23_MOT_10 - Motion Hadrien Buclin et consorts - Favorisons l’accès à la prévention et aux soins bucco-dentaires.
Séance du Grand Conseil du mardi 17 septembre 2024, point 31 de l'ordre du jour
Texte déposé
Les difficultés d’accès aux soins bucco-dentaires pour les personnes à faible revenu constituent une réalité bien documentée. Ainsi, plus de la moitié des familles (53%) disent avoir déjà renoncé à un traitement médical ou thérapeutique, comme des traitements dentaires, pour des raisons de coûts[1]. Cette réalité concerne en particulier les soins dentaires car ceux-ci sont de manière écrasante à charge directe des ménages : en effet, les ménages privés paient de leur poche près de 91% de la facture dentaire en Suisse, contre environ 54% en moyenne dans les autres pays de l’OCDE[2]. La difficulté d’accès aux soins bucco-dentaires est appelée à s’aggraver dans un contexte de baisse des revenus de la population : rappelons que les salaires réels en Suisse ont baissé de 0,8% en 2021 puis 1,9% en 2022[3].
Soulignons également que si les affections bucco-dentaires ne sont pas traitées de manière précoce, des complications sérieuses peuvent apparaître, soit localement, soit être la cause de problèmes de santé beaucoup plus graves : en d’autres termes, favoriser l’accès le plus large possible aux dépistages et aux soins bucco-dentaires permet un fort retour sur investissement à travers des économies dans les coûts de la santé. Comme l’a souligné récemment le Dr. Étienne Barras, médecin-dentiste conseil de l’Etat du Valais : « Un franc investi dans la promotion de la santé bucco-dentaire permet d’économiser 10 francs dans les soins »[4].
Le Conseil d’État a certes annoncé en mars 2022 un dispositif visant à favoriser l’accès aux soins dentaires pour les personnes précarisées ainsi que pour les enfants et les personnes entrant dans un établissement médico-social. La mise en place de ce dispositif est à saluer, mais il faut bien constater que son périmètre demeure très restreint au regard des enjeux. Pour cette raison, la présente motion demande de favoriser de manière plus large l’accès à la prévention et aux soins bucco-dentaires, en particulier à travers le remboursement par l’État, sous condition de ressources, d’une partie des dépistages et traitements dentaire des personnes à faible revenu. Les soussigné·es proposent plus précisément de rembourser les factures dentaires pour les personnes au bénéfice d’un subside à l’assurance-maladie jusqu’à hauteur de 500 francs par personne et par an, ce qui correspond au coût moyen des soins dentaires en Suisse par personne et par an[5]. Lors des débats en commission ou devant le Grand Conseil, ce montant pourrait cependant être modifié.
En partant de l’hypothèse que les personnes au bénéfice de subsides à l’assurance-maladie, soit environ 290'000, fassent appel à la prestation prévue par cette motion à hauteur de 350 francs par année et par personne en moyenne, le coût annuel pour les caisses de l’État serait d’environ 100 millions de francs par an. Si l’on y ajoute environ 5 millions pour un renforcement des moyens administratifs au sein du Département de la santé et de l’action sociale pour la mise en œuvre du dispositif ainsi que pour des campagnes de prévention de la santé bucco-dentaire, le total du dispositif demandé par la présente motion se monte à 105 millions par an : ce montant représente moins de 20% de l’excédent brut de 607 millions dégagé par l’État dans le cadre des comptes 2022, ce qui veut dire que le dispositif demandé par cette motion pourrait être financé sans avoir à prélever de nouvelles ressources fiscales ou cotisations sociales.
Certes, en 2018, une initiative populaire proposant la création d’une assurance pour les soins dentaires a été refusée : mais le score honorable réalisé par ce texte laisse selon nous la porte ouverte à la mise en œuvre d’un dispositif plus réduit, comme celui qui est proposé par cette motion. Alors que le coût de la présente motion peut être estimé, nous l’avons dit, à 105 millions, l’initiative soumise au vote en 2018 prévoyait un financement des soins dentaires à hauteur d’environ 380 millions, soit un dispositif beaucoup plus ambitieux[6].
