24_RES_12 - Résolution Joëlle Minacci et consorts au nom Rebecca Joly et Patricia Spack Isenrich - Contre les agressions du 14 juin, défendons les droits démocratiques (Développement et mise en discussion avec au moins 20 signatures).

Séance du Grand Conseil du mardi 25 juin 2024, point 14 de l'ordre du jour

Texte déposé

Le 14 juin dernier, la manifestation de la Grève féministe à Lausanne s'est poursuivie à Montbenon dans la soirée par des assemblée et des animations festives autorisées par la Ville de Lausanne. Dans ce cadre, un groupe d'individus a agressé physiquement des militantes après avoir provoqué des sympathisant-e-s et fait des saluts nazis. Deux personnes ont été frappées au visage et emmenées aux urgences au CHUV. 

Le Grand conseil rappelle que les agressions physiques sont interdites par la loi et punies pénalement. Après la votation de la motion Maury "En finir avec les symboles nazis sur sol vaudois" en novembre 2023 par notre législatif, les symboles nazis seront également interdits prochainement dans le Canton. Le Grand Conseil affirme également que nul-le ne peut être agressé-e physiquement du fait d'idées politiques. Il affirme ce faisant son attachement à la défense des droits et des libertés démocratiques.

Il y a un an, le Grand conseil soutenait largement une résolution visant à apporter le soutien au président de la DIANA qui recevait des menaces de mort dans le cadre de ses fonctions, affirmant notre attachement à la liberté d'expression et notre commune indignation envers toute menace concernant la liberté d'expression et d'engagement. 

Être agressé physiquement avec des lésions corporelles ou recevoir des menaces de mort pour des appartenances à des mouvements politiques est inacceptable dans un État de droit, que l'on soit président de la DIANA ou coordinatrice de la grève féministe.

Le Grand conseil apporte son soutien aux victimes de ces attaques et dénonce l'atteinte grave à la démocratie et à la liberté d’expression que constituent ces atteintes à l'intégrité physique.

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Yves PaccaudSOC
Yolanda Müller ChablozVER
Mathilde MarendazEP
Vincent KellerEP
Marc VuilleumierEP
Patricia Spack IsenrichSOC
Céline MisiegoEP
Elodie LopezEP
Arnaud BouveratSOC
Sandra PasquierSOC
Laurent BalsigerSOC
Julien EggenbergerSOC
Cédric RotenSOC
Oriane SarrasinSOC
Eliane DesarzensSOC
Cendrine CachemailleSOC
Valérie ZoncaVER
Théophile SchenkerVER
Claire Attinger DoepperSOC
Felix StürnerVER
Martine GerberVER
Anna PerretVER
Isabelle FreymondIND
Sébastien CalaSOC
Laure JatonSOC
Yannick MauryVER
Sébastien HumbertV'L

Documents

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La résolution étant accompagnée de 27 signatures, le président ne demande pas l’appui de 20 membres. 

Mme Joëlle Minacci (EP) —

Le 14 juin dernier, la manifestation de la grève féministe à Lausanne s'est poursuivie dans la soirée, à Montbenon, par des assemblées et des animations festives autorisées par la ville de Lausanne. Dans ce cadre, des militantes ont été agressées physiquement par un groupe d'individus qui ont provoqué des sympathisants et fait des saluts nazis. Deux personnes ont été frappées au visage et emmenées aux urgences au CHUV. 

Le Grand Conseil rappelle que les agressions physiques sont interdites par la loi et punies pénalement. Après la votation par notre législatif de la motion Maury « En finir avec les symboles nazis sur sol vaudois », en novembre 2023, les symboles nazis seront également interdits prochainement dans le canton. Le Grand Conseil affirme également que nul ne peut être agressé physiquement du fait d'idées politiques. Ce faisant, il affirme son attachement à la défense des droits et des libertés démocratiques. Il y a un an, le Grand Conseil soutenait largement une résolution visant à apporter un soutien au co-président de la Diana qui recevait des menaces de mort dans le cadre de ses fonctions, affirmant ainsi notre attachement à la liberté d'expression et notre commune indignation devant toute menace concernant la liberté d'expression et d'engagement. Il est inacceptable, dans un État de droit, de subir des agressions physiques entraînant des lésions corporelles ou de recevoir des menaces de mort en raison de son affiliation à des mouvements politiques, que l'on soit président de la Diana ou coordinatrice de la grève féministe.

