'620’000 pour financer les études relatives à la construction de la future prison des Grands-Marais (PGM) en une étape de travaux au lieu de deux ainsi que pour financer les diagnostics archéologiques relatifs à la construction de la future prison des Grands-Marais (PGM) et des sites adjacents, la Nouvelle colonie ouverte (COO) et le Poste de contrôle avancé (PCA) dans la Plaine de l’Orbe (1er débat).
Séance du Grand Conseil du mardi 26 novembre 2024, point 28 de l'ordre du jour
Documents
- Texte adopté par CE - EMPD Crédit d'étude complémentaire construction PGM - publié
- Rapport de la commission - RC 24_LEG_32 - Patrick Simonin
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourEn préambule, quelques mots sur les points 28, 30 et 31 de notre ordre du jour, traités par la même commission ad hoc, ce qui me permettra d’être succinct aux points 30 et 31 :
Cette commission a traité trois projets de décrets qui réunissaient un crédit d’étude complémentaire, deux crédits d’investissement, un crédit d’objet et un crédit d’étude. Ces cinq projets concernent le domaine pénitentiaire avec 5’205’000 francs pour le site de la prison du Bois-Mermet et 69’093’000 francs au total pour le Pôle Pénitentiaire du Nord Vaudois (PPNV).
Au début de la séance de commission, une discussion générale a eu lieu sur les trois décrets soumis au Grand Conseil. La commission a pu être informée notamment sur le Plan d’affectation cantonal PPNV, mis à l’enquête en juin et juillet 2023, qui permettra de construire tous les objets souhaités sur ce site. Il est en cours de conciliation quant aux constructions futures du site PPNV, dont certaines se trouvent en zone agricole actuellement. La distribution des secteurs constructibles a été revue pour optimiser le projet. Par endroits, il y a eu des déclassements en zone agricole ; ainsi, il n’y a pas eu besoin d’utiliser de réserves cantonales.
Plusieurs remarques générales ont été formulées. Concernant l’augmentation des coûts dans le milieu pénitentiaire, Mme la Conseillère d’Etat a indiqué que le Conseil d’Etat a décidé de réaliser des comparaisons intercantonales, de venir avec des propositions pour diminuer les montants et que, dans le cadre des études complémentaires, il a été demandé de trouver des solutions pour essayer de diminuer les coûts. Elle a reconnu que, vis-à-vis de la population, le montant par place de détention est élevé. Pour autant, il est important aussi de répondre aux exigences fédérales, au vu des remarques tant de la Commission de gestion (COGES) que de la Commission des visiteurs du Grand Conseil. Il ne faut pas aller en dessous des normes fédérales pour la construction de prisons. Au vu des surcoûts opérationnels générés par la situation actuelle − manière dont les établissements sont exploités, utilisation intensive des zones carcérales − un commissaire estime utile que le Conseil d’Etat clarifie sa vision à terme. En réponse, le chef du Département de la jeunesse, de l’environnement et de la sécurité relève que, depuis une dizaine d’années, la situation est difficile en matière de surpopulation carcérale, en particulier de zones carcérales où des pénalités peuvent être infligées à l’Etat en cas de non-respect des limites de durée légale de détention. Il estime toutefois qu’il y a un potentiel d’économie dans une situation plus apaisée concernant les zones carcérales, dans un potentiel abandon de la prison du Bois-Mermet, même si la décision n’a pas encore été prise, et dans la réalisation de la prison des Grands-Marais en une étape au lieu de deux étapes. Cela évite des surcoûts opérationnels.
Concernant l’évolution des normes fédérales, M. le conseiller d’Etat relève qu’il est important de les respecter pour bénéficier du soutien financier de la Confédération, offrir des conditions de travail dignes au personnel et réduire les coûts sécuritaires. Ils sont plus importants en cas de surpopulation carcérale et de bâtiments vétustes. La cheffe du Département de l’économie, de l’innovation, de l’emploi et du patrimoine ajoute que, du point de vue de nouvelles constructions, le Conseil d’Etat a la volonté d’avoir des planifications à long terme et transparentes. Si actuellement des réflexions budgétaires sont à être menées, il n’y a pas de difficulté de bilan, le canton de Vaud n’est pas endetté. C’est donc le moment de tenter de rattraper le retard dans le domaine pénitentiaire comme pour les gymnases, bien que l’on soit en période d’inflation.
