22_REP_207 - Réponse du Conseil d'Etat au Grand Conseil à l'interpellation Nicola Di Giulio - Danse avec les loups ! (22_INT_129).
Séance du Grand Conseil du mardi 4 avril 2023, point 48 de l'ordre du jour
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Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour« Le retour du loup questionne notre société » titrait un quotidien, il y a peu. Dans sa réponse aux questions posées dans mon interpellation, le Conseil d’Etat – que je remercie pour ses réponses – rappelle les mesures mises en œuvre sur le territoire cantonal pour la protection des troupeaux et le suivi des populations de loups, ainsi que leur régulation. Les éleveurs se doivent impérativement de prendre des dispositions importantes pour protéger leurs troupeaux. Les autorités quant à elles se doivent de prendre des décisions pour maintenir absolument le loup loin des activités de l’homme.
La protection des loups fait débat, mais pourquoi ? Dans le monde, la protection des loups divise les autorités et les agences de protection de la faune. Jusqu’à récemment, peu d’entre nous pouvaient se vanter d’avoir déjà vu un loup à l’état sauvage. Pour beaucoup d’éleveurs, aujourd’hui, le loup n’a plus sa place. Pourquoi le débat est-il si polarisé ou émotionnel ? Certes, nous avons fait de grands progrès avec la réintroduction du loup, mais les récents événements politiques marquent une régression réelle, à tel point que le bétail, les animaux de rente sont tous les jours mis en danger par les loups. A la lumière des récents événements, certains éleveurs parlent même de vouloir appliquer – tenez-vous bien ! – la loi du talion ! Œil pour œil, dent pour dent – un animal de rente tué, un loup abattu. L’ordonnance fédérale en vigueur semble aujourd’hui bien loin de cette intention, car il serait regrettable que les éleveurs régulièrement touchés par ces prédateurs appliquent leur propre loi.
La gestion de la faune sauvage a été longtemps considérée comme une chasse gardée par des éleveurs, les chasseurs et le gouvernement, lui-même lié aux intérêts de l’industrie du bétail. Vous l’avez compris, le débat est épineux. La Confédération a apporté des modifications dans la gestion des grands prédateurs, dans notre pays. Et en substance, le Conseil d’Etat mentionne dans ses réponses que les mesures de protection mises en place sont efficaces, mais qu’elles requièrent un engagement conséquent des bergers ainsi que des éleveurs. Des surveillances ont été opérées dans le cadre d’interventions d’urgence, dans le but de tester l’effarouchement du loup. Des indemnisations des dommages causés par le loup aux animaux de rente et aux cultures agricoles sont versées, indemnités conjointes entre la Confédération et les cantons à raison de 80 % à charge de la Confédération et à 20 % à celle des cantons.
Si l’on examine les risques légaux encourus par un éleveur qui abattrait un loup surpris en train d’attaquer son bétail, le Conseil d’Etat mentionne que « sera puni d’une peine privative de liberté d’un an au plus ou d’une peine pécuniaire quiconque intentionnellement et sans autorisation chasse ou tue du gibier ainsi que des animaux d’espèces protégées. » Le Conseil d’Etat rappelle également qu’il s’agit bien d’une pratique illégale qui conduit à l’ouverture d’une enquête pénale. Le Conseil d’Etat reconnaît que le cadre légal actuel ne permet que peu de marge de manœuvre, mais un plan d’action visant à optimiser les mesures actuelles est néanmoins en cours d’élaboration.
En conclusion, en terre vaudoise, l’UDC souhaite une régulation préventive, c’est-à-dire pouvoir tirer les loups quand ils sont trop nombreux, mais avant qu’ils ne tuent. En effet, aujourd’hui, malheureusement, les décisions sont prises seulement après coup, quand il est trop tard. L’élimination de meutes ou d’individus devrait être autorisée là où l’agriculture est menacée. Il devrait aussi être permis d’abattre les loups qui s’approchent de façon menaçante des zones habitées et des êtres humains, ou contre lesquels les mesures de protection des troupeaux sont inefficaces. Le loup n’a plus été présent chez nous pendant longtemps. Devrions-nous sacrifier notre équilibre alimentaire sur l’autel de l’équilibre de l’écosystème ? Le loup n’a tout simplement pas sa place dans notre pays.
La discussion est ouverte
Je souhaiterais faire entendre un autre son de cloche par rapport aux appels à faciliter les tirs et à tirer les loups de manière plus fréquente. Selon moi, l’exemple de la France, où les tirs sont facilités sur le plan légal et beaucoup plus fréquents, montre les limites d’une telle approche. En France, on a pu constater que les attaques du loup n’ont pas diminué ensuite des tirs. Au contraire, de sérieux indices laissent penser que des tirs tous azimuts ont plutôt conduit à déstructurer les meutes, à les rendre plus nerveuses et à aggraver les menaces contre les troupeaux ; il y a là quelque chose de potentiellement contre-productif. J’estime donc qu’il faut bien réfléchir avant de se lancer tête baissée dans la voie proposée aujourd’hui par l’UDC – et peut-être bientôt par une majorité parlementaire, sur le plan fédéral, qui souhaite assouplir la loi sur la chasse, alors même que cet assouplissement avait été refusé en votation populaire, en 2020 !
