20_REP_53 - Réponse du Conseil d'Etat au Grand Conseil à l'interpellation Pierre Dessemontet et consorts - Accord Canton-Communes sur la répartition de la facture sociale : quid des communes dont l’aide péréquative est plafonnée ? (20_INT_14).

Séance du Grand Conseil du mardi 29 juin 2021, point 26 de l'ordre du jour

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Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Pierre Dessemontet (SOC) —

Je commence par déclarer mes intérêts : je suis municipal d’une commune actuellement plafonnée dans l’aide péréquative et dont je reprends les finances communales d’ici environ 36 heures. J’aimerais tout d’abord remercier le Conseil d’Etat pour la rapidité et la franchise de sa réponse. Je remercie également le Bureau du Grand Conseil pour la célérité avec laquelle il a tenté, à plusieurs reprises, de mettre ce point à l’ordre du jour ; si nous n’en parlons qu’aujourd’hui et non au mois de mars ou d’avril, la responsabilité m’en incombe principalement. Je remercie donc ces instances pour la rapidité de leurs réponses. Voilà l’aspect positif que j’ai trouvé à souligner dans cette réponse, dont vous pouvez imaginer que, par ailleurs, elle ne me satisfait pas du tout. En effet, elle confirme que pour les communes touchées par l’article 8, alinéa 1f de la Loi sur les péréquations intercommunales (LPIC), l’accord canton-communes et la feuille de route mise en place dans le cadre de cet accord n’ont que très peu d’impact, puisque pour l’essentiel ou du moins une grande majorité de cette aide, la bascule qui aurait pu être favorable à ces communes se trouve finalement bloquée par le fameux plafonnement.

D’une certaine manière, on peut donc malheureusement dire que les communes plafonnées sont largement exclues des effets de l’accord. Ou plutôt devrions-nous dire la commune plafonnée, puisque la réponse du Conseil d’Etat nous apprend qu’il n’en restait que trois, en 2019, dont une seule pour une somme correspondant à plus d’un point d’impôt, alors que les acomptes montrent que, pour l’année 2021, à l’exception de la commune de Syens plafonnée pour un montant de l’ordre de 1800 francs, seule la commune d’Yverdon-les-Bains se trouve en situation d’être plafonnée. D’une certaine manière, par conséquent, l’article 8 alinéa 1f de la LPIC est devenu une Lex Yverdon-les-Bains. Pour rappel, cet article plafonne l’aide péréquative à un certain nombre de points d’impôt, fixés par décret, selon la loi. Actuellement, ce plafonnement se monte à 8 points d’impôts.

Il y a plusieurs choses à dire sur le sujet. Tout d’abord, la commune que j’ai l’honneur d’administrer au sein de la Municipalité est triplement touchée. D’une part, le fait que le plafonnement soit libellé en points d’impôt signifie que plus votre commune est pauvre, plus vous atteignez rapidement le plafond dont la hauteur est définie par l’aisance ou au contraire la modestie de la valeur du point d’impôt. Ensuite, la commune est elle-même plafonnée et ainsi ne touche pas l’ensemble de l’aide à laquelle elle aurait droit si le plafonnement n’existait pas. Enfin, le troisième effet est que, du fait de l’existence d’un plafonnement, la commune est exclue de certains accords tel celui qui a été trouvé. J’avais d’ailleurs soutenu cet accord, tout en sachant très bien qu’il y avait un risque assez fort qu’il n’ait qu’un impact relativement modeste pour ma propre collectivité. D’une certaine manière, la commune d’Yverdon-les-Bains, qui reste la dernière commune à être plafonnée, est punie d’être en même temps trop grande et trop pauvre.