Tous les membres du Conseil d’Etat ont cette vision transparente avec un véritable dialogue entre le service constructeur et les services avec lesquels ils travaillent. A la question des zones carcérales prévues pour une courte durée de séjour, aujourd’hui utilisées largement pour la détention jusqu’à 50 jours, le chef du Département de la jeunesse, de l’environnement et de la sécurité répond travailler sur ce dossier. Si les constructions prévues ici sont réalisées à l’horizon de 10 ans, la problématique des zones carcérales sera résolue, car il y aura suffisamment de places de détention avant jugement pour que les zones carcérales ne soient plus utilisées de façon contraire au droit fédéral. Pour autant, un travail est mené en parallèle pour avoir une alternative et répondre à la motion Jean-Marc Nicolet et consorts au nom de la Commission des visiteurs du Grand Conseil par une solution de type espaces modulaires. J’en ai terminé avec des propos généraux sur les trois décrets.
Revenons à notre point 28 de l’ordre du jour, exposé des motifs pour le crédit complémentaire de 12’620’000 francs pour l’étude relative à la prison des Grands-Marais. Un premier crédit d’étude de 12 millions a été obtenu en 2018 – projet de décret n° 79. A cette date, il était prévu de réaliser la prison en deux étapes. L’étude portait donc sur le masterplan de l’entier du bâtiment et le détail sur une seule partie du projet − la première étape. Le crédit d’étude complémentaire de 12’600’000 francs demandé aujourd’hui est lié à la décision du Conseil d’Etat de réaliser la construction en une étape. Il doit permettre de finaliser les études pour mettre au point un dossier d’appel d’offres ouvert aux entreprises totales pour réaliser ce bâtiment. Il s’agit de terminer toutes les études et d’aller de l’avant pour parvenir à un prix définitif jusqu’à la mise à l’enquête du projet. La discussion générale a été nourrie et une seconde séance de commission a été nécessaire pour ce crédit d’étude complémentaire. Ces échanges portaient sur les raisons de réaliser le projet dorénavant en une seule étape, les éléments financiers du crédit d’étude de 2018 − travaux effectués et montants dépensés − les éléments financiers du crédit d’étude de 2024, le mode de conduite du projet, le libellé du présent décret qui omet des données de celui de 2018 − dossiers d’autorisation de construire et d’appel d’offres − le personnel engagé pour ce projet et ses rémunérations et la volonté de mener la construction en entreprise totale.
La seconde séance de commission a permis de présenter une version plus complète et plus précise du tableau financier de la page 12 du présent exposé des motifs. La Direction générale des immeubles et du patrimoine (DGIP) a reçu la mission de contenir les volumes et les surfaces et de réduire les coûts. La DGIP compte la tenir. Le chef du Département de la jeunesse, de l’environnement et de la sécurité ne souhaite pas demander un crédit additionnel d’ouvrage. Pour autant, il souligne que cela ne signifie pas un projet au rabais non plus. Les conditions de travail du personnel pénitentiaire et les conditions de détention des personnes détenues sont aussi deux enjeux auxquels on doit répondre. La question des délais a également été nourrie et il a été demandé de confirmer que la mise en service est bien prévue pour fin 2030. La commission est informée que les dates mentionnées − fin de la page 6 de l’exposé des motifs − correspondent au planning de construction prévu dans le cadre du projet « Prison des Grands-Marais » en deux étapes. Aujourd’hui, le projet est revu avec la construction de 410 places en une étape ; une mise en service à la fin 2030 sera impossible. Il s’avère toutefois que c’est inexact, car le planning indiqué dans l’exposé des motifs n° 79 d’il y a 6 ans prévoit une mise en service de la première étape au printemps 2026. Il convient donc de relire le présent exposé des motifs en tenant compte de ces éléments. Le conseiller d’Etat confirme que l’on veillera au respect des calendriers et les crédits. Les conseillers d’Etat en charge sont sensibles à ces éléments. Au terme de ces deux séances, munie des éléments complémentaires demandés, la commission recommande au Grand Conseil l’entrée en matière sur ce projet de décret, à l’unanimité.
La discussion sur l’entrée en matière est ouverte.
