22_LEG_270 - EMPL Interdiction de la mendicité – Modification de la Loi pénale vaudoise (LPén) (2e débat).
Séance du Grand Conseil du mardi 1er octobre 2024, point 8 de l'ordre du jour
Documents
- Tableau miroir avant 2e débat - PL Interdiction de la mendicité - Modification de la Lpén
- Rapport de minorité de la commission - RC min 22_LEG_270_Florence Bettschart-Narbel
- Texte adopté par CE - EMPL Interdiction de la mendicité - publié
- Rapport de majorité de la commission - RC maj 22_LEG_270_Thanh-My Tran-Nhu
- Tableau miroir - PL Interdiction de la mendicité - à l'issue des travaux de commission
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourDeuxième débat
Il est passé à la discussion du projet de loi, article par article, en deuxième débat.
Art. 23. – Al. 2, lit. b
Nous n'allons pas revenir en détail sur tous les arguments concernant la place qu’ont ou n’ont pas les Roms, mais il est important de souligner un point. Le premier débat a mis en lumière un paradoxe frappant : les conseils communaux des grandes villes directement concernées par la mendicité, en particulier Lausanne, s'opposent à une loi trop restrictive. D'ailleurs, il y a quelques années, le conseil communal de Lausanne avait adopté un règlement qui a largement inspiré le projet du Conseil d'Etat pour la loi actuelle.
Il est intéressant de noter que de nombreux députés, essentiellement de droite, venant de régions où la mendicité est quasi inexistante, militent pour un durcissement de cette loi. Il y a une forme de paternalisme à imposer des cautèles et des interdictions à des villes telles que Lausanne qui n'en ressentent pas le besoin. On peut se demander, à cet égard, si cela ne constitue pas un manque de respect envers l'autonomie communale.
Par ailleurs, le Tribunal fédéral peut statuer comme il l'entend sur le plan législatif. Nous continuons à penser qu'interdire la mendicité dans les transports publics et aux arrêts, dans les cimetières, les marchés, les files d'attente, sur les terrasses, aux entrées d'établissements publics, à proximité des écoles, crèches, places de jeux, banques, bureaux de poste, bâtiments publics, horodateurs, distributeurs d'argent, immeubles d'habitation, établissements médicaux et de soins, et même dans les musées, théâtres ou cinémas, revient à interdire la mendicité de fait. Le cas échéant, nous verrons ce que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) en dira.
Un mot enfin sur la police, dont nous avons peu parlé lors du premier débat. Elle se trouve dans une position inconfortable, contrainte de verbaliser des personnes démunies – Roms ou non. Le donateur ne donne pas pour que cet argent retourne dans les caisses publiques. Quant aux marginaux et aux toxicomanes – qui eux aussi mendient – il est peu probable que l'administration puisse récupérer le fruit de ces amendes.
Nous l'avons déjà exprimé : nous ne sommes pas opposés à un certain encadrement de la mendicité, et le projet initial du Conseil d'Etat allait dans ce sens. Cependant, la version de la loi adoptée lors du premier débat va beaucoup trop loin. Par voie d’amendement, nous demandons le retour au texte du Conseil d'Etat.
« Art. 23. – Al. 2, lit. b : Retour au texte du Conseil d'Etat. »
Je vais proposer un nouvel amendement. En préambule, je souhaite rappeler qu'après les débats de la première séance, la majorité de la commission pourrait accepter les modifications apportées, à l'exception du dernier amendement proposé par la minorité, qui inclut une liste mentionnant les immeubles d'habitation, les bureaux, ainsi que les bâtiments et installations publics.
Comme vous pouvez le constater, j'ai maintenu certains éléments, notamment les magasins, conformément à la version du Conseil d'Etat. Je suis également d'accord pour conserver les établissements médicaux et de soins. En revanche, en ce qui concerne les immeubles d'habitation, les bureaux, ainsi que les bâtiments et installations publics, je pense que cela pose quelques difficultés, notamment pour la police qui aura du mal à appliquer ces dispositions, notamment en raison de la notion floue de « bâtiment public » et encore plus de celle d’ « installation publique ». De plus, comme cela a déjà été souligné, ajouter les immeubles d'habitation revient à se rapprocher dangereusement d’une interdiction générale de la mendicité.
Je vous invite en conclusion à soutenir mon amendement.
« Art. 23. – Al. 2, lit. b : aux entrées
des immeubles d’habitation et de bureaux, bâtiments et installations publics,des magasins et établissements médicaux et de soins, musées, théâtres et cinémas. »
Je ne sais pas si le secrétariat peut afficher l'extrait du Journal des tribunaux que je leur ai transmis. Je tiens à remercier à la fois le Conseil d'Etat et le secrétariat du Grand Conseil de nous avoir fait parvenir l'arrêt du Tribunal fédéral qui, comme mentionné lors du débat précédent, concerne le canton de Bâle-Ville. Cet arrêt est le fruit d'une analyse extrêmement rigoureuse, détaillée sur plusieurs pages.
*insérer image
Vous avez sous les yeux le règlement en question, plus précisément le paragraphe 9 sur la mendicité. En le lisant, vous pouvez constater à quel point la réglementation de Bâle-Ville est particulièrement restrictive. Cependant, malgré cela, le Tribunal fédéral, en se fondant sur l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), a jugé cette réglementation tout à fait valable.
Je note que ce règlement, en particulier sous la lettre d, impose une interdiction de mendicité à moins de 5 mètres des entrées ou sorties de commerces, banques, bureaux de poste, musées, théâtres, cinémas, immeubles d'habitation ou de bureaux, ainsi que de bâtiments ou installations publics. Il s'agit bien de ce règlement qui a été validé par le Tribunal cantonal de Bâle-Ville, puis par notre plus haute instance juridique, le Tribunal fédéral. Ce dernier a également souligné qu'il reste suffisamment d'espaces publics pour permettre à chacun de circuler librement, voire d'exercer la mendicité.
Ce qui me surprend quelque peu dans les propos de certains de mes préopinants, notamment la rapportrice de la majorité et M. Vuilleumier, c'est que ce règlement émane d'un canton à forte majorité rose-rouge-verte. Cela montre qu'il n'y a manifestement pas d'unanimité sur cette question au sein des partis de gauche, que ce soient les socialistes, les Verts ou les alternatifs suisses. A moins que certains membres de ce Grand Conseil estiment détenir, seuls, la vérité absolue. Il est donc un peu étonnant d'affirmer, comme l'a fait M. Vuilleumier, que seuls des élus de la campagne, généralement de droite, cherchent à limiter la mendicité. L'exemple de Bâle-Ville prouve bien le contraire.
Enfin, cher collègue Vuilleumier, je crois que vous sous-estimez le ras-le-bol général de la population, qu'elle soit de gauche, de droite ou du centre. Ce n'est pas nécessairement un rejet des personnes qui mendient, mais bien une exaspération face aux excès liés à cette pratique. Pour toutes ces raisons, je vous invite à maintenir la version votée lors du premier débat qui s’avère finalement moins limitative que le texte du canton de Bâle-Ville, voté par une majorité de centre-gauche et validé par le Tribunal fédéral.
J’ai une question à adresser à Mme la rapportrice de majorité sur l'article 23. Elle a accepté une partie de celui-ci. Est-ce qu'elle serait d'accord d’ajouter les musées, théâtres et cinémas ?
