22_REP_190 - Réponse du Conseil d'Etat au Grand Conseil à l'interpellation Vincent Keller - A qui profite la CA-RL et comment est-elle financée ? (22_INT_120).

Séance du Grand Conseil du mardi 6 juin 2023, point 15 de l'ordre du jour

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M. Vincent Keller (EP) —

Je remercie le Conseil d’Etat pour sa réponse à mon interpellation. Je regrette que celui-ci n’entre pas en matière sur cette demande qui vise à égaliser l’accès à la Centrale alimentaire de la région lausannoise (CA-RL) pour les communes du canton et qu’il ne se préoccupe pas des démunis. Cette volonté de mutualisation évoquée dans l’historique de la CA-RL a permis la naissance et le développement de la CA-RL. Cette dernière a pu exister, parce que la ville de Lausanne est venue soutenir cette volonté en l’encourageant par le biais du préavis de la subvention. Si une telle volonté venait à naître entre les grands acteurs cantonaux mentionnés plus loin dans la réponse du Conseil d’Etat, ceci serait dans l’intérêt de la population vaudoise pour une couverture appropriée et coordonnée de l’aide alimentaire dans ce canton. En effet, ces communes – Renens, Yverdon et d’autres peut-être – soutiennent les collectifs qui font le travail de venir en aide aux personnes vulnérables, notamment par des distributions de nourriture, par des cantines solidaires et d’autres mesures. La demande augmente, mettant les collectifs et les communes concernées face à une augmentation des précarités. Preuve en est, j’ai été contacté dernièrement par M. Pierre-André Glauser, de l’Association Partage Riviera, à Vevey, qui a lu la réponse du Conseil d’Etat et qui m’a apporté une correction s’agissant de son association : ce ne sont pas 310 familles qui reçoivent chaque semaine entre 7 et 8 tonnes de denrées alimentaires, comme cela figure dans la réponse du Conseil d’Etat, mais 600 familles. Plus les communes viennent en aide aux publics vulnérables, plus ceux-ci viendront dans ces communes sur qui, de fait, reposera la charge sociale. Une prise en charge par le canton aurait le double avantage d’être incitative – les communes souhaitant soutenir une distribution de nourriture se sentiraient légitimes de solliciter la CA-RL – mais aussi de favoriser la répartition à l’échelle du canton. A titre d’exemple, les communes de l’Ouest lausannois ont récemment été sollicitées par la CA-RL pour une participation financière qu’une partie d’entre elles a acceptée. Cela montre que la thématique préoccupe certaines et certains plus que d’autres et surtout que la CA-RL a besoin de fonds.

Il faut ajouter que de nombreuses personnes échappent au radar de la précarité. Parmi ces pauvres jamais mentionnés, mais qui sont les clients des dispositifs, mentionnons par exemple les sans-papiers, les personnes issues de l’asile – leur assistance, déjà en dessous de tout, n’a pas été indexée et leur nombre est passée de 5000 au début de l’année 2022 à plus de 11’000, chiffre donné par M. Dürst dans une séance précédente. On peut aussi citer les ménages qui sont juste en dessous des normes et qui se retrouvent avec moins d’argent à la fin du mois que les gens au RI – car c’est à eux de payer les factures d’électricité et non pas au RI – et enfin les personnes surendettées qui doivent vivre avec le minimum vital de l’Office des poursuites. Tous ces pauvres sont des habitants du canton pour lesquels l’Etat de Vaud devrait mesurer sa force au soin qu’il prend envers les plus faibles de ses membres.

Face à cela, le canton devrait se poser les questions suivantes : premièrement, quelle est la réelle couverture cantonale assurée par tous ces acteurs identifiés ? Deuxièmement, quelles sont les modalités de distribution ? Ces modalités garantissent-elles un accès équitable à la nourriture pour les personnes concernées ? Recevoir un carton une fois par année, ce n’est pas la même chose que de recevoir un cabas chaque semaine, vous en conviendrez. Je salue l’ouverture du Conseil d’Etat à cette thématique et je prends acte qu’il y restera attentif. Je souhaiterais que dans la veille qu’il a mise en place, en guise d’indicateurs, il ajoute celui des communes concernées par les distributions de nourriture, qu’il les approche et qu’il vérifie avec elles si elles disposent des moyens nécessaires pour faire face aux demandes.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion est ouverte.

Mme Patricia Spack Isenrich (SOC) —

Je viens appuyer les propos de mon collègue Vincent Keller et me permets de prendre la parole, car c’est un sujet très sensible, pour pouvoir le constater sur le terrain de mon district. Je me permets de déclarer mes intérêts : je suis syndique de la commune de Bussigny, en charge notamment des affaires sociales. Je précise que la CA-RL redistribue des denrées alimentaires à près de 38 structures membres de la région lausannoise, le rapport du Conseil d’Etat n’en citant que quatre principales. Le travail effectué par la CA-RL est donc considérable. Toutefois, depuis le début de la crise sanitaire, les besoins alimentaires des personnes en situation de précarité ont considérablement augmenté. Ce sont les constatations de la CA-RL, qui a écrit une lettre dans ce sens aux municipaux et municipales de l’Ouest lausannois en charge des affaires sociales, l’année dernière déjà. Ainsi, le volume des cabas confectionnés et distribués a hebdomadairement doublé, avec plus de 1200 cabas distribués chaque semaine. En 2021, la CA-RL a ainsi distribué un total record de 747 tonnes de produits de première nécessité et a impacté plus de 10’000 bénéficiaires par semaine. Ceci représente une augmentation de près de 40 %, en deux ans, du volume total distribué.

La CA-RL a toutefois proposé une prestation qui a été déficitaire en 2019, puis aussi en 2020. En conséquence, depuis 2021, en raison de son budget limité, la CA-RL n’a pas pu ouvrir de nouvelles antennes de distribution. Elle a ainsi atteint sa capacité maximale avec les ressources dont elle disposait. Concrètement, cela signifie qu’une nouvelle association souhaitant pouvoir offrir des cabas ne peut plus se fournir auprès de la plus grande centrale alimentaire, alors que la demande augmente. Cela s’est produit à Bussigny, en 2022, alors qu’une association y avait ouvert une cantine solidaire, avec remise de cabas de nourriture à des personnes défavorisées. Malheureusement, la CA-RL avait alors dû refuser de la soutenir par manque de moyens. Or, à Bussigny, cela concernait près de 40 personnes qui venaient chaque semaine chercher un cabas. Il faut constater que le besoin est bien là et qu’il peine à être assouvi. Il est donc bien difficile de pouvoir assurer un minimum de nourriture décente à nos plus démunis. D’un autre côté, on constate aussi que les Cartons de l’Ouest lausannois peinent à trouver des financements et les soutiens financiers diminuent de plus en plus dans cette association également.

En raison de l’inflation, de l’augmentation des coûts de l’électricité et du chauffage, de la hausse du taux hypothécaire de référence, de la hausse des primes de l’assurance-maladie et du prix des aliments, se nourrir correctement et sainement coûte cher et, dans les faits, l’alimentation constitue un poste important de dépenses au sein d’un budget familial. Dans l’Ouest lausannois, le nombre d’expulsions à fin avril 2023 a déjà atteint celui de toute l’année 2022. On constate ainsi malheureusement dans nos régions et dans nos districts que la précarité existe bel et bien et qu’elle augmente. Il serait donc temps est important que le canton soutienne de manière plus accrue les associations d’aide alimentaire d’urgence et qu’il prenne un rôle plus actif dans le domaine de l’aide alimentaire.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion est close.

Ce point de l’ordre du jour est traité.

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