Nous nous apprêtons à voter 74 millions pour les infrastructures pénitentiaires, soit pour la construction de la future prison des Grands-Marais et pour le maintien du Bois-Mermet et de Bochuz dans l’attente de la mise en service des Grands-Marais. Bien que nous attendions avec impatience ces travaux, un problème se pose. Ce printemps, diverses interventions parlementaires ont amené le Conseil d’Etat à admettre qu’un rapport externe sur la surpopulation carcérale, mandaté par ses soins, a été rendu le 27 février 2024 par Benjamin Brägger. Ce rapport a été annoncé depuis 2021 par le Conseil d’Etat, en plénum et dans la presse. Le Conseil d’Etat l’avait commandé pour comprendre les causes de la surpopulation carcérale vaudoise et proposer des solutions. Toutefois, nous n’avons toujours pas accès à ce rapport, alors qu’il a déjà circulé auprès du Ministère public. Aujourd’hui, je regrette cette rétention d’informations cruciales pour les décisions du Grand Conseil au moment où le Conseil d’Etat nous demande de voter des crédits importants pour les infrastructures pénitentiaires. Madame la conseillère d’Etat, au regret que nous ne puissions prendre connaissance de ce rapport important et nécessaire pour l’avenir pénitentiaire, j’aimerais savoir ce qu’il en est, et en particulier quand ce rapport sortira.
Aujourd’hui, nous allons commencer les discussions sur les trois décrets concernant l’avenir des prisons vaudoises, en termes de nouvelles constructions ou de rénovations. Ces trois décrets se situent aux points 28, 30 et 31 de notre ordre du jour. Pour ne pas alourdir les débats, je prends la parole au début de la première entrée en matière pour vous donner la prise de position du groupe socialiste sur l’ensemble des trois décrets.
Depuis de nombreuses années, la Commission des visiteurs pointe du doigt − c’est un euphémisme − les mauvaises conditions de détention dans les prisons vaudoises, entre autres à cause du manque de place due à la surpopulation et de locaux vétustes qui ne sont plus adaptés à leur utilisation. Aujourd’hui, nous allons pouvoir y remédier en partie et améliorer ces gros points noirs qui minent notre système pénitentiaire. Les différents travaux prévus dans ces trois décrets permettront la création de places ou la rénovation des prisons qui montrent que les années ne les ont pas épargnées. Actuellement, la détention des détenus ne correspond pas aux normes sanitaires ou sécuritaires qu’on a le droit d’exiger dans notre canton. Ce manquement aux normes fédérales crée des tensions entre détenus et rend, de fait, le travail des agents pénitentiaires beaucoup plus pénible. Détenus et agents pénitentiaires subissent la situation et cela doit changer. Notre commission a siégé à deux reprises et s’est penchée sur tous les projets de construction, les projets de travaux, de rénovation, et avant tout sur les modes de financement envisagés. Les trois rapports sont très complets concernant ces trois points, mais voici les points que j’aimerais relever.
Concernant la future prison des Grands-Marais, attenante aux Etablissements de la plaine de l’Orbe (EPO), il a été soulevé par la commission qu’il manquait une vision liée à la mobilité et aux transports publics. Bien que la population devant s’y rendre va augmenter, il n’y a aucune desserte facilitant l’accès à l’ensemble du complexe, tant pour les visiteurs que pour le personnel, par exemple. Malgré les réponses rassurantes apportées en commission, il est nécessaire de trouver de vraies solutions avec la commune d’Orbe et de continuer les discussions avec les partenaires locaux de la mobilité.
Bien que ces trois décrets soient indépendants du point de vue des procédures liées au marché public et aux projets d’architecture, ils sont intimement liés du point de vue politique et de la stratégie pénitentiaire que le canton souhaite mettre en place. Ne pas accepter l’un ou l’autre de ces projets remet en cause la pertinence de l’ensemble.
Pour conclure, et afin que nous puissions aller de l’avant enfin dans ce dossier, le groupe socialiste vous prie d’entrer en matière sur les trois projets de décret qui vous sont proposés aujourd’hui et de suivre les conclusions unanimes de la commission.
Je précise d’abord que je suis également membre de la commission des visiteurs, même si je m’exprime ici en mon nom et au nom de mon groupe. Comme l’a dit la députée Tran-Nhu, depuis plusieurs mois, nous savons que cette étude a été rendue au Conseil d’Etat, analysant les causes de la surpopulation carcérale et établissant des propositions. Je trouve tout à fait intolérable, personnellement, que l’on nous demande de voter des montants aussi importants pour notre budget, pour le contribuable, sans nous donner accès à cette étude chiffrée. Cela fait penser à d’autres situations de non-transparence de la part du Conseil d’Etat, comme celle du budget et des risques. Une autre situation similaire s’était produite en 2022 : j’avais posé des questions sur l’audit du Plan climat que vous refusiez de publier, qui a pourtant révélé que l’Etat n’allait atteindre que 6 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030. Donc, qu’il s’agisse de l’audit sur le Plan climat, des risques en matière de budget ou de ce rapport externe sur les causes de la surpopulation carcérale, le Grand Conseil n’est pas seulement une chambre d’enregistrement. Nous devrions être tenus au courant de ces informations cruciales pour nos prises de décisions. Ici, il s’agit des décisions sur les infrastructures pénitentiaires cantonales. Nous devrions avoir accès, avant d’engager ces montants, à ce rapport.
