LEG_678004 - Exposé des motifs et projet de décret instituant des mesures de soutien à la diversité des médias et Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur le postulat Valérie Induni et consorts – Pour un vrai soutien à la presse et aux médias (17_POS_238) (190) (2e débat).

Séance du Grand Conseil du mardi 9 mars 2021, point 17 de l'ordre du jour

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Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Il est passé à la discussion du projet de décret, article par article, en deuxième débat.

Art. 3.—

Mme Anne Baehler Bech — Rapporteur-trice de majorité

La commission s'est réunie le 26 janvier, suite à la volonté exprimée par le Grand Conseil de trouver une solution aux difficultés soulevées par le dépôt de notre collègue Berthoud d'un amendement à l'alinéa 1 de l'article 3 de l'exposé des motifs et projet de décret, soit de discuter sur sa portée et ses conséquences. Suite aux discussions de la commission, il apparaît en effet que l'amendement déposé entraverait l'action de l'État et impacterait principalement les petits journaux, ce qui irait à l'encontre des objectifs du projet de décret acceptés par la majorité de la commission. La politique d'insertion d'annonce du Conseil d'État serait notamment particulièrement affectée. L'idée de ne pas injecter de l'argent public à des groupes de presse distribuant des dividendes est parfaitement compréhensible. Telle quelle, elle se heurte toutefois à la complexité de la réalité. En effet, il n'y a pas que les grands groupes de presse qui peuvent distribuer des dividendes. Tous les groupes, petits ou grands, constitués en SA, peuvent être concernés. A cet égard, contrôler juridiquement et pratiquement l'interdiction de distribuer des dividendes pourrait être complexe, chronophage et pourrait même devenir une véritable usine à gaz.

Par ailleurs, la possibilité laissée à l'État de faire passer des annonces dans le cadre du budget ordinaire serait réduite en cas d'acceptation de l'amendement. En effet, la mise en place de cet exposé des motifs et projet de décret ne concerne pas seulement les 6,2 millions mais bel et bien l'ensemble de la politique publique en lien avec la presse, car l'exposé des motifs a été pensé de cette manière. Le chapitre 4.1.1 de ce dernier intitulé « Plan média d'annonces publicitaires » le rappelle expressément. Ainsi, avec cet amendement, il deviendrait difficile de publier des annonces payantes dans un journal distribuant des dividendes, parce que la pratique actuelle de l'annonce d'information ne se distinguerait plus avec celle, nouvelle, d'aide à la diversité des médias. Pour aller dans le sens de l'amendement, tout en évitant ses effets délétères, le Conseil d'État propose un nouvel amendement figurant cette fois à l'alinéa 2 de cet article 3, les mesures de soutien pourraient ainsi être soumises à des conditions et des limitations. Ces dernières seraient toutefois définies dans le règlement d'application. La deuxième phrase de l'actuel alinéa 2 deviendrait l'alinéa 3.

Fort des explications et clarifications obtenues lors de la séance, notre collègue auteur de l'amendement le retire et accepte de se rallier au nouvel amendement proposé. Toutefois, dans la mesure où le Parlement n'est pas maître du règlement, il souhaite l'assortir d'un vœu afin de rappeler expressément les objectifs initiaux de son amendement. Au vote, tant l'amendement que le vœu que vous trouvez dans le rapport de la commission, sont acceptés à l'unanimité par la commission. Je ne peux que vous recommander de suivre la commission et de poursuivre dans la voie du premier débat, soit d'accepter les amendements proposés par la majorité de la commission.

« Art. 3. —

Al. 2 : Le Conseil d'État fixe par voie réglementaire les modalités des mesures de soutien. Il définit les charges, conditions, limitations auxquelles il y a lieu d’assortir leur octroi.

Al. 3 : Il veille en particulier à ce que ces mesures soient affectées aux activités médiatiques proprement dites. »

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Afin d'éclaircir nos débats, nous en sommes à l'article 3 intitulé « Types de mesures » et nous discutons d'un amendement à alinéa 2 ainsi que de la création d'un nouvel alinéa 3.

M. Alexandre Berthoud (PLR) —

Cette séance a permis de clarifier un certain nombre d'éléments. Aller chercher des médias qui ne distribuent pas de dividendes ne constitue pas une usine à gaz, c'est même relativement simple, puisque nous l'avons mis en place dans le cadre des crédits COVID. Un argument est toutefois extrêmement important : cet exposé des motifs et projet de décret ne concerne pas uniquement les 6,2 millions de francs pour ces cinq prochaines années, mais bien l'ensemble de la politique publique en lien avec la presse. En clair, dans le budget ordinaire, toute annonce qui se réalise ou qui se réaliserait suite à mon amendement, ne pourrait pas être publiée dans un journal, un quotidien ou un hebdomadaire distribuant des dividendes. Or, il ne s'agissait pas du but de mon amendement. La discussion que nous avons notamment eue avec le chancelier a permis de clarifier cet aspect lors de la dernière séance de commission. Cet exposé des motifs et projet de décret traite donc du montant à disposition pour l'aide à la presse, mais surtout de la relation que le Conseil d'État entretient avec la presse.