Pour ma part, je regrette aussi les erreurs de tir commises ces derniers mois par le canton, l’une en mars 2022 quand un loup extérieur à la meute du Marchairuz avait été abattu, et l’autre en novembre 2022 lorsque le mâle alpha de la meute a été abattu, par erreur là encore. Ces erreurs montrent la difficulté à mettre en œuvre des tirs de manière ciblée, précise et efficace, puisqu’il est très difficile d’identifier visuellement les différents loups. Ces erreurs de tir posent aussi un problème sur le plan légal puisque, jusqu’à nouvel ordre, on parle d’une espèce protégée. Compte tenu de toutes les limites à mettre en œuvre des tirs de plus en plus fréquents, selon moi la voie à suivre passe plutôt par un renforcement des mesures de cohabitation et de protection des troupeaux. La fondation Landry par exemple, qui fait du bon travail et mène des recherches concrètes pour améliorer la cohabitation entre les loups et les ovins, pourrait être davantage soutenue financièrement. Les éleveurs et éleveuses doivent bien sûr être soutenus, notamment de manière à leur permettre davantage de moyens humains pour la protection des troupeaux ; c’est tout de même la méthode la plus efficace, avec la possibilité de recourir à des tirs d’effarouchement non létaux si un loup s’approche trop d’un troupeau, voire s’il cherche à entrer dans la bergerie. La voie du renforcement des moyens humains est beaucoup plus prometteuse que celle que des tirs qui, en France, montrent leur caractère approximatif et déstructurant pour les meutes, sans amener de résultats satisfaisants.
Nous voici partis pour un sujet qui fâche un peu tout le monde : les éleveurs, les citoyens, les écologistes… et avec la biodiversité animale, etc. : il faut tout préserver !
J’aimerais revenir sur l’intéressante interpellation de mon collègue Nicola Di Giulio, avec ses cinq questions et pour commencer, sur la première question et ses trois piliers. A propos du premier pilier – le monitoring – force est de constater, monsieur le conseiller d’Etat, qu’il ne fonctionne « pas des masses bien » comme on dit... Il faudrait presque mettre une puce à chaque loup pour pouvoir l’identifier et savoir qu’il est là le jour J, mais le lendemain il est peut-être à 50 kilomètres ! C’est un animal hyper mobile et on le sait très bien, mais en Suisse, en faisant 50 kilomètres, on passe vite de Genève à Fribourg, c’est clair.
Pour le deuxième point – la protection des troupeaux – dans la réponse, on demande aux bergers éleveurs d’avoir un engagement très conséquent : parcage, présence des patous et éventuellement rentrer les animaux la nuit. Mais où en arrive-t-on ? Rentrer les animaux la nuit ! Mesdames et messieurs qui veulent de la biodiversité, si l’on met des animaux en estivage, l’été, c’est pour qu’ils pâturent jour et nuit ; ce n’est pas pour les rentrer la nuit, ou alors autant les garder en plaine où on les soignera plus ou moins intensivement et cela ira aussi. Les Italiens le font déjà, d’ailleurs. Au point 3 – régulation – on arrive dans le cadre fédéral. Il faut des autorisations pour les tirs, ce qui est logique, car c’est la loi qui le dit. Mais dès qu’il y a une attaque, si l’on demande une autorisation, car il est prouvé par l’ADN qu’il y a un loup, les semaines et les mois passent et on apprend plus tard qu’alors on pensait qu’il fallait tirer un certain animal, ce n’était pas le bon sujet. Cela devient risible pour certains citoyens, mais je peux vous assurer que pour les éleveurs, une telle situation n’est jamais risible.
J’en arrive à la réponse au point 4, indemnisation des éleveurs. Actuellement, au vu de la situation dont nous avons bien compris qu’elle devient de plus en plus ingérable sur notre territoire, les mesures du plan loup ne couvrent pas du tout la réalité des dégâts totaux subis par les éleveurs lors des attaques de loup. Dans tous les cas, les dégâts collatéraux sont sous-évalués pour les éleveurs et leurs troupeaux. Ces dégâts souvent énormes sont invisibles, car on ne s’en aperçoit que 2, 4 ou 6 mois plus tard, avec des animaux qui deviennent fragiles et que les éleveurs peinent à approcher ; s’ils ont un chien, notamment avec les moutons, ceux-ci ont même peur du chien et de la famille, et ils deviennent incontrôlables, cela sans même parler des avortements, etc. Il faut tout de même préciser que le canton participe à la fixation des indemnités pour les dégâts causés. Il est important de le dire, car l’Etat pourrait faire un effort supplémentaire à propos de ces importants dégâts invisibles. Je vous annonce donc que je compte déposer la détermination suivante :
« Par la présente détermination, le Grand Conseil invite le Conseil d’Etat à tout mettre en œuvre afin de pouvoir prélever le plus rapidement le ou les loups commettant des attaques dans les fermes d’élevage ou à proximité des habitations sur le territoire cantonal. »
Nous avons entendu une intervention personnelle, en début d’après-midi, et cette détermination reflète cette intervention, car il y a urgence. Dès qu’il y aura des attaques près des bâtiments, comme ce fut le cas dans la région de la Côte et au Pied-du-Jura, l’Etat doit intervenir le plus rapidement possible par le biais de son Service de la faune.
La discussion sur la détermination est ouverte.