La présente motion demande au Conseil d’État de proposer une modification de la Loi sur la santé publique et de toute autre législation cantonale pertinente telle que la Loi sur l’harmonisation et la coordination de l’octroi des prestations sociales et d’aide à la formation et au logement cantonales vaudoises, visant à charger l’État :
- d’assurer une promotion et une prévention efficientes en matière de santé et d’hygiène bucco-dentaires
- de promouvoir et faciliter la prise en charge médico-dentaire par des dépistages et des examens dentaires réguliers et par un accès aux soins dentaires, en particulier au moyen d'aides financières ouvertes à l’ensemble des personnes au bénéfice de subsides à l’assurance-maladie jusqu’à une hauteur de 500 francs par personne et par année (montant à indexer sur l’indice des prix à la consommation)
[1]24 Heures, « Les familles suisses sont sous pression financière », 4 avril 2023.
[2] Chiffres de 2011 cités dans l’Exposé des motifs et projets de décrets ordonnant la convocation des électeurs pour se prononcer sur l’initiative populaire « Pour le remboursement des soins dentaires » et sur le contre-projet du Grand Conseil, février 2017, p. 45.
[3] Office fédéral de la statistique, Indice suisse des salaires, Évolution des salaires en 2022.
[4]Cité par l’ATS, 27 avril 2023.
[5]24 Heures, « La facture très opaque des soins dentaires », 11 janvier 2018.
[6]24 Heures, « La facture très opaque des soins dentaires », 11 janvier 2018.
Conclusion
Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures
Liste exhaustive des cosignataires
Signataire | Parti |
---|---|
Théophile Schenker | VER |
Sylvie Podio | VER |
Joëlle Minacci | EP |
Alberto Mocchi | VER |
Patricia Spack Isenrich | SOC |
Nathalie Jaccard | VER |
Elodie Lopez | EP |
Vincent Keller | EP |
Rebecca Joly | VER |
Muriel Thalmann | SOC |
Yolanda Müller Chabloz | VER |
Claude Nicole Grin | VER |
Cédric Roten | SOC |
Alice Genoud | VER |
Denis Corboz | SOC |
Claire Attinger Doepper | SOC |
Sébastien Humbert | V'L |
Julien Eggenberger | SOC |
Yves Paccaud | SOC |
Martine Gerber | VER |
Felix Stürner | VER |
Yannick Maury | VER |
Sandra Pasquier | SOC |
Cendrine Cachemaille | SOC |
Marc Vuilleumier | EP |
Céline Misiego | EP |
Sylvie Pittet Blanchette | SOC |
Laurent Balsiger | SOC |
David Raedler | VER |
Vincent Bonvin | VER |
Mathilde Marendaz | EP |
Documents
- Rapport de minorité de la commission - RC min 23_MOT_10 - Sylvie Podio
- Rapport de majorité de la commission - RC maj 23_MOT_10 - Gérard Mojon
- 23_MOT_10-Texte déposé
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourLa majorité de la Commission de santé publique recommande au Grand Conseil de ne pas prendre en considération la motion du député Buclin. Affirmant que des ménages vaudois renoncent pour des raisons financières à procéder régulièrement à des contrôles de dépistage, voire à des soins dentaires, le motionnaire demande d'accorder à l'ensemble des personnes au bénéfice de subsides à l'assurance-maladie un soutien financier supplémentaire jusqu'à concurrence de 500 francs par année et par personne.
Un deuxième aspect de sa motion porte sur le renforcement des missions de l'Etat en matière de prévention. La cheffe du Département de la santé et de l'action sociale (DSAS) rappelle que même s'il n'a pas encore déposé de réponse formelle à la motion Claire Richard pour un soutien ciblé et efficace aux soins buccodentaires, le Conseil d'Etat déploie déjà depuis 2020 diverses mesures afin de mettre en place un dispositif aussi complet que possible répondant aux demandes de la motion. Il a entre autres mis en place des campagnes de prévention et de promotion de la santé buccodentaire visant particulièrement les jeunes, les personnes âgées et les personnes en situation de handicap, populations directement visées par la motion Claire Richard.
