22_HQU_106 - Question orale Thanh-My Tran-Nhu - Académie de police : les plaintes des aspirant-e-s genevois-es sont-elles justifiées ?.
Séance du Grand Conseil du mardi 11 octobre 2022, point 3.12 de l'ordre du jour
Texte déposé
Le 2 octobre 2022, nous apprenions dans les colonnes du 24heures1 que les agent-e-s genevois-es, par le biais de leurs syndicats, exprimaient leur mécontentement quant à la formation de l'Académie de Savatan auprès du Grand Conseil dudit canton.
Parmi les griefs, il a été reproché un cursus "militaire, infantilisant et lacunaire". A cela s'ajoutent l'éloignement de la réalité urbaine de la ville de Genève et une tendance à l'uniformisation des postulant-e-s, lesquels seraient plus jeunes et sans formation antérieure. La distance du site de formation découragerait les aspirant-e-s ayant une famille.
Interrogé par le média, l'Etat de Vaud assurait de la qualité de cette formation. Aucune critique n'ayant été formulée auprès de l'Association professionnelle des gendarmes vaudois.
Ainsi, nous posons la question suivante au Conseil d'Etat : Comment une telle différence d'appréciation entre le Canton de Vaud et le Canton de Genève s'explique-t-elle ?
1https://www.24heures.ch/la-colere-enfle-autour-de-la-formation-des-policiers-262600386776
Transcriptions
Question orale Thanh-My Tran-Nhu - Académie de police : les plaintes des aspirant-e-s genevois-es sont-elles justifiées ? (22_HQU_106)
Le 2 octobre 2022, nous apprenions dans les colonnes du 24heures que les agent-e-s genevois-es, par le biais de leurs syndicats, exprimaient leur mécontentement quant à la formation de l'Académie de Savatan auprès du Grand Conseil dudit canton.
Parmi les griefs, il a été reproché un cursus « militaire, infantilisant et lacunaire ». A cela s'ajoutent l'éloignement de la réalité urbaine de la ville de Genève et une tendance à l'uniformisation des postulant-e-s, lesquels seraient plus jeunes et sans formation antérieure. La distance du site de formation découragerait les aspirant-e-s ayant une famille.
Interrogé par le média, l'Etat de Vaud assurait de la qualité de cette formation, aucune critique n'ayant été formulée auprès de l'Association professionnelle des gendarmes vaudois.
Ainsi, nous posons la question suivante au Conseil d'Etat : comment une telle différence d'appréciation entre le Canton de Vaud et le Canton de Genève s'explique-t-elle ?
Le Conseil d’Etat relève que les critiques dont il est question dans les articles de presse émanent d’une partie des syndicats de policiers genevois et non pas du gouvernement. Le conseiller d’Etat en charge de la sécurité à Genève, par ailleurs Président du Conseil de direction de l’Académie de police de Savatan (CODIR), n’a pas formulé de critiques allant dans ce sens.
Le Conseil d’Etat tient cependant à amener les informations suivantes pour une meilleure compréhension de la formation policière actuelle :
- Depuis 2021, tous les policiers formés en Suisse sont soumis au nouveau Concept général de formation. La formation de base se déroule désormais en deux étapes successives d’une année chacune. La première a lieu dans les centres régionaux de formation, telle que l’Académie de police de Savatan, et la seconde dans le corps d’appartenance. La deuxième année de formation a précisément pour objectif d’assurer l’intégration des aspirants, de leur permettre d’assimiler les particularismes opérationnels propres à leur corps de police ainsi que d’acquérir une connaissance du terrain et de leur région. Dès lors, les aspirants genevois, à l’instar de tous les aspirants policiers de Suisse, sont formés aux spécificités de leur canton lors cette deuxième année ;
- Les programmes de cours dans les centres de formation sont fixés par l’Institut suisse de police pour l’obtention du brevet fédéral de policier. Le contenu des cours est par conséquent le même, quelle que soit l’école de police suivie en Suisse. L’Académie de police de Savatan ne déroge pas à ce programme ;
- Les conditions de réussite aux examens sont également standardisées au niveau suisse sous l’égide de l’Institut Suisse de Police. Les deux règlements d’examens sont approuvés par le Secrétariat d’Etat à la formation, à la recherche et à l’innovation (SEFRI), débouchant sur la reconnaissance du brevet fédéral de policier. Pour l’Académie de police de Savatan, un taux de réussite aux examens fédéraux de près de 98% en moyenne est enregistré ;
- Les aspirants policiers ne sont pas recrutés par l’Académie de police de Savatan, mais par leur corps d’appartenance. C’est aussi ce dernier qui décide de l’affectation des policiers formés au sein de leur corps une fois la formation de deux ans achevée. Dès lors, les critiques des syndicats genevois sur le recrutement, le profil des aspirants ou encore l’incorporation dans le corps ne concernent pas l’Académie de police ;
- Les aspirants genevois disposent de logements modernes gracieusement mis à disposition sur le site de Savatan, de sorte qu’ils n’aient pas à rentrer au terme des cours. Le fait de résider sur site permet également des interactions sociales et des partages d’expériences entre aspirants de corps de police différents.