Je voudrais revenir sur deux points. Tout d’abord, notre collègue M. le député Di Giulio a complètement raison. Aujourd’hui, les bras m’en tombent quand j’entends qu’un éleveur qui défendrait son troupeau risquerait des peines privatives de liberté ! Alors qu’on sait que les prisons vaudoises sont submergées et qu’on ne sait où enfermer les gens, si quelqu’un défend son bétail, il risque une peine de prison ! C’est à l’envers du bon sens !
Et quant à vos propos, monsieur Buclin, les bras m’en tombent également ! Comment peut-on effectivement admettre aujourd’hui que l’on ne devrait prélever que quelques prédateurs qui n’ont pas de prédateur – car c’est le problème numéro un ? Nous avons été dépassés par l’arrivée des loups dans notre région. Aujourd’hui, nous sommes à la veille de la montée dans les alpages et nous devons faire peur aux prédateurs, mais si nous continuons sur le même chemin, nous allons au-devant de gros problèmes. L’interpellation de M. Di Giulio me semble donc très intéressante et nous devons en tenir compte. Je soutiendrai aussi la position de M. Durussel. Effectivement, l’heure est grave et nous devons arrêter de rêver. Nous sommes à un stade où il faut prendre des mesures drastiques. Il faut admettre que les personnes qui sont sur le terrain ont raison, même si cela peut paraître surprenant. Il faut suivre cette interpellation et soutenir le dépôt de M. Durussel.
Je déclare mes intérêts : je suis membre du comité cantonal de ProNatura. Je souhaite revenir sur un terme utilisé à plusieurs reprises dans le débat : la réintroduction du loup. Parler de réintroduction donne l’impression qu’il s’agit d’un animal artificiellement ramené chez nous alors qu’il n’y était plus, que ce soit le fait d’écologistes, d’un plan plus ou moins machiavélique, ou autre. Or, ce n’est pas le cas. Le loup est revenu par lui-même, depuis l’Italie et la France. D’autres animaux ont été réintroduits, mais ce n’est pas le cas du loup. Partant de là, il faut se dire que le loup est là et que même si vous souhaitez l’exterminer complètement, au cours des prochaines années, tout porte à croire au vu de l’existence de meutes de loups en Italie, en France, et dans d’autres pays européens, que la solution de l’extermination serait simpliste, même d’un point de vue purement comptable, car les loups reviendront. Alors, autant faire en sorte que la cohabitation se passe au mieux, et donner aux éleveuses et éleveurs les moyens de prendre des mesures efficaces pour protéger leurs troupeaux. Imaginer que l’on résoudra le problème en exterminant le loup, c’est malheureusement quelque chose de complètement hypothétique et de faux.
Visiblement, le débat s’est élargi par rapport à la réponse à l’interpellation de notre collègue Di Giulio. C’est pourquoi je me permets de rappeler que, ces dernières années, l’évolution de la présence du loup sur le territoire suisse a été exponentielle. A la fin de l’année 2022, selon les chiffres du KORA, nous en sommes à la présence de 240 individus et 23 meutes. C’est-à-dire que par rapport à la fin de 2021, donc en une année, ce sont 92 individus supplémentaires et 9 meutes de plus. Nous nous trouvons donc vraiment devant une évolution énorme par rapport à ce qu’on nous annonçait. C’est malheureusement pourquoi je me permets de réagir quand M. Buclin nous parle de la votation sur la Loi sur la chasse en 2020 – et j’annonce mes intérêts : je fais partie du comité cantonal en faveur du oui à cette loi. Au moment où nous avions annoncé cette évolution, tout le monde nous a dit que nous exagérions, mais malheureusement, les chiffres que je viens de vous donner prouvent que c’est bien le cas. Je vous invite donc à accepter la détermination José Durussel.
Je tiens à répondre à M. Buclin qui demandait de ne plus toucher à la Loi sur la chasse. Les Chambres fédérales se sont rendu compte de cette évolution négative et c’est pourquoi, en décembre 2022, elles ont accepté une modification de la loi afin de permettre notamment des tirs préventifs du loup. Aujourd’hui, un référendum a été lancé contre cette modification de la loi par certaines organisations environnementales. Visiblement, elles n’ont pas encore obtenu le nombre de signatures nécessaires, donc je vous appelle à ne pas apporter les quelques milliers de signatures qui manqueraient encore d’ici au 8 avril, pour que nous n’ayons pas à voter sur la question.
J’annonce mes intérêts : je fais partie du Conseil de fondation du Parc de la Garenne. Il faut comprendre que lorsque les loups se font traquer et tirer par des gardes-chasse professionnels qui n’ont pas été capables de tuer le bon loup, la meute explose et s’éclate. Les jeunes loups partent alors dans tous les sens et font à peu près n’importe quoi, parce qu’ils n’ont pas été éduqués pour s’occuper sans entrer dans les bergeries entre autres. Je pense donc que la détermination proposée tombe totalement à côté. En effet, laisser tirer des loups par tout un chacun permet de faire des cartons. Alors que les professionnels n’ont déjà pas les connaissances nécessaires pour tirer les bons loups, c’est ouvrir la porte à une grande catastrophe. Il faut donc absolument refuser cette détermination. Je ne suis pas contre la régulation du loup, je peux comprendre que les éleveurs aient des craintes pour leurs troupeaux et aussi que la population soit inquiète. Donc, réguler le loup, d’accord, mais pas n’importe comment et par n’importe qui, s’il vous plaît ! Laissez faire le Conseil d’Etat et les professionnels pour que les choses se fassent au mieux, si possible en apportant une formation correcte aux gardes-chasse.