Je souhaite également réagir aux propos de M. Vuilleumier, selon lesquels ce seraient principalement des députés des zones rurales qui voteraient des mesures ne les concernant pas directement. Nous nous trouvons ici dans la capitale vaudoise, et il est important de rappeler que cette ville appartient à tous les Vaudois et Vaudoises. Il est donc erroné d'opposer systématiquement la ville et la campagne. Ce que l'on entend souvent, et que j'ai moi-même constaté en parcourant le canton, c'est que de plus en plus de personnes hésitent à se rendre en ville. Elles estiment que l'espace public est devenu moins agréable, en raison notamment de la présence de toxicomanes et de mendiants, ce qui nuit à l'image de la ville. De plus, il est bien connu que les offices du tourisme reçoivent de nombreuses lettres de touristes s'interrogeant sur l'état de notre ville. Par conséquent, il est inapproprié de réduire cette question à une simple opposition entre ville et campagne : il s'agit d'un problème vaudois, qui nous concerne tous et toutes. Ainsi, revenir en arrière sur ce qui a été voté serait incompréhensible pour une large majorité de la population.
Enfin, je comprends la proposition d'amendement de notre collègue Thanh-My Tran-Nhu. Mon collègue Cardinaux a suggéré de maintenir les musées, théâtres et cinémas dans la liste des lieux concernés, et je pense que plus nous avancerons dans cette direction, mieux ce sera. Cela dit, je peux accepter l'amendement proposé par Thanh-My Tran-Nhu, car l'essentiel est que cette loi soit adoptée et que nous puissions aller de l'avant.
Je vais m’abstenir de reprendre tout le débat concernant la question de s'appuyer non seulement sur le jugement du Tribunal fédéral, mais également sur celui de la CEDH, bien que certains choisissent délibérément d’ignorer ces instances et le droit supérieur.
Si nous voulons aujourd'hui faire preuve d'honnêteté intellectuelle, je vous encourage à déposer un amendement visant à interdire purement et simplement la mendicité, plutôt que de vous dissimuler derrière une liste interminable, qui ressemble à un inventaire à la Prévert, et qui ne fera que nous conduire à nouveau devant les tribunaux. Soyez francs, allez au bout des choses et proposez l’interdiction totale de la mendicité, afin que nous sachions clairement à quoi nous en tenir ! Cela serait bien plus honnête que de discuter indéfiniment pour savoir si 20 ou 30 lieux seront interdits, couvrant ainsi 98 % ou 100 % de l’espace urbain dans les villes de ce canton.
Enfin, concernant la situation à Bâle, certes, il y a là-bas une majorité politique bien définie, mais n'oublions pas qu’il existe aussi, dans ce pays, des sociolibéraux, des personnes qui se disent de gauche, y compris au sein du parti socialiste, mais qui, en réalité, ne le sont pas tant que ça. De même, il y a parfois des PLR qui conservent une fibre radicale ou sociale, bien que, dans notre canton, cela semble être en voie de disparition.
Je souhaite revenir sur l'amendement déposé par notre collègue Marc Vuilleumier, qui invoque l'autonomie communale pour justifier un retour au texte initial du Conseil d'Etat. Il a notamment fait référence à des débats qui avaient eu lieu il y a plusieurs années au sein du conseil communal. Je tiens à rappeler à cette assemblée que, en 2024, la municipalité de Lausanne a clairement exposé sa position sur la question de la mendicité dans son préavis 2024/16 du 28 mars 2024. De plus, le syndic de Lausanne a expressément appelé les députés lausannois à soutenir les amendements proposés dans le rapport de minorité.
Fort de ces éléments, il me semble que l'argument fondé sur une supposée autonomie communale est sans véritable fondement. Je vous encourage donc à maintenir le texte tel qu'il a été voté lors du premier débat.
Je tiens d'abord à rappeler à M. Buffat que le parti socialiste et les Verts ont, à mon sens, la magnificence de permettre une variété de pensées. Bien que nous partagions des valeurs communes, notamment des valeurs profondément humanistes, il est normal que certaines de nos sections adoptent des positions parfois différentes. Nous ne formons pas un bloc unilatéral. Dans cette perspective, il est essentiel de rappeler qu’interdire la mendicité ne résoudra ni la pauvreté ni les problèmes de toxicomanie auxquels notre espace public est confronté. Cela ne ferait qu'ajouter une sanction supplémentaire pour des personnes déjà en grande difficulté, qui se trouvent dans cette situation à cause de circonstances souvent très pénibles.
Enfin, je pense qu'il est surtout crucial de nous concentrer sur le compromis proposé par ce nouvel amendement, qui pourrait nous éviter tout risque juridique. Le fait que la réglementation ait été validée à Bâle ne garantit en rien qu'elle passera sans contestation dans le canton de Vaud. Si vous souhaitez aller dans cette direction, il est essentiel de mettre en place un système, afin de s’assurer que notre approche soit reconnue par les tribunaux et éviter ainsi de devoir recommencer le travail déjà accompli.
Pour répondre à M. Cardinaux, qui me demandait si j'étais d'accord d'ajouter les musées, théâtres et cinémas. J'ai le regret de lui répondre par la négative, car j'estime avoir mis assez d'eau dans mon vin avec les amendements de la minorité acceptés lors du premier débat.
Je souhaite revenir sur les propos de Mme Bettschart-Narbel, qui évoquait un ras-le-bol ressenti par une partie de la population. Il est important de reconnaître que cette frustration n'est pas isolée. Les réactions face à la mendicité sont diverses, et il serait réducteur de prétendre que l'ensemble de la population partage ce sentiment. Bien que je comprenne sans difficulté que certaines personnes en aient assez, je ne suis pas certaine qu'il s'agisse de la majorité. Il existe également une frange souvent négligée de la population qui exprime sa solidarité envers les personnes roms et les familles dans le besoin, en leur offrant des vêtements, et participent notamment au mouvement citoyen de la Maraude pour aider ceux qui dorment dans la rue. Il est essentiel de replacer ce débat dans ce contexte. Trop souvent, nous parlons de la mendicité de manière désincarnée, comme si elle ne concernait pas des êtres humains, des familles, des histoires de vie. J’imagine que vous avez également lu les articles de 24heures relatant les difficultés rencontrées par des enfants qui peinent à suivre l’école et qui sont contraints de dormir dans la rue. Nous devons nous rappeler qu'il y a des personnes, des histoires de grande précarité derrière cette réalité, et que réduire la discussion à « la mendicité nous dérange » et à un désir d'interdiction généralisée n'est pas une solution. Dans cette optique, je vous encourage à soutenir l’amendement de mon collègue, M. Vuilleumier, car le texte initial proposé par le Conseil d'Etat, élaboré avec soin, vise à un compromis entre l’arrêt de la CEDH et la volonté exprimée par la majorité du Grand Conseil concernant l’interdiction de la mendicité.
Ce compromis est, à mon sens, sage et permet d'éviter d'imposer une interdiction déguisée. Je crains que les amendements actuellement en discussion ne conduisent précisément à cela, ce qui n’est pas l’objectif de cette modification législative. Je vous invite donc à revenir au texte initial du Conseil d'Etat et à soutenir l'amendement Vuilleumier.
A écouter mes collègues de gauche, il semble que M. Pilloud estime que le Tribunal fédéral a tort, que le parti socialiste de Bâle ou de Lausanne est également dans l'erreur, tout comme le PLR ou Bâle-Ville – qui n’est pas une campagne. Vous affirmez également qu’il n’y a pas de ras-le-bol généralisé. Finalement, il apparaît que votre seul argument consiste à prétendre que vous avez raison contre tout le monde, qu’il s’agisse de votre propre parti, de la justice ou de vos adversaires politiques ; ce qui est un peu maigre.
Je peux entendre que le ras-le-bol n’est pas généralisé, mais pour vivre dans cette ville, notamment dans le secteur bien identifié qui s’étend de la gare à la Riponne tout au long de la journée, il existe un sentiment de lassitude. Ce ras-le-bol n'est pas dirigé contre la mendicité en tant que telle, mais il s’agit de la rendre moins attractive pour certaines catégories de la population qui, hélas, en ont fait une forme de métier. Voilà le véritable problème. En acceptant une mendicité à chaque coin de rue, vous la tuez d’une certaine manière. Ce n’est pas la mendicité en soi qui pose problème, mais le fait que le parcours de la gare à la Riponne soit jonché de dealers, de mendiants et des personnes sous l’effet du crack.