Ainsi, en coordination avec Rebecca Joly et Patricia Spach-Isenrich, j'ai déposé la résolution suivante : « Le Grand Conseil apporte son soutien aux victimes de ces attaques et dénonce l'atteinte grave à la démocratie et à la liberté d'expression que constituent ces atteintes à l'intégrité physique. »

Je vous invite à suivre cette résolution pour ce qu'elle défend, c'est-à-dire la liberté d'expression démocratique. 

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La discussion est ouverte. 

M. Cédric Weissert (UDC) —

Je peux tout à fait vous rejoindre sur le fond, c'est-à-dire la dénonciation des attaques contre la liberté d'expression. A ce titre, mon parti a déjà réagi, et notre position a d'ailleurs été reprise par le Blick. Toutefois, comment voulez-vous que je soutienne cette déclaration commune visant une unité, alors que lundi de la semaine dernière, votre groupe politique mentionne dans un communiqué de presse : « Force est de constater qu'avec la montée des partis de la droite dure, du Rassemblement national en France à l'UDC en Suisse, et de leur discours de haine contre les mouvements sociaux féministes, propalestiniens, queer, contre les personnes issues de l'immigration, etc., de tels groupes fascistes se sentent de plus en plus décomplexés. » ? Ce type de déclarations est tout simplement honteux. Elle laisse à penser que nous cautionnons des groupes fascistes. Ces paroles discréditent toute démarche commune sur un fait tout aussi honteux. Avant de jouer les sauveurs de la société, évitez d’en être les pyromanes ! 

Mme Patricia Spack Isenrich (SOC) —

Vendredi 14 juin, des dizaines de milliers de personnes se sont mobilisées pour défendre les droits des femmes à l'occasion de la traditionnelle grève féministe. L'égalité salariale, des salaires minimaux et des rentes décentes ont notamment figuré au cœur de leurs revendications. En Suisse, je constate que des efforts continus sont nécessaires pour garantir une égalité réelle et complète entre hommes et femmes dans tous les aspects de la vie sociale, économique et politique, et pour faire avancer les droits de la femme. Et l'histoire nous montre que ces efforts doivent continuer, puisque la presse nous apprend qu'en marge d’une grève féministe – un événement pacifique et autorisé – deux femmes auraient été frappées par des hommes semblant appartenir à un groupe fasciste, dont certains auraient fait des saluts nazis et provoqué les membres du mouvement. Le groupe du parti socialiste condamne fermement ces actes violents et ne peut que dénoncer ces attaques qui constituent des atteintes graves à la démocratie, à la liberté d'expression. 

En Suisse, bien que des progrès significatifs aient été réalisés en termes de législation et de services de soutien, il reste beaucoup à faire pour éradiquer les violences de tous types faites aux femmes. Il est crucial de continuer à parler de ces violences inadmissibles, de sensibiliser et de mobiliser tous les membres de la société pour protéger leurs droits et leur dignité. Par conséquent, la résolution qui vous est présentée est pleine de sens, puisqu’elle déclare que le Grand Conseil apporte son soutien aux victimes de ces attaques et dénonce une atteinte grave à la démocratie et à la liberté d'expression. Le groupe du parti socialiste soutient cette résolution et vous prie d'en faire de même. 

M. Nicolas Suter (PLR) —

Toute agression ou menace, quel qu'en soit le contexte, est inacceptable. Raison pour laquelle, sur le fond, cette résolution peut être tout à fait soutenue, et le sera par une bonne partie du groupe PLR. Néanmoins, la récupération politique, et notamment les aspects que mon collègue Weissert a mentionnés, c'est-à-dire l'amalgame auquel s’emploie le groupe Ensemble à Gauche entre cette agression et l'UDC, s’avère également inacceptable. Pour cette raison, une partie du groupe PLR refusera cette résolution ou s’abstiendra – vous l'aurez compris, le groupe est partagé. En d’autres termes, nous soutenons complètement cette résolution sur le fond, mais l’amalgame n’en demeure pas moins inacceptable. 