Personnellement, j’estime que ces sommes reflètent une politique qui mise avant tout sur le tout carcéral, politique dont on sait maintenant qu’elle ne fonctionne pas à long terme, en matière de resocialisation, d’apaisement social, de prévention de la récidive. Cela a été établi par la science. Ce qui est vrai pour les autoroutes a également été démontré en matière de politique pénitentiaire : plus l’on construit des prisons, plus on les remplira tant que nous ne mènerons pas une politique ambitieuse axée sur la réhabilitation qui est à long terme moins coûteuse pour le contribuable et l’Etat. Pour ses raisons et surtout en opposition au refus de transparence envers notre pouvoir législatif de la part du Conseil d’Etat, je m’opposerai à ces décrets.
D’entrée de cause, j’annonce mes intérêts, qui seront pertinents par la suite : j’étais président de l’Association tourisme et environnement (ATE) Vaud et je suis actuellement coprésident de l’ATE Suisse. L’ATE Vaud était l’une des opposantes au projet de construction. Nous avons conclu une convention qui a conduit au retrait de l’opposition.
Sur le principe, il n’est pas nécessaire d’y revenir, mais ce sujet est naturellement d’une grande importance, tant la surpopulation carcérale dans notre canton est un serpent de mer auquel on doit trouver et apporter des solutions. Plusieurs objets parlementaires ont porté sur le sujet, y compris de la part de la Commission des visiteurs du Grand Conseil. Le canton de Vaud figure dans le trio de tête des cantons en matière de surpopulation carcérale et de nombre de détenus, précédé de Zurich, qui est quand même presque deux fois plus grand. Dans ce contexte, la problématique entraîne à la fois des conséquences humaines, naturellement, parce que la surpopulation carcérale provoque de graves problèmes en matière de détention et de légalité de la détention, et en termes économiques. En effet, qui dit détention illicite – elle l’est dès le moment où les conditions de détention ne sont plus correctes en raison de la surpopulation carcérale − dit indemnité payée aux personnes détenues pour les jours de détention illicites. Naturellement, cela a un poids économique pour notre canton indépendamment de la question humaine, bien plus importante que la question économique et très problématique.
Le sujet est absolument central et ce projet de décret est positif. Deux problématiques déjà évoquées doivent être mises en avant. La première concerne les causes de la surpopulation carcérale. Sur ce sujet, il y a eu non seulement des dépôts individuels, mais aussi un dépôt de la Commission thématique des affaires juridiques sur les causes de la surpopulation carcérale. Pour l’instant, aucune réponse n’y a été apportée. C’est bien dommage, parce que voter plus de 50 millions dans le cadre de ces projets revient à voter à l’aveugle, parce que nous ignorons les analyses du rapport Gaillard. Nous n’avons aucune information de la part du Conseil d’Etat, alors qu’il connaît les conclusions de ce rapport. Ce n’est pas correct ni compréhensible, parce que nous détenons les cordons de la bourse et devons les délier à l’aveugle, sans savoir pourquoi nous ne pouvons pas faire autrement. Cela a été demandé par plusieurs personnes. Il est certain que disposer des informations sur le rapport Gaillard et sur la position du Conseil d’Etat concernant les causes de la surpopulation carcérale serait utile. En effet, nous sommes en train de régler les effets de la surpopulation carcérale en votant un crédit à 50 millions et en augmentant les places de détention. Nous souhaitons connaître les causes de la surpopulation carcérale. Je remercie donc Mme la conseillère d’Etat de nous apporter certains éléments, en tout cas ceux en main du Conseil d’Etat à ce sujet.