Ainsi, la discussion d’aujourd’hui vise à clarifier ces zones. Je reconnais que cela peut sembler disproportionné, mais il s’agit de prévenir un appel d'air dans cette ville. Ainsi, dans le contexte des nombreux dossiers dont nous avons discuté ces dernières semaines, que ce soit en matière d’hygiène et de santé publique, de l’usage du domaine public par la mendicité, ou des questions sanitaires et sécuritaires liées à la drogue, nous entendons souvent des discours contradictoires. Certains domaines doivent être totalement exclus de certaines zones, d'autres non, selon les obédiences de chacun.
Enfin, je considère que vous ne pouvez pas avoir raison contre tous vos frères et sœurs de parti d’autres cantons, tout en ouvrant la porte à des pratiques qui créent un ras-le-bol global sur la vie quotidienne à Lausanne. Je vous encourage donc à suivre les propositions émises et à cesser de prétendre que tout le monde a tort, sauf vous.
En réponse à M. Miauton, je tiens à rappeler que nous ne nions pas qu'une partie de la population soit exaspérée par la situation actuelle. Ce que nous affirmons, c'est qu'il existe une diversité de réactions au sein de ce canton, et que la position que vous défendez n'est qu'une parmi d'autres, sans être généralisée. Il est essentiel de replacer cette discussion dans son contexte : certaines personnes se sentent dérangées par le fait d’être abordés dans la rue, tandis que d'autres ne sont pas affectées. Par ailleurs, il existe également des individus que ces situations de précarité touchent. Ces deux réalités cohabitent, et il est important de les contextualiser.
Ensuite, monsieur Miauton, j'aimerais vous rappeler que nous sommes ici dans un esprit de compromis concernant cette modification de la loi. Nous avons décidé d'entrer en matière en acceptant le rapport de la majorité, et c'est dans cet état d'esprit que nous avons abordé le sujet. Ce compromis a été atteint, car nous avons convenu de modifier la loi en acceptant la proposition du Conseil d'Etat, non pas en affirmant que nous avions raison envers et contre tous. Le problème réside dans le fait que, malgré cet engagement, la droite continue d'apporter des amendements qui conduisent à une interdiction déguisée, sans aucune retenue sur l'élargissement de la liste des lieux où la mendicité serait interdite.
Je souhaite donc rappeler l'esprit de compromis qui nous a guidés au départ, et je vous demande de garder cela à l'esprit lors des prochains votes. Je vous invite également à adopter une approche similaire et à alléger vos amendements, afin de favoriser un compromis qui se rapproche de la proposition initiale du Conseil d'Etat.
Un lieu commun n'avait pas encore été abordé lors du premier débat, celui de la question du « métier » des Roms, en l’occurrence. Il est vrai que, dans l'esprit de certains membres, ces individus peuvent sembler désincarnés, comme s'ils n'avaient pas d'existence propre. Je ne tire aucune fierté de mon expérience, mais j'estime important d'avoir pris le temps de les rencontrer lorsque j'étais municipal. J'ai reçu ces personnes dans mon bureau, participé à des repas en plein air sous une simple toile de tente, tout en rentrant le soir dans mon lit douillet, tandis que les Roms dormaient dehors. Aujourd'hui, je prends souvent un café avec eux, et je peux attester qu'ils sont des êtres humains réels, avec leurs propres problèmes et leurs joies. Ce ne sont pas des figures abstraites. Et, parfois, nos échanges sont même assez amusants.
Cependant, pour nous limiter à eux, les Roms ne viennent pas ici simplement pour exercer un « métier » de mendicité. En Roumanie, ils vivent dans une extrême pauvreté et cherchent simplement à gagner un peu d'argent pour survivre. En restreignant complètement leurs possibilités de mendier à Lausanne, nous rendons leur vie encore plus difficile. De plus, l'exemple récent de Genève, où la mendicité a été interdite, illustre bien les conséquences de telles restrictions, puisque non seulement les Roms n'ont pas quitté la ville, mais la situation a engendré un imbroglio administratif gigantesque, avec des milliers d'amendes infligées à ces personnes qui, après avoir été sanctionnées, sont retournées en Roumanie, ramenant avec elles ces amendes. Je me souviens d’une émission télévisée qui montrait un fonctionnaire genevois qui se plaignait d'avoir trois mille amendes sur son bureau, débordé par cette situation. Par conséquent, arrêtons d'aggraver une bureaucratie excessive et adoptons un regard plus humain sur ces questions. Comme l'a souligné Mme Minacci, nous sommes prêts à accepter la proposition du Conseil d'Etat, mais non d’aller au-delà.
J'apprécie beaucoup le canton de Bâle-Ville, ses musées, et j'aime me baigner dans le Rhin ; j’apprécie également son carnaval, le Morgenstreich, que je recommande vivement de découvrir au moins une fois. En outre, je salue la politique énergétique de Bâle-Ville, qui prévoit de couvrir tous ses toits de panneaux solaires d'ici 2035. J'espère que, lors des discussions sur la Loi sur l'énergie, le canton de Bâle-Ville sera à nouveau mentionné dans la perspective du vote final. Cela dit, nous parlons ici de la situation vaudoise. Il est naturel et normal d’examiner comment d'autres cantons abordent des problématiques observées dans diverses villes suisses. Le Conseil d'Etat a proposé un projet qui répond spécifiquement aux réalités du territoire vaudois. Nous nous trouvons dans une situation où la loi, depuis plusieurs années, ne peut pas être appliquée, et l'objectif du Conseil d'Etat est de rendre ce dispositif applicable.
Bien que nous disposions d'une validation du Tribunal fédéral concernant le canton de Bâle-Ville, cela ne présage pourtant en rien la position que pourrait adopter la CEDH. Cela n'élimine pas non plus les recours qui pourraient être déposés, et les longueurs administratives et judiciaires y relatives probables durant plusieurs années. Nous serions alors bloqués dans une situation de statu quo. Ainsi, je me permets de rappeler ce que j'ai dit depuis le début de ce débat. Je comprends que l'on se réfère à d'autres cantons et qu'il existe une volonté d’adapter le dispositif par le biais d'amendements. C'est tout à fait légitime. Toutefois, l'objectif du Conseil d'Etat est de proposer un dispositif équilibré, proportionné et, surtout, qui puisse être mis en œuvre. Peut-être que certains et certaines d'entre vous ont intérêt à ce que ce dispositif ne soit pas applicable, afin de nourrir leur fonds de commerce politique. Mais le souhait du Conseil d'Etat est clair : il s'agit de trouver une solution qui permette d'apaiser la situation. C'est pourquoi il a élaboré ce projet proportionné. Dans l’intervalle, certes, l'arrêt du Tribunal fédéral concernant la loi bâloise a été rendu, et je suis prêt à accepter certains amendements, notamment celui de Mme Tran-Nhu, qui permet de la nuance et de la proportionnalité. Avec un dispositif de cette nature, nous serons non seulement solides sur le plan juridique, mais surtout sur le plan opérationnel. Il est important de considérer notre capacité à gérer un dispositif qui s’avérerait trop complexe, une liste à la Prévert, des distances de 4,92 mètres entre chaque entrée pour déterminer si l'on peut mendier ou non… les agents de police seront confrontés à des situations absurdes sur le terrain.