C’est là un défaut de la LPIC actuelle, qui devrait évidemment être corrigé à l’avenir, car si l’on met un système en place, on s’attend à ce qu’il s’applique de manière plus ou moins égale à tout le monde, ou alors, si des cautèles sont mises, qu’elles soient à la faveur des communes, ainsi que cela se produit avec le plafonnement de la contribution, un système qui permet de protéger les communes, leur évitant de contribuer trop au système. Nous ne devrions pas avoir un système qui plafonne au niveau de l’aide qui pourrait être reçue. J’entends évidemment bien, dans la réponse, que le Conseil d’Etat n’entend pas réviser la LPIC parce que nous sommes en discussion et que l’on sait que tout le monde dit que nous devrions rapidement aboutir à une réforme complète du système de la péréquation intercommunale. On sait pourtant aussi que ce ne sera pas si facile, ainsi que nous le voyons déjà dans les négociations actuelles. En effet, de nombreuses communes ont des intérêts fortement divergents les uns des autres, et elles ont toutes le sentiment – c’est le cas de la mienne, mais je ne doute pas que d’autres communes aient le même sentiment – de jouer leur peau dans cette négociation qui sera donc extrêmement difficile. Alors, que faire ? Je ne déposerai pas de détermination quant à la réponse du Conseil d’Etat, mais je vais déposer une initiative législative visant à l’abrogation de l’alinéa 1f de l’article 8 LPIC. Ce que l’on a fait pour Mies, c’est-à-dire régler un cas devenu un cas spécial, doit pouvoir être fait pour d’autres collectivités.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est ouverte.

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Conseiller-ère d'État

Je remercie M. Dessemontet pour ses déterminations et l’annonce de son initiative législative. Je crois que nous avions été très clairs, dans le cadre de l’accord, sur les effets pour Yverdon. La discussion avait aussi porté sur ce point et nous avions indiqué que quelques communes – dont maintenant principalement Yverdon – seraient concernées par le plafond de l’aide.

L’interpellation s’interroge sur la manière dont les communes concernées par le plafond de l’aide bénéficient de l’accord relatif à la participation à la cohésion sociale (PCS). Je ne veux pas reprendre tout ce que dit cet accord, mais il prévoit la reprise des frais des agences d’assurances sociales pour les prestations sociales cantonales, dès 2022, et une réduction forfaitaire appliquée au montant de la PCS calculé selon le droit actuel. Les communes concernées par le plafond de l’aide bénéficieront de la première mesure, mais pas de la deuxième. Cela s’explique par le fait que, dès aujourd’hui, l’augmentation de la PCS n’a pas d’influence sur les transferts en faveur de ces communes. Il n’est donc pas étonnant que celles-ci ne bénéficient pas des mesures qui visent à freiner la progression de la PCS.

Il convient aussi de souligner, ainsi que cela a été rappelé, que nous sommes dans une phase transitoire. L’interaction entre les montants prévus par l’accord et le système actuel seront, dans tous les cas, discutés, voire changés avec une péréquation nouvelle ou modifiée. Ce sera l’occasion d’intégrer cette réflexion, en sachant qu’avec l’initiative SOS Communes, d’autres paramètres entrent en compte puisque cette initiative a abouti et que cela a évidemment un impact par rapport au délai lié à la mise en œuvre de la péréquation modifiée. Alors que l’on imaginait une nouvelle péréquation pour 2023, le fait que cette initiative ait abouti implique que nous traitions aussi de son texte, ce qui a une conséquence sur les discussions en cours et sur les délais relatifs à la nouvelle péréquation.

Evidemment, pour faire bénéficier les communes plafonnées de tous les volets de l’accord entre l’Etat et les communes, il faudrait modifier le plafond, voire le supprimer. Cela signifierait admettre qu’une commune puisse, via le système de péréquation, bénéficier de transferts pour un montant supérieur à la valeur de ses 8 points d’impôt, avec évidemment un effet sur les autres communes. Aujourd’hui, le plafonnement de l’aide implique, pour Yverdon-les-Bains, 3,7 millions de moins que sans ce plafond. La décision revient au Grand Conseil et je prends note qu’une initiative législative sera déposée en ce sens. Je rappelle que le plafond a été modifié très récemment. Il était fixé à 6,5 points d’impôt avant 2019, ce qui a notamment permis à Yverdon de déplafonner 1,2 million par rapport à l’ancien droit, sur un décompte péréquatif net, en 2019, soit des effets positifs pour Yverdon de plus de 16 millions d’effet péréquatif net après déduction de la PCS soit la facture sociale. Le débat me semble donc très clair. Comme d’habitude, cette discussion montre qu’il y a beaucoup d’intérêts à concilier, entre l’Etat, les communes, les villes, les plus petites communes et celles à moins forte capacité. Encore une fois, comme je le répète lors de chaque débat, il faudra donc beaucoup de bonne volonté de chaque côté pour arriver à une solution négociée.