En outre, l’Académie de police accorde une attention particulière aux réalités opérationnelles des corps partenaires. A cet effet, une plateforme d’échanges a été créée afin d’intégrer les retours d’expérience et les adaptations techniques, tactiques et pédagogiques dans son programme, tout en respectant les conditions-cadres fixées par le Concept général de formation, établi pour toute la Suisse.
Par ailleurs, une série de mesures ont été prises en 2019 visant à renforcer l’autonomisation et la responsabilisation des aspirants de l’Académie de police – projet ADAPTO – tels que la mise en place d’une formation distancielle e-learning, la réduction du nombre d’heures obligatoires pour les activités physiques, la diminution des heures dédiées au décorum policier – chants, lever des couleurs, rassemblements, etc. – un accent particulier mis sur des heures de cours d’éthique professionnelle et de protection des droits humains, etc.
Enfin, depuis le début de l’année 2022, un conseil scientifique commun à l’Académie de police de Savatan et au Cifpol – l’école de police pour les cantons de Jura, Neuchâtel et Fribourg – a été créé. Ce conseil scientifique a pour mission :
- de réaliser une veille sur les tendances et évolutions pertinentes susceptibles d’influencer la formation policière de base à moyen et long terme ;
- d’organiser des évènements favorisant les échanges scientifiques ;
- de répondre aux sollicitations des deux écoles de police sur des thématiques particulières, ainsi que de rechercher des interlocuteurs pertinents et des experts ;
- de préaviser, anticiper, suivre et éventuellement stimuler des projets de recherche qui concernent les Ecoles ;
- d’établir des liens avec l’Institut Suisse de Police ou d'autres institutions chargées de formation policière, ainsi qu’avec les hautes écoles ;
- d’appuyer la Commission de formation de l’Académie de police dans l’amélioration des plans d’études et de pédagogie policière.
Ce conseil scientifique commun aux deux écoles de police est composé d’experts et d’expertes nommés par la Conférence latine des Chefs des Départements de justice et police (CLDJP), notamment issus de l’Ecole des sciences criminelles de l’Université de Lausanne. Il vise à améliorer la pédagogie policière, notamment en s’inspirant de pratiques existantes en Suisse ou à l’étranger. Dès lors, si le contenu des cours est harmonisé au niveau national, comme indiqué avant, l’organe de direction de l’Académie de police de Savatan et l’école de police pour les cantons de Jura, Neuchâtel et Fribourg ambitionnent de faire évoluer en permanence les modalités d’enseignement et la pédagogie policière.
En conclusion, le Conseil d’Etat estime que les éléments cités démontrent que les critiques émises par certains syndicats de police genevois à l’encontre de la formation à l’Académie de police de Savatan ne se justifient pas. Tant les autorités du canton de Genève que les représentants vaudois – polices communales et cantonales – sont satisfaits de la qualité de la formation dispensée. Le projet de déplacement de l’école de police à Moudon ainsi que les travaux en cours pour la création d’une école de police romande sur plusieurs sites vont encore davantage consolider les évolutions entreprises ces dernières années et constituent une opportunité pour dynamiser la formation policière.
Je vous remercie pour cette réponse très détaillée. Est-il prévu des aménagements, hormis le déplacement de Moudon, pour les aspirantes et aspirants en charge d’enfant qui peuvent difficilement loger sur place ?
Retour à l'ordre du jourJe ne peux pas répondre à cette question. J’en prends donc note et j’y répondrai lors d'une prochaine séance.