Je vous encourage donc à faire preuve de sagesse et à éviter de proposer des amendements disproportionnés qui dénatureraient l'esprit qui a guidé le Conseil d'Etat dans ses travaux. L'objectif est de créer un projet de loi équilibré, capable de résister à d'éventuels recours juridiques, mais surtout qui puisse être appliqué concrètement, sur le terrain. En effet, réduire le nombre de lieux autorisés à la mendicité risque de concentrer cette activité dans certains endroits, causant ainsi d'autres désagréments. L'amendement de Mme Tran-Nhu va, à mon sens, dans la bonne direction, car il nuance l'amendement proposé par la minorité de la commission. Nous sommes sur la bonne voie et la bonne trajectoire.
Enfin, rappelons que l'objectif du Conseil d'Etat est d'avoir un dispositif légal qui puisse entrer en vigueur rapidement et qui soit réellement applicable sur le terrain. Il ne sert à rien de faire des promesses que nous ne pourrions tenir auprès des citoyens. Nous avons besoin d'un dispositif que la police puisse appliquer efficacement dans la réalité.
Je suis désolé, bien qu’ayant déjà entendu beaucoup de choses dans ce Grand Conseil, je suis choqué qu'on puisse passer par pertes et profits un arrêt du Tribunal fédéral. Monsieur le conseiller d'Etat, lorsque je vous entends affirmer que ces dispositions seraient disproportionnées, il faut rappeler que le Tribunal fédéral est composé de cinq juges. Certes, il peut parfois se tromper, mais dans l'arrêt que vous avez reçu, il examine précisément cette limitation et déclare : « Les mendiants et mendiantes ne sont donc pas entièrement exclus de l'espace public. Le simple usage commun leur reste au contraire accessible », et ce, en dépit de l'opinion différente de celle que vous manifestez. Les comportements visés sont délimités de manière intelligible et suffisamment précise.
Nous avons un ordre juridique – le président a souligné tout à l'heure notre engagement à respecter cet ordre, ainsi que les lois et la jurisprudence. Je suis très surpris de ce déni où, comme pour asséner une vérité, on répète à l'envi que c'est disproportionné et que cela sera annulé par la CEDH. Cet arrêt du Tribunal fédéral date de 2022, et nous sommes maintenant fin 2024. A ma connaissance, il n'a pas été annulé par la CEDH. Peut-être devrions-nous ajouter à la liste de M. Miauton les juristes progressistes suisses qui, selon vous, n'ont rien compris et auraient dû se tourner vers la CEDH.
Bien entendu chacun peut défendre son point de vue sur la mendicité – est-elle ou non organisée – mais il me paraît inacceptable de passer aux oubliettes un arrêt du Tribunal fédéral qui, sur dix pages, examine la proportionnalité et l'applicabilité de la loi. Cela me paraît choquant pour des élus censés légiférer et appliquer le droit et les principes constitutionnels suisses.
Monsieur le conseiller d'Etat, permettez-moi de vous dire que j'étais à Bâle-Ville fin août. Comme vous appréciez cette ville, vous y avez certainement récemment fait un tour. Contrairement à mon expérience à la gare de Lausanne, je n'y ai pas vu de mendiants. J'en déduis donc que le problème a été résolu, malgré cette loi que vous jugez disproportionnée et inapplicable.
Encore une fois, comme l’a souligné M. Miauton, nous constatons que le débat est compliqué avec des personnes qui sont convaincues d’avoir raison contre tout le monde, y compris contre Bâle-Ville, les juristes progressistes, et le Tribunal fédéral, et qui invoquent parfois la CEDH comme une autorité mystique ou christique, qui donnerait soudainement une jurisprudence différente ! Cela frôle l’hallucination dans ce débat.
Je ne vais pas répondre à mon collègue, le député Marc-Olivier Buffat, mais je souhaite appeler notre Parlement à faire preuve d'un esprit de concorde et de compromis. Face à ce sujet délicat, il est essentiel de reconnaître que nous avons des tendances politiques, des valeurs fondamentales et un sens des priorités variés. Certains souhaitent interdire la mendicité de manière pure et simple, tandis que d'autres estiment qu'il s'agit d'un droit à préserver en toutes circonstances. Entre ces deux positions, le Conseil d'Etat a déposé un projet de loi qui a été minutieusement examiné en séance de commission, avec un travail de fond effectué et des propositions d'amendement, même si elles différaient entre la majorité et la minorité. Tous ont fait des concessions concernant la liste des interdictions proposée à l'article 23. Une partie de l'hémicycle estime que cette liste, acceptée lors du premier débat, est trop longue. Dans un effort pour trouver un compromis, nous essayons de la restreindre légèrement, sans remettre complètement en question cette liste. Nous sommes prêts à accepter des restrictions concernant les entrées des magasins et des établissements médicaux et de soin. Je vous demande donc d’entendre ceux qui acceptent d'aller dans ce sens. C'est un véritable effort de compromis. Je crois qu'il serait positif pour notre population de voir notre Parlement parvenir à un dénominateur commun, à un accord pour traiter cette problématique. Si cet amendement – et je remercie la rapportrice de majorité pour son pas par rapport à sa position initiale – était adopté et que le projet de loi était ainsi accepté, cela montrerait une solution intelligente de la part de notre Parlement, et enverrait un message approprié à notre population.
J’aimerais vous lire un texte reçu d’un élu socialiste : « Dans les faits, la mendicité se concentre dans les principaux centres urbains du canton, en particulier à Lausanne. Depuis des mois, cette pratique a sensiblement augmenté et s’est diffusée. » Je passe quelques paragraphes pour aller au dernier. Il conclut : « Un soutien aux propositions faites dans le rapport de minorité permettra une régulation pragmatique et respectueuse du droit supérieur de la mendicité dans le canton de Vaud, et en particulier dans les villes, pour que chacune et chacun puissent jouir de l’espace public en toute quiétude. C’est aussi la position qu’avait défendue l'Union des communes vaudoises dans le cadre de la consultation. » Et c’est signé : Grégoire Junod. Nous allons donc dans le sens d’un élu socialiste, M. Grégoire Junod. Je vous invite à nous imiter.
Je me dois de réagir aux propos entendus. Personne ici ne remet en cause les arrêts du Tribunal fédéral, monsieur Buffat. Ce que le Conseil d'Etat souhaite, c'est établir un dispositif qui soit applicable. Rien, absolument rien, et personne dans ce Parlement ne peut affirmer avec certitude qu'aucun recours ne sera déposé à la CEDH. Et nous ne souhaitons pas cela. C'est pourquoi la position du Conseil d'Etat et du département consiste à jouer la carte de la prudence, raison pour laquelle, depuis le début de ce débat, je vous invite à éviter d'avoir la main trop lourde. Si vous estimez nécessaire d'allonger cette liste et que vous êtes convaincu, sur un plan juridique, que cela tiendra la route – après tout, vous êtes juriste, vous avez donc probablement plus de compétences que moi pour évaluer la qualité d'une telle proposition – je considère néanmoins que le jeu n'en vaut pas la chandelle. Il serait préférable de rester raisonnable à cet égard. De plus, j'insiste sur un point qui n'est pas suffisamment abordé : le caractère opérationnel de la disposition. Si nous proposons une liste à la Prévert trop détaillée, les agents de police rencontreront d'énormes difficultés à faire respecter ces dispositions.
Je me permets de répondre à M Moscheni, qui s'est permis de relayer les propos de monsieur le syndic, Grégoire Junod : en effet, il a dit qu'il soutenait les amendements de l'Union des communes vaudoises (UCV), mais ces amendements ne correspondent pas au dernier amendement de la minorité, parce qu'ils ne citent pas du tout les immeubles d'habitation et les bureaux.
L’amendement Thanh-My Tran-Nhu, opposé à l’amendement Marc Vuilleumier, est préféré par 118 voix contre 14 et 5 abstentions.
L’amendement Thanh-My Tran-Nhu est refusé par 77 voix contre 59 et 2 abstentions.