Le Conseil d'Etat a mis sur pied des groupes de travail chargés d'harmoniser la prophylaxie dentaire en milieu scolaire et d'organiser des cours de sensibilisation à la santé buccodentaire destinés au personnel d'accueil collectif. Il a octroyé un soutien supplémentaire à Point d’Eau-Lausanne offrant différentes prestations médicales et paramédicales aux personnes en situation précaire. Il a signé une convention avec MEDIDENT, plateforme gérée par Unisanté qui permet de superviser la qualité et la facturation des soins buccodentaires à charge des régimes sociaux. De surcroît, Mme la conseillère d'Etat rappelle que certaines communes subventionnent les soins buccodentaires de leurs habitants mineurs par le biais d'un service dentaire scolaire, voire le remboursement de traitements entrepris même dans le cadre privé. Au niveau cantonal, à fin 2022, un tiers des 278’000 personnes qui touchaient un subside pour l'assurance-maladie bénéficiaient déjà d'une prise en charge de ces soins buccodentaires par le biais du Revenu d’insertion (RI), des prestations complémentaires assurance-invalidité et des prestations complémentaires Famille. Les arguments des défenseurs de la motion sont mentionnés dans mon rapport, ils seront développés par la rapporteuse de minorité.
Les commissaires qui s'opposent à la motion relèvent que le montant requis par la motion est surfait. Questionné sur le fait que, bien que basant ses calculs sur un coût moyen de 350 francs, la motion réclame pourtant une aide financière à hauteur de 500 francs, le motionnaire convient que ses estimations se montraient relativement grossières. Les opposants rappellent également qu'en 2018, l'initiative populaire pour le remboursement des soins buccodentaires a été clairement rejetée par le peuple vaudois à plus de 57 %. Ils constatent que les trois pistes d'intervention retenues par la commission parlementaire en charge du dossier buccodentaire, en 2017, ont déjà été reprises par notre Parlement par le biais de l'acceptation de la motion Claire Richard. De plus, le Conseil d'Etat l'a déjà mise en œuvre, je vous l'ai dit au début de mon intervention. Ils relèvent finalement que la proposition portée par la motion ne revient finalement qu'à augmenter un subside à l'assurance-maladie et qu'elle est ainsi contraire à la volonté populaire exprimée il y a tout juste cinq ans. Au vote, la Commission de santé publique recommande au Grand Conseil de ne pas prendre en considération la motion du député Buclin par 8 voix contre 7.
Concernant la position du motionnaire et celle du Conseil d'Etat, la minorité renvoie au rapport de majorité qui développe ces éléments de manière exhaustive. La minorité estime, tout comme la conseillère d'Etat, que d'un point de vue de santé publique, il demeure clair que plus les contrôles buccodentaires et les séances d'hygiène augmentent, plus les complications sanitaires peuvent être évitées et les coûts des traitements subséquents diminués. L'inflation à laquelle les ménages sont confrontés actuellement comporte un risque supplémentaire de renoncement aux soins dentaires pour des personnes de condition moyenne ou modeste, alors que les personnes en grande précarité sont avec raison la cible privilégiée actuellement par le Conseil d'Etat.
La minorité estime que la motion tombe à pic en permettant l'accélération de la mise en place du dispositif de l'Etat, en particulier en réponse aux demandes de la motion Claire Richard. Elle n'a rien d'une mesure arrosoir, puisqu'elle cible les ménages au bénéfice d'un subside à l'assurance-maladie, c’est-à-dire des personnes qui ne sont pas en situation de grande précarité, mais suffisamment fragilisées financièrement pour renoncer à des soins dentaires réguliers et préventifs. Elle ne prévoit pas une aide illimitée, mais propose de fixer un montant plafond. Par conséquent, il s'agit d'une proposition de compromis raisonnable, qui reste relativement modérée et s'avère même moins coûteuse qu'initialement. La minorité souligne qu'à la surprise générale, en 2018, l'initiative populaire pour le remboursement des soins buccodentaires avait recueilli 43 % d'avis favorables, alors qu'elle était beaucoup plus généreuse que la présente motion. La consultation du peuple sur un projet plus restreint, comme la proposition portée par la motion Hadrien Buclin, obtiendrait peut-être une majorité en sa faveur. La minorité recommande donc au Grand Conseil de renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.
La discussion est ouverte.
