RAP_678712 - Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur le Postulat Pierre Zwahlen et consorts - Encourager les compétences de base en mettant en oeuvre la loi fédérale sur la formation continue (19_POS_140).
Séance du Grand Conseil du mardi 24 janvier 2023, point 27 de l'ordre du jour
Documents
- Texte adopté par CE - Rap-CE POS Zwahlen 19_POS_140 - publié
- Rapport de la commission - RAP_678712 - Sonya Butera
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourLa Commission thématique de la formation s’est réunie le 11 novembre 2022 pour étudier la réponse du Conseil d’Etat au postulat Pierre Zwahlen et consorts sur l’encouragement des compétences de base via la mise en œuvre de la loi fédérale sur la formation continue. Le député avait déposé sa motion en octobre 2018 demandant d’examiner une base légale visant à encourager les compétences de base dans le cadre de la formation continue. Il avait accepté de transformer son texte en postulat, lors des discussions qui avaient porté sur le fait que la Loi vaudoise sur la formation professionnelle (LVLFPr) qui devait bientôt être révisée constituait une base légale suffisante. L’objet a ainsi été renvoyé sous forme de postulat au Conseil d’Etat, en mai 2019.
Le rapport soumis aujourd’hui détaille le plan d’action relatif à la formation continue et à la certification professionnelle des adultes. Il s’agit d’un plan en 18 mesures conduit par la Direction générale de l’enseignement postobligatoire (DGEP) et qui considère l’insertion professionnelle dans un continuum de formation en trois étapes. La préalphabétisation, d’abord, puis les compétences de base et, enfin, la certification de niveau secondaire II. Le conseiller d’Etat a expliqué que l’objectif du député Zwahlen d’élaborer un dispositif efficient favorisant l’acquisition de compétences de base en veillant à la qualité rejoignait totalement les objectifs du Conseil d’Etat. Celui-ci, déjà lors de la précédente législature, partageait l’objectif d’assurer une formation continue destinée aux adultes dans un contexte de changement sociétal, technique et numérique, où les changements de métier durant la vie professionnelle sont devenus fréquents. Il a également rappelé que le Conseil d’Etat s’engage aussi contre l’illettrisme qui touche environ 10 % de la population.
Le postulant a dit sa déception quant au rapport de moindre qualité du Conseil d’Etat par rapport à d’autres réponses déjà reçues, notamment relatives à son postulat sur l’encouragement de la formation continue dans le cadre de la transition numérique. Selon lui, il manquerait notamment des informations chiffrées sur le nombre de personnes présentant des difficultés en compétences de base, d’adultes ne disposant pas de titres de formation de niveau secondaire II, voire d’informations sur les partenariats constitués autour de la formation élémentaire des adultes, comme les conventions avec Français en Jeu, la Corref, Lire et Ecrire, Connaissance 3, pour donner quelques exemples. En revanche, il a relevé l’intention positive de mettre sur pied un dispositif d’aide financière pour les personnes qui ne peuvent accéder à des offres de formation continue ou à la certification professionnelle des adultes.
La discussion générale s’est focalisée en particulier sur les cours de français destinés aux personnes allophones issues de la migration, dont il est relevé l’importance, en particulier, pour de nombreuses femmes et pour les personnes candidates à des procédures de naturalisation. La proportion élevée de la population présentant d’importantes lacunes dans les compétences de base, soit 26 %, a interpellé les commissaires. Ceux-ci pensent que la Commission thématique de la formation devrait mener des réflexions plus pointues sur la thématique de la formation continue. Les difficultés des personnes issues de la migration qui ne peuvent exercer leur métier faute de reconnaissance de leur titre en Suisse sont notamment relevées. Les commissaires se demandent aussi si les temps d’incapacité de travail de longue durée, de chômage ou de revenu d’insertion pourraient être mis à contribution pour accompagner ces personnes afin de valider leurs acquis et expériences ; ceci sort toutefois du champ du postulat. Au vote, à l’unanimité des commissaires présents, la commission recommande d’accepter le rapport du Conseil d’Etat.
La discussion est ouverte.