Mme Rebecca Joly (VER) —

Pour ma part et au nom du groupe des Verts, je vous invite évidemment à soutenir cette résolution et la demande qu’elle exprime, l’envoi d’un signal par le Parlement, en tant qu'institution démocratique pour affirmer notre soutien à la liberté d'expression, celle de manifester et du droit à la sécurité pour les femmes dans l'espace public et pour s’opposer aux violences à leur encontre, tout comme à celles exprimées au nom d'une idéologie mortifère. Aujourd'hui, cette résolution demande la condamnation des violences, l’affirmation de notre soutien aux victimes tout comme notre soutien à la liberté d'expression. Que les personnes de cet hémicycle votent non en leur âme et conscience à un tel appel ! 

M. Aurélien Demaurex (V'L) —

Le groupe vert’libéral est unanime pour condamner les violences, quelles qu'elles soient. Il est inadmissible que des personnes soient menacées ou agressées pour avoir défendu leur opinion. Nous sommes d'avis qu’il incombe à la police, puis à la justice, de punir sévèrement les auteurs de ces violences. Or, cette résolution a pour objet que le Grand Conseil se saisisse d'un acte qui doit être pris en charge par un autre pouvoir, le judiciaire. Le risque est grand d'avoir, pour chaque violence, agression ou drame survenu dans notre canton, une résolution qui n'a, pour rappel, aucune ou très peu d'effet sur le réel, puisque non contraignante pour le Conseil d'Etat.

Vous le savez, de manière générale, les Vert’libéraux refusent, par souci d'efficience et de sobriété parlementaire, les résolutions qui n'obtiennent pas un soutien très large de ce plénum. De plus, nos discussions, nos prises de parole, ma prise de parole, coûtent 200 francs la minute. Ce débat n'est pas gratuit, comme dirait notre collègue Gross, mais coûte cher au contribuable. Pour quel effet sur le réel ? En revanche, je vous l'accorde, il s’agit aussi d’un message fort et important adressé à toute la population vaudoise. Cependant, je me plais aussi à rappeler que nous sommes le législatif cantonal et non un distributeur de tweets ou de storiesInstagram

En ce qui concerne l'impact sur la politique de ce canton, les résolutions ont un effet principalement symbolique, à condition qu'elles reflètent le soutien unanime ou quasi unanime du Grand Conseil à une position donnée. Dès lors, il arrive que les Vert’libéraux se rallient à une résolution, si elle rejoint une très large majorité. Ce qui fut le cas – comme mentionné tout à l'heure – lors de menaces de mort à l'encontre du président de la Diana, en février 2023. Mais, sans quasi-unanimité, une résolution est vide de sens. Or, il semblerait, à ce que nous avons entendu jusqu'à maintenant, que ce ne sera pas le cas pour cette question. Dès lors, pour ma part et pour les raisons évoquées, je vais m'abstenir. D'autres membres du groupe vert’libéral, tout en me rejoignant sur l'inefficacité des résolutions en général, soutiendront cette résolution par cohérence avec le vote contre les menaces visant le président de la Diana.

M. Denis Dumartheray (UDC) —

Non, je ne soutiendrai pas cette résolution émanant d'une frange de cette assemblée prônant la haine envers mon parti et moi-même. Je condamne fermement toute agression contre tout individu, de tout sexe et de toute confession. Mais comment accepter de lire une publication d’Ensemble à Gauche, que je me permets de citer :  « Montée de la droite dure, du Rassemblement national en France à l'UDC en Suisse, et à leur discours de haine contre les mouvements sociaux féministes propalestiniens, queer, contre les personnes issues de l'immigration, de tels groupes fascistes, violents, se sentent de plus en plus décomplexés » ? Cette publication est non seulement injurieuse envers mes collègues de parti mais vous discrédite envers une large partie de notre population. 

Quant à la motion Maury, elle a été modifiée avec l’accord de l’auteur et à l’unanimité de la commission, de sorte à y ajouter « toute forme de symbole ». Je ne suis pas agriculteur, mais travaillant dans l'aéronautique, j'ai eu l'occasion de me rendre dans de nombreux pays, l'Egypte, les Etats-Unis, l'Espagne, Dubaï, etc. J'ai toujours attaché une grande importance au partage avec des cultures différentes. Ainsi, il m’est difficile d’accepter de me faire traiter de fasciste. Comment mes enfants expliqueront-ils à mes petits-enfants et arrière-petits-enfants que leur grand-père était nazi, fasciste ? Cela m’est intolérable et contraire à mes convictions. 