L'accès à des contrôles périodiques et à des soins dentaires n'est aujourd'hui pas garanti, dans le canton, pour les personnes aux revenus modestes ou moyens. Des ménages renoncent à ces contrôles périodiques, voire à des soins pour des raisons financières. Cette situation s'explique par un des systèmes de financement des soins dentaires parmi les plus antisociaux au sein des pays européens. En effet, le financement repose presque exclusivement sur les ménages, alors que dans beaucoup de pays voisins, les soins dentaires sont remboursés par la Sécurité sociale. La situation en Suisse et dans le canton de Vaud risque encore de s'aggraver avec l'augmentation des primes maladie et l'érosion plus générale des revenus de la population. A cet égard, je rappelle que les salaires réels ont reculé durant trois années consécutives en Suisse, soit une détérioration très nette de la situation sociale. Pour cette raison, la présente motion demande de favoriser l'accès à la prévention et aux soins buccodentaires pour les personnes aux revenus modestes, en particulier par le biais du remboursement par l'Etat d'une partie des dépistages et traitements des personnes à faible revenu. Je propose plus précisément de rembourser les factures dentaires pour les personnes au bénéfice d'un subside à l'assurance-maladie jusqu'à hauteur de 500 francs par personne et par an, ce qui correspond au coût moyen des soins dentaires en Suisse par personne et par an. Je rappelle qu'une telle proposition profiterait à plus de 36 % de la population, soit le pourcentage des habitants du canton qui bénéficient d'un subside. Il ne s'agirait donc pas d'aider une petite minorité de personnes précarisées, mais de larges pans de la population aux revenus modestes ou moyens. C'est ce qu'il faut pour améliorer la situation, ce que rappelle une récente étude de l'International Health Policy Survey, puisqu’environ 26 % de la population suisse a renoncé à un soin ou à un examen dentaire pour des raisons de coût.
Par conséquent, nous sommes confrontés à une situation dans laquelle plus d'un quart de la population n'a tout simplement pas accès à des soins dentaires. Il s'agirait d'un très bon investissement pour la santé publique du canton, dans la mesure où si les affections buccodentaires ne sont pas traitées de manière précoce, des complications sérieuses peuvent apparaître localement ou être la cause de problèmes de santé beaucoup plus graves. En d'autres termes, favoriser l'accès le plus large possible aux dépistages et aux soins buccodentaires permet un fort retour sur investissement à travers des économies dans les coûts de la santé, et donc, in fine, constitue une limitation à l'augmentation des primes et du même coup des subsides pour le canton.
De la part des partis qui prétendent se soucier de la problématique de la hausse des primes, nous pouvons donc raisonnablement attendre un soutien à cette proposition. Une partie de l'argent investi dans cette mesure serait ainsi récupérée par le canton sous la forme d'économies dans les dépenses liées aux subsides. Comme l'a souligné récemment dans les médias le Dr Etienne Barras, médecin-dentiste-conseil de l'Etat du Valais : « Un franc investi dans la promotion de la santé buccodentaire permet d'économiser 10 francs dans les soins. » Ainsi, 1 franc équivaut à 10 francs de retour sur investissement.
Enfin, un dernier aspect se révèle également important : la motion demande que l'Etat s'engage davantage dans la prévention, notamment à travers des campagnes d'information et de dépistage. Il pourrait par exemple être question de modifier l'article 6 de la Loi sur la santé publique portant sur les missions du service de santé publique, pour confier plus explicitement une responsabilité à l'Etat en la matière, par exemple renforcer les moyens dévolus à cette tâche.
Certes, comme l'ont rappelé les deux rapporteurs, l’initiative populaire lancée par la gauche de la gauche, en 2018, a été rejetée par la population vaudoise. Toutefois, rappelons-le : cette initiative s’avérait beaucoup plus ambitieuse en prévoyant la création d'une nouvelle assurance sociale sur le modèle de l'AVS, c’est-à-dire avec des cotisations proportionnelles au revenu, financées paritairement entre employés et employeurs, soit une assurance à destination de toute la population et un remboursement pour des montants nettement plus élevés que les 500 francs proposés ici. Ma nouvelle proposition est par conséquent nettement plus modeste. Malgré le vote de 2018, remettre un projet plus modeste sur la table conserve toute sa légitimité. C'était d'ailleurs la promesse de plusieurs forces politiques, y compris à droite, que de présenter après la votation un projet plus limité visant à soutenir les personnes à faible revenu. Pour ces différentes raisons, j'espère que vous réserverez un bon accueil à cette motion.