Déjà évoqué par Mme Cachemaille, le second élément problématique concerne la mobilité. Plus de 50 millions sont votés dans ces décrets. Alors, je dois absolument le souligner et le déplorer : les questions de mobilité ont été non seulement négligées, mais aussi complètement ignorées. Le site prévu dans l’exposé de motifs est loin des transports publics. Il n’y a absolument aucune correspondance en matière de transports publics, alors que les familles des personnes détenues n’ont pas toujours les moyens de posséder un véhicule individuel et sont dépendantes des transports publics. Selon une expérience personnelle, me rendant parfois à cette prison en transports publics et à vélo, ce n’est pas forcément des plus évidents. Il est donc bien dommage de ne pas prendre appui sur ces projets pour trouver une solution, d’autant qu’en réalité, non seulement le statu quo est maintenu, mais on péjore encore la situation. En effet, les plans de l’établissement des Grands-Marais montrent que l’entrée de l’établissement pénitentiaire s’inverse par rapport à la gare CFF la plus proche. On prolonge donc le temps de marche pour les personnes qui viennent en train. C’est inacceptable ! L’ATE Vaud avait fait opposition au projet pour cette raison. Dans le cadre de discussions qui ont relativement traîné, mais qui ont enfin abouti, nous sommes parvenus à une convention qui vise notamment la mise en place d’une ligne de transport public. Pour cela, je remercie Mme la conseillère d’Etat. Sur cette base, nous avons retiré l’opposition. Pour finir, à titre personnel et parmi les Verts et Vertes, certaines personnes s’abstiendront ou voteront en faveur du décret, l’abstention étant liée au premier point relevé − les causes de la surpopulation carcérale − selon les réponses qui seront apportées par Mme Moret.
En tant que membre de la Commission des visiteurs, je voudrais souligner plusieurs points de cet exposé des motifs. Premièrement, réaliser en une seule étape le projet de la prison des Grands-Marais est à saluer, puisque cela permettra de gagner environ cinq ans, avec une mise en service progressive dès 2030, plutôt que 2035. Ce gain de temps est très important au regard de la surpopulation carcérale. Deuxièmement, selon la première estimation des travaux en 2018, le projet s’élevait à 279 millions, puis selon la réévaluation de 2023, à 411 millions. Cela représente un surcoût d’un tiers. Vouloir achever les travaux en 2030 plutôt qu’en 2035 permettra vraisemblablement de limiter les surcoûts qui vont s’additionner à ces montants d’ici là.
Nous espérons qu’en cherchant à limiter les dépenses, l’on ne touchera pas les deux points suivants. Mes visites de prison ont permis de constater les difficultés rencontrées par les personnes à mobilité réduite. Je me réjouis donc de constater qu’une vingtaine de cellules adaptées pour les détenus à mobilité réduite sont prévues dans le projet. J’espère que vouloir limiter les coûts de cette prison ne va pas limiter le nombre de cellules pour les détenus à mobilité réduite.
Ensuite, je constate avec satisfaction que 22 places en unité psychiatrique sont prévues. C’est absolument nécessaire compte tenu de la pathologie psychiatrique rencontrée fréquemment chez les détenus. J’ose espérer aussi que ce nombre de places en psychiatrie ne va pas diminuer.
Pour terminer, permettez-moi, madame la conseillère d’Etat, de m’étonner par une affirmation concernant les zones carcérales dans cet exposé des motifs. Il est mentionné qu’avant la construction de la prison des Grands-Marais, il ne sera pas possible de supprimer le problème des détentions au-delà de 48 heures en zone carcérale qui sont, je le rappelle, des détentions illégales. Permettez-moi de m’étonner, voire d’être choqué par une telle affirmation. Cela signifie que, pendant six ans, le canton de Vaud va continuer d’être dans l’illégalité pour ses détentions prolongées en zone carcérale. C’est long, c’est trop long. Des solutions doivent être trouvées d’ici là, peut-être en libérant des places en prison, en mettant davantage de détenus au bénéfice d’un bracelet électronique, en remettant en question les causes de notre surpopulation carcérale ou encore, comme mentionné dans le rapport de commission, par la construction d’espaces modulaires. Humainement, je ne peux pas accepter que l’on ne mette pas tout en œuvre pour trouver des solutions au problème lancinant des incarcérations en zone carcérale. Malgré cela, nous entrerons en matière pour ces trois décrets.
Permettez-moi de partager mes réflexions. En effet, il ne m’est pas facile de souscrire aux demandes de crédit d’études de manière générale et dans la perspective de la construction de nouvelles prisons, mais je les accepterai.
La construction d’une nouvelle prison signe, en effet, sur le fond, une forme d’échec en matière d’inclusion et de tolérance. Chaque espèce, groupe et collectivité tend à trouver une normalité commune à partir de laquelle elle déploie sa stratégie d’exclusion, de contention et de réhabilitation dans le but de garantir une sécurité à sa collectivité. Notre société d’humains déploie une énergie et des moyens colossaux pour tenter de juguler la violence, la déviance et l’absence d’obéissance.