Notre nouveau président, M. Jean-François Thuillard, brillamment élu, prouve que nous sommes un groupe politique fiable et reconnu pour ses actions politiques dans notre canton. Je condamne encore une fois ces agressions et toute autre forme de violence. Enfin, je ne soutiendrai pas cette résolution et vous demande, par respect de nos institutions, d'en faire de même. 

M. Alexandre Démétriadès (SOC) —

J’aimerais simplement revenir sur l'intervention de notre collègue Demaurex, qui évoque les raisons de son refus de soutien. Il me semble que vous avez, il n'y a pas longtemps, soutenu une résolution sur l'occupation de l'Unil, alors qu'elle ne rencontrait nullement l’unanimité. Vous avez soutenu, me semble-t-il, une résolution sur l'efficience de l'Etat, alors que là non plus, l'unanimité n’y était pas. Votre argument ne me paraît par conséquent pas cohérent. Vous avez évoqué une chose importante : le rôle de la justice se trouve d'un côté, celui de la politique de l'autre. Or, précisément, cette résolution n'adresse strictement aucun message à la justice, ce qui est parfaitement approprié en termes de séparation des pouvoirs. Il s’agit de distinguer les démarches de plaintes individuelles des agressions et des saluts nazis, condamnées sur le plan pénal. 

Or, pour le cas qui nous occupe, il s’agit de quelque chose de différent : un acte politique sous la forme d’une attaque physique portée contre une manifestation et les causes défendues – même si nous ne les partageons pas toutes et tous ici. A cet égard, le Parlement, en tant qu'institution, a parfaitement son rôle à jouer. C'est dans ce sens aussi, me semble-t-il, que le municipal PLR de la ville de Lausanne, en charge de la sécurité, est intervenu pour défendre ce droit de manifester. En effet, il est question d'un droit fondamental garanti par la Constitution à laquelle nous prêtons toutes et tous le serment de la respecter, de la défendre ; la liberté de réunion et de manifestation en fait partie.

Chères et chers collègues, si les personnes victimes de ces agressions avaient été députées, vous n’hésiteriez pas une seule seconde à soutenir ce texte, puisque symboliquement, cela revient à attaquer les représentants du peuple, donc le peuple. Dans le même ordre d’idées, une manifestation a été attaquée, cela signifie que symboliquement la société civile l’est. 

Enfin, je peux entendre l’expression d’un désaccord avec un communiqué de presse, mais nous pouvons tout de même nous élever en tant qu'institution. Ensemble à Gauche n’est pas seul à avoir déposé cette résolution, puisqu’elle est l’objet de trois partis. Il est d’ailleurs à noter que si nous avions eu davantage de temps, le nombre de partis aurait pu être supérieur. Pour ces raisons, il est parfaitement justifié de la soutenir, au nom des victimes, pour affirmer que nous condamnons des attaques contre la liberté d'expression et de réunion, des conditions existentielles d'exercice de la démocratie. Nous devons transmettre un message clair affirmant le droit des personnes à manifester en toute sécurité, tout en leur assurant notre soutien, même si leurs causes ne correspondent pas nécessairement aux nôtres. Je vous invite solennellement à apporter votre soutien à cette résolution.

 

Mme Joëlle Minacci (EP) —

Je souhaite brièvement rappeler quelques éléments. Je peux tout à fait entendre les remarques relatives au communiqué de presse émanant d’Ensemble à gauche. Or, ce n'est pas l'objet de la résolution que je dépose aujourd'hui. A cet égard, je tiens tout de même à dire que parfois certains communiqués de presse de la part de l'UDC contiennent des termes qui ne nous conviennent pas. Toutefois, je peux comprendre vos remarques. 