La proposition du gouvernement sur cet amendement me convient donc très bien. Je me permets toutefois de mentionner le vœu voté à l'unanimité de la commission : « Dans le cadre du règlement qu'émettra le Conseil d'État dans la politique publique en lien avec les médias, il privilégiera : 1) Les bénéficiaires qui ne distribuent pas de dividendes, y compris dans le cadre d'un groupe. 2) Les entreprises qui ne recourent pas à des licenciements économiques malgré des résultats bénéficiaires, y compris dans le cadre d'un groupe. 3) Les bénéficiaires qui recourent à la formation ». Étant donné la discussion que nous avions eue lors du débat précédent, le Parlement pourra demander un état de situation et éventuellement des rapports. Il est important de préciser cet élément. A titre personnel, j'ai accepté de retirer mon amendement au profit de celui du gouvernement.

Mme Nuria Gorrite (C-DCIRH) — Conseiller-ère d'État

Je remercie le plénum d'avoir accepté le renvoi de cette question à la commission en début d'année. En effet, cet examen a été utile afin, d'une part, de clarifier les impacts et motifs de l'amendement Berthoud et, d'autre part, de venir avec une proposition intégrant les préoccupations d'une partie du plénum, tout en ne privant pas l'État de cette politique publique importante en direction du soutien à la diversité et à la pluralité des médias. Le gouvernement vous invite également à soutenir cet amendement ainsi que le vœu exprimé par la commission et qui cadrera l'esprit général entourant la réalisation de ce règlement d'accompagnement pour la politique publique que nous mettons en place au travers de cet exposé des motifs.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

L'amendement de la commission (article 3, alinéa 2) est adopté à une large majorité.

L'alinéa 3 (nouveau), est adopté avec 1 abstention.

L'article 3, amendé, est adopté à une large majorité.

Les articles 4 et 5 sont adoptés.

Le projet de décret est adopté en deuxième débat.

Mme Anne Baehler Bech — Rapporteur-trice de majorité

Compte tenu du bel accord trouvé et de la nécessité de pouvoir faire entrer cet exposé des motifs et projet de décret rapidement en vigueur, je demande un troisième débat immédiat.

M. Alexandre Berthoud (PLR) —

Je suis favorable à un troisième débat immédiat, pour autant que notre collègue Mahaim et comme cela avait été prévu lors des débats en commission — au mois d'août — s'engage à retirer le point suivant, soit la motion qu'il a déposée.

M. Raphaël Mahaim (VER) —

Je confirme les propos de mon collègue Alexandre Berthoud. Je me suis engagé à retirer mon texte, dans le cas où il serait possible de consolider, dans la loi, cette idée de disposition transitoire pour la période si particulière que nous vivons actuellement. Je confirme donc ce retrait si la concrétisation partielle de mon texte a lieu dans le cadre de nos discussions. A ce stade, c'est la seule chose que je puisse confirmer explicitement et sans aucune ambiguïté.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Le troisième débat immédiat est admis à la majorité des trois quart (108 voix contre 11 et 4 abstentions).

Troisième débat

Le projet de décret est adopté en troisième débat par 117 voix et 2 abstentions.

La discussion générale est ouverte.

M. Yvan Pahud (UDC) —

Dans sa majorité, le groupe UDC devrait soutenir ce projet de décret d'aide à la presse, malgré le fait que cette dernière ne soit pas toujours très impartiale à l'égard de la droite et surtout envers l'UDC. Une majorité de mon groupe le soutiendra donc. Il faut être transparent et ouvert : cette aide à la presse ne fera pas de miracle, cela ne sauvera pas tous les journaux. Il s'agit d'un effet de mode. Toutefois, certaines aides devraient apporter un soutien principalement aux petits journaux qui mènent une politique locale et qui relaient les faits concernant les nombreuses associations faisant vivre les villages. C'est dans cet esprit que je soutiens ce projet de décret, principalement dans l'objectif d'aider ces petits journaux.

J'ai encore une question concernant le poste à l'Agence télégraphique suisse (ATS). En effet, lors des débats, il avait été indiqué que le prix des abonnements pourrait être revu à la baisse afin que les petits journaux puissent payer les informations de l'ATS, prix qui semblait trop élevé pour ces derniers. Un engagement avait été pris afin de trouver une solution. Or, à ce jour, nous n'avons pas obtenu d'informations et de retours sur cet élément. Si Mme la conseillère d'État a des informations à nous communiquer, je souhaite obtenir des précisions. Si nous finançons un poste à l'ATS, il est important que les petits journaux puissent se payer des informations.

M. Raphaël Mahaim (VER) —

Au fil de nos débats, nous avons quelque peu oublié les raisons pour lesquelles nous travaillons sur ce projet, pourquoi finalement nous faisons tout cela. Nous le faisons, parce qu'il en va de notre démocratie, de la capacité de chacun et chacune à se forger une opinion sur la base du travail effectué par les médias, que ce soit au niveau très local, régional, voire international — en l'occurrence, il s'agit ici plutôt des niveaux local et régional. Nous ne devons pas perdre cela de notre ligne de mire et c'est pour cette raison que nous avons dû adopter un dispositif particulier, innovant afin de favoriser la diversité, notre démocratie et pour le système dans lequel nous travaillons.