Magnifique, il faut effaroucher les loups ! A mon avis, c’est n’importe quoi quand on voit que le loup s’est montré très opportuniste, durant cet hiver, en faisant même des prédations dans des exploitations de plaine. Je n’ose pas imaginer ce qui va se passer durant la saison d’estivage qui va démarrer ! Les éleveurs dont je fais partie ont déjà la boule au ventre. Cher collègue député Buclin, vous ne vous rendez pas compte du travail et du coût que cela représente, d’autant plus que cela ne s’arrête pas à 35 heures par semaine à 100 % ; le loup travaille jour et nuit. Merci d’accepter la détermination de notre collègue Durussel.
J’ai une question à l’adresse de M. le conseiller d’Etat. Lors de la législature précédente, dans le rapport de la Commission de gestion par rapport au loup, vous avez écrit qu’une des problématiques du prélèvement était qu’en cas de problème, il y a des autorisations de prélèvement, mais que l’on ne prélevait pas forcément les bons individus et plutôt les jeunes. Dans la détermination de notre collègue Durussel, je trouverais intéressant – mais je laisse l’appréciation à votre étude – le fait de prélever les individus qui posent problème. Mais en écoutant Mme Cherbuin, j’éprouve un vrai doute et j’aimerais avoir des éclaircissements. Est-il intéressant de prélever les loups qui posent des problèmes, donc que l’on arrive à identifier et qui se « spécialisent » dans l’attaque de bovins ? Ou alors est-ce une fausse bonne idée ? Je vous remercie déjà pour votre réponse.
Quand on a parlé de la réintroduction – ou du retour, monsieur Mocchi, on peut en discuter – du loup chez nous depuis une vingtaine d’années, les gens simples comme moi pensaient que c’était parce qu’il s’agissait d’une espèce menacée, et qu'une espèce menacée justifiait des mesures de protection particulières. Maintenant, la situation est toute différente puisque le loup n’est nullement une espèce menacée, mais une espèce bien présente dans toute l’Europe et en voie d’expansion. Au fond, nous sommes donc dans la même situation qu’avec les sangliers, c’est-à-dire des animaux qui ont tendance à se multiplier, dont les comportements sont difficilement conciliables avec une partie de la vie de nos paysans, et qui par conséquent méritent d’être régulés.
J’aime beaucoup le terme « prélèvement » qui est très distingué. A son propos, je me demande si le loup lui-même ne considère pas, quand il vient bouchoyer quelques malheureux moutons dans un élevage, qu’il les prélève délicatement ? En tout cas, ce dont je suis sûr, c’est que les mêmes milieux qui se préoccupent du confort des animaux d’élevage et de rente et qui imposent à nos paysans et éleveurs des contraintes toujours plus grandes pour que les animaux ne souffrent pas, sont bien indifférents aux souffrances des troupeaux attaqués par une meute de loups, qui souvent ne sont qu’à moitié dévorés, qui doivent agoniser sur le pâturage, et qui restent ensuite terrorisés. S’il n’est pas une espèce en voie de disparition, le loup ne mérite pas toutes ces précautions.
Je commence par déclarer mes intérêts : je suis une paysanne dont une génisse a péri, en juillet 2022, sous les crocs du loup. Je tiens très volontiers à votre disposition une photo qui vous montre un exemple de ce qui se passe dans la réalité. Je vous invite surtout surtout à venir partager le quotidien des exploitants de notre canton et même de notre pays, en particulier des éleveurs. Maintenant que le loup s’approche des habitations, faut-il que nous attendions un drame pour agir ? Je suis abasourdie par les propos de certains de nos collègues. Je vous invite donc à soutenir la détermination de notre collègue, M. Durussel.
Je pense que nous sommes toutes et tous d’accord ici que les attaques contre les troupeaux doivent être réduites et évitées au maximum. De la droite à la gauche, il me semble y avoir un consensus autour de cette problématique. Ce qui nous divise, ce sont les moyens à mettre en œuvre pour y parvenir. Avec d’autres spécialistes du comportement du loup, tels celles et ceux de la Fondation Landry que j’ai citée dans ma première intervention, j’estime que le tir n’est pas la bonne méthode pour réduire les attaques, ainsi que le cas français l’a démontré. En effet les tirs y sont pratiqués à beaucoup plus grande échelle qu’en Suisse, mais sans grand succès. Je pense donc qu’il faut réfléchir à d’autres méthodes. La surveillance des troupeaux par des bergères et des bergers avec un soutien financier accru aux éleveuses et éleveurs pour financer ces moyens humains supplémentaires est une méthode beaucoup plus prometteuse pour réduire les attaques.