Pour répondre à M. Demaurex, il est en effet possible de dire qu'une résolution est non contraignante. Néanmoins, lorsqu'un événement entraîne des actes d'agression physique mettant en péril les libertés démocratiques de citoyens, il est crucial, en tant qu'acteurs politiques, de se positionner fermement. Cela doit se faire de la même manière que lorsque des menaces ont été formulées contre des individus en raison de leurs fonctions et de leurs rôles politiques. En tant que Grand Conseil, il est important de pouvoir se positionner lorsque ces libertés démocratiques sont attaquées afin d’éviter que ce phénomène ne s'amplifie. Ainsi, avoir la sagesse de distinguer ce qui est demandé dans une résolution d'autres prises de parole s’avère primordial parce qu’un message est envoyé aux militantes de la grève féministe sur notre position politique, la défense de leurs droits démocratiques. Enfin, je le répète, cela ne nous empêche pas d'entendre les remarques adressées à notre encontre.

M. Grégory Bovay (PLR) —

A titre préalable, je condamne évidemment toute agression qu'ont subie ces femmes et les actes lâches de ces individus. Aussi, j'apporte mon soutien aux victimes de ces attaques et dénonce l'atteinte à la démocratie et à la liberté d'expression que constituent ces atteintes à l'intégrité physique. 

Fort de ce préambule, je nourris un peu le sentiment que cette résolution, au même titre que certaines autres, tiennent bien plus du commentaire d'actualité que du travail d'un législateur. J'ai l'impression d’une substitution aux autorités pénales et à la justice, alors que, je le rappelle, des plaintes ont été déposées, qu'une enquête est en cours et ainsi que la justice doit accomplir dorénavant son travail.

Ensuite, sans vouloir trop digresser, un certain nombre de points m'interpellent quant au contenu de la résolution, aux positions et aux prises de parole rapportées par Ensemble à Gauche. La résolution relève que le Grand Conseil est attaché à la défense des droits et des libertés démocratiques, notamment à la liberté d'expression ; valeurs que je partage pleinement. En revanche, je m’interroge sur certains slogans affichés lors de la grève des femmes : « Etat coupable » ou « Police complice ». Je me demande aussi ce que viennent faire des drapeaux palestiniens dans cette grève des femmes, sauf à dire que la Palestine est un pays leader en matière de droits des femmes, ce qui n’est, je crois, malheureusement pas le cas. Je déplore que les féministes n’aient pas profité de cette grève pour également condamner des assassinats et les viols subis par des filles et des femmes israéliennes, perpétrés par le Hamas, que ces autoproclamées féministes ne soient pas venues soutenir non plus les femmes iraniennes lorsqu'elles s'élevaient face à un régime islamiste pour tenir une place dans la société et le droit d'enlever leur voile. 

Il s’agit d’un combat à géométrie variable et les amalgames relatés par Ensemble à Gauche me désolent. Encore une fois, je condamne fermement ces agressions parfaitement insoutenables. Laissons la justice effectuer son travail et, le cas échéant, condamner de manière exemplaire ces personnes. Je soutiens pleinement la liberté d'expression et la défense des droits démocratiques quand cela est fait, sans insultes, sans amalgames et dans le respect des règles. Force est de constater que dans le cas précis, cette résolution tient malheureusement bien plus de la récupération politique, raison pour laquelle je ne peux la soutenir et vous invite à en faire de même. 

Mme Séverine Evéquoz (VER) —

Je prends pour la dernière fois la parole dans cette assemblée plénière. Je souhaite que nous puissions prendre le temps d'un petit peu de recul au moment de réfléchir à cette résolution. J'ai le sentiment que plusieurs choses sont mélangées. Je m'exprime aussi en tant qu'ancienne présidente de ce Grand Conseil que j'ai eu le grand honneur de présider. Nous donnons au canton une orientation, une vision plutôt qu’une politique partisane. Certes, la communication de notre parti peut nous échapper ou effectivement parfois s’avérer à la limite de ce que nous voudrions donner comme message, simplement parce que les partis ont un rôle politique différent du nôtre, ici. Les partis défendent des idées avec force et vigueur. Or, ici, il s’agit du Grand Conseil. A cet égard, je pense qu’il nous incombe de condamner toute agression, surtout lorsqu'il s'agit de défendre les droits de liberté d'expression, de manifester, l'intégrité physique des personnes. 

J’ajouterai que j’ai l'impression que nous sommes tombés dans le piège – qui fonctionne à merveille – qui consiste à nous opposer, à nous diviser, parce que nous avons vu un quelconque communiqué de presse, un post, un réseau social, quelque chose qui génère de la colère. Une colère parfaitement audible et compréhensible face à l’impensable : des agressions sur manifestants, dans les rues de Lausanne. 

