22_POS_54 - Postulat Yvan Pahud et consorts - Diminuer ou suspendre temporairement la taxe cantonale sur l’électricité, une aide essentielle pour les ménages et l’économie vaudoise !.

Séance du Grand Conseil du mardi 19 septembre 2023, point 16 de l'ordre du jour

Texte déposé

Les tarifs d'électricité pour l'année 2023 ont été annoncés à la fin du mois d'août.

L'ampleur de la hausse n'était pas prévisible dans la mesure où elle dépend de facteurs géopolitiques qui dépassent les frontières nationales, d'où la forte volatilité des marchés.

Sans intervention, notre économie et une partie des ménages se retrouveront dans une situation financièrement délicate.

En effet, cette hausse importante vient s'ajouter aux autres hausses (mazout, gaz, caisse maladie, etc.).

La facture d'électricité va prendre l'ascenseur pour la plupart des ménages du pays.

L'augmentation moyenne devrait s'élever à 27% en Suisse pour 2023 (et plus de 50% dans certaines régions), selon les données publiées par la Confédération début septembre.

En parallèle à cette hausse du prix de l'électricité, couplée à l'augmentation du prix de l'essence, la population devra faire face à une nouvelle hausse des primes d'assurance maladie. 

L'année prochaine s'annonce ainsi tendue pour les ménages. Loyer, assurance maladie, énergie : tout devient plus cher !

Notre Canton a une marge de manœuvre sur le montant de la taxe sur l’électricité qui est de 0,6cts/kwh.

Celui-ci pourrait par exemple suspendre ou diminuer temporairement le prélèvement de la taxe cantonale et le compenser par le budget ordinaire afin de garantir le financement du fond de rénovation.

Dès lors, le présent postulat demande au Conseil d'Etat d'étudier la possibilité de suspendre ou diminuer temporairement et dès 2023, le prélèvement de la taxe cantonale sur l’électricité tout en garantissant le financement du fonds cantonal pour l’énergie.

 

Sainte-Croix, le 20.09.2022

Yvan Pahud, Député

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
José DurusselUDC
Nicolas GlauserUDC
Sylvain FreymondUDC
Yann GlayreUDC
Denis DumartherayUDC
Thierry SchneiterPLR
Fabien DeillonUDC
Céline BauxUDC
Philippe LinigerUDC
Fabrice NeyroudUDC
Nicolas BolayUDC
Jean-François ThuillardUDC
Stéphane JordanUDC
Aliette Rey-MarionUDC
Pierre-Alain FavrodUDC
Cédric WeissertUDC
Jean-Bernard ChevalleyUDC
Fabrice MoscheniUDC
Fabrice TannerUDC
Philippe JobinUDC
Nicola Di GiulioUDC

Documents

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Nicolas Suter (PLR) — Rapporteur-trice

Tout d’abord, je remercie Mme Sylvie Chassot et M. Cédric Aeschlimann pour l’excellente tenue du secrétariat de la commission. Ce postulat aborde la question de la hausse des coûts de l’électricité qui s’additionnent à ceux de l’inflation généralisée que nous avons connue début 2023. Dans le canton, on est passé de 18,5 à plus de 30 centimes le kWh, ce qui pèse lourdement sur le porte-monnaie des ménages et des PME. Afin de les soulager, ce postulat s’attaque uniquement à la taxe sur l’électricité, de compétence cantonale, et qui se monte actuellement à 0,6 centime par kWh. Le postulant ajoute que la diminution temporaire de cette taxe ne devrait pas impacter le financement du fonds cantonal sur l’énergie ; la compensation pourrait se faire sur les fonds disponibles du canton. Le chef du département indique que la taxe en question rapporte grosso modo 25 millions de francs par année. Cette somme est injectée principalement dans le programme bâtiment qui permet de bénéficier d’argent fédéral, à savoir de 30 à 35 millions pour 2023.

