22_INI_3 - Initiative Maurice Neyroud et consorts - Initiative parlementaire à l'attention des Chambres fédérales.

Séance du Grand Conseil du mardi 29 août 2023, point 26 de l'ordre du jour

Texte déposé

Initiative cantonale demandant au Conseil d’État vaudois d'intervenir auprès des autorités fédérales afin de modifier la LAT pour que la pose d’isolation extérieure soit considérée comme des travaux d’entretien.

 

Contexte :
La Stratégie énergétique 2050 élaborée par le Conseil fédéral doit permettre au pays de conserver un niveau d'approvisionnement élevé.
L’approvisionnement et l’efficience énergétique préoccupent aujourd’hui l’entier de la population suisse.
Il s’agit à la fois de favoriser la production d’énergies renouvelables et dans le même temps de motiver les propriétaires à rénover leurs bâtiments en vue d’économiser de l’énergie. On estime à plus d’un million les maisons qui devraient être assainies d’urgence sur le plan énergétique.
La rénovation des bâtiments est un véritable défi pour tous les propriétaires d’immeubles. Il s’agit de conjuguer les mesures d’isolation permettant d’économiser le maximum d’énergie et l’installation de nouveaux systèmes de production d’énergie, que ce soit par la pose de panneaux solaires ou tout autre système permettant de ne plus recourir aux énergies fossiles. Les solutions techniques existent, des subventions sont proposées et les coûts sont de plus en plus attractifs.
Malheureusement, on constate une fois de plus que les lois et procédures ont souvent du retard face aux besoins de la population.
La Loi fédérale sur l’Aménagement du Territoire (LAT 18a.) et l’article 32a de l’OAT permettent aujourd’hui l’installation de panneaux solaires dans les zones à bâtir et les zones agricoles sans procédure d’autorisation.
En revanche, il n’en est pas de même concernant les isolations périphériques des bâtiments qui sont considérées comme des transformations soumises à permis de construire au sens de l’art. 22 al. 1 LAT. Si cette qualification n’empêche pas la rénovation des bâtiments existants avant 1972 et bénéficiant de la garantie de la situation acquise, ce pour autant que l'on admette que l'identité du bâtiment est respectée, l'isolation doit rester dans le cadre des augmentations de surfaces permises par l’art. 42 OAT. De plus, cette qualification rend impossible l’isolation périphérique des constructions qui entrent dans le champ d’application de l’article 24a ou 24d alinéa 1 LAT. En effet, ces articles renvoient à l’art. 22 al. 1 LAT pour définir la limite des travaux non soumis à autorisation. Dans ces cas-là, seul un crépi isolant pourrait donc être réalisé à titre de travaux d’entretien, ce qui est clairement insuffisant pour une isolation efficiente.
Des travaux d’assainissement énergétiques qui passent par l’installation de systèmes de chauffages plus écologiques, l’isolation thermique, la production d’énergie renouvelable (installations solaires, éoliennes de petite taille, pompes à chaleurs etc.) et les vitrages pour
capter l’énergie solaire (chauffage passif) et une isolation périphérique efficiente sont nécessaire pour garantir une économie d’énergie et il est urgent de faciliter les démarches nécessaires à leur autorisation.
Le soussigné demande au Conseil d’État, par voie d'initiative et selon l'article 128 LGC, de faire valoir son droit d'initiative auprès des chambres fédérales pour que celles-ci modifient législation fédérale sur l’aménagement du territoire (LAT) de la manière suivante :

 

Proposition de modification de l’article 18a LAT:

 

Article 18a LAT Installations solaires assainissement énergétique

 

1 Dans les zones à bâtir et les zones agricoles, les installations solaires suffisamment adaptées aux toitsles travaux d’assainissement énergétiquesne nécessitent pas d’autorisation selon l’art. 22, al. 1. De tels projets doivent être simplement annoncés à l’autorité compétente.

 

La règle vaut notamment pour l’installation de systèmes de chauffages plus écologiques, l’isolation thermique, la production d’énergie renouvelable (installations solaires, éoliennes de petite taille, pompes à chaleurs etc.) et les vitrages pour capter l’énergie solaire (chauffage passif).

Les isolations périphériques sont autorisées même lorsque l’habitation existante a déjà épuisé le potentiel d’agrandissement maximal selon l’art. 42 OAT. Elles sont présumées ne pas porter atteinte à l’identité de la construction.

 

2 Le droit cantonal peut:

a. désigner des types déterminés de zones à bâtir où l’aspect esthétique est mineur, dans lesquels d’autres installations solaires peuvent aussi être dispensées d’autorisation;

b. prévoir une obligation d’autorisation dans des types précisément définis de zones à protéger.

 

3 Les installations solairestravaux d’assainissement énergétique sur des biens culturels ou dans des sites naturels d’importance cantonale ou nationale sont toujours soumises à une autorisation de construire. Elles ne doivent pas porter d’atteinte majeure à ces biens ou sites.

 

4 Pour le reste, l’intérêt à l’utilisation de l’énergie solaireà l’économie d’énergie par des travaux d’assainissement sur des constructions existantes ou nouvelles l’emporte en principe sur les aspects esthétiques

 

 

 

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Jacques-André HauryV'L
Nicola Di GiulioUDC
Nicole RapinPLR
Céline BauxUDC
Pierre-André RomanensPLR
Jean-Rémy ChevalleyPLR
Stéphane JordanUDC
John DesmeulesPLR
Marc MorandiPLR
Fabrice TannerUDC
Aliette Rey-MarionUDC
Philippe GermainPLR
Grégory BovayPