21_INT_52 - Interpellation Jean Tschopp et consorts - Livraison de journaux et d’imprimés publicitaires: a-t-on touché le fond ? (Développement).

Séance du Grand Conseil du mardi 27 avril 2021, point 12 de l'ordre du jour

Texte déposé

Créée en 1973, Epsilon est une entreprise suisse active dans le portage de journaux et la distribution d’imprimés publicitaires (distribution non adressée ou DNA). Elle est leader sur ce marché en Suisse romande dans les cantons de Vaud, Genève et Fribourg. Cette entreprise appartient à 100% à La Poste. Epsilon emploie 600 collaborateurs et collaboratrices en Suisse romande. Le personnel doit composer avec des conditions de travail difficiles: salaires largement inférieurs à ceux des facteurs, horaires de nuit. Une enquête de la RTS du 25.03.2021 faisait état de la faiblesse de ses revenus, de tournées à rallonge, de non-prise en charge des frais de transport et de manque de compensation notamment.

 

Pour le portage de journaux, le salaire horaire vient d’être diminué par Epsilon en s’alignant sur les minima de CHF 18.27/heure (sans les vacances) fixés par la Commission fédérale de la poste PostCom. Actuellement, une autre restructuration est en cours pour la DNA non soumise aux minima de PostCom. Elle prévoit de nouvelles péjorations: baisses de salaires à CHF 16.10-/heure (sans les vacances) et la suppression de l’assurance perte de gain en cas de maladie. Ces baisses de salaire pour Vaud et Fribourg sont encore accentuées en regard de la comparaison avec le canton de Genève qui pratique désormais un salaire minimum de CHF 23.14-/heure. Epsilon n’est toujours pas partie à une convention collective de travail. Cette restructuration est présentée par l’entreprise comme la seule alternative à la fermeture. Ces dégradations successives font craindre une sous-enchère abusive et répétée pourtant combattue par notre ordre juridique et par la Commission tripartite cantonale.

 

Le Conseil d’Etat et le Grand Conseil Vaudois se préoccupent de la santé des médias qui traversent une période difficile. La presse écrite n’est pas épargnée. Plusieurs titres ont disparu récemment (L’Hebdo, Le Matin dans sa version papier, Le Régional). D’autres titres émergent (Watson, Le Blick romand et Riviera-Chablais votre région) sans que l’on soit au clair sur leur viabilité, au vu notamment de la forte diminution des recettes publicitaires dans la presse écrite.

 

En début 2021, le Grand Conseil votait un décret accordant plusieurs mesures de soutien aux médias (annonces payantes, formation des journalistes, soutien à la production de dépêches d’agences, encouragement à l’information des jeunes) et allouant un montant de CHF 6.2 mios d’aide. L’association professionnelle des journalistes Impressum et le syndicat Syndicom saluaient ce décret. Lors des débats, le Grand Conseil appelait aussi de ses voeux des conditions de travail correctes dans le secteur des médias. Le Grand Conseil a souvent manifesté son attachement à un service public postal fort, accessible dans toutes les régions du canton et offrant de bonnes conditions de travail pour son personnel. Par ailleurs, en février 2017, une motion du conseiller national Olivier Feller, soutenue par des élu·e·s de différents bords politiques, demandait à La Poste de garantir une distribution matinale sans augmentation tarifaire pour les éditeurs. Si beaucoup d’abonnés optent pour une lecture de leur journal en ligne, souvent ces mêmes abonnés maintiennent une livraison papier pour parcourir leur journal avec leur café ou/et l’emmener au travail.

 

Attachés à des conditions de travail correctes et à un service postal fort assumant pleinement ses responsabilités, les député·e·s soussigné·e·s ont l’honneur d’adresser les questions suivantes au Conseil d’Etat:

 

1. Particulièrement engagé dans son aide aux médias, le Conseil d’Etat est-il préoccupé par les conditions de travail précaires entourant la livraison de journaux chez Epsilon, un métier essentiel au fonctionnement de la presse écrite ?