Je pense aussi qu’il faut raison garder sur la présence du loup sur le territoire. M. Bardet, vous avez parlé d’une augmentation exponentielle des loups dans le canton, pourtant il faut tout de même constater qu’il n’y a pas d’augmentation exponentielle des dégâts aux troupeaux. Sur les années 2021 et 2022, il y a plutôt une stabilisation autour de 60 bêtes perdues par année du fait des loups. Entre 2021 et 2022, il n’y a donc pas d’augmentation, ainsi que le révèle la réponse du Conseil d’Etat à ma simple question (22_QUE_32) posée il y a quelques mois. Et toujours selon la réponse à ma question écrite, les pertes dues à la prédation du loup représentent moins de la moitié des pertes, alors que la majorité de celles-ci est due à des accidents et à la maladie. Des chiffres intéressants cités dans un long article du Temps, montraient que les indemnités – car rappelons qu’il y a heureusement des indemnités pour les éleveuses et éleveurs qui perdent des bêtes suite aux attaques du loup – se sont élevées, en 2021, à 70'000 francs. A titre de comparaison, l’indemnisation des dommages causés par le sanglier s’élève chaque année à plus de 500'000 francs. Ces éléments nous permettent de relativiser un peu, de garder la tête froide et de nous dire que la situation reste suffisamment sous contrôle pour que nous ayons le temps de réfléchir aux bonnes méthodes, aux méthodes les plus efficaces pour protéger les troupeaux. Il faut en effet mettre aussi dans la balance tout ce que le loup apporte, en termes de régulation des autres espèces ; il est une partie intégrante de la biodiversité. Il ne faut donc pas le considérer uniquement en termes de coûts, mais aussi en termes de services rendus aux équilibres naturels. C’est pourquoi je vous invite à refuser cette détermination qui ne propose qu’une seule méthode unilatérale – celle du tir – alors que d’autres méthodes de protection des troupeaux ont fait leurs preuves.
Dans cette salle, nous savons combien le sujet du loup est émotionnel. J’ai un grand respect pour les éleveuses et éleveurs qui ont connu des pertes de leurs bêtes, ces dernières années. Il n’empêche que, dans notre ordre du jour, il aurait peut-être été utile de traiter l’objet suivant avant celui-ci. Une commission unanime s’est mis d’accord pour demander un plan d’action à l’égard du loup, dans ce canton, et je pense que c’est une mesure juste. Il est vrai que certains dégâts sont parfois comparables à ceux d’autres animaux et comme nous l’avons fait, je crois que l’auteur du postulat, notre collègue Germain se réfère aux sangliers, car il existe aussi des dégâts commis par d’autres espèces.
En l’occurrence, ce qu’on nous propose ici est bien pire que la loi du talion, puisque la détermination José Durussel nous propose de tuer le ou les loups, dès qu’il y a une attaque. Je comprends les émotions de chacune et de chacun, mais qu’est-ce qu’une attaque d’une ferme d’élevage ? Il y a bien des attaques qui échouent – et c’est heureux ainsi – et qui ne portent pas à conséquence et qui sont sans dommages. Dans la logique proposée par la détermination, il y a donc une option de vengeance, une attitude qui a fait disparaître cette espèce de notre pays au XIXe siècle. Passons rapidement au point suivant de notre ordre du jour pour étudier le postulat de notre collègue Philippe Germain, mais je vous invite à ne pas donner suite à la détermination proposée.
Comme je le mentionnais dans mes propos, le sujet est émotionnel, mais il faut justement laisser nos émotions de côté afin de prendre les bonnes décisions. Monsieur Buclin, je reviens sur vos propos initiaux pour apporter une précision : comme vous le savez, une louve alpha peut mettre au monde une nouvelle meute tous les trois ans. C’est une multiplication exponentielle et vous comprenez que cela devient intenable pour les éleveurs, ne pensez-vous pas ?
Monsieur Mocchi, vous déclarez que ProNatura mentionnerait que le retour du loup s’est fait naturellement. Je dirais que la réintroduction du loup est une introduction volontaire et artificielle d’un couple de loups, dans des régions où ils étaient présents – je vous l’accorde – mais qui ne doit pas être confondue avec un retour naturel des loups dans nos régions. Bien entendu, je vous invite à soutenir la détermination José Durussel.
J’ai encore plus d’une dizaine de demandes de parole sur cet objet. (Exclamations.)
Concrètement, je voudrais réagir à certains propos que j’ai entendus et à certaines postures qui me dérangent. Tout d’abord, d’un point de vue philosophique – pour prendre un peu de recul sur notre débat d’aujourd’hui dont j’entends qu’il est très émotionnel – je trouve vraiment dommage, de la part de nombreuses intervenantes et de nombreux intervenants, la volonté d’opposer l’homme à la nature. Je m’entends parler comme mon professeur de philosophie du droit et cela me fait un peu peur… Nous avons hérité de la philosophie moderne consistant à dire que nous sommes l’espèce ultime, que nous dominons la nature et que c’est ainsi que nous évoluons. En réalité, la domination de la nature nous envoie dans le mur, nous en tant qu’espèce. J’estime que vouloir continuer la confrontation, ou plutôt l’affrontement ou la bataille que nous livrons à la nature, plutôt qu’essayer de cohabiter avec elle me navre personnellement. J’estime en effet qu’en tant qu’espèce humaine, notre attitude de vouloir dominer plutôt que trouver notre place et une place pour chaque espèce, est navrante. Voilà pour la minute philosophique du jour, mais apparemment, cela n’intéresse pas grand monde (elle rit), mais c’est le premier élément qui me navre.
