21_POS_45 - Postulat Philippe Germain et consorts - A quand une gestion efficiente et courageuse des grands prédateurs ?.

Séance du Grand Conseil du mardi 4 avril 2023, point 49 de l'ordre du jour

Texte déposé

 

La présence des loups sur le territoire de notre canton ne fait plus l’ombre d’un doute, et les attaques de ceux-ci ne cessent d’augmenter. Bien que le sujet ait déjà été discuté sous cette coupole ces dernières années, force est de constater que les loups ont pris de l’avance sur nous et que les mesures prônées dans les interventions précédentes ne sont plus satisfaisantes.

Si pour les milieux écologiques l’intégration du loup se passe bien, dans les milieux agricoles entre autres, les sentiments sont bien différents. Des attaques, des mesures de protection envisagées qui s’avèrent inefficaces, des bergers impuissants et des situations entre bovins et humains dangereuses sont à constater. Les détenteurs des animaux payent le prix cher pour un retour du loup qui semble échapper totalement au contrôle des instances qui devraient le gérer.

Grâce à la révision du 15 juillet 2021 de l’Ordonnance sur la chasse (OChP, 922.01), les cantons peuvent intervenir plus rapidement dans les effectifs de loups ; un renforcement de la protection des troupeaux est également prévu. A ce jour, le mode de régulation appliqué dans notre canton ne nous semble pas du tout adapté aux récents évènements. De plus, le délai entre la parution de l’Ordonnance et les actions du canton est trop élevé, avec comme conséquence une augmentation exponentielle du nombre d’individus. Enfin, la charge de travail pour les surveillants de la faune et le préposé à la protection des troupeaux ne cesse d’augmenter et la communication et le soutien nécessaires peinent à voir le jour.

La problématique ne concerne pas uniquement l’agriculture. Si les loups venaient à continuer à s’attaquer au bétail, un découragement total des bergers en serait la conséquence. La biodiversité que permettent les pâturages boisés est également menacée. Le tourisme est aussi concerné avec des chemins de randonnée menacés par des troupeaux qui pourraient devenir agressifs. Les exemples sont de plus en plus nombreux.

Dans le canton des Grisons ainsi que les pays voisins, les meutes se sont reproduites à une vitesse telle que la gestion de la situation devient très compliquée voire impossible. Nous ne souhaitons pas vivre cette expérience dans notre canton. C’est pourquoi nous jugeons important que le canton anticipe en ayant une stratégie de gestion du loup claire, efficace et ciblée qui permet une cohabitation entre le loup, le bétail et l’humain satisfaisante pour tous les acteurs concernés.

Nous demandons donc au Conseil d’Etat de fournir un rapport de type « plan de gestion du loup », tel qu’il existe pour le sanglier, qui démontre la vision du canton concernant la gestion et la régulation du loup, y compris du nombre de loups et meutes que le canton estime gérable pour une cohabitation saine et une régulation rapide et ciblée.

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Sacha SoldiniUDC
Olivier PetermannPLR
Georges ZündPLR
Alexandre BerthoudPLR
Chantal Weidmann YennyPLR
Josephine Byrne GarelliPLR
Gérard MojonPLR
Yvan PahudUDC
Daniel RuchPLR
Jean-Rémy ChevalleyPLR
Sergei AschwandenPLR
Céline BauxUDC
Nicolas SuterPLR
Anne-Lise RimePLR
Pierre-André RomanensPLR
Carole SchelkerPLR
Sylvain FreymondUDC
Daniel DeveleyPLR
Jean-François CachinPLR
Carole DuboisPLR
Bernard NicodPLR
François CardinauxPLR
Florence GrossPLR
Alain BovayPLR
Marion WahlenPLR
Jean-Marc GentonPLR
Aliette Rey-MarionUDC
Rémy JaquierPLR
Jean-Daniel CarrardPLR

Documents

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Sylvain Freymond (UDC) — Rapporteur-trice

Je tiens à remercier M. Florian Ducommun, secrétaire de commission, pour son excellent travail lors de cette commission et la rédaction des notes de séance. Le postulant sait qu’il convient de trouver des solutions pour vivre avec le loup, mais il se demande si une grande quantité de meutes est gérable sur le long terme, tant dans le Jura que dans les Alpes. Dès lors, il souhaite connaître la position du Canton sur la problématique du loup et s’il prévoit de mieux communiquer avec la population et les éleveurs, les milieux agricoles étant par ailleurs très inquiets de la situation actuelle et future.