Je demande le vote nominal.
Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.
Celles et ceux qui soutiennent l’amendement Thanh-My Tran-Nhu votent oui ; celles et ceux qui s’y opposent votent non. Les abstentions sont possibles.
Au vote nominal, l’amendement Thanh-My Tran-Nhu est refusé par 76 voix contre 62.
*insérer vote
Au nom du groupe UDC, je souhaiterais à nouveau déposer l'amendement à la lettre c, nouvelle, qui vise à clarifier la distance de 5 mètres. Pourquoi opter pour cette distance de 5 mètres, qui s'inspire de ce qu'a instauré Bâle, comme nous l'avons déjà discuté ? Cette distance permettrait de définir clairement les termes « à proximité » et « aux abords ». Si je demandais à cinq personnes de définir ce qu’est la proximité, j’obtiendrais probablement cinq réponses différentes. Contrairement à ce qui a été dit précédemment, 5 mètres est une mesure facilement identifiable, même sans double mètre, ce que les corps de police évalueront avec aisance, de surcroît car il s’agit d’une distance sur laquelle ils doivent déjà statuer dans d'autres contextes. Pour toutes ces raisons, je vous remercie de soutenir cette clarification.
« Art. 23.– Al. 2, lit. c (nouvelle) : Une distance de 5 mètres doit être respectée vis-à-vis des lieux indiqués à la lettre b. »
Pour répondre à mon collègue, je pense qu'il est inopportun d'ajouter un amendement ou une nouvelle règle. Je vous invite à rejeter cet amendement qui compliquerait le travail de la police et qui n’a d’autre objectif que de restreindre la mendicité au maximum. Vous affirmez, cher collègue, qu'il faut faire confiance à la police. Je vous encourage à leur accorder cette confiance, notamment lorsqu’ils déclarent qu’il n’existe pas de réseau organisé et que la mendicité ne pose pas de problèmes de sécurité. Il serait sage, de manière générale, d’écouter la police, même quand leurs avis ne concordent pas avec vos convictions personnelles.
Il est essentiel d'assurer une certaine cohérence dans les mesures que nous mettons en place. Si nous envisageons d'imposer des interdictions dans des lieux spécifiques, il est également logique d'établir une distance autour de ces zones. Ainsi, la décision de définir un rayon en lien avec la fermeture de certaines zones me semble à la fois pertinente et nécessaire. Sinon, il aurait été inutile de voter sur la première partie. Une majorité de ce Parlement a soutenu l'amendement précédent, ce qui était cohérent. Sans une distance définie, chacun pourrait établir sa propre interprétation, que ce soit 50 centimètres ou 10 mètres. Ce manque de clarté est regrettable. Du reste, en matière de sport, par exemple, les règles sont très précises. Actuellement, des systèmes numériques permettent de mesurer avec exactitude, mais il reste toujours une personne, un adulte, pour mesurer les distances nécessaires pour les événements. C'est tout à fait simple. Je propose par conséquent d’établir une distance de 5 pas d'une personne adulte, ce qui correspond à environ 5 mètres, à respecter par rapport aux lieux indiqués. C'est clair, précis et facilement applicable. Dans le milieu du sport, cela se pratique tous les jours.
Je souhaite répondre à ma collègue Minacci en soulignant que cette règle va dans son sens. En effet, les policiers mesurent souvent le concept de « à proximité » de manière variable, ou parfois de façon excessive. En établissant une distance fixe de 5 mètres, nous clarifions la situation : si un mendiant se trouve à plus de 5 mètres, il a le droit d'exercer son activité. A l'inverse, si nous laissons le terme « à proximité » sans précision, cela revient à laisser aux policiers le soin de décider de ce qui est acceptable. Ainsi, cette règle de 5 mètres offre une protection au mendiant contre l'éventuel zèle d'un policier qui pourrait considérer ce que constitue une distance minimale et interdire sa pratique. En fixant cette distance, nous assurons au mendiant qu'il peut exercer son activité en toute légalité, tant qu'il reste à plus de 5 mètres des personnes dans une file d'attente ou devant un magasin. Par conséquent, madame Minacci, cette mesure protège également le mendiant en définissant une distance, plutôt qu'en laissant un critère flou de « à proximité ». Comme l'a bien mentionné mon collègue, ce terme peut varier considérablement d'une personne à l'autre, allant de 100 mètres pour certains à 50 centimètres pour d'autres. En définitive, il est dangereux de laisser place à l'interprétation de « à proximité », alors qu’établir une distance claire est le meilleur moyen de protéger à la fois ceux qui ne souhaitent pas être dérangés par les mendiants et ceux qui désirent exercer leur droit à mendier.
Cher collègue Moscheni, pour ma part, je souhaite avant tout protéger les mendiants contre le zèle des députés de droite qui proposent des amendements interminables qui frôlent l'absurde et la caricature. Je vous invite donc à rejeter ces amendements. En outre, je tiens à rappeler que la gauche a abordé ce texte dans un esprit de compromis. Dès le départ, nous avons accepté le rapport de majorité, bien que cela nous ait coûté. A présent, vous refusez un amendement de ma collègue Tran My Tran Nhu qui visait à trouver un compromis supplémentaire. Il est clair que vous ne faites aucun effort de compromis et que vous insistez pour instaurer une interdiction généralisée mais déguisée. Bien que vous prétendiez respecter les arrêts du tribunal fédéral et de la CEDH, vos propositions conduisent en réalité à des interdictions généralisées. Je pense que vous explorez une voie très problématique, et nous sommes en train de nous engager sur un chemin dangereux. Je vous invite à rejeter ces amendements et à revenir à une version de compromis.
Je vous propose un petit exercice puisqu’il semble que nous ayons envie de perdre du temps ce matin. Monsieur Moscheni et moi allons nous positionner sur la même ligne de départ et faire cinq pas. Vous verrez, étonnamment, nous n'arriverons pas à la même distance ! Cela prouve qu'utiliser des pas ne constitue pas une mesure universelle. De plus, il est important de rappeler que nous travaillons sur un projet de loi. Sur un plan juridique, définir une distance précise de cinq mètres semble, à mon avis, un non-sens. Une telle précision devrait plutôt être définie dans un règlement, si nous respectons la façon dont nous sommes censés travailler, puisqu’une loi est censée établir des principes. Si vous souhaitez vraiment inclure des mesures de distance, je propose que nous utilisions des unités de mesure plus pratiques. Enfin, je voudrais également souligner que cet amendement témoigne d'un manque de confiance flagrant vis-à-vis du Conseil d'Etat. Je rappelle que ce dernier n'est pas de mon bord politique et qu’il représente une majorité qui va plutôt dans l’autre sens. Il n’y a donc pas de confiance quant à l’application des principes que nous discutons aujourd'hui. Enfin, cet amendement va à l'encontre de la tradition de compromis à la vaudoise. Vous affirmez votre majorité – vous en avez parfaitement le droit – je l’entends bien. Toutefois, comme l’a rappelé Mme Minacci, la gauche a consenti à des efforts pour parvenir à un compromis acceptable pour la plupart d'entre nous. Ce n'est pas facile ni agréable d'entrer dans ces discussions. En agissant ainsi, vous nous faites un pied de nez monumental, ce qui va à l’encontre de la tradition politique de notre canton. C'est dangereux de ne pas respecter la richesse et la validité du compromis à la vaudoise.
Concernant l'aspect du compromis, il est clair qu'il n'y a aucune volonté de compromis, ce que je trouve regrettable. J'ai appris à accepter cette situation. Cependant, je tiens à souligner que lorsque nous débattons d'une loi qui s’avère si éloignée de la réalité des personnes qui devront l'appliquer, notre Parlement se ridiculise. Il est impératif de le dire ici : notre Parlement est en train de se discréditer. Je vous encourage à en discuter avec les agents de police sur le terrain, qui vivent cette réalité au quotidien. Le message que vous faites passer ici est véritablement absurde.
A titre personnel, et c'est dans ce cadre que je m'exprime à ce stade du débat, je ne soutiendrai pas cet amendement, et ce, avec des arguments peut-être moins catégoriques que ceux déjà avancés. Mon objection repose principalement sur des considérations de technique législative. En tant que législateurs, il est de notre responsabilité de poser des principes et de fournir des lignes directrices, notamment dans le cadre d'une loi pénale, laissant ainsi à l'autorité pénale compétente le soin d'appliquer ces principes en utilisant des termes et des formulations dont la densité normative lui permet une certaine appréciation. Or, en établissant une distance fixe de 5 mètres, nous privons les juges de la possibilité d’apprécier les circonstances concrètes de la cause, comme le dirait un juriste. Je considère donc que ce serait un choix législatif peu judicieux d’instaurer une telle distance. Je partage également les préoccupations concernant l'applicabilité de cette mesure pour les forces de l'ordre. Par conséquent, en raison de ces considérations, je m’opposerai à cet amendement.
Je souhaitais simplement apporter quelques éléments tirés du terrain. Monsieur Démétriadès, je ne sais pas à qui vous vous adressez, mais en ce qui me concerne, les policiers avec qui je discute expriment tous le besoin d'un cadre clair, avec des distances précises. La notion d' « à proximité » n'est pas du tout clairement définie, et ils craignent sincèrement que, si cette loi est adoptée sans clarification, cela puisse compromettre l'exercice de leur fonction. Aujourd'hui, établir un cadre clair dans la loi est une demande explicite des agents chargés de son application. De plus, comme je l'ai mentionné précédemment, cela constitue également une protection pour les mendiants. En effet, si un policier zélé interprète la proximité comme étant, par exemple, 10 mètres, alors un individu pratiquant la mendicité pourrait être contraint d'abandonner son activité. En instaurant une limite claire et définie, nous pouvons établir un cadre qui détermine ce qui est légal et ce qui ne l'est pas. Je vous invite donc à soutenir cet amendement.
Monsieur Moscheni, vous avez tout à fait raison. Il est essentiel que les agents de police disposent d’un cadre clair. Ce cadre sera défini dans la directive opérationnelle, mais il doit également laisser une certaine marge de manœuvre aux agents sur le terrain. C’est précisément le but de cette directive, soutenue par l'ensemble des forces de police de notre canton. Il est crucial de permettre aux agents de s'adapter aux situations qu'ils rencontrent. Je vous en prie, évitez de fixer des mesures précises en mètres ou en centimètres dans la loi. Ce que M. de Haller a souligné est extrêmement important, tant d'un point de vue juridique que pour l'efficacité avec laquelle la police pourra appliquer la loi. Je partage votre constat, monsieur Moscheni : la police a besoin d'un cadre clair. Je collabore quotidiennement avec les forces de police et je peux attester qu'il est impératif que le cadre soit établi de manière précise, mais il le sera via la directive opérationnelle. Il est probable que cette directive mentionne une distance d’environ 5 mètres, mais elle offrira une plus grande marge de manœuvre aux agents de police. Je vous encourage à discuter avec l'adjudant Nicolas, que vous croisez chaque mardi dans les couloirs, car il vous dira exactement la même chose. Il est primordial d'avoir un cadre clair, mais le bon niveau pour le définir est la directive opérationnelle.
L’amendement Jean-Bernard Chevalley est refusé par 78 voix contre 45 et 10 abstentions.
Je demande un vote nominal.
Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.
Celles et ceux qui soutiennent l’amendement Jean-Bernard Chevalley votent oui ; celles et ceux qui le refusent votent non. Les abstentions sont possibles.
Au vote nominal, l’amendement Jean-Bernard Chevalley est refusé par 75 voix contre 49 et 9 abstentions.
*insérer vote nominal
L’article 23 est accepté tel qu’admis en premier débat par 69 voix contre 56 et 4 abstentions.
Je demande le vote nominal.
Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.
Celles et ceux qui soutiennent l’article 23 votent oui ; celles et ceux qui le refusent votent non. Les abstentions sont possibles.
Au vote nominal, l’article 23 est accepté tel qu’admis en premier débat par 74 voix contre 58 et 3 abstentions.
*insérer vote
Les articles 23a, 23b, 23c, premier et 2, formule d’exécution, sont acceptés tels qu’admis en premier débat à l'unanimité.
Le projet de loi est adopté en deuxième débat.
La discussion générale est ouverte.
Comme je l'avais anticipé lors de l'entrée en matière, nous voici face à un projet de loi qui s'annonce inapplicable, qui nécessitera un temps considérable aux forces de police, et qui sera sans doute combattu par les milieux associatifs jusqu'à Strasbourg. Il ne faudra pas longtemps avant que les autorités cessent d'appliquer cette loi, entraînant un retour du dossier sur le bureau de M. le conseiller d'Etat. Comme si cela ne suffisait pas que la CEDH nous ordonne de modifier cette loi, nous offrons une seconde occasion aux juges de Strasbourg de nous sanctionner, humiliant ainsi une fois de plus au passage notre démocratie. Je m’étonne que le système d'avertissement, que je considère inapplicable, n'ait pas fait l'objet d'une discussion au sein du plénum.
Mon collègue Alexandre Démétriadès a brièvement mentionné les difficultés que les forces de l'ordre rencontreront face à ces procédures administratives, qui en feront partie intégrante. A ceux qui, lors du premier débat, ont insinué que je ne faisais pas la distinction entre la CEDH et l'UE, faisant ainsi preuve d'un certain mépris, je répondrai que, pour moi, la CEDH et l'UE représentent une même crème passée de date : cela ne sent pas bon, cela rend malade, et dès qu'on y touche, on n'a qu'une envie, c'est de s'en éloigner au plus vite ! Fidèle à ma ligne, je refuserai ce projet de loi.
Bien sûr, nous n’allons pas évoquer à nouveau tous les arguments lors de ce débat final, mais nous avons tout de même fait une découverte intéressante, puisque nous avons appris que M. Buffat, tout comme M. Venizelos, apprécient se rendre à Bâle – ce qui est tout à fait louable, car c'est une très belle ville ! Mais, surtout, nous avons appris que M. Buffat n'avait vu aucun mendiant à Bâle. Cela démontre simplement que le dispositif bâlois parvient à interdire, de facto, la mendicité dans les zones fréquentées. J'imagine que M. Buffat se rend plutôt dans des endroits animés que dans les bas-fonds de Bâle. En conséquence, l'expérience de M. Buffat témoigne d'une interdiction effective de la mendicité.
Ce que nous déplorons le plus dans ce débat, ainsi que les valeurs qui le sous-tendent, c'est qu'une fois de plus, la réponse apportée à la mendicité se résume à des mesures répressives. Cela était déjà en partie vrai dans le projet du Conseil d'Etat, mais cette répression a été renforcée, ce qui soulève de nombreuses préoccupations.
Si l'on ne parle que des Roms en mettant de côté d'autres groupes, il est important de rappeler que les Roms sont des Européens qui ont le droit d'être ici. Ce sont de véritables personnes, et le Conseil de l'Europe encourage les Etats à développer des politiques publiques favorisant leur intégration, l'accès au logement, à la formation, et à la sortie de la précarité. L'interdiction, comme à Genève, n'est pas une solution, puisque non seulement les Roms ne sont pas partis, et que cela a également créé un imbroglio administratif gigantesque. A cet égard, je rejoins les propos de notre collègue de l'UDC.