Il est parfaitement compréhensible que divers sujets se mélangent au gré de ce débat, mais je nourris le souhait que nous ne cédions pas à la colère, à la division. Nous nous retrouvons face au constat suivant : ne pas voter une résolution qui a pourtant sa légitimité, de surcroît parce qu’elle n'attaque pas simplement deux femmes qui ont manifesté, elle attaque les femmes – les femmes quand elles manifestent. J'entends que nous sommes prêts à défendre certaines causes, notamment lorsqu'il s'agit de menaces de mort contre une personne qui prend position dans la société pour défendre un thème comme la chasse. Pourtant, lorsqu'il s'agit de soutenir la cause des femmes qui manifestent pour leurs droits, il semble que cette cause soit perçue comme moins importante. Je voudrais vous interroger là-dessus : est-ce légitime ? Non, je ne pense pas. Ensuite, la grève féministe n'est pas organisée par Ensemble à Gauche. Ensemble à Gauche n'a pas le monopole des attentes des femmes dans cette société. Vous savez que les luttes féministes sont de droite et de gauche. De plus, les menaces de mort proférées contre des député-e-s existent. Il faut aussi prendre position sur cela. Ne pas passer cela sous silence. L’institution a aussi un rôle à jouer ; et je regrette qu'elle ne l'ait pas fait

Quant à l'efficience de notre Grand Conseil, effectivement, nous sommes inefficients. Certains thèmes chronophages se retrouvent systématiquement à l’ordre du jour. Nous avons pu le constater, ce matin, dans des débats qui dévient. Va-t-on bientôt me demander de me taire parce que je parle un peu trop longtemps ? Or, ce matin, des gens monopolisent le débat sur les comptes, alors que finalement, ça n'a pas lieu d'être… Vous voyez ? Je dévie déjà. L'efficience ? C'est aussi cela. Que chacun prenne ses responsabilités pour finalement rendre au contribuable ce qu'il attend, c'est-à-dire des décisions politiques claires, correctes. Vous m’en voyez désolée, mais je considère que nous perdons de vue la mission de notre Grand Conseil. Je souhaite que vous réfléchissiez à la question de la division profonde de ce dernier, à ce même risque – majeur – encouru par notre société et à la place des femmes dans cette dernière, parce que je crois que c'est de cela que nous parlons aujourd'hui. Enfin, malgré toute la colère que je peux comprendre, j'espère que vous pourrez soutenir cette résolution qui vise simplement au respect du droit de manifester. (Applaudissements.)

M. Fabrice Moscheni (UDC) —

Je voulais déjà m'excuser auprès de Mme la députée Evéquoz, car il me semble que vous parliez de moi par rapport au fait d’avoir monopolisé le débat, ce matin, sur les comptes. Je suis désolé ; j’ai simplement essayé de faire mon travail. 

Par rapport à la discussion en cours, madame Minacci, j'apporte mon soutien à toutes les victimes et personnes qui sont agressées sur la base de leurs opinions ou de leurs origines ; je partage votre constat sur le durcissement du climat social et politique. En revanche, permettez-moi néanmoins de mettre un peu en doute votre bonne foi. Je doute de votre bonne foi et de celle de votre parti politique, votre mouvance lorsque je sais qu’elle se permet – peut-être pas vous personnellement – de régulièrement déchirer les affiches de ses adversaires politiques ou d’y dessiner des cibles, en nourrissant comme seul grief d’appartenir à un parti différent, celui de l'UDC. Je peux en témoigner : j'ai vu des cibles dessinées sur ma tête – mes enfants les ont vues. Je doute aussi de votre bonne foi à la lumière de vos communiqués de presse qui injurient une partie de la population suisse, avec pour simple prétexte d’appartenir à l'UDC : une stigmatisation sur la base d’opinions politiques. Je doute aussi de votre bonne foi lorsque votre mouvement politique soutient des actions militantes qui profèrent des injures antisémites. 