Concrètement, l’autre élément a déjà été évoqué ; c’est la question de l’efficacité des mesures et de leur rapport coût/bénéfice. Aujourd’hui, on entend la volonté de certaines et de certains de tirer, tirer, tirer et de prélever, mais en réalité il s’agit de tuer des loups. Or, cette mesure a prouvé maintes fois son inefficacité. Cela a été dit : les mesures efficaces coûtent effectivement cher ; or nous avons devant nous le conseiller d’Etat qui peut être potentiellement chargé de tirer des loups, mais nous n’avons pas la responsable du département qui pourrait donner des subventions pour apporter de l’aide humaine et financière aux éleveurs qui sont en estivage et devraient se protéger des attaques de loups et je trouve cela fondamentalement dommage. Je pense aussi que l’on spécule et imagine beaucoup, mais j’aimerais revenir sur une information apportée par M. Buclin : combien de pertes sont-elles dues au loup pendant la saison d’estivage ? C’est la question que j’aimerais poser à M. le conseiller d’Etat. Quelles sont les pertes dues au loup pendant la saison d’estivage ? Finalement, on voit que des pertes sont dues à d’autres causes telles que des maladies ou d’autres attaques, puisque les animaux s’attaquent aussi entre eux. Alors, concrètement, de quoi parlons-nous quand on parle des attaques de loups ? La volonté de n’utiliser qu’un seul moyen de réponse – celui du tir – me semble stérile, à terme. J’ai aussi entendu ici que le loup n’était plus menacé et, du coup, allons-y gaiement et tirons-le ? Pourtant, si l’on a réussi qu’une espèce en voie d’extinction ne soit plus en voie d’extinction, ce n’est peut-être pas une bonne idée de revenir à la voie de l’extinction ; ce n’est pas ainsi que fonctionne la protection de la biodiversité ! Donc, concrètement, notre volonté de dominer la nature plutôt que de vouloir collaborer ou vivre ensemble me navre, et ce débat en est malheureusement une preuve.
J’ai beaucoup de respect pour nos institutions et pour les services cantonaux, mais je crains que la situation ne soit plus sous contrôle, auprès des services en charge de la gestion du loup. Ainsi que cela a été rappelé par notre collègue Laurence Bassin, finalement, nous sommes dans Jurassica. La situation n’est plus du tout sous contrôle ! Il ne faut pas être dans le déni, alors que nous tirons la sonnette d’alarme (une sirène retentit) depuis plusieurs années sur la problématique du loup. On nous a dit : « Le loup ne va pas s’attaquer aux troupeaux, ne vous inquiétez pas, il n’y aura pas de meutes, il va uniquement s’attaquer à du gibier, en forêt. » Il s’est passé quelques mois et finalement le loup s’est attaqué à un premier troupeau. On nous a dit : « Ne vous inquiétez pas, il ne va pas s’attaquer aux bovins ». Et quelques mois passent encore et le loup s’est attaqué aux bovins ! On nous a alors dit : « Ne vous inquiétez pas, il ne va pas aller dans les fermes ! Il ne va quand même pas franchir les portes des écuries pour aller s’attaquer à des moutons et des bovins », mais force fut de constater, il y a deux semaines de cela, que le loup s’introduit maintenant dans les fermes pour aller chercher à manger ! Et on nous dit encore :« Ne vous inquiétez pas, il n’y a pas de risque pour la population ». Or, la semaine passée, on constate que des loups commencent à avoir des comportements agressifs envers l’homme. Donc, quelle est la prochaine étape ? Il va se produire ce que tout le monde voudrait éviter : un accident ! Et le loup va s’attaquer à l’être humain. Que va-t-on dire, alors ? « Il aurait fallu prendre des mesures ! » Mais cela fait des années qu’on vous dit qu’il faut prendre des mesures ! Donc, par le biais de cette détermination, je pense que c’est un signal que le Parlement veut envoyer au Conseil d’Etat et à ses services pour lui dire : « Agissez, le Parlement est derrière vous ! » C’est pourquoi je soutiendrai la détermination José Durussel.
Au vu du fossé qui semble infranchissable entre les personnes citadines habitant des villes et hors réalité, et celles qui sont régulièrement confrontées à la réalité de l’élevage et de la pratique agricole, je propose une motion d’ordre afin de voter sur la proposition de notre collègue.
La motion d'ordre est appuyée par au moins 20 membres.
La discussion sur la motion d’ordre est ouverte.
Nous sommes d’accord que la motion d’ordre laisse au Conseil d’Etat la possibilité de s’exprimer et de répondre aux questions qui lui ont été posées ?
Oui, c’est bien le cas, monsieur le député.
Le sujet est hautement émotionnel et j’ai rarement vu autant de monde à la tribune du public. Je ne sais pas si c’est par les réseaux que l’on a appris que nous débattions du loup aujourd’hui, mais cela intéresse manifestement un large public et je m’en réjouis. Le débat est fortement émotionnel, mais je l’ai trouvé de relativement bonne tenue, alors que j’ai vécu des débats beaucoup plus émotionnels sur ce sujet. Avant de répondre aux différentes questions, je souhaite vous dire qu’évidemment, le Conseil d’Etat ne prend pas le sujet à la légère, mais qu’il agit. Il a récemment pris des décisions, notamment en matière de régulation, mais aussi de protection des troupeaux, d’information et de communication, et d’accompagnement des éleveurs effectivement fortement impactés par la présence du loup dans les alpages.