Pour notre part, nous aurions pu accepter le projet du Conseil d'Etat, mais nous nous opposerons à ce projet-ci, bien que dépourvus d’illusions, puisque nous savons que la majorité soutiendra cette version issue des débats. Cependant, j'espère encore qu'au moins nos propositions visant à mettre en œuvre les directives du Conseil d'Europe pour promouvoir une politique sociale sur ces problématiques pourront être prises en compte. Cela permettrait, pour ceux qui sont ici, de sortir de la précarité et d'être mieux accueillis. Ce serait la moindre des choses, même si nous le disons sans trop d'illusions. En conclusion, nous voterons contre cette loi.
Il m’arrive aussi parfois de me rendre à Bâle, si cela vous intéresse, nous pourrions prendre le train ensemble pour visiter le Kunst Museum, qui propose des expositions absolument fascinantes ! Cela dit, mon discours diffère radicalement de celui de mon collègue Glayre, même si je comprends tout à fait son point de vue et que je peux le rejoindre sur certains aspects. En revanche, il me semble que la préservation de l'espace public conserve toute son importance, mais ce n'était pas, à mon avis, l'objectif principal de cette législation. Pour moi, il ne s'agit pas de punir systématiquement les mendiants, mais plutôt de protéger les citoyennes et les citoyens dans l'espace public qui leur est réservé. De ce point de vue, je pense que nous avons réussi. Je tiens également à souligner qu'il existe des populations vulnérables à Lausanne, notamment les personnes âgées, qui peuvent être particulièrement appréhendées par la mendicité, qui est parfois passablement soutenue. Personnellement, je crois en l'effet préventif de cette loi ; nous sommes en train de mettre en place une réglementation qui me semble intéressante pour protéger notre espace public. Quant à la nécessité d'un cadre légal plus clair, ce qui a été proposé jusqu'à présent me paraît pertinent. Les forces de l'ordre connaissent leur métier ; elles agiront en fonction des directives que nous leur donnerons, à condition qu'elles soient claires, nettes et précises.
Je rappelle aussi que plus de soixante communes ont exprimé le souhait d'un cadre plus strict et plus clair. Un aspect qui me paraît évident dans le projet de loi que nous avons discuté. Bien sûr, que nous soyons d'accord ou non, cela fait partie intégrante du débat politique. Nous vivons en démocratie ; il se peut que nous perdions, ou peut-être que vous gagnerez. C'est ainsi que fonctionne la démocratie. Enfin, je voudrais également rappeler que l'UDC avait déjà travaillé pour interdire la mendicité il y a quelques années. Finalement, c'est nous qui faisons le grand écart aujourd'hui. Je vous encourage donc à voter en faveur de cette loi, telle que nous l'avons élaborée et discutée aujourd'hui.
J’aimerais aborder trois points. Tout d'abord, pour les historiens qui liront le Bulletin du Grand Conseil dans une centaine d'années, je tiens à préciser que les propos de notre collègue Glayre ne représentent pas du tout la position adoptée par une nette majorité de notre canton, qui est attachée à ses relations avec nos voisins immédiats ainsi qu'aux droits fondamentaux défendus par la CEDH. C'était ma petite boutade !
Deuxièmement, je regrette sincèrement le flou important qui a entouré nos débats concernant l'exploitation des personnes, notamment dans les familles, ainsi que les violences exercées au sein de celles-ci ou dans des réseaux liés à la mendicité, que l'on pourrait qualifier d'organisation mafieuse. Je le rappelle, cette situation n'est pas une constatation faite par la police et ne reflète pas une réalité générale. Pour traiter ces questions, il existe d'autres dispositifs qui doivent être mis en place. Ce n'était pas le cadre approprié pour aborder ces enjeux dans le cadre de cette loi sur la mendicité.
Je reviens sur la position que j'ai défendue lors de l'examen de l'amendement de ma collègue Tran-My Tran-Nhu, qui proposait un ultime compromis sur ce texte. Comme je l'ai indiqué en préambule de mon intervention, il est essentiel de reconnaître qu'au sein de notre population et dans notre hémicycle, coexistent des perspectives très différentes sur la mendicité. Certains ont une vision très restrictive, tandis que d'autres estiment que demander de l'aide est un droit absolu, qui devrait pouvoir être exercé en tout temps et en tout lieu.
Entre ces deux positions, le Conseil d'Etat avait proposé un projet qui semblait équilibré, mais cela n'a pas convenu aux députés membres de la commission. Au cours des débats, nous avons été très près de parvenir à une solution véritablement équilibrée, prenant en compte les différentes volontés de notre Parlement. Hélas, nous n'avons pas réussi à concrétiser cela.
Enfin, je trouve que la quatrième liste figurant à l'article 23, qui énumère des lieux tels que les entrées des habitations et des bureaux, est beaucoup trop exhaustive. En mon âme et conscience, je ne peux pas soutenir un projet de loi qui impose des interdictions aussi larges, difficiles à appliquer pour la police.
Je partage le sentiment de mon collègue Démétriadès concernant la teneur des débats qui se sont tenus dans cet hémicycle. Personnellement, je trouve que le ton des échanges a souvent manqué de bonne foi, comme c'est malheureusement le cas depuis plusieurs mois dans ce plénum. Je pense qu'il existait une réelle possibilité de compromis. En effet, la proposition du Conseil d'Etat était déjà une forme de compromis. Cependant, une partie des députés et des députées n'est pas venue dans cet esprit. Pour une partie significative de la gauche, le fait de cadrer la mendicité de manière aussi forte représentait déjà un compromis. La barque fut chargée jusqu’à ce que la limite de flottaison soit atteinte. En ce qui me concerne, ainsi qu’une partie des Verts, le projet qui résulte de nos débats n'est pas acceptable dans sa forme actuelle. Je crains que le vote final ne soit pas unanime chez nous. Pour ma part, j'aurai beaucoup de mal à soutenir ce projet, car nous avons encore une fois été confrontés à une absence de compromis.
J'en prends acte avec regret. Je pense que la loi qui sortira de nos débats sera difficile à appliquer et a de fortes chances d'être contestée, suspendue, voire annulée à un moment donné. Nous pourrions alors nous retrouver avec le même contexte et les mêmes débats dans quelques années, après un recours à la CEDH qui pourrait entraîner un refus de notre loi. Certes, cela ne sera peut-être pas le cas, je ne suis pas Mme Irma. Enfin, je ne peux pas soutenir une proposition qui vise à cacher la misère, à la tenir éloignée de nos yeux. Cela va à l'encontre de mes valeurs et de ma propre éthique. C'est pourquoi je voterai contre ce projet lors du vote final.
Malgré les quelques bémols exprimés plus tôt et les débats nourris qui ont suivi, il convient de saluer le fait que nous disposons désormais d’une loi et bientôt d’un règlement d’application concernant cette question cruciale de la mendicité. Il était en effet indispensable que notre Grand Conseil se saisisse de ce problème. Oui, je reste profondément légaliste, institutionnaliste, constitutionnaliste, il faudra m’user ainsi… mais pas encore trop longtemps, rassurez-vous ! Monsieur le Conseiller d’Etat, j’accorde ma confiance au Tribunal fédéral – même s’il lui arrive d’avoir tort, notamment lorsqu’il rejette mes recours. Cela dit, il me semble tout à fait logique et pertinent que ce Parlement ait choisi de s'inspirer, entre autres, de la réglementation en vigueur à Bâle-Ville pour légiférer. Je tiens à rappeler que notre cadre législatif est moins restrictif que celui de Bâle-Ville, et qu’il reste donc proportionné. J’aimerais également souligner, à l’intention des deux groupes qui se sont exprimés avant moi, que le canton de Vaud n’est pas une île. Il se passe des choses ailleurs, et la réglementation évolue dans d’autres cantons. Nous devons en tenir compte, même si cela diffère de ce que certains imaginent dans un monde idéal, loin de celui du docteur Pangloss.
