23_POS_43 - Postulat Jean Tschopp et consorts - Renforcer l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap (Développement et demande de renvoi à commission avec au moins 20 signatures).
Séance du Grand Conseil du mardi 30 mai 2023, point 13 de l'ordre du jour
Texte déposé
En 2021, quelque 3700 élèves du canton âgés de 4 à 20 ans ont bénéficié d’un enseignement spécialisé encadré par l’Office de soutien pédagogique et de l’enseignement spécialisé (Référence Numerus No 6 septembre 2022). Une partie des ces élèves reçoit du soutien tout en étant scolarisé en milieu ordinaire, et une partie suivent leur scolarité au sein d’établissements spécialisés. En 2021, près de 1500 élèves de l’enseignement spécialisé fréquentent ainsi une classe ordinaire et 2200 une classe spécialisée (Ibid.). Au terme des 11 années d’école obligatoire, deux organes vont intervenir et se coordonner afin d’orienter l’élève vers les différentes voies possibles.
L’Office de soutien pédagogique et de l’enseignement spécialisé gère un dispositif de transition qui offre plusieurs possibilités : une prolongation de la scolarité au sein de l’établissement scolaire, une orientation vers un centre de préformation ou un accueil dans une structure de transition pour les 16-20 ans.
En parallèle, l’Office de l’assurance-invalidité va examiner la possibilité pour l’adolescent de suivre une première formation professionnelle. Cette démarche peut déboucher sur l’accès à une formation à des degrés divers : une formation élémentaire AI, une formation pratique INSOS, une attestation de formation professionnelle (AFP), un certificat fédéral de capacité (CFC) ou des formations gymnasiales telles que l’école de commerce, l’école de culture générale ou l’école de maturité.
Si une partie des l’élèves ayant bénéficié d’un enseignement spécialisé peut espérer suivre une formation professionnelle qualifiante (AFP, CFC, formations gymnasiales puis études supérieures), combien ont ensuite accès un emploi ? À ce titre, l’Office fédéral de la statistique (OFS) dispose de chiffres portant sur l’ensemble de la Suisse. Selon ces chiffres, « parmi les personnes handicapées en âge de travailler (16-64 ans), plus de deux sur trois participent au marché du travail : 68% occupent un emploi et 4% sont au chômage, soit 72% d’actifs (valeurs 2019). (…). Parmi les personnes fortement limitées, un peu moins de la moitié est professionnellement active (47%). Cet engagement est toutefois moindre que celui des personnes sans handicap (87%; OFS - Participation au marché du travail des personnes avec et sans handicap, 29.11.2021). » Le renforcement de l’inclusion sur le marché du travail ordinaire des personnes handicapées doit devenir une priorité. Le Grand Conseil l’a exprimé en renvoyant au Conseil d’Etat à une large majorité les motions Bouverat 20_MOT_9 « Pour une mise en œuvre de la CDPH dans le canton de Vaud et pour une loi sur l’intégration des personnes handicapées qui porte bien son nom » et Cuérel 20_MOT_8 « Pour une loi cantonale relative aux droits des personnes handicapées ».
Les personnes handicapées ont toute leur place dans le monde du travail. La méconnaissance et le manque de sensibilisation des acteurs du marché du travail peuvent être des freins à leur engagement. Il importe de se donner les moyens de surmonter ces freins. Les efforts attendus engagent aussi bien le secteur privé que le secteur public. Dans son programme de législature 2022-2027, le Conseil d’Etat projette de « développer une politique d’intégration de personnes en situation de handicap » au sein du personnel de l’administration cantonale (chapitre 3.15).
Par ailleurs, pour celles et ceux qui n’auront pas accès à une formation professionnelle qualifiante, et n’auront donc que très peu de chance de se voir ouvrir les postes du marché primaire de l’emploi, des activités en milieu protégé, se déroulant principalement au sein des établissements socio-éducatifs, sont proposés : centre de jour, atelier protégé à vocation socialisante, atelier protégé à vocation productive. Reste qu’en pratique, les conditions d’accès sont souvent incompatibles avec les handicaps en présence. De nombreux jeunes qui sortent des écoles spécialisées ne trouvent pas d’occupation adaptée à leurs souhaits, à leurs compétences ou à leur handicap. Les quelques possibilités en ateliers protégés ne sont souvent pas satisfaisantes. Il n’existe pas de chiffres précis sur ce que deviennent ces jeunes à l’âge adulte (à partir de la majorité). Des éléments chiffrés et des indicateurs seraient utiles pour évaluer l’efficacité des politiques publiques menées et orienter vers l’insertion professionnelle des personnes handicapées dans le milieu ordinaire comme objectif visé. Faute de formation, d’activité ou d’emploi adapté, les associations de défense des personnes en situation de handicap font le constat que beaucoup de ces personnes handicapées percevant une rente de l’assurance invalidité se retrouvent chez elles livrées à elles-mêmes et manquent de perspective. Passé les mesures de transition, certaines personnes ne fréquentent pas les activités proposées par manque de choix, manque d’intérêt pour celles-ci, manque d’accessibilité (régionalisation de l’offre ou équipement non adapté à l’handicap) ou en raison de difficultés personnelles à s’y intégrer. Ces jeunes disparaissent alors des radars et se retrouvent sans activité et perspective à domicile. Les parents et les proches sont alors leur seul soutien. Des éléments chiffrés et des indicateurs seraient utiles pour évaluer l’efficacité des politiques publiques menées par les services cantonaux. Ne faudrait-il pas également envisager d’autres types de formation permettant à la personne de développer des compétences non directement transposables sur le marché de l’emploi mais qui néanmoins développes leur capacité d’inclusion et de participation sociale ?