Le projet de prison des Grands-Marais est une pierre à l’édifice de notre stratégie politique qui rend possible le déploiement de moyens pour répondre aux attentes de notre société actuelle. Il ne fait aucun doute que, sur ce point, la prison des Grands-Marais remplira sa mission en matière de détention dans des conditions satisfaisantes, en offrant pour quelque temps le nombre de places suffisant, entre autres améliorations notables. Le déploiement et le renforcement de la politique de réinsertion en milieu carcéral et sur l’ensemble de la chaîne pénale doivent être assurés eux aussi.
À la lecture du rapport, je relève la volonté de développer de nouveaux moyens de réinsertion, ce que je salue ; et j’invite le Conseil d’Etat à intégrer cette volonté à chaque phase et dans chaque domaine du projet, y compris celui de la conception architecturale. Toutefois, permettez-moi d’espérer que notre société sera capable de libérer autant de ressources dans le domaine de la prévention que dans celui de la répression et d’espérer que notre Parlement s’engagera avec autant de détermination pour combattre et réduire les causes de ces déviances et transmettre à nos enfants le goût d’un avenir confiant et tolérant. Je me permets encore de citer un vers inspirant du poète François Villon qui permettra de prendre un peu de recul de quelque cinq siècles et peut-être que certains se souviendront de leurs études : « Frères humains qui après nous vivez, n’ayez les cœurs contre nous endurcis. (…) »
La grande majorité des membres du groupe UDC va accepter les entrées en matière et les projets de décret sur les multiples points à l’ordre du jour concernant soit le deuxième crédit d’études du projet des Grands-Marais, soit des aménagements et remises à niveau technique des centres pénitentiaires vaudois en activité. Toutefois, concernant la problématique de la surpopulation carcérale, le groupe UDC rejoint les opposants à la troisième voie autoroutière : ce n’est pas en augmentant les structures que nous parviendrons à diminuer les flux. Le groupe UDC est d’avis qu’au même titre que la stratégie de mobilité, une stratégie de contrôle de la migration opportuniste serait aussi à renforcer pour soulager quelque peu nos prisons. Nous pensons particulièrement au renvoi effectif des criminels étrangers.
J’aimerais revenir un peu en arrière : cette espèce de recul, alors que la commission a accepté l’ensemble, m’étonne. Deuxièmement, attendre ne va rien résoudre. Aujourd’hui, plusieurs projets de décrets visent à résoudre enfin une partie du problème. Toutefois, nous n’allons pas résoudre la question de la surpopulation carcérale. Nous devons trouver des moyens pour avancer et faire les choses correctement. Le rapport Brägger n’a rien à voir avec la construction, mais davantage avec le Service pénitentiaire et le conseiller d’État qui en est chargé. Nous devons distinguer les choses.
Le groupe PLR estime que ces rapports sont justes, qu’il faut aller de l’avant et construire des bâtiments. Toutefois, nous souhaitons que pour éviter des problèmes, les notions de comité de pilotage et de comité de projet ne soient pas simplement des lettres, mais qu’ils soient suivis et que nous ayons une garantie ferme que les montants engagés soient engagés directement à bon escient.
En préambule, j’exprime mon étonnement : il est incroyable, cet après-midi, que M. le conseiller d’Etat Vassilis Venizelos, et le chef du SPEN soient absents des discussions aux côtés de Mme Moret. En effet, nous allons nous prononcer notamment sur quelques dizaines de millions de francs.
Ensuite, 12’620’000 francs pour la globalité des projets ne paraissent pas énormes. Le rapport de la commission explique les raisons des deux étapes qui deviennent une seule étape, mais le crédit est tout de même très conséquent. Il y a un rappel important. Il faut revenir un peu en arrière et aux premières discussions. Les Grands-Marais correspondent à 410 places et à plus de 400 millions. Tout le monde sait calculer : nous allons dépasser 1 million, voir 1,3 ou 1,4 million d’ici 2034 selon les coûts réels de cet investissement dans la plaine de l’Orbe. Souvent, je discute avec les gens ; ils nous posent des questions et « tombent sur leurs fesses » − excusez-moi du terme – en entendant ces chiffres. Une place dans un pénitencier en Suisse, en Allemagne ou ailleurs, car c’est peut-être pareil, coûte 1 million et plus. Nous sommes dans un pays d’opulence, apparemment, et les chiffres sont expliqués, mais cela nous paraît surdimensionné. Des gens se sucrent certainement au passage. Il faut oser le dire et je le dis.
Je déclare mes intérêts en tant que visiteur de prisons depuis deux ans et demi. Les termes de « surpopulation carcérale » figurent dans le rapport de la commission : certes, la surpopulation carcérale est un fait, mais seul un pénitencier est actuellement en surpopulation carcérale, à savoir celui du Bois-Mermet. D’ailleurs, je salue le personnel et la direction pour l’immense travail qu’ils font dans cet établissement, avec plus de 170 personnes pour 100 places ; cela représente une charge énorme. Je vous laisse imaginer.