Enfin, monsieur Vuilleumier, je regrette de vous décevoir dans votre vision finalement assez binaire de la société. Mon expérience personnelle, aussi banale soit-elle, illustre bien la réalité de nombreux Lausannois et Vaudois. Quand ils se rendent à la gare, prennent le métro, ou voyagent, ils sont confrontés à des situations bien différentes de celles que vous évoquez. Pour conclure, je rappelle que Bâle-Ville a dû faire face à des problèmes sociaux graves, notamment liés à des scènes ouvertes de la drogue, qu’ils ont su apparemment résoudre à satisfaction. S’inspirer d’autres cantons peut parfois être salutaire. Je vous invite donc à voter le texte adopté à l'issue de ce deuxième débat.
Je ne vais pas répéter les propos de mon collègue Marc-Olivier Buffat, mais il me semble essentiel, aujourd’hui, de voter cette loi. Certes, le Conseil d'Etat avait déjà proposé un compromis, mais je le trouvais relativement léger. Il a, en effet, ajouté quelques mots entre la phase de consultation et le travail en commission. Cependant, notre rôle en tant que parlementaires est précisément d’amender les projets de loi lorsque nous estimons qu'ils ne sont pas suffisamment aboutis, et de proposer des améliorations qui vont au-delà de ce que le Conseil d’Etat a soumis. Si nous nous contentons d’être une chambre d’enregistrement de l’exécutif, nous n’irons pas loin.
Je suis convaincu que ce projet de loi est non seulement nécessaire, mais aussi applicable. Il ne devrait pas poser de difficultés particulières aux forces de police, auxquelles nous devons également faire confiance pour sa mise en œuvre. Il me semble d’ailleurs que la police elle-même attendait une telle législation pour pouvoir agir plus efficacement. Cette loi aura une valeur préventive que je juge très importante. Il ne s’agit pas d’éliminer les mendiants, mais de permettre à nos concitoyens de se sentir en sécurité dans l’espace public. A ce propos, pendant ces débats, j'ai reçu plusieurs emails de citoyens, dont un particulièrement marquant d’une dame de 88 ans. Elle m'expliquait qu’elle devait faire des détours pour rentrer chez elle parce qu’un mendiant agressif se trouvait sur son chemin. C’est pour ces personnes que nous travaillons, semaine après semaine, au Grand Conseil.
Comme beaucoup d'entre nous, je suis profondément préoccupé par certains propos tenus et par les décisions que nous nous apprêtons à prendre. Le domaine public, par définition, appartient à toutes et tous, et il doit rester le moins restreint possible. Dans le contexte de ce que nous avons entendu aujourd'hui, je me demande quelles seront les prochaines restrictions que nous imposerons pour garantir la paix des uns et des autres. S'agira-t-il des manifestations ou d'autres formes d'expression ?
Je m’oppose fermement à ces restrictions, car elles doivent être aussi limitées que possible lorsqu'il s'agit de l'utilisation de l’espace public. Ce qui m'inquiète particulièrement, c’est cette tendance à vouloir se fermer à des modes de vie différents, à ne plus vouloir les voir, à vouloir les effacer de notre champ de vision. J’espère sincèrement que cela ne conduira pas à l’exclusion d’autres catégories de personnes de nos espaces communs. Pour toutes ces raisons, je ne pourrai pas soutenir ce projet.
Je regrette que les efforts pour aboutir à un projet de loi acceptable pour le plus grand nombre n’aient pas reçu un écho favorable. Malgré cela, je soutiendrai ce projet, bien que du bout des doigts. Il est important de rappeler que la situation actuelle ressemble à un no man's land juridique. En tant que juriste, je ne peux me satisfaire de ce vide. Nous avons une loi qui n'est pas appliquée, et je rappelle également que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a suspendu la procédure en attente de l’élaboration de cette nouvelle loi. Alors certes, cette loi pourrait être retoquée, mais ce qui compte avant tout, c’est que nous avancions.
Je vais soutenir cette loi, bien que l’amendement visant à fixer une distance précise n’ait pas été accepté. Cependant, je compte sur le Conseil d'Etat et sur M. le conseiller d'Etat, qui s'est engagé à ce que cette distance soit clairement définie dans le règlement d'application. En effet, le terme « à proximité » est trop vague pour être utilisé de manière opérationnelle, notamment pour protéger non seulement les policiers, mais aussi les personnes qui pratiquent la mendicité. Il est crucial que cette notion soit claire, mesurable, normée, car la question de la mendicité est complexe, comme l’a montré ce débat, qui a suscité des émotions et révélé des positions clairement opposées. Ainsi, une définition précise est indispensable. « A proximité » ne signifie rien de concret, et dans le cadre de l’implémentation de cette loi, je pense qu'il est absolument essentiel que le règlement d'application fournisse une définition claire et normée de ce terme.
Au terme de ces débats, je choisis de retenir le verre à moitié plein. Je vous invite à voter cette loi, ce qui nous permettra de disposer d'un dispositif applicable sur le territoire vaudois, avec une règle claire. A l’évidence, le Conseil d'Etat a défendu son projet pour deux raisons principales : d’une part, des considérations juridiques, en espérant qu’aucun recours ne soit déposé contre cette décision, afin que nous puissions mettre en œuvre ce dispositif ; d’autre part, des raisons opérationnelles. Je peux vous assurer que la police cantonale, ainsi que les polices communales, appliqueront ce dispositif avec proportionnalité et professionnalisme, comme elles le font pour toutes les lois que vous adoptez. Certains détails ne seront peut-être pas précisés dans le règlement d'application, mais plutôt dans la directive opérationnelle. Je pense notamment à la distance de cinq mètres qui a été évoquée, et qui sera probablement mentionnée dans cette directive. Ce qui est certain, c'est que la police mettra en œuvre ce dispositif. Nous espérons que, malgré les différents amendements déposés, ce dispositif ne sera pas contesté sur le plan juridique, et que nous pourrons le déployer. Il ne s'agit pas de faire disparaître la mendicité, car nous n’y parviendrons pas, et encore moins la pauvreté. Cependant, cette loi apportera un peu d'apaisement dans ce débat, permettant à chacun de continuer à profiter de l'espace public. Elle nous permettra aussi de nous concentrer sur d’autres enjeux tout aussi essentiels.
En conclusion, je vous encourage à accepter ce projet de loi, même avec ses différents amendements. Il est crucial d’avoir un cadre clair et une règle précise. Le débat a eu lieu, et la position du Parlement est maintenant claire. Encore une fois, j'espère que ces dispositions ne seront pas attaquées juridiquement, mais il est fondamental d’avoir un cadre applicable sur le terrain.
La discussion est close.
Le projet de loi est adopté définitivement par 81 voix contre 37 et 18 abstentions.
Rapport du Conseil d’Etat au Grand Conseil sur le postulat Florence Bettschart-Narbel et consorts : Pour une adaptation de la loi pénale suite à l’arrêt de la CEDH (22_POS _68)
Décision du Grand Conseil après rapport de la commission
La commission a accepté la réponse du Conseil d'Etat au postulat de Mme Florence Bettschart-Narbel.
La discussion est ouverte.
Compte tenu de l'adoption de la modification de la loi pénale, je ne peux que me réjouir et accepte la réponse du Conseil d'Etat à mon postulat.
La discussion est close.
Le rapport du Conseil d'Etat est approuvé avec quelques abstentions.
Réponse du Conseil d’Etat à l'interpellation Guy Gaudard au nom du PLR – Mendicité et Traite des êtres humains (20_INT_50)
Débat
La discussion est ouverte.
Au vu de la large acceptation du projet de modification de la loi sur la mendicité, j'accepte les réponses du Conseil d'Etat.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
Ce point de l’ordre du jour est traité.