En guise de réponse aux propos de M. Pahud, j'espère vivement que mon parti soit aussi mal traité que le sien. En effet, la presse doit exercer son rôle critique à l'égard de tout le monde. Si nous vivions dans un monde médiatique dans lequel les uns étaient traités avec bienveillance et les autres avec critique, cela ne fonctionnerait pas. Plutôt que de choisir la victimisation, il faut privilégier la liberté d'expression, d'opinion et de la presse et c'est pour cela que nous nous battons. Avec ce modeste projet qui ne réglera toutefois pas tous les enjeux du paysage médiatique de ces prochaines années — il reste de nombreux défis à relever — nous y concourrons. Au nom du groupe des Verts et au terme de ce débat, je souhaitais vous rappeler le pourquoi de tout cet exercice.

M. Alexandre Berthoud (PLR) —

Dans le prolongement de mes collègues et au nom du groupe PLR, nous soutiendrons ce projet. Bien des séances ont été nécessaires pour établir la situation et comprendre de quoi nous parlons. Mes collègues et moi-même avons apprécié la partie relative à la formation des journalistes, car c'est extrêmement important. Pendant ces temps difficiles, le gouvernement a soutenu activement la presse. Des crédits supplémentaires sont également passés du côté de la Commission des finances, comme l'a indiqué Mme la conseillère d'État. Je le répète, nous devons aussi soutenir, par la presse, la relance économique, notamment des restaurateurs, magasins et toutes les activités qui ont été fermées. A titre personnel, je tiens à remercier l'ensemble des journalistes qui sont nombreux aujourd'hui à notre tribune pour nous écouter.

Mme Nuria Gorrite (C-DCIRH) — Conseiller-ère d'État

En premier lieu, je souhaite répondre à la question posée par M. Pahud. Monsieur Pahud, je peux vous confirmer que des discussions sont en cours entre l'ATS et Vaud Presse, le consortium des petits titres — ils sont douze et, avec le nouveau titre du Régional, ils seront treize. Deux points doivent être discutés entre l'ATS et Presse Vaud. Il y a tout d'abord le mandat qui devrait être donné par Vaud Presse à l'ATS. Actuellement, les sujets couverts par l'ATS ne sont pas toujours ceux attendus par ces petits journaux. Ces derniers aimeraient dès lors pouvoir discuter du mandat qui leur serait donné. En outre, il y a bien évidemment la question tarifaire, étant entendu que le rôle d'un soutien public serait de leur donner accès à des conditions préférentielles. En effet, les abonnements ATS sont relativement onéreux pour une partie des petits titres. Dès que le Conseil d'État pourra agir, ces discussions pourront se matérialiser, alors même qu'elles sont d'ores et déjà bien avancées et en cours.

Je vous remercie par ailleurs du soutien que vous apportez à ce panel de propositions et d'acteurs. Nous posons un cadre, car la question de la pluralité des médias constitue une attente forte à la fois des acteurs de la vie démocratique que nous sommes — nous sommes en pleines élections communales et vous avez pu constater à quel point cette presse locale est indispensable à l'animation de la vie démocratique dans nos régions — mais aussi à l'exercice de la pluralité des opinions publiques qui nécessitent des canaux de distribution pour s'exprimer. Au travers de cette politique, nous cherchons à contribuer à l'éducation aux médias, à la découverte de la pluralité des médias que compte le canton de Vaud. Monsieur Berthoud, vous l'avez aussi souligné, il s'agit d'un soutien à la formation de cette profession. C'est un soutien à la presse en tant qu'institution. L'aide indirecte au travers d'une politique d'annonce par l'État est un autre volet important. Il s'agit d'un panel relativement large de soutien. L'État ne peut pas tout, mais comme l'État ne peut pas rien, c'est au nom de ce principe que nous instaurons cette nouvelle politique publique qui sera évaluée dans les prochaines années pour étudier si elle est pertinente, si elle doit être maintenue, voire renforcée ou réformée, seul l'avenir nous le dira. Je vous remercie du consensus qui a pu se développer autour de cette proposition du gouvernement.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est close.

Le projet de décret est adopté définitivement par 95 voix contre 3 et 21 abstentions.

Rapport du Conseil d'État au Grand Conseil sur le postulat Valérie Induni et consorts

Mme Anne Baehler Bech — Rapporteur-trice de majorité

La commission a considéré que l'exposé des motifs et projet de décret répondait parfaitement au postulat déposé par notre collègue Induni et vous recommande donc à l'unanimité d'accepter ce rapport.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est ouverte.

Mme Valérie Induni (SOC) —

J'accepte avec un grand plaisir la réponse qui a été bien plus loin que ce que j'aurais pu imaginer initialement. Je remercie l'ensemble de la députation pour avoir cherché un consensus et finalement être arrivée à une situation concertée et partagée très largement dans ce plénum. C'est un signe encourageant pour la presse de notre canton.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est close.

Le rapport du Conseil d'État est approuvé à une large majorité.

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