Les bâtiments représentent 44 % de la consommation énergétique et un tiers des émissions de CO2. Cet argent est donc bien investi, puisqu’en plus de son impact positif pour l’énergie et le climat, les assainissements génèrent une plus-value pour l’économie. Si la commission est bien consciente de l’augmentation significative des factures d’électricité et de leur impact aussi bien pour les privés que pour les entreprises, elle considère que le postulat, par la mesure arrosoir qu’il propose, n’atteint pas sa cible. Pour un ménage, on parle d’un impact de 15 à 20 francs par année. Et pour le cas médiatisé du boulanger de Villeneuve – mentionné dans le 24heures du 15 janvier 2023 et dont la facture d’électricité été  multipliée par 11, passant de 2’500 à 28’000 francs – la réduction proposée par le postulat réduirait sa note de 300 francs par année, soit moins de 1 %. La commission recommande au Grand Conseil de ne pas prendre en considération ce postulat par 8 voix et 7 abstentions.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. Yvan Pahud (UDC) —

Pas un jour ne passe sans qu’on nous parle d’augmentations de prix. Notre population est durement touchée par l’inflation, et le pouvoir d’achat est devenu, pour l’année 2023, son principal sujet de préoccupation. Le dépôt de ce postulat faisait suite à la première salve d’augmentations des prix de l’électricité, mais aujourd’hui – au mois de septembre – on nous annonce encore des hausses du prix d’électricité qui devraient s’élever en moyenne à près de 20 %. Nos ménages souffrent !

On peut agir de diverses façons pour aider notre population à payer ses factures. Divers pays européens ont effectué des tests. La France a mis en place le chèque vie chère pour que sa population puisse faire face – surtout les gens à bas revenu – à leurs factures ; avec la proposition qui vous est faite par le biais de ce postulat, nous agissons non par des subventions, mais par le principe d’encaisser moins. L’on ponctionne donc moins la population sur la marge de manœuvre dont l’Etat dispose. Certains vous diront « l’économie qui va être faite représente un café par jour, ce n’est pas énorme » ; mais un café plus un café plus un café, à la fin de l’année, ce sont des milliers de francs. Pour des ménages qui parviennent à peine à boucler le mois, un petit café additionné aux 100, voire aux 1000 autres, fait une différence ; vous n’avez qu’à demander aux personnes concernées. Je rappelle que le postulat n’est pas contraignant, mais une proposition au Conseil d’Etat d’utiliser sa marge de manœuvre de 0,6 % sur les taxes sur l’électricité.

Je rappelle que le fonds sur l’énergie, soit la taxe sur l’électricité qui représente 25 millions selon le Conseil d’Etat, est injecté dans le fonds de rénovation. Je propose, par le biais de ce postulat, que le Conseil d’Etat utilise le budget de l’Etat pour alimenter ce fonds. Le bénéfice de la Romande Energie s’est élevé à plus de 53 millions en 2022. Sachant que le canton de Vaud en est l’actionnaire majoritaire, une bonne partie de ces 53 millions est reversée à l’Etat de Vaud, qui peut utiliser cet argent, trop ponctionné auprès de l’utilisateur, pour alimenter le fonds sur l’énergie. C’est donc une proposition concrète, simple à mettre en œuvre et non contraignante pour le Conseil d’Etat, mais qui va soulager le porte-monnaie de la classe moyenne et de ceux qui ont des difficultés à payer leurs factures. La population attend des mesures. Nous pouvons agir par le biais de cette taxe. Je vous invite à soutenir ce postulat.

M. Grégory Bovay (PLR) —

Le postulat s’intéresse à la hausse des coûts de l’électricité en sus de l’inflation et propose de diminuer ou de suspendre temporairement la taxe cantonale sur l’électricité. Cela étant, l’analyse de mon collègue Pahud est partiellement correcte, car il y a une augmentation des coûts de l’électricité depuis bientôt deux ans ; mais elle est aussi quelque peu erronée, car le postulant parle de diminution et de suspension temporaire. Or, la situation n’est pas conjoncturelle, mais structurelle. On le voit bien avec l’annonce de l’augmentation de 18 % des coûts de l’électricité pour l’année prochaine. Le groupe PLR est extrêmement sensible au pouvoir d’achat de la population vaudoise. A cet égard, je vous rappelle que, peu avant le dépôt du présent postulat, ma collègue Florence Gross avait déposé une motion qui demandait au Conseil d’Etat d’abaisser l’ensemble des taxes cantonales de 20 % pour une durée d’une année ; certes, c’était temporaire, mais c’était aussi un vrai bol d’air pour le pouvoir d’achat des Vaudoises et des Vaudois.