M. Julien Cuérel (UDC) —

Je déclare mes intérêts : je suis syndic d’une petite commune. Je comprends tout à fait ce qu’a dit M. Dessemontet, qui a entièrement raison. Je fais une suggestion concernant les 3,7 millions de francs évoqués : ils pourraient constituer un « petit geste » de l’Etat envers la deuxième ville du canton, de manière provisoire, afin d’éviter un report sur les autres communes.

J’ai une question complémentaire. Dans les explications de Mme la conseillère d’Etat, j’ai entendu deux termes différents. Cela fait cinq ou six ans qu’on entend que la péréquation actuelle a beaucoup d’effets de bord et que le système devient compliqué ; la démonstration vient d’être faite par M. Dessemontet. Il faudrait donc entièrement refaire la péréquation et c’est pourquoi elle s’appelle Nouvelle péréquation intercommunale vaudoise (NPIV), le mot « nouvelle » indiquant bien qu’il faut tout reprendre. Parmi les éléments évoqués, madame la conseillère d’Etat, vous avez parlé de nouvelle péréquation, mais vous avez également parlé de la « future péréquation modifiée ». Ma question est donc la suivante : s’agit-il d’une nouvelle péréquation dont nous entendons parler depuis 6 ou 7 ans, ou d’une péréquation modifiée, soit la péréquation actuelle que l’on aménagerait je ne sais trop comment, puisque chaque léger aménagement produit les effets de bord que l’on vient d’évoquer. J’aimerais que l’on puisse apporter une certaine clarté au Parlement : y aura-t-il une nouvelle péréquation vaudoise, ou s’agira-t-il de la péréquation actuelle modifiée ?

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Conseiller-ère d'État

Je remercie M. Cuérel pour ses questions. Evidemment, ce sont des questions toutes théoriques, puisque vous êtes parfaitement au clair sur les discussions menées entre le Conseil d’Etat et l’Union des communes vaudoises (UCV), pour en être partie prenante, monsieur le député. Cela étant, j’y réponds volontiers. S’agissant de la péréquation actuelle, dans tous les cas, il s’agira de prendre des mesures transitoires. En effet, la question de la facture policière, par exemple, dépend d’un accord qui prend fin en 2021, ce qui poserait certaines difficultés sans mesure transitoire. Dans ce cadre, l’idée serait de voir ce que l’on peut faire de manière transitoire, si toutes les communes sont bien d’accord avec ce qui est proposé, évidemment. C’est l’objet des discussions en cours entre le Conseil d’Etat et les communes, ainsi que M. Cuérel le sait parfaitement.

Des négociations peuvent être menées dans ce cadre sur l’un ou l’autre des points de la péréquation, mais c’est un jeu de mikado, car il faut faire attention à ce que l’on fait dans un système très délicat à modifier, où la moindre modification peut produire des effets à l’autre bout de la chaîne. Nous examinons donc ce qui peut être fait de manière transitoire en attendant soit une toute nouvelle péréquation, soit une péréquation modifiée – c’est une question de terminologie. La réelle question est de voir si l’on arrive à mettre en place un système complètement neuf ou s’il s’agit seulement de modifier certains paramètres de la péréquation actuelle. Tout va dépendre des discussions en cours ainsi que des discussions liées à l’initiative SOS Communes.

Ces démarches sont d’une grande complexité, car je rappelle que des motions et des postulats nous ont aussi été renvoyés, comme celui de M. Lohri, proposant divers systèmes. Nous devons analyser tout cela dans le cadre de la future péréquation, qu’elle soit modifiée ou totalement révisée. L’objectif principal est toujours d’arriver à une solution qui puisse satisfaire la grande majorité des communes et l’ensemble des partenaires institutionnels, soit l’Etat et les communes, dans une discussion franche, avec beaucoup de bonne volonté de part et d’autre, afin de trouver un consensus.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est close.

Ce point de l’ordre du jour est traité.

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