Il y a 15 ans, j’avais déjà déposé un postulat en faveur des compétences de base. La Ville de Lausanne a créé il y a déjà un quart de siècle, la communauté d’intérêts pour la formation élémentaire des adultes et cofinancé les organisations privées qui enseignent les compétences de base. Aujourd’hui, il s’agit de combler l’inégalité de traitement des gens concernés sur l’ensemble du canton. J’observe aujourd’hui une meilleure prise de conscience de la part du Département de l’enseignement et de la formation professionnelle, ainsi que de la DGEP. En 2020, 272 personnes ont fréquenté les cours de compétences de base en français, en calcul ou en éducation numérique soutenus par l’Etat. L’an dernier, ces cours réunissaient 450 personnes, ils devraient être plus de 600 en 2023, soit trois fois plus en quatre ans. Je me réjouis de cette évolution tout en constatant l’étendue des besoins par ailleurs reconnus par le département. Dans notre canton, voilà les chiffres : 80’000 personnes sont concernées par des difficultés en calcul et en français, ne se sont pas approprié vraiment les outils informatiques ; soit 1 personne sur 10. En outre, 26 % des adultes de plus de 30 ans ne disposent pas d’un titre de formation postobligatoire, ce qui équivaut à pas moins de 130’000 personnes dans le canton de Vaud. La loi fédérale sur la formation continue comporte un important volet en faveur des compétences de base. Ainsi, avec le Secrétariat d’Etat à la formation, à la recherche et l’innovation (SEFRI), l’Etat peut désormais développer ses partenariats avec des organismes comme Français en Jeu, Lire et Ecrire, Corref, la fondation le Relais, etc. S’il s’agit d’une question d’insertion professionnelle, elle n’y est pas limitée, car elle est relative à l’inclusion sociale. Beaucoup de femmes, notamment allophones, sont encore isolées. Nous avons abordé cet aspect en commission, et j’ai entendu des témoignages importants. En effet, aujourd’hui, ces femmes trouvent mieux leur place grâce aux ateliers et aux cours qui sont délivrés. La certification professionnelle des adultes doit certes être encouragée, mais elle échappe à beaucoup, représentant un objectif inaccessible. La volonté d’agir contre l’illettrisme figure désormais dans le Programme de législature 2022-2027, dont nous parlerons cet après-midi. Pour ceux que cela intéresse, il s’agit du point 3, mesure 3.3, page 60 : une heureuse priorité du gouvernement et du chef du département. Il faudra cependant en faire un vrai plan d’action en faveur des compétences de base dans le cadre de la formation des adultes en s’appuyant sur les organes, les organismes privés qui facilitent déjà l’intégration sociétale de gens motivés à rompre leur isolement. Je vous remercie d’approuver ce rapport, complété en commission par des précisions utiles sur les démarches en cours.
Cette motion déposée en 2018 fut transformée en postulat, en février 2019. Lors de la discussion, les débats en commission se sont focalisés sur les divers cours de langue française destinés aux personnes allophones issues de la migration. Diverses offres sont disponibles dans certaines communes vaudoises : Français en Jeu, Lire et Ecrire, notamment. Ces cours, souvent subventionnés, sont suivis principalement par des femmes qui très souvent, naturellement, vivent en communauté, s’occupent des enfants et n’ont pas beaucoup d’occasions, si elles ne franchissent pas le pas, de se mêler à la population locale. En outre, ces cours sont aussi très importants pour les personnes ayant comme objectif de demander la naturalisation.
La demande exprimée par ce postulat, à savoir encourager les compétences de base en mettant en œuvre la loi fédérale sur la formation continue, rejoint les objectifs du Conseil d’Etat qui partage le souci d’assurer une formation continue destinée aux adultes, que ce soit sur l’aspect technique, numérique ainsi que le problème de l’illettrisme. Tout comme l’unanimité des commissaires, le groupe UDC vous propose d’accepter ce rapport et vous en remercie.
J’aimerais partager avec vous des expériences que je vis chaque semaine comme responsable des inscriptions chez Lire et Ecrire pour La Côte. En effet, je rencontre constamment des personnes qui éprouvent des difficultés dans leur quotidien, comme on l’a dit, pour trouver un emploi – souvent précaire – ou qui possèdent déjà des emplois de cet ordre, rarement correctement rémunérés par des employeurs qui profitent largement du fait que ces personnes ne peuvent pas défendre et faire valoir leurs droits, mais également certaines qui souhaitent pouvoir accompagner leurs enfants à l’école. Chaque semaine, j’entends dire « j’ai honte » ou « c’est compliqué pour moi, parce qu’aujourd’hui mon fils ou ma fille de sept ans lit mieux que moi. » Dans notre pays, cela est inacceptable. Offrir une meilleure qualité pour les prestations de base équivaut aussi à donner la possibilité à ces femmes, mais aussi à ces hommes – car il y en a – d’améliorer leur quotidien et de prétendre à un meilleur emploi. Dans les soins, par exemple, pour être aide-infirmière il faut passer par une formation Croix-Rouge qui requiert une exigence de qualité de compréhension orale du français, mais aussi de l’écrit. Ensuite, faire valoir ses droits, lire une lettre de l’administration qui n’est pas toujours rédigée dans un langage facile à lire et à comprendre – je me permets de glisser cette nuance – demande aussi un certain réseau d’aide, dont ces personnes, souvent précarisées, ne bénéficient pas. Tout comme mes préopinants, je vous recommande d’accepter les conclusions de ce rapport ; j’en serai très heureuse.
Pour sa part, le groupe PLR se réjouit des réponses apportées par le Conseil d’Etat, notamment sur le développement des mesures nécessaires à la consolidation des compétences de base. Il acceptera son rapport.
La formation des adultes est une priorité, un vaste chantier qui doit absolument évoluer. Oui, je vous le concède, l’administration est parfois dure lorsqu’elle écrit à ses citoyens. Nous essayons de prêter attention à cet aspect. Nous en avons parlé dans le cadre de l’Etat-major du département pour essayer de mieux expliquer les choses, mais il existe une certaine dureté de la part de l’administration, qui ne s’en rend pas forcément compte ; c’est aussi mon cas, lorsque je signe des lettres. Nous tentons d’améliorer ce point. Troisièmement, la lutte contre l’illettrisme constitue l’une des priorités mentionnées dans le programme de législature, un chantier assez vaste et complexe auquel il manque des données que nous allons essayer d’obtenir. Prochainement, nous aurons des contacts avec les institutions concernées par cette problématique.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
Le rapport du Conseil d’Etat est approuvé à l’unanimité.