En l’espèce, la proposition du postulant est tout à fait intéressante, mais elle ne vise que la taxe sur l’électricité. Elle n’aurait qu’un effet extrêmement faible sur le pouvoir d’achat, soit une dizaine de francs, pour un ménage et par année. Par ailleurs, rappelons que le produit de la taxe de l’électricité est injecté dans le programme bâtiment qui permet de bénéficier d’une manne de la Confédération. En proposant de compenser cette perte grâce aux bénéfices réalisés par le canton ou la Romande Energie, le postulant propose des solutions qui ne sont ni pérennes ni applicables. Elles ne sont pas pérennes, car si le canton a connu des résultats bénéficiaires ces dernières années, nous n’avons pas l’assurance que cela continuera notamment au regard de la situation économique ambiante actuelle. A cet égard, je suis assez circonspect lorsque le postulant prend exemple sur la France, quand on sait que la dette publique en France atteint 30’000 milliards d’euros de dettes. De plus, les solutions ne sont pas applicables, car si l’Etat est bien l’un des actionnaires majoritaires de la Romande Energie, cette dernière reste une société anonyme avec sa gouvernance propre ; le canton ne saurait la contraindre à affecter ses bénéfices dans le programme bâtiments. En raison de ce qui précède, la majorité du groupe PLR vous invite donc à vous abstenir sur cet objet.

M. Fabrice Moscheni (UDC) —

Beaucoup de choses ont été dites. J’aimerais amener quelques points supplémentaires et peut-être reprendre certains points présentés par mon préopinant pour lui montrer que quelques centimes sur les kWh ne sont pas si anodins que cela. Premièrement, nous sommes tous d’accord : il y a un problème par rapport à l’inflation et à son impact sur la classe moyenne. Il y a plusieurs causes à cette inflation, mais il est reconnu que l’un des problèmes principaux est l’augmentation du prix de l’énergie. Or, l’énergie n’est pas simplement le prix que vous payez en plus sur votre consommation directe ; l’énergie est aussi l’augmentation du petit pain que vous achetez chez votre boulanger, car lui-même subit aussi l’augmentation du prix de l’énergie et la reporte sur le prix du petit pain. Cela va aussi influencer le prix de votre chou-fleur qui, pour être conservé, consomme de l’énergie électrique ; son prix va donc augmenter. L’énergie a un impact sur l’inflation, avec un effet démultiplicateur ; il est donc très important de gérer cette croissance.

Deuxièmement, au niveau fédéral, le surveillant des prix M. Meierhans a clairement appelé les institutions publiques à y aller mollo sur les taxes, puisqu’il a reconnu que c’était l’un des gros problèmes par rapport à l’augmentation des prix et à cette inflation rampante.

Finalement, on peut se demander si l’Etat de Vaud peut se permettre de fournir un effort financier et de suspendre cette taxe de 0,6 centime. En effet, 0,6 centime sur le kWh, représente 25 millions de francs. Or, c’est simplement une fiscalité de plus. L’autre fiscalité, c’est, par exemple, les bénéfices de la Romande Energie. Cette dernière, en plus des 25 millions perçus grâce à ces 0,6 centime, a réalisé, en 2022, 60 % de bénéfices de plus qu’en 2021 ; elle est donc passée de 35 à 54 millions de bénéfice, soit à peu près 20 millions de plus.

Dès lors, en pleine crise inflationniste, l’Etat de Vaud a directement impacté l’inflation en la faisant augmenter avec l’augmentation fiscale à travers les bénéfices de la Romande Energie et, accessoirement, cette taxe perçue sur le kWh.

Diminuer ou suspendre cette taxe est une évidence, car comment expliquer aux Vaudois que non seulement le canton de Vaud ne combat pas l’inflation, mais, pire, qu’il l’alimente par une augmentation de la fiscalité sur l’énergie ? Pour toutes ces raisons, je vous invite à renvoyer ce postulat au Conseil d’Etat.

M. Guy Gaudard (PLR) —

Je déclare mes intérêts : je suis installateur-électricien diplômé. A ce titre, le postulat de notre collègue Pahud est tout à fait cadré à la situation économique que vivent la majorité de nos concitoyens qui glissent doucement de la classe moyenne à la classe modeste. Le postulant a expliqué les raisons de sa demande. Si, pour le conseiller d’Etat, l’argent ne pousse pas sur les arbres, nos concitoyens utilisent régulièrement les expressions d’antan : « un sou est un sou », « il n’y a pas de petites économies », « les petits ruisseaux font les grandes rivières », etc. Notre Parlement aurait tort de négliger ou d’ignorer la pression économique actuelle qui appauvrit une partie de notre population. La proposition de compensation de notre collègue est bonne. En effet, d’autres financements du fonds cantonal de l’énergie pourraient l’alimenter par le delta que représente une suspension temporaire de la taxe cantonale sur l’électricité – 25 millions par an, comme l’a dit mon collègue Moscheni. Dès lors, je vous invite à accepter la prise en considération de ce postulat.