Procéder à des contrôles buccodentaires réguliers est important pour plusieurs raisons : détecter et traiter rapidement les caries, les maladies des gencives et d'autres problèmes dentaires avant qu'ils ne s'aggravent. Le dentiste peut éliminer la plaque et le tartre que le brossage quotidien ne peut pas enlever, ce qui aide à prévenir les caries et les maladies parodontales. Certains problèmes de santé, comme le diabète ou les troubles nutritionnels, peuvent se manifester par ce type de troubles. Les dentistes peuvent donc repérer ces signes en amont et recommander, le cas échéant, un suivi médical adéquat.
Vous l'aurez compris, les contrôles buccodentaires réguliers sont essentiels pour prévenir et traiter les problèmes dentaires, maintenir une bonne hygiène buccale, détecter des signes de maladies générales et améliorer la santé. Il est donc primordial de faciliter l'accès à cette prestation en diminuant les complications sanitaires et ainsi éviter des coûts de traitement bien plus onéreux et lourds. Il est toujours moins cher de prévenir que de guérir. Les commissaires du parti socialiste vous demandent de prendre en considération cette motion et de la renvoyer au Conseil d'Etat.
Je partage plusieurs constats développés dans cette motion, tels que le fait qu'un pourcentage élevé de gens renonce à consulter pour des soins dentaires en raison de difficultés financières, ainsi que le fait que des dépistages précoces permettent d'éviter des complications ultérieures et ainsi de faire bon nombre d'économies. En revanche, je ne suis pas convaincu par la solution proposée par le motionnaire de rembourser les frais dentaires à hauteur de 350 à 500 francs par année pour les personnes au bénéfice d'un subside pour l’assurance-maladie. Cette solution reste une solution arrosoir pour toute une tranche de la population, au bénéfice des prestations. De surcroît, elle aurait un coût estimé selon les différents scénarii de 65 à 100 millions de francs par année.
Par ailleurs, si la réponse à la motion Claire Richard est encore en devenir, des mesures sont déjà mises en place telles que des contrôles scolaires étendus ou des contrôles dentaires complets dès la première anomalie constatée chez les jeunes. Des contrôles dentaires se font également avant les entrées en institution pour les seniors ou pour les gens avec un handicap, en institution. Il faut rappeler aussi la possibilité de prise en charge dentaire au Point d'eau à des prix très abordables. Ces interventions directes permettent de cibler au mieux les prises en charge des populations à risque et d'éviter des mesures arrosoir.
En conclusion, nous vous invitons à attendre la réponse donnée par le Conseil d'Etat à la motion Claire Richard et par conséquent à refuser la prise en considération de cette motion.
En 2018, il y a seulement cinq ans, l'initiative populaire pour le remboursement des soins buccodentaires a été refusée par 57 % des électeurs. La commission parlementaire en charge du dossier de santé buccodentaire en 2017 avait retenu trois pistes d'intervention. D’abord, le soutien aux personnes précarisées, ensuite, la prévention auprès des enfants et, enfin, la population des personnes en EMS. La motion Claire Richard, déposée également en 2018, a repris ces pistes et a été acceptée par le Grand Conseil. Depuis, le Conseil d'Etat n'est pas resté inactif et a agi dans le sens des trois axes définis. L'avis du Parlement a donc parfaitement été entendu par un Conseil d'Etat qui prend les mesures adéquates. Les travaux qui ont été retardés par la pandémie et par le décès du médecin-dentiste-conseil, mais ils avancent. Laissons donc le temps au Conseil d'Etat pour progresser dans ses travaux qui bénéficient déjà d'un soutien politique du Parlement. Le groupe PLR vous invite à suivre le rapport de majorité et à refuser de prendre en considération cette motion.
La motion du député Buclin propose un soutien financier accru pour les soins dentaires des bénéficiaires de subsides à l’assurance-maladie. Bien que l'idée soit proactive, le groupe UDC s'y opposera pour plusieurs raisons. D'abord, depuis 2020, notre Conseil d'Etat a déjà mis en place quelques mesures efficaces pour améliorer l'accès aux soins dentaires, notamment des campagnes de prévention et des projets scolaires. De plus, cette motion suggère une aide de 500 francs par personne et par année, alors que les coûts réels sont environ de 250 à 300 francs, ce qui pourrait entraîner des dépenses publiques inutiles. De plus, un tiers des bénéficiaires reçoivent également déjà une aide d'autres régimes sociaux. Enfin, il est important de noter que l'initiative de remboursement des soins dentaires a été rejetée par 57 % des votants, en 2018, ce qui témoigne d’une opposition claire du public. En résumé, les mesures en place sont adaptées aux besoins de la population, raison pour laquelle le groupe UDC appelle à ne pas considérer la motion de notre collègue Buclin.