Je doute également de votre bonne foi, madame, lorsque l'on sait que vous avez soutenu des militants qui ont eux-mêmes soutenu des déclarations du Hamas, qui ne dénoncent pas ce qui s'est passé le 7 octobre et qui soutiennent des tweets du guide suprême de la République islamique d'Iran, M. Ali Khamenei. Je doute également de votre bonne foi lorsqu’on sait que votre mouvance politique appelle à la désobéissance civile, notamment sur l'état de droit, un état de droit que candidement vous mettez en avant en disant qu'il faut le défendre. Et puis, madame, je doute aussi un petit peu de votre bonne foi quand votre mouvance politique se permet de traiter des fonctionnaires, les policiers, de « bâtards », ce publiquement et joyeusement parce que c'est ainsi qu'il faut parler. Finalement, il est vrai que j'ai un peu l'impression que vous appliquez une approche à géométrie variable, que vous recourez à de la récupération. Pour toutes ces raisons, je m’abstiendrai. 

Mme Céline Misiego (EP) —

J’aimerais apporter une précision qui me semble importante : la grève féministe dénonce les viols, tous les viols de tous les hommes contre toutes les femmes ; il est honteux de vouloir faire penser le contraire. 

Quant à vous, monsieur Moscheni, vous portez des accusations. Avez-vous des preuves de vos accusations ou s’agit-il uniquement de diffamation ? A titre d’information, j’aimerais savoir si ma collègue peut porter plainte directement. 

M. Jean-Rémy Chevalley (PLR) —

De prime abord, j'étais assez partagé quant à cette résolution pour les éléments cités tout à l'heure par plusieurs de mes préopinants. Et puis, en y réfléchissant, j’ai fait abstraction de ma sphère politique, comme nous devrions tous le faire pour des cas tels que ces agressions. Nous extraire de la sphère politique qui nous catégorise. En effet, il retourne de notre société, de ce qui s’y passe, de gens qui ne la respectent plus et que nous devons unanimement condamner. Cela n’incombe pas à un parti politique, mais à nous, à nous en tant que députés, en tant qu'êtres humains. 

Et, pour pouvoir les condamner en tant qu'êtres humains, il s’agit de se distinguer de la sphère politique. A cet égard, je rejoins tout à fait les propos de ma collègue Séverine Evéquoz. Je pense qu'il est essentiel de mettre de côté toute autre considération et de condamner cette situation de manière unanime. C'est pourquoi je vous encourage à accepter cette résolution. 

Toutefois, je tiens à préciser que je ne soutiens ni la manifestation ni les affiches et drapeaux qui y étaient associés. Ce que je condamne ? Les incivilités et les éléments de notre société qui ne nous représentent plus. Condamnons ensemble ces actes, mais sortons, s'il vous plaît, de notre sphère politique (Applaudissements)

M. Julien Eggenberger (SOC) —

Je m'inscris totalement dans la ligne des interventions de Mme Evéquoz et de M. Chevalley, même si je ne partage pas l'entier des propos de ce dernier. Toutefois, les propos de ces deux intervenants peuvent se résumer ainsi : l’objectif ne tend pas à savoir si le combat des personnes qui ont été lâchement agressées est justifié, mais plutôt si nous défendons le droit de manifester, un droit constitutionnel.

Pour ma part, à l'époque, j'ai voté la résolution pour le président de la Diana, or s'il y a bien une chose que je ne défends pas ici, ce sont les activités de la Diana. Mais j'ai trouvé aussi, comme beaucoup, comme la majorité, même l'unanimité – ou presque – de ce Grand Conseil que ces actes étaient inadmissibles. Ainsi, aujourd'hui, nous devons opter pour le même raisonnement, observer les événements et nous poser la question suivante : accepte-t-on que dans notre canton, des gens qui manifestent pacifiquement pour défendre des thèses politiques soient attaqués par de sinistres individus ? Notre présence ici, en tant que députés et députées, témoigne de notre profonde foi en la démocratie. Un pilier essentiel de notre démocratie est la capacité à exprimer pacifiquement nos opinions. Or les personnes qui attaquent des manifestants nourrissent une idée parfaitement contraire ; et nous devons dénoncer cela. 

En outre, les organisatrices de la grève féministe – le plus grand mouvement social existant dans notre pays aujourd'hui – sont indépendantes des partis politiques. Les organisatrices de la grève féministe vaudoise ont d'ailleurs publié leur propre communiqué de presse suite à l'agression qui a eu lieu. Ce n'est pas le mouvement Ensemble à Gauche qui a le droit de communiquer, qui parle au nom de cette grève. Par conséquent, je ne comprendrais pas très bien que des membres de ce Parlement s’opposent à soutenir ou à défendre l'idée qu'on puisse manifester, ce au nom d'une des organisations qui a réagi et dit des choses qui nous déplaisent. 