M. Laurent Balsiger (SOC) —

En effet, la situation des uns et des autres, en particulier celle des familles et des personnes les plus vulnérables, est préoccupante. Il faut agir au niveau des services sociaux – ils le font déjà et on va s’assurer que ce soit le cas, au travers du prochain budget ; pour cela, je me réjouis de pouvoir compter sur le soutien de l’entier du plénum. Un des piliers est que chacune et chacun puisse vivre décemment dans ce canton ; c’est une lutte importante.

Une autre lutte importante est de mettre en œuvre la révolution énergétique qui sera favorable au climat. Plus on est efficace dans l’énergie, moins on consomme et paie cette énergie. Les 25 millions dont il est question seront justement utiles pour soutenir le programme bâtiments et les travaux de rénovation qui sont bénéfiques tant pour les propriétaires que pour les locataires, car finalement ces derniers vont payer moins de charges.

Sur le long terme, les défis énergétiques que nous connaissons ne vont pas disparaître. Nous avons donc intérêt à investir aujourd’hui pour moins consommer demain et produire une énergie locale et durable. Le problème est réel, mais nous devons le résoudre autrement, par le biais de soutien à celles et ceux qui en ont besoin. Cet argent est absolument nécessaire pour que nous prenions ce virage énergétique qui sera profitable à toute notre économie, à toute notre société, à chacune et à chacun. C’est l’un des meilleurs investissements que l’on puisse faire. Cette taxe n’est pas d’un café par jour, mais de 15 francs, soit de 3-4 cafés par année pour un ménage, un investissement important pour l’avenir des uns et des autres. Je vous invite donc à refuser ce postulat.

M. Arnaud Bouverat (SOC) —

Je m’inquiète d’une vue à très court terme, parce que la facture énergétique risque d’exploser ces prochaines années pas seulement cette année et la suivante, mais durant les futures décennies si nous ne réussissons pas à passer le tournant énergétique. Je serais ouvert à proposition concrète de M. Pahud qui serait par exemple : « Trouvons des moyens sur la fiscalité directe plutôt que sur ces taxes, afin de réussir à financer de manière plus efficace le tournant énergétique pour qu’il pèse de manière beaucoup plus sociale sur le budget des ménages vaudois ». Malheureusement, il n’y a pas l’ombre d’une telle proposition dans le postulat de M. Pahud ; il ne propose ici que de reporter le problème un peu plus loin. Qui va financer ce tournant énergétique, si ce n’est pas tous les ménages ? J’ai un réel problème, parce que la facture sera d’autant plus violente, y compris pour les personnes les plus modestes, dans les décennies à venir. Dès lors, il faut aussi être responsables et une réallocation pourrait être opportune, mais ce n’est pas la proposition qui nous est soumise aujourd’hui.

De plus, le débat budgétaire et fiscal sera intéressant ; on devra discuter du pouvoir d’achat et de savoir qui on allège et qui on soutient durant les prochaines années. Jusqu’à maintenant, je n’ai pas l’impression que les mots d’ordre donnés par l’échiquier politique qui représente ce postulat vont dans le bon sens. Dans ce contexte, je suis opposé aux effets d’annonce et aux esbroufes que l’on voit venir avec cette proposition. Il faudra débattre du pouvoir d’achat dans les débats fiscaux et budgétaires de l’année prochaine.

M. Yvan Pahud (UDC) —

Monsieur Balsiger, il y a l’économie directe et il y a l’économie indirecte, comme cela a été mentionné par mon collègue Moscheni. L’économie directe, c’est les 0,6 centime que les personnes vont directement économiser ; et l’économie indirecte, c’est l’augmentation qu’ils ont subie sur tous les produits qu’ils consomment chaque jour. En effet, les boulangers ont connu une augmentation d’électricité et l’ont répercutée sur le prix du pain. C’est donc l’ensemble du panier de la ménagère qui a augmenté. Aujourd’hui, nous avons les moyens de fournir un effort et soutenir notre population qui est durement touchée, mais peut-être que nous n’en aurons plus les moyens dans trois ou quatre ans. Alors, en agissant temporairement, la population aura peut-être eu le temps de s’adapter à la situation.