Par ailleurs, l’exposé des motifs mentionne qu’« il convient aussi de tenir compte de la criminalité, de la croissance démographique ». C’est très intéressant. Depuis longtemps, mon parti parle de problèmes de démographie et de criminalité. On a souvent quelques années d’avance sur la réalité, parce qu’ici, on est vraiment dans une fatale réalité. On continue à construire des prisons et accepter des personnes qui, malheureusement − pas toutes, il y a aussi de bons travailleurs − sont souvent des délinquants qui finissent dans ces établissements. Alors, je pose une question à Mme la conseillère d’Etat, vu que M. le conseiller d’État n’est pas présent : selon vos connaissances, si le renvoi des criminels étrangers accepté par le peuple était réellement et strictement appliqué, cela pourrait-il changer sensiblement le problème de la surpopulation carcérale ? Pour rappel, nos pénitentiaires et prisons comptent 74 % de personnes qui ne sont pas d’origine suisse. C’est important de le relever.
Concernant le potentiel d’économie, il est noté en page 3 du rapport de la commission qu’à l’avenir, il faudrait pouvoir fermer la prison du Bois-Mermet pour réaliser des économies financières. Je reviendrai plus tard sur le sujet au point 31 de l’ordre du jour.
Comme rappelé par ma collègue Cachemaille, dans le projet du Grand-Marais, le site des EPO n’est presque pas desservi par les transports publics. Or, l’on y construit un bâtiment de 400 détenus et 500, 600, 700 employés de plus − je ne connais pas exactement les chiffres. Rendre visite à un détenu aux EPO prend actuellement 30 à 45 minutes de marche. Il est bon de marcher, mais ce n’est pas pratique pour les gens qui n’ont pas de véhicule privé. Au sortir des votations du week-end, cela ne cadre pas très bien dans l’affaire. On construit dans un endroit non desservi par les transports publics, où l’on ne se rend pratiquement qu’en voiture. Comme visiteur, je constate que nous devons prendre les collègues qui ne sont pas véhiculés à la gare de Chavornay ou ailleurs. Nous nous arrangeons très bien, mais c’est une réalité. Il est vrai qu’un pénitentier aux abords d’une commune n’est pas très sexy. Cela peut être à Nyon, à Aigle, à Cossonay ou à Payerne. Là, c’est à Orbe. On ajoute une couche à Orbe. C’est bien et nécessaire, comme indiqué dans le rapport, mais il y a mieux comme emplacement, selon moi.
Ensuite, concernant la construction de ce nouvel établissement, j’ai une autre question pour Mme la conseillère d’Etat. Le programme prévoit de mettre des personnes en détention avant jugement, des ateliers de sport, de l’administration et du médical évidemment. Il n’y a pas uniquement de graves criminels dans ces pénitenciers, même si lors de nos visites, ils ne nous disent pas ce qu’ils ont fait, ils n’ont pas à le faire ni nous à le leur demander. Nous allons également visiter une fois par année le bâtiment à la rue du Simplon, en dessous de la gare de Lausanne. Cet établissement sert uniquement à la semi-détention avec travail externe et aux courtes peines privatives de liberté. A-t-on imaginé ce genre d’emplacement dans le nouvel établissement ? Aujourd’hui, avec l’absence de transports publics là-bas, ce n’est pas possible, alors que c’est nettement plus pratique au Simplon, à 30 secondes voire une minute de la gare. C’est plus pratique pour les gens détenus, surtout s’ils travaillent le matin et doivent être de retour rapidement en fin d’après-midi.
J’aimerais apporter un autre commentaire personnel. Dans les études sur le projet, il y a eu très peu de préoccupations quant à l’emprise sur le terrain agricole, contrairement à d’autres projets, notamment de routes − je reviendrai sur le week-end de votations. Même si le rapporteur a donné quelques précisions, il y a 4 à 5 hectares de très bonnes terres agricoles, dans la plaine de l’Orbe, qui sont pris par le projet. De plus, il ne faut pas oublier les 8 à 9 kilomètres de nouvelles clôtures autour du périmètre principal des PO.
Mon collègue a précisé que le groupe UDC allait suivre ce rapport. En effet, je vous encourage à le faire, mais avec des bémols. Finalement, madame la conseillère d’Etat, monsieur le Président du Grand Conseil, il serait agréable que lors du prochain débat, M. le conseiller d’Etat Venizelos soit présent.