Contrairement à ce que pense la majorité de la commission, les interventions mises en place ne permettent pas de prendre en charge des personnes précarisées afin d'éviter qu’elles renoncent aux soins par manque de moyens financiers. J'aimerais donc simplement mettre en exergue un témoignage issu de la « vraie vie », paru ce jour dans 24heures, d'une étudiante qui dit « même en touchant les subsides pour l'assurance-maladie, je me retrouve souvent à sec à partir du 20e jour du mois ». Le plus sévère de ces renoncements ? Avoir esquivé le dentiste alors qu'elle saignait des gencives, il y a quelques mois. Je vous invite donc à prendre en considération cette motion qui propose une solution modérée.
Nous avons évoqué à plusieurs reprises l'initiative refusée par le peuple vaudois en 2018. Il est intéressant de se pencher sur les raisons de ce refus et sur le débat de l'époque. L'entier de la classe politique avait alors estimé qu’il y avait effectivement un problème concernant le financement des soins dentaires, mais que la solution n'était pas opportune. Or, aujourd'hui, la motion Buclin a le mérite d’amener de nouvelles propositions plus modérées, répondant dans sa forme aux critiques formulées à l'époque. Ainsi, cette motion est pétrie de bon sens et s’avère relativement modérée par rapport aux besoins réels de la population. Par conséquent, je ne peux que vous inviter à la soutenir, dans l’esprit des débats de 2018 qui avaient démontré la nécessité d’agir.
Par rapport à la situation des étudiants, l'intervention de Mme Thalmann est très juste. Quand j'étais étudiant à plein temps, suite à un contrôle buccodentaire offert par l'Université de Lausanne pour la modique somme de 40 francs, j’ai dû me résoudre à me faire arracher quatre dents de sagesse. J’ai d’abord demandé un devis en Suisse : 1500 francs – cela sans compter la médicamentation relative à une telle intervention. Autant vous dire que lorsqu’on vit d'une bourse d'études qui couvre certes le loyer et la nourriture, cela n’inclut en tout cas pas ce genre de frais. Que faire ? Tout simplement ce à quoi je me suis moi-même résolu à l'époque : se rendre France, soit consentir à du tourisme dentaire ; je n'avais pas le choix. En France, je pouvais me faire arracher mes quatre dents de sagesse pour 500 euros. Il n'y avait pas d'autre solution.
S’il est à relever que des mesures sont mises aujourd'hui en place pour la prévention, il n'y en a pas beaucoup ou pas assez pour les soins réels, pas assez bien ciblées ou insuffisantes. Une somme de 500 francs par année ? Ce n'est pas la lune quand des frais dentaires – au-delà du simple contrôle – deviennent rapidement exponentiels. Les situations individuelles sont différentes les unes des autres, mais dans la précarité les solutions restent rares. Par conséquent, il me paraît important d'imaginer quelque chose à mettre en place. Nous avons évoqué les étudiants ; d'autres catégories souffrent aussi de ne pas avoir accès à des soins dentaires. Enfin, j’ajoute qu’à titre personnel, j'aurais évidemment préféré me rendre dans un cabinet dentaire en Suisse, plutôt que d'aller faire du tourisme dentaire à l'étranger : ce n'était ni des vacances ni une partie de plaisir !
J’aimerais amener quelques éléments de réponse à certains de nos collègues. A M. Vionnet, j'aimerais préciser qu'il s'agit bien d'un coût de 65 millions – et non de 100 – par an, un montant confirmé par le département. Je reconnais que le calcul initial de la motion était erroné, puisqu'il n'incluait pas les personnes déjà soutenues, notamment par l'aide sociale. Ainsi, le coût total du dispositif proposé serait de 65 millions, non de 100 millions. Ensuite, cher collègue Vionnet, vous évoquez une prestation mal ciblée ou arrosoir. Pour moi, elle ne l'est précisément pas, puisqu'elle tient compte du critère des subsides maladie, à mon avis le meilleur indicateur de l'état du revenu et de la fortune des personnes, puisqu’une partie de celle-ci est ajoutée au revenu pour le calcul du droit au subside. Ainsi, selon moi, il s’agit du meilleur indicateur possible, justement, afin d’éviter d'aider des personnes qui seraient suffisamment aisées pour se passer d'une aide.