J’aimerais aussi rappeler à M. Bouverat que j’ai eu l’honneur de déposer une interpellation quant au bénéfice de 53 millions de la Romande Energie que je trouve vraiment indécent en cette période d’inflation où notre population souffre. Mardi dernier, dans le groupe Energie, nous avons eu le plaisir d’entendre la vice-présidente de l’ElCom affirmer que, quand les prix ont été fixés pour 2023, ils étaient au plus haut et qu’ils sont redescendus. Cela va se traduire simplement par un bénéfice record de la Romande Energie. Certes, une partie de ce bénéfice est reversé au Canton, mais c’est un impôt caché, puisque le canton finance son budget ordinaire par le biais de la taxe. Selon moi, c’est antisocial. Il faut pouvoir suspendre temporairement cette taxe pour redonner un peu de pouvoir d’achat à notre population qui souffre.

M. Fabrice Moscheni (UDC) —

Monsieur Bouverat, vous et moi, du moins la droite et la gauche avons deux stratégies : vous préférez collecter l’argent et ensuite le redistribuer, alors que nous préférons laisser l’argent dans la poche des contribuables et de la classe moyenne. Chacun a sa stratégie et sa vision de la société. Par rapport aux taxes, je voudrais quand même en appeler à la gauche de cet hémicycle : sachez que les taxes, comme celles sur l’électricité, sont la fiscalité la plus antisociale qu’il soit. Riche ou pauvre, vieux ou jeune, vous payez le même montant. C’est une approche très antisociale, car elle n’est pas liée à la capacité financière de la personne ; cela devrait quand même en appeler à votre fibre sociale.

Concernant le prix de l’électricité, on nous dit que cela représente un café par année, ou trois cafés par année. Il faut revoir vos principes d’économie ! L’énergie a un effet démultiplicateur, puisqu’elle est partout : dans les transports, la consommation, la nourriture, le chauffage. Il y a la consommation directe et indirecte qui aura un impact important sur l’inflation. Dès lors, l’inflation n’est pas ces 0,6 centime, mais aussi tous les effets indirects générés. Comment expliquer aux Vaudoises et Vaudois que le canton de Vaud contribue à l’augmentation de l’inflation ? L’augmentation du prix de l’énergie n’a eu aucun impact pour le canton de Vaud ; c’est même le contraire, puisqu’il a collecté plus d’argent. Aujourd’hui, la classe moyenne souffre et n’arrive pas à boucler ses fins de mois, alors que le canton de Vaud s’est fait davantage d’argent dans cette crise. C’est un message assez contradictoire ! Nous politiques avons la responsabilité de représenter les gens qui nous ont élus et d’essayer, dans la mesure du possible, de les préserver ou de les aider dans cette crise inflationniste. Dès lors, pour toutes ces raisons, je vous demande de renvoyer ce postulat au Conseil d’Etat.

M. Nicolas Suter (PLR) — Rapporteur-trice

Il n’est pas dans mon habitude de défendre la Romande Energie ; je déclare mes intérêts : je travaille aux services industriels de Genève et, pour toutes les parties hors monopole, nous sommes en concurrence directe. Toutefois, j’aimerais quand même dire que pas un franc du bénéfice de la Romande Energie provient de la taxe de 0,6 centime. Supprimer temporairement cette taxe ne va pas diminuer d’un franc le bénéfice de la Romande Energie, puisqu’il n’y a aucune relation. Les gestionnaires de réseau de distribution d’énergie (GRD) collectent la taxe et la reversent entièrement à l’Etat.

M. Fabrice Moscheni (UDC) —

Ce que mon préopinant vient de dire est tout à fait correct. Il n’en reste pas moins que l’Etat collecte les deux sources d’argent, c’est-à-dire le bénéfice et la taxe. Ces deux fiscalités s’ajoutent. Dès lors, aujourd’hui, la Romande Energie réalise 54 millions de bénéfice plus 25 millions de taxes. Nous demandons aujourd’hui que la Romande Energie réalise 54 millions de bénéfice et collecte zéro franc de taxes. Pour le canton, il y a donc effectivement une perte de 25 millions, tout en sachant que, par rapport à 2021, le canton aura de toute façon gagné près de 20 millions grâce à l’augmentation des bénéfices de la Romande Energie. C’est là où le bât blesse : pendant que la classe moyenne souffre, le Canton gagne plus d’argent. Cela pose vraiment un problème de déontologie.