Les député·e·s soussigné·e·s demandent au Conseil d’Etat, en particulier au Département de l’économie, de l’innovation, de l’emploi et du patrimoine (DEIEP) au vu de la thématique, une étude portant sur l’évolution de l’accès au marché de l’emploi des personnes en situation handicap, les freins à cet accès ainsi qu’au chômage. Cette étude devrait inclure les mesures que pourrait envisager la Direction générale de l’emploi et du marché du travail (DGEM) pour renforcer leur intégration professionnelle dans le secteur privé et dans l’administration cantonale sur la base d’éléments chiffrés et d’indicateurs. Ce service pourrait aussi fournir des informations issues de la surveillance du marché du travail, dans la mesure où les personnes en situation de handicap subissent des discriminations sur leur lieu de travail. Enfin, les député·e·s soussigné·e·s demandent dans la mesure du possible de faire la lumière et chiffrer les personnes handicapées qui, après un parcours dans un établissement scolaire spécialisé, voir des mesures de transition, peuvent se retrouver sans accompagnement, sans perspective, parfois à domicile et à charge de leur famille et/ou de proches aidant.
Les signataires demandent que cette étude se fasse en consultation notamment avec les associations de défense des personnes en situation de handicap, de proches-aidants et les partenaires sociaux.
Lausanne, le 23.05.2023
Jean Tschopp, Sylvie Podio, Hadrien Buclin, Céline Baux, Graziella Schaller
Conclusion
Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures
Liste exhaustive des cosignataires
Signataire | Parti |
---|---|
Sylvie Pittet Blanchette | SOC |
Cendrine Cachemaille | SOC |
Valérie Zonca | VER |
Yves Paccaud | SOC |
Thanh-My Tran-Nhu | SOC |
Alberto Cherubini | SOC |
Denis Corboz | SOC |
Monique Ryf | SOC |
Carine Carvalho | SOC |
Yolanda Müller Chabloz | VER |
Vincent Jaques | SOC |
Patricia Spack Isenrich | SOC |
Graziella Schaller | V'L |
David Vogel | V'L |
Jean-Louis Radice | V'L |
Théophile Schenker | VER |
Laurent Balsiger | SOC |
Yannick Maury | VER |
Sandra Pasquier | SOC |
Vincent Bonvin | VER |
Sébastien Humbert | V'L |
Oscar Cherbuin | V'L |
Cédric Roten | SOC |
Claire Attinger Doepper | SOC |
Valérie Induni | SOC |
Sébastien Cala | SOC |
Sylvie Podio | VER |
Pierre Dessemontet | SOC |
Pierre Fonjallaz | VER |
Felix Stürner | VER |
Muriel Thalmann | SOC |
Amélie Cherbuin | SOC |
Marc Vuilleumier | EP |
Alice Genoud | VER |
Claude Nicole Grin | VER |
Martine Gerber | VER |
Céline Baux | UDC |
Jean-Bernard Chevalley | UDC |
Oriane Sarrasin | SOC |
Romain Pilloud | SOC |
Hadrien Buclin | EP |
Elodie Lopez | EP |
Cloé Pointet | V'L |
Pierre Zwahlen | VER |
Rebecca Joly | VER |
Olivier Gfeller | SOC |
Alexandre Rydlo | SOC |
Nathalie Vez | VER |
Documents
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourTrop de personnes en situation de handicap ne trouvent pas d’activité ou d’emploi correspondant à leurs aptitudes, souhaits et limitations. Un tiers des personnes en situation de handicap se retrouve sans emploi, voire la moitié d’entre elles, si on prend en compte des handicaps plus limitants. Sur le terrain, un effort considérable est déployé dans la formation, les écoles spécialisées, les établissements socio-éducatifs, et dans l’école inclusive également. Toujours est-il que trop de personnes, notamment à la sortie d’établissements spécialisés, se retrouvent sans perspectives pour elles et leurs proches aidants.
Ce postulat demande au Département de l’économie, de l’innovation, de l’emploi et du patrimoine, notamment à la Direction générale de l’emploi et du marché du travail (DGEM), d’intervenir auprès des partenaires sociaux et des nombreuses associations de défense des personnes en situation de handicap et de proches aidants afin de faciliter leur insertion professionnelle et surmonter les freins à l’engagement. Nous demandons une étude pour sensibiliser les acteurs du marché de l’emploi, mais aussi mobiliser les aides financières qui existent notamment auprès de l’assurance invalidité. En outre, le chômage peut aussi intervenir.
Ce postulat constitue un complément utile aux motions Arnaud Bouverat et Julien Cuérel qui demandent une mise en œuvre de la Convention relative aux droits des personnes handicapées et qui sont actuellement sur la table du Conseil d’Etat. Savoir ce que deviennent les jeunes personnes en situation de handicap, que nous perdons parfois de vue à la sortie de l’enseignement spécialisé, est important et constitue le cœur de ce postulat. Je remercie les collègues de plusieurs bords politiques qui se sont rassemblés autour de ce texte. L’intégration des personnes en situation de handicap engage notre vision de l’être humain tout entier et je me réjouis d’en débattre avec mes collègues en commission.
Retour à l'ordre du jourLe postulat, cosigné par au moins 20 membres, est renvoyé à l’examen d’une commission.