En outre, de manière plus générale, la problématique me paraît sous-estimée par certains et certaines de nos collègues, à droite. Dans un pays qui compte parmi les 3 ou 4 pays les plus riches du monde, approximativement un quart de la population est exclu de tout ou d’une partie des soins dentaires pour des raisons financières, avec toutes les conséquences en cascade que cela peut entraîner sur l'état de santé général. Il est sans doute important de rappeler qu'une mauvaise santé buccodentaire est un facteur de risque, y compris pour des AVC ou des maladies cardiaques. La santé buccodentaire peut présenter des risques vitaux.
Pour toutes ces raisons, je pense que nous devons empoigner cette problématique de manière plus conséquente, plus sérieuse. En conclusion, cette motion me semble toujours apporter une réponse adéquate à la situation.
Dans ce genre de dossiers, tout le monde peut relater une expérience personnelle ou un cas compliqué. Toutefois, la votation a exprimé l’avis d’une majorité. Si les 43 % de personnes favorables devaient méritent une réponse, cela est en partie relayé par la motion de Mme Claire Richard.
En outre, j’ai quelques doutes quant à l’aide de maximum 500 francs. En effet, cette somme est remise en cause par son décalage avec le coût réel, ce que le gouvernement indique. Un calcul assez rapide montre que 36 % de la population – environ 300'000 personnes pour simplifier – multipliée par 500 francs, donne tout de même la somme de 150 millions. En outre, je tiens à signaler que les discussions étaient similaires concernant les subsides à l'assurance-maladie. Or, les proportions sont largement supérieures, puisqu’on arrive gentiment à 900 millions. En outre, je crains également que cette aide ne soit pas parfaitement ciblée, alors que la motion de Mme Claire Richard répond à des catégories de personnes qui en auraient besoin.
Enfin, à nouveau pour des raisons de coûts, tout simplement, je ne vois pas comment nous pourrions intégrer cela dans le prochain budget qui va nous occuper bientôt. Pour toutes ces raisons, je vous recommande de ne pas renvoyer la motion « Buclin-dentaire » au Conseil d'Etat.
Je me permets de rebondir sur le témoignage de notre collègue Pilloud qui se plaint des coûts de la santé dans notre pays. La conseillère d'Etat pourra probablement nous renseigner sur un aspect : quelle est la différence salariale du personnel infirmier entre la Suisse et la France ? Une estimation grossière suffira.
Veuillez m’excuser de reprendre la parole, mais vous me voyez obligé de contester les chiffres de M. Miauton qui parle de 150 millions par an, et donc de l'idée erronée que l'ensemble de la population éligible au subside dépenserait les 500 francs par an prévus dans cette motion. Ce n’est évidemment pas le cas. Une partie des personnes dont la santé buccodentaire va bien se contenterait du dépistage annuel recommandé qui coûte aux alentours de 200-250 francs. Une partie n’irait aussi qu’une fois tous les deux ans ou trois ans se soumettre à ce dépistage peut-être par manque de rigueur d’agenda. En tous les cas, il est certain que ces 500 francs par personne et par an ne peuvent pas être considérés comme base de calcul.
Ensuite, à l'intention de M. Bardet sur les coûts de la santé, tous les spécialistes de santé publique vous diront que la manière efficace de réduire les coûts de la santé se résume par davantage de prévention. Et, en matière buccodentaire, les dépistages sont un moyen de prévention efficace, puisque chaque franc investi permet d'en économiser 10 et aurait donc un réel impact sur les primes maladie dans le canton. Par conséquent, si vous êtes sincèrement favorable à une baisse des coûts de la santé, par le soutien à cette motion, vous trouverez une manière efficace d'y contribuer.
Pour reprendre les termes de mon préopinant, actuellement, en Suisse, seuls 2 % des coûts de la santé sont liés à la prévention... le reste est lié aux problèmes de santé pour lesquels la prévention est insuffisante. Or, aujourd'hui, c’est ce que propose la motion de M. Buclin. La réalité buccodentaire est d'abord liée à des facteurs génétiques. Certaines personnes ont une santé buccodentaire du tonnerre, quand chez d'autres, c'est une catastrophe ! Et il est vrai que pour pouvoir se prémunir contre les aggravations de la santé buccodentaire, la question des moyens financiers se pose. Or, une aggravation va nous coûter plus cher et se répercuter sur la santé au-delà du buccodentaire. En tant que législateurs, nous devons garder en tête qu’une prévention efficace et efficiente, comme le propose cette motion, amène des économies sur d'autres coûts, qui seront plus élevés sans cela.