 

2. Le Conseil d’Etat prévoie-t-il d’approcher La Poste à ce sujet ?

 

3. Envisage-t-il de se coordonner avec les gouvernements genevois et fribourgeois pour demander à La Poste de garantir des conditions de travail correctes pour le personnel d’Epsilon ?

 

4. Le Conseil d’Etat prévoie-t-il en concertation avec la Commission tripartite cantonale l’adoption d’un contrat type de travail (CTT) pour combattre cette sous-enchère abusive et répétée observée dans le portage de journaux et la distribution d’imprimés publicitaires ?

Conclusion

Souhaite développer

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Anne-Sophie BetschartSOC
Marc VuilleumierEP
Sébastien CalaSOC
Hadrien BuclinEP
Salvatore GuarnaSOC
David RaedlerVER
Sylvie Pittet BlanchetteSOC
Alice GenoudVER
Stéphane MontangeroSOC
Pierre ZwahlenVER
Cédric EchenardSOC
Valérie InduniSOC
Stéphane BaletSOC
Julien EggenbergerSOC
Muriel Cuendet SchmidtSOC
Felix StürnerVER
Yves PaccaudSOC
Cendrine CachemailleSOC
Isabelle FreymondIND
Eliane DesarzensSOC
Delphine ProbstSOC
Muriel ThalmannSOC
Pierre FonjallazVER
Jean-Claude GlardonSOC
Monique RyfSOC

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Jean Tschopp (SOC) —

Il a souvent été question de la Poste, dans cette assemblée, et de sa responsabilité en tant que service public. Nous voulons un réseau postal dense et accessible dans toutes les régions du canton. Plus récemment, nous avons voté un décret d’aide aux médias, dont en particulier la presse écrite qui traverse une phase difficile en ce moment. Avec cette interpellation, nous nous penchons sur le sort des livreurs de journaux qui, le matin, nous permettent de partir au travail ou de prendre notre petit-déjeuner en lisant le journal. Si beaucoup de lecteurs apprécient de lire leurs journaux sur écran, beaucoup d’abonnés restent attachés au format papier.

Les employés de l’entreprise Epsilon détenue à 100 % par la Poste font face à des conditions de travail difficiles, de nuit, avec de bas salaires de 18 ou même de 16 francs de l’heure pour la livraison d’imprimés publicitaires. Or, il n’est pas normal qu’une entreprise publique telle que La Poste cautionne un tel affaiblissement des conditions de travail et une telle sous-enchère salariale. Nous le savons : notre Conseil d’Etat est attaché à un réseau postal fort, à un service public qui l’est tout autant et qui assume ses responsabilités. Or, ici, la Poste est même en-deçà des conditions minimales définies par PostCom s’agissant de la livraison des imprimés publicitaires. Les plusieurs centaines d’employés qui œuvrent à différents endroits de Suisse romande, dans le canton de Fribourg, à Genève, dans le canton de Vaud, se sont vu notifier des congés-modifications avec des baisses de salaire et la suppression de l’assurance-perte de gain-maladie.

Si nous nous préoccupons des médias et de leur sort, nous devons être attentifs à ce que les conditions de travail soient correctes dans l’ensemble de la chaîne des médias jusqu’à la livraison des journaux. Nous attendons donc du Conseil d’Etat qu’il interpelle la Poste sur ses responsabilités pour éviter une surenchère salariale encore accentuée par le fait que Genève connaît un salaire minimum de 23 francs de l’heure, creusant encore les disparités intercantonales que rien ne justifie. Nous attendons donc des réponses du Conseil d’Etat et qu’il puisse interpeller la Poste afin qu’elle assume ses responsabilités pour combattre la sous-enchère salariale de ces métiers difficiles, nécessaires au bon fonctionnement des médias.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

L’interpellation est renvoyée au Conseil d’Etat qui y répondra dans un délai de trois mois.

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