M. Vassilis Venizelos (C-DJES) — Conseiller-ère d’Etat

Nous aurons d’autres occasions de débattre sur la Romande Energie, puisque différentes interpellations ont été déposées ; le Conseil d’Etat y répondra prochainement. M. Suter a raison de rappeler le fonctionnement, le prélèvement et la redistribution des fruits de la taxe sur l’électricité des différents GRD. Il faut peut-être aussi rappeler que la Romande Energie est une entreprise privée, cotée en bourse ; évidemment, le canton est actionnaire au sein de cette société et, à travers son rôle d’actionnaire, a la possibilité d’orienter l’activité de ce gestionnaire de réseau. Toutefois il faut à tout prix décorréler les bénéfices réalisés par les GRD et les tarifs d’électricité proposés. Ces tarifs d’électricité sont souvent composés d’énergie achetée sur les marchés ; comme la Romande Energie ne produit pas 100 % de l’énergie qu’elle revend, elle doit se servir sur les marchés, durant plusieurs années, avec une fluctuation des prix que l’on ne maîtrise pas. 
Pour cette raison – et là, je rejoins le député Bouverat – la priorité doit être évidemment dans l’autonomie énergétique et dans la production énergétique. Plus nous serons autonomes, moins nous serons dépendants des importations et de la fluctuation des marchés, et exposés à des augmentations de tarifs comme celles que nous connaissons. C’est précisément la stratégie de la Romande Energie qui va investir 1,5 milliard ces prochaines années pour augmenter sa capacité de production ; d’autres GRD sur le territoire vaudois vont faire de même. 
J’en reviens au postulat. Evidemment Canton ne peut pas aller chercher à Berne l’argent qu’il ne met pas dans le programme bâtiments. La part cantonale représente 60 millions pour 2023 ; en 2022, 50 millions ont permis à 1000 bâtiments d’être rénovés et de bénéficier d’une subvention cantonale, et à 1500 chauffages fossiles d’être remplacés. Ce n’est donc pas rien. C’est de l’argent qui est ensuite redistribué dans l’économie locale. Chaque franc investi dans la transition énergétique rapporte 5 francs dans l’économie locale. On ne va pas financer des acteurs pétroliers ou des clubs de football qui jouent en Champions League. Cela soutient très concrètement notre économie locale et les emplois locaux, ce qui est essentiel. Chaque fois que l’on retire la part vaudoise, on ne peut pas aller en chercher l’équivalent du côté de la Confédération. Pour l’année passée, c’était un rapport de l’ordre de 0,95 pour être exact ; chaque franc investi par le Canton rapporte 1 franc de la Berne fédérale. Pour 2024, le taux devrait être de 1,3, soit un taux encore plus intéressant. Evidemment, nous avons besoin de cet argent pour accélérer la transition énergétique, pour renforcer notre autonomie énergétique et donner, sur le long terme, un impact réel et concret sur l’augmentation des tarifs. C’est probablement la meilleure stratégie. 
J’entends les propositions faites dans ce postulat et les alternatives que l’on pourrait imaginer en nous appuyant sur la redistribution d’une partie des bénéfices de la Romande Energie. Pour rappel, dans le budget 2023, le bénéfice de la Romande Energie redistribué au canton est de 16 millions. Nous sommes donc loin des 25 millions que nous rapporte la taxe sur l’électricité. Evidemment, à court terme, l’augmentation des tarifs de l’électricité et des primes d’assurance maladie et l’impact de l’inflation sur le pouvoir d’achat des Vaudoises et des Vaudois nécessitent des réponses politiques fortes, mais pas sectorielles. Nous avons besoin de réponses globales. Quoi qu’il en soit, en matière de transition énergétique, nous devons investir massivement ces prochaines années pour éviter d’exposer la population et la société à une augmentation des coûts de l’énergie et des tarifs encore plus importants. Dès lors, je vous invite à refuser ce postulat. 
 

M. Yvan Pahud (UDC) —

J’aimerais réagir aux propos de M. le conseiller d’Etat concernant la perte du financement fédéral, car c’est faux. En effet, je répète les conclusions du postulat : « … le prélèvement de la taxe cantonale sur l’électricité, tout en garantissant le financement du fonds cantonal pour l’énergie ». Cela signifie que les 25 millions seront pris par le budget et que nous pourrons obtenir le même montant de la Confédération. Dès lors, avec ce postulat, le fonds sur l’énergie est assuré.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil refuse la prise en considération du postulat par 88 voix contre 25 et 14 abstentions.

M. Yvan Pahud (UDC) —

Je demande un vote nominal.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui suivent la recommandation de la commission, à savoir le classement du postulat, votent oui ; celles et ceux qui souhaitent la prise en considération du postulat votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, le Grand Conseil refuse la prise en considération du postulat par 88 voix contre 22 et 19 abstentions.

* insérer vote nominal.

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