Je souhaite réagir aux propos de notre collègue Miauton et lui rappeler que, dans le cadre du débat concernant le droit de préemption, il me semble qu'il n'avait pas fait beaucoup de cas des volontés de la majorité de la population. Alors, il me voit un peu surpris qu'il revienne faire des reproches à notre collègue Buclin et à sa motion tout à fait légitime, à mon sens, parfaitement ciblée sur les personnes qui en ont le plus besoin. Pour compléter aussi les propos de M. Bardet, je ne vois pas vraiment le rapport entre les coûts de la santé et les salaires du personnel soignant en France et en Suisse. M. Pilloud parlait de santé dentaire et non du système de santé vaudois, et d’ailleurs il n'a pas remis en question le coût général de la prestation, mais la manière dont la facture est répartie aujourd'hui, c’est-à-dire à 100 % sur le dos des patientes et des patients. Pourtant, un autre modèle permettrait de réduire ces coûts et – comme l'ont dit M. Buclin et de nombreux préopinants et préopinantes – et favoriser une approche préventive de la santé buccodentaire. Selon moi, sa motion est pondérée et ciblée. Le coût annoncé de 65 millions, grosso modo, correspond à un maximum, mais il serait probablement inférieur, puisqu’il est corrélé aux prestations utilisées ou non. Ainsi, dans ce cadre, et parce qu'elle cible justement les personnes qui en ont le plus besoin – les jeunes en formation, les personnes à l'AVS, les familles – à mon sens, nous avons tout intérêt à renvoyer cette motion au Conseil d'Etat.
Par rapport aux propos tenus en commission, je note un clair décalage entre la somme proposée par le motionnaire et les coûts réels : la somme est beaucoup trop haute. Ensuite, j'ai bien noté que le Conseil d'Etat avait revu cette somme à 65 millions. Toutefois, si vous reprenez les débats sur les subsides à l'assurance-maladie, on réalise que l’on peut nous donner tous les maximums possibles et imaginables, quelques années plus tard, ces coûts explosent. L'aspect des maladies congénitales est d'ores et déjà quelque chose qui est réglé par l'assurance-invalidité. Ensuite, pour répondre à mon collègue Cala, mon voisin de pupitre avait ouvert la brèche ce matin en abordant la question des Logements d’utilité publique (LUP), et vous revenez carrément sur le débat de la Loi sur la préservation et la promotion du parc locatif (LPPPL). Ce n'est pas tout à fait la même chose ! La LPPPL présentait un vide juridique et le Grand Conseil, dans sa souveraineté, a pris des décisions. Ici, il s’agit d’un débat en lien avec une partie de la population qui n'a pas gagné en 2018.
La prévention coûte toujours moins cher que devoir gérer les conséquences d’un manque de prévention. Nous venons d'ailleurs de l'aborder dans le cadre du postulat Florence Gross et consorts sur la problématique d'approvisionnement en médicaments et en matériel sanitaire, que nous venons de soutenir très largement. Il vaut d'ailleurs la peine de se rappeler que nous avions baissé la garde tant au niveau du canton que de la Confédération en termes de préparation de pénuries, parce que nous estimions que c'était inutile. Ce qui est piquant ? Ce sont souvent les mêmes qui veulent diminuer les coûts de la prévention qui se plaignent ensuite de l'explosion, notamment de ceux de la santé. Pour toutes ces raisons, pour le bien-être des personnes concernées, mais aussi pour nos budgets, y compris ceux de la santé, je vous invite à soutenir cette motion.
La discussion est close.
Le Grand Conseil refuse la prise en considération de la motion par 79 voix contre 58 et 1 abstention.
Je demande un vote nominal.
Retour à l'ordre du jourCette demande est appuyée par au moins 20 membres.
Celle et ceux qui souhaitent le classement de cette motion votent oui ; celles et ceux qui souhaitent sa prise en considération votent non. Les abstentions sont possibles.
Au vote nominal, le Grand Conseil refuse la prise en considération de la motion par 80 voix contre 58 et 1 abstention.
*insérer vote nominal