Lors de la commission, la transparence des propos tenus par la cheffe du département a été saluée. La conseillère d’Etat a souligné qu’il était nécessaire de soutenir l’administration et de trouver conjointement des solutions à la problématique du loup. Plusieurs membres de la commission considèrent que l’action et les mesures prises par le Canton devraient être mieux présentées à la population vaudoise et aux éleveurs qui ont l’impression de ne pas être assez écoutés. Cela permettrait de calmer quelque peu les tensions, car le mécontentement gagne désormais un certain nombre d’acteurs. Le côté émotionnel est actuellement très fort dans les milieux concernés. La transparence par rapport au recensement des populations de loups, l’encadrement des éleveurs ainsi que les rapports avec les différentes associations et personnes qui militent pour la présence du loup sont des thèmes qui ont été abordés lors de cette commission. La problématique concernant la responsabilité des propriétaires de bovins et amodiateurs des différents alpages de notre canton a également été évoquée. En effet, la cohabitation entre les différents utilisateurs des alpages tels que les promeneurs, cyclistes ou encore campeurs, avec des troupeaux plus nerveux à la suite d’attaques, pourrait poser un problème à l’avenir.

A la suite des différentes discussions lors de la commission, le postulant a proposé de modifier son intervention parlementaire comme suit : « Nous demandons donc au Conseil d’Etat de fournir un rapport de type Plan d’action qui démontre la vision du Canton concernant la gestion et la régulation du loup, y compris du nombre de loups et meutes que le Canton estime gérable pour une cohabitation saine et une régulation rapide et ciblée ». En conclusion, la commission a accepté, à l’unanimité des membres présents, de prendre partiellement ce postulat en considération et de le renvoyer au Conseil d’Etat.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. José Durussel (UDC) —

Je tiens tout d’abord à déclarer mes intérêts : j’étais commissaire, membre de l’Association romande pour la régulation des grands prédateurs ainsi qu’éleveur et j’estive également du bétail dans le Jura vaudois et neuchâtelois. Comme mes collègues de commission, j’ai soutenu la prise en considération partielle de ce postulat, car j’attends le rapport que le Conseil d’Etat va nous proposer pour donner suite aux diverses demandes du postulant. Le titre du postulat en dit d’ailleurs long : « une gestion efficiente et courageuse ». Cela nous promet des bons résultats, surtout avec ces dernières semaines et l’ampleur des attaques dans toutes les régions du canton, ceci avant la montée sur les alpages.

Par ailleurs, je souhaiterais que certains termes ne soient plus utilisés dans les discussions que l’on a avec le Conseil d’Etat mais aussi dans les différents rapports et correspondances. Il s’agit du terme de « cohabitation » qui est souvent repris et qui figurera dans un futur rapport. Ce terme doit être purement et simplement retiré de notre langage, car il est impossible de faire cohabiter des loups avec des bovins ou des moutons.

En 2015, j’ai déposé un premier objet intitulé « Le loup chez nous, à quel prix ? ». Il n’y avait pas encore eu d’attaques ni de dégâts de loups, mais on notait leur présence déjà en Valais et dans les Grisons. En 2015, tout le monde avait souri à la fin de mes déclarations. Or, nous sommes désormais confrontés à une tout autre situation et cela est triste. J’espère que le rapport du Conseil d’Etat contiendra des conclusions en faveur de tous les éleveurs de notre canton et que vous continuerez à discuter avec vos collègues des cantons concernés. Les loupes bougent ; ils sont ici, en France, à Neuchâtel, et même en plaine, dans la Broye. Vous avez du travail devant vous et j’attends de vous que vous avanciez positivement sur ce dossier.