La grève féministe défend son point de vue. Elle n'a d'ailleurs pas mentionné les éléments cités par les interventions des membres de l'UDC. Vous pouvez critiquer la communication d'un parti ; c'est votre droit. Néanmoins, je ne vois pas en quoi cette critique vous dispense de la solidarité, de la dénonciation des agresseurs.

M. Xavier de Haller (PLR) —

A titre personnel, je me sens un petit peu otage du débat qui est actuellement en train de se dérouler. D'un côté, il est extrêmement difficile de considérer qu'il ne faut pas soutenir cette résolution frappée de bon sens qui soutient non seulement notre état de droit mais également renforce le pouvoir des institutions. Or, de l'autre, les éléments de faits qui, selon moi, sont très peu établis sont unilatéralement rapportés aujourd'hui par différents intervenants. D’une certaine manière, on nous demande un blanc-seing. Par conséquent, je réitère : je me sens otage de ce débat. J’ignore comment me déterminer sur cette proposition de résolution. En effet, comme l'a très bien dit le député Grégory Bovay, des dénonciations pénales ont eu lieu, et des enquêtes sont en cours. Les forces de l'ordre et la justice établiront les éventuelles responsabilités, identifieront dans la mesure du possible – je l'admets – les auteurs qui seront à n’en point douter, condamnés. Ainsi, laissons la justice faire son travail et évitons de politiser le débat. A titre personnel, je ne soutiendrai pas cette résolution

Mme Valérie Zonca (VER) —

Je souhaite simplement revenir un petit instant sur les propos de M. Bovay et à ses questionnements sur la présence de drapeaux palestiniens, ukrainiens ou de collectifs représentant les mouvements de contestation en Erythrée ou en Iran. Il y a un élément fondateur à la grève féministe qui s'appelle la convergence des luttes, un principe de solidarité envers les peuples opprimés, peu importe leur nationalité. Pour en savoir plus, je vous invite cordialement à venir à nos différents événements pour ne pas simplement choisir ce qui nous arrange dans les causes défendues ou non défendues, mais à accéder à une vision d'ensemble. Je rejoins ce qui a été dit plus tôt visant à prendre un peu de recul et à se concentrer sur l'essentiel de la résolution, soit la protection des femmes et du droit de manifester pour toutes et tous. Je vous invite à finir cette année politique sur un signal d'unité en laissant nos potentiels différends politiques de côté et à soutenir cette résolution. 

M. Alexandre Berthoud (PLR) —

Les propos de mon collègue Denis Dumartheray m'ont profondément touché. Je condamne fermement tous les discours tenus de cette manière, quel que soit le communiqué de presse. Je vais faire une déclaration rapide : au nom de la liberté démocratique et de la liberté en général, je soutiens ce texte. Je pense que le texte de Mme Minacci est clair et précis et qu'il ne concerne pas l'ensemble des événements. Personnellement, j'ai été affecté par la situation de mon collègue et ami, le président de la Diana Vaudoise. Même si M. Eggenberger n'est pas de cet avis, je le comprends et je le respecte. J'étais si proche de lui que j'ai pris sa place lorsqu'il était affaibli. Le fait que la résolution du Parlement vaudois ait été votée presque à l'unanimité – excepté par votre groupe, madame Minacci, qui s'est abstenu pour d'autres raisons que nous avons discutées au parlement – est important. Encore une fois, je soutiendrai ce texte personnellement, au nom de la liberté démocratique. Pour moi, il est crucial de le soutenir.

Mme Carole Dubois (PLR) —

Sans développement, vous me voyez parfaitement d'accord avec les propos de mon collègue Jean-Rémy Chevalley et Alexandre Berthoud et je soutiendrai cette résolution au nom de ma détestation de toute violence gratuite, qu'elle soit commise par des femmes, des hommes et des enfants, sur des femmes, des hommes et des enfants et quel que soit le bord politique qui s'y colle. 

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La discussion est close. 

La résolution est adoptée par 87 voix contre 29 et 13 abstentions.

 

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