On parlait tout à l’heure de réintroduction et je puis confirmer qu’il ne s’agit pas d’une réintroduction du loup, mais que cet animal est effectivement revenu naturellement dans nos régions, sans réintroduction artificielle. Maintenant, le loup est là ; c’est une espèce protégée et nous devons apprendre à vivre avec. Cela représente une très forte douleur pour certains éleveurs, mais c’est un changement de paradigme important qu’il faut entendre et auquel il faut apporter des réponses concrètes. C’est ce que fait le Conseil d’Etat depuis plusieurs années. Cela a été dit : les meutes s’agrandissent et la pression sur les alpages est de plus en plus forte. Il est nécessaire de renforcer les mesures de protection, ainsi que le monitoring sur les meutes, non pas pour tenter de savoir où se trouvent les loups, mais pour mieux comprendre la façon dont ils se structurent et se répartissent sur le territoire. Si je prends par exemple le loup de Forel, ses premières traces ADN ont été enregistrées au Tessin. Le loup est mobile et M. Mocchi a raison de rappeler que la stratégie de l’extermination – même si le droit fédéral l’interdit – ne réglerait probablement pas la pression que le loup peut représenter sur nos alpages, à l’échelon vaudois, compte tenu de sa mobilité. Nous devons donc composer avec une espèce protégée par le droit fédéral, contrairement au sanglier, monsieur Haury, qui n’est pas une espèce protégée et qui fait l’objet de mesures de régulation intensives, compte tenu des dégâts qu’il peut créer sur les différentes cultures.
Il faut dire que, ces dernières saisons, les gardes-faunes ont été passablement occupés par la gestion du loup ; c’est une pression très forte sur les gardes-faunes et sur la police de la faune et il faut l’entendre. On a évoqué tout à l’heure l’erreur de tir sur le mâle alpha, qui n’a pas eu d’impact majeur sur la structure de la meute et son comportement. Mais il faut dire que la police de la faune qui doit effectuer les tirs doit composer, d’une part, avec le mécontentement des éleveurs qui souhaiteraient que les prélèvements soient effectués beaucoup plus rapidement, et d’autre part avec différents mouvements qui viennent sur les alpages pour protéger le loup, mais qui n’ont pas forcément des comportements adéquats. Dans certaines situations, ils vont carrément menacer les bergers et la police de la faune, à tel point que, durant cette saison, une patrouille de la police cantonale a dû assurer la sécurité des gardes-faunes ! C’est un comble ! Nous sommes donc dans un contexte fortement émotionnel sur les alpages et le Conseil d’Etat prend la situation très au sérieux. S’il devait y avoir des accidents entre êtres humains, ce serait plutôt au niveau des tensions entre associations qui viennent défendre le loup à tout prix, les éleveurs qui en ont ras le bol de la situation, et les gardes-faunes qui tentent de faire leur travail dans ces conditions et qui sont mobilisés pour assurer les tirs. En effet, comme vous le savez, il y a eu des tirs durant cette saison, mais aussi pour assurer le monitoring et l’observation du comportement des différentes meutes.
Le Conseil d’Etat doit composer avec un droit fédéral qui va peut-être évoluer. Vous avez rappelé qu’en 2024, il doit y avoir un référendum sur le changement du droit fédéral accepté par une majorité des Chambres et qui doit permettre de basculer dans une différente logique, de régulation. Pour le coup, nous nous rapprocherons du régime que l’on connaît par exemple en France. Si le référendum n’aboutit pas et que la population venait à se prononcer en faveur de la modification législative, ce système de régulation entrera en vigueur en 2024. Nous allons donc composer encore une saison avec le droit actuel.
Je me permets le commentaire suivant sur la détermination : soit on enfonce des portes ouvertes, soit on demande au Conseil d’Etat de ne pas respecter le droit fédéral. En effet, le droit fédéral est très clair et il met des conditions très strictes pour pouvoir demander un tir. Nous pouvons le faire pour un loup isolé, comme cela a été fait cet été, mais ce loup isolé a disparu du secteur des Mosses. Une décision de tir a été prise sur un loup isolé, mais le tir n’a pu être effectué, car le loup n’a pas été identifié. On peut tirer sur la moitié des jeunes d’une meute, quand une meute est identifiée comme responsable de dégâts importants. Cela a été fait : une décision de tir a été prise pour trois jeunes loups. Une jeune louve a été prélevée et un deuxième jeune loup devait être prélevé, mais c’est en fin de compte un mâle qui a été prélevé – on revient à l’erreur que j’évoquais tout à l’heure – ce qui n’a pas eu d’impact sur la composition de la meute et son comportement. Suite à cette erreur, la décision d’étendre le périmètre de tir a été prise afin de concentrer les forces sur un tir sur proie, compte tenu des forces en présence et des difficultés à atteindre les objectifs visés. Mais ce tir sur proie dont l’échéance est tombée au 31 mars n’a pas pu avoir lieu. C’est le deuxième cas de figure dans lequel une régulation est possible. Enfin, pour autant que des dégâts soient démontrés, nous pouvons aussi demander une autorisation de tir sur un couple reproducteur, auprès de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV). Cela a été fait pour le fameux mâle alpha, mais nous avons été confrontés au refus de l’OFEV compte tenu du droit fédéral avec lequel nous devons composer. La détermination nous demande d’aller au-delà et nous pourrons probablement le faire à partir de 2024, mais pas pour la saison à venir, durant laquelle nous devons composer avec le droit actuel où la régulation est un outil parmi d’autre, mais sans être la solution ultime.