Mme Marion Wahlen (PLR) —

Je prends la parole au nom du postulant, M. Philippe Germain qui rappelle ses intérêts : agriculteur, éleveur de vaches laitières, amodiateur d’un alpage dans la région du Marchairuz et président de la Fédération vaudoise des syndicats d’élevage bovin. Depuis le dépôt, le traitement du postulat en 2021 ainsi que le rapport de commission reçu récemment, beaucoup d’éléments ont évolué et le loup a pris de l’avance sur les mesures préconisées par les services de l’Etat et que les experts pensaient suffisantes. Aujourd’hui, il est bien installé, son comportement change et il devient plus présent, jusqu’aux abords des fermes ou zones habitées, laissant les éleveurs démunis devant ses attaques de plus en plus fréquentes.

À la suite de la séance de commission, le postulant remercie le Conseil d’Etat pour ses réponses. Il espère que la révision de l’ordonnance sur la chasse et la protection des mammifères et oiseaux sauvages (OChP) ainsi que la modification de la Loi fédérale sur la chasse permettront une gestion efficace des effectifs du loup. Le postulant salue le monitoring mis en place sur le long terme ainsi que le développement des relations avec les régions frontalières. En ce qui concerne les animaux tués à la suite d’une attaque avérée, les indemnisations totales représentent un soulagement pour les éleveurs, mais ne remplaceront jamais un animal. Ce sont des animaux de rente qui peuvent avoir une haute valeur génétique et qui représentent un investissement pour l’avenir, sans parler de la valeur sentimentale.

Pour conclure, de nombreuses attaques se sont produites cet hiver dans les régions de plaine et le postulant s’inquiète face aux discussions qui ne manqueront pas et ne se dirigent pas vers une cohabitation sereine et moins émotionnelle dans à une situation en pleine évolution. Les efforts entrepris par le Canton pour une meilleure communication avec la population et une protection efficace des troupeaux doivent être poursuivis afin que la cohabitation avec le loup soit encore possible. Je vous remercie de soutenir ce postulat.

M. Pierre-François Mottier (PLR) —

Je ne souhaite pas répéter ce qui a été dit lors du dernier point de l’ordre du jour. Je soutiendrai ce postulat, comme le groupe PLR dans sa majorité. Bien que beaucoup de choses aient été dites aujourd’hui, j’ai l’impression que nous avons été enfumés par les discours de plusieurs intervenants. Il reste une cinquantaine de jours jusqu’à la montée aux alpages et peu de choses ont été mises en œuvre. Quelques mauvais spécimens ont été prélevés et nous sommes au-devant d’un été qui s’annonce très difficile. L’acceptation de la détermination de M. Durussel est une bonne chose, mais il est nécessaire de prendre des mesures drastiques.

L’été dernier, j’ai été heureux de rencontrer M. le conseiller d’Etat de la Direction générale de l’environnement (DGE) ainsi que Mme la conseillère d’Etat de la Direction générale de l’agriculture, de la viticulture et des affaires vétérinaires (DGAV), lesquels discutent pour trouver un accord ainsi que des solutions. Nous restons toutefois à l’aube de gros problèmes. Je ne vais pas vous faire une théorie sur le loup, je n’en ai pas la prétention ni la capacité. Toutefois, lorsqu’on parle de prélever le mâle alpha, cela me fait sourire, car ce sont les louves qui mettent en place les meutes et qui déterminent le nombre de loups qui viennent peupler le territoire vaudois.

Il faut prendre des mesures drastiques, nous ne pouvons plus nous permettre de voir ce qui va se passer. On doit aujourd’hui donner la possibilité à nos chasseurs de faire peur à ces prédateurs qui n’ont en eux-mêmes pas et qui se permettent de venir jusqu’à nos fermes, à proximité des villes et villages. Je vous encourage à accepter partiellement ce postulat de notre collègue Germain. J’invite également le Conseil d’Etat à prendre des mesures et nos conseillers nationaux à se bouger à ce niveau. Nous devons avancer très rapidement, car les problèmes sont pour aujourd’hui. Si on veut décourager nos éleveurs à monter dans les alpages dans les années à venir, il faut continuer de cette manière.

Mme Séverine Evéquoz (VER) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil prend le postulat en considération partiellement par 114 voix et 8 abstentions.

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