On a nommé une commission qui s’est réunie et a travaillé sur plusieurs objets. Si, chaque fois que la commission travaille, nous avons droit à une séance de la Commission des visiteurs en plénum, cela commence à devenir ennuyeux. Chacun y va de sa petite idée et personnellement, cela me déplaît fortement.
Je parle à titre personnel, non en tant que présidente de la Commission des visiteurs de prisons. Nous ne sommes pas en train de mener un débat de la Commission des visiteurs. Nous en sommes à l’examen du crédit complémentaire pour financer les études relatives à la construction de la future prison des Grands-Marais, non à l’examen d’une étude ou à un constat sur le rapport Brägger, la surpopulation ou tout autre sujet. Dès lors, au vu de la position de la commission, je vous invite à voter en faveur de ces différents rapports.
Tout d’abord, rappelons à quel stade du projet nous en sommes : au crédit d’étude complémentaire pour financer les études relatives à la construction de la future prison des Grands-Marais en une étape au lieu de deux.
Gardant à l’esprit que nous en sommes à cette étape, les questions de mobilité doivent être étudiées. D’ailleurs, c’est clairement stipulé dans le cadre de la convention signée avec l’ATE, qui avait fait opposition au Plan d’affectation cantonal, non au projet de construction.
Ensuite, vous avez évoqué à plusieurs reprises le rapport concernant la surpopulation. Le département concerné m’indique qu’il devrait s’exprimer sur ce rapport d’ici la fin de l’année. Selon le département qui construit cet objet, le rapport que vous mentionnez va vous donner une idée à date. Nous en sommes aux études ; ensuite, la construction va durer plusieurs années. Cet objet, une fois construit, va durer plusieurs dizaines d’années. Le rapport sur la surpopulation ne vous donnera donc pas un éclairage actuel ni ne répondra à la question suivante : « pouvons-nous nous passer de cette prison pour les 40 prochaines années ? » La réponse est clairement non. La Commission des visiteurs de prison a relevé à plusieurs reprises certaines difficultés. Par ailleurs, des prisons doivent être rénovées. Or, la Commission des visiteurs l’affirme aussi : rénover une prison en utilisation n’est pas la meilleure des idées, comme nous l’avons remarqué, et ce n’est plus ce que nous souhaitons proposer. Faut-il disposer de ces études afin de créer la prison des Grands-Marais en une étape ? Oui. C’est ce à quoi vous devez répondre aujourd’hui, en octroyant au Conseil d’Etat ce crédit d’étude.
Vous avez aussi soulevé la question des terres agricoles : je vous renvoie à la page 2 du rapport de la commission qui indique qu’il n’est pas nécessaire d’utiliser les réserves cantonales. Vous avez posé plusieurs questions à l’attention de mon collègue Venizelos : il était présent aux deux séances de commission et a pu répondre à toutes les questions des commissaires. Vous avez aussi parlé des mesures alternatives à la détention : le canton de Vaud est l’un des cantons qui utilisent le plus ce type de mesures. Enfin, vous nous avez posé une question concernant le renvoi des criminels étrangers puisque le département constructeur et aussi celui qui s’occupe de la situation des étrangers en situation illégale. Le Conseil d’Etat a mis en priorité le renvoi les personnes en situation illégale qui ont un passé criminel. C’est l’une des priorités du Conseil d’Etat de renvoyer ces personnes.
J’espère avoir répondu à vos questions et je vous remercie de suivre votre commission en nous accordant ce crédit d’étude.
La discussion est close.
L’entrée en matière est admise par 98 voix contre 6 et 12 abstentions.
Il est passé à la discussion du projet de décret, article par article, en premier débat.
Art. 1 à 3. –
Lors du vote en commission, les trois articles ainsi que le projet de décret tel que proposé par le Conseil d’Etat ont été acceptés à l’unanimité des membres présents.
Les articles 1 à 3, formule d'exécution, sont acceptés à une large majorité avec plusieurs avis contraires et abstentions.
Le projet de décret est accepté en premier débat.
Les discussions ont été vives, mais sur l’ensemble du domaine carcéral, elles ont été courtes concernant ce projet. Je vous propose donc de soumettre l’avis du Grand Conseil au deuxième débat immédiatement.
Retour à l'ordre du jourLe deuxième débat immédiat est admis à la majorité des trois quarts (101 voix contre 6 et 8 abstentions).
Deuxième débat
Le projet de décret est adopté en deuxième débat et définitivement par 101 voix contre 6 et 10 abstentions.