Ce que je souhaite personnellement, dans ce débat, dans la gestion du loup et dans les objectifs que nous nous fixons en matière de cohabitation entre le loup et l’économie alpestre, c’est une économie rationnelle, une approche scientifique. Les scientifiques reconnaissent que, dans certaines situations, le tir peut représenter une solution, mais il n’est pas la seule mesure. C’est la raison pour laquelle le Conseil d’Etat viendra prochainement présenter un plan d’action – peut-être en réponse au postulat Germain qui va nous occuper tout à l’heure – comportant différentes mesures. Il s’agit d’une part d’alléger la charge mentale des éleveurs en renforçant les indemnisations ou faisant un effort supplémentaire sur ce point, en accompagnant les éleveurs pour différentes mesures de protection déjà proposées depuis plusieurs années, et en renforçant aussi le corps de police de la faune, car si nous voulons un meilleur accompagnement des meutes sur le terrain, nous avons aussi besoin de ressources supplémentaires pour permettre à la police de la faune de travailler dans de bonnes conditions. Et je l’ai dit, la pression et l’émotion sont fortes sur les alpages, et la police de la faune est mise sous pression et nécessite un soutien important de notre part. Quant à renforcer la collaboration avec la Confédération, il est vrai qu’entre le constat d’une attaque, la demande d’autorisation de tir et la décision prise au niveau de l’OFEV, nous pouvons renforcer la fluidité et l’accélération des séquences des différentes décisions. Nous devons aussi professionnaliser l’effarouchement. Nous avons fait différents tests en matière d’effarouchement, qui n’ont pas toujours été concluants. Nous avons aussi tenté la pose de colliers sur différents loups. Ces mesures doivent être renforcées, mais cela nécessite aussi des ressources supplémentaires.
Comme je l’ai dit tout à l’heure, nous devons améliorer le monitoring et enfin, il y a un effort de communication important à faire. Quelques exemples ont été cités tout à l’heure de promeneurs avec leur chien qui ont été suivis par des loups ; c’est un phénomène effectivement observé. Nous sommes fort heureusement encore loin du schéma, un brin caricatural, décrit tout à l’heure, avec des attaques sur des citadins ou des villageois. L’expérience des pays voisins qui connaissent le loup depuis des décennies nous permet de nous éloigner de cet exemple caricatural, mais nous suivons la situation de très près. En matière de communication, le canton va encore renforcer ses efforts, même si certaines précautions ont été prises, notamment en matière d’information : comment se comporter en présence ou à proximité d’un loup, car il y a évidemment de bons réflexes et de bonnes attitudes à avoir.
Une question m’a été posée concernant les pertes dues au loup. Ces chiffres vous seront communiqués dans le plan d’action qui vous sera présenté conjointement avec ma collègue Dittli. Ce que je puis déjà vous indiquer, à l’heure actuelle, ce sont les chiffres qui figurent dans une réponse à la simple question Hadrien Buclin – Présence du loup dans le canton : des informations plus précises seraient utiles (22_QUE_32). Sur les ovins, les pertes dues au loup représentent environ un quart des pertes, ce qui est relativement important. Pour les bovins, par contre, les pertes représentent environ 3 % des pertes totales des bovins en estivage. Nous reviendrons sur ces chiffres dans le cadre du plan d’action loup. Le Conseil d’Etat est préoccupé par la situation et il travaille avec les cantons voisins pour trouver des solutions, ainsi qu’avec la France, puisque nous avons des meutes qui se trouvent sur les deux territoires.
Je vous invite à faire preuve de rationalité et d’éviter de tomber dans un débat émotionnel. Nous avons besoin de l’ensemble des mesures que je viens de décrire. Avec ma collègue Dittli, nous allons au contact des éleveurs, de la police de la faune et aussi des scientifiques qui sont sur le terrain. Nous avons parlé de la Fondation Landry tout à l’heure, mais il y a aussi d’autres scientifiques, sur le terrain, qui font un travail merveilleux. Nous devons trouver des solutions pour permettre une coexistence. Le loup est une espèce protégée et il a aussi un impact positif sur la biodiversité et sur la qualité de nos forêts. On observe un impact probable sur les populations de cervidés qui causent des dégâts importants aux forêts. La présence du loup a un effet de régulation sur ces populations, ce qui est relativement positif du point de vue de la biodiversité, mais les équilibres sont fragiles. Surtout, c’est une nouvelle situation à laquelle nous devons faire face et avec laquelle nous devons composer, tout en gardant notre sang-froid et en restant dans la rationalité. Je vous remercie pour ce débat intéressant. Comme je l’ai dit, au sujet de la détermination, le Conseil d’Etat pourrait l’appliquer à partir de 2024, mais pas pour la saison à venir, puisque nous sommes contraints par le droit fédéral existant. Je vous invite à passer au point suivant de notre ordre du jour – le postulat Germain – qui donnera un signal au Conseil d’Etat pour présenter le plan d’action loup que je viens de décrire.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
La motion d’ordre Marion Wahlen est acceptée par 80 voix contre 36 et 11 abstentions.
La détermination José Durussel est acceptée par 69 voix contre 52 et 7 abstentions.
Ce point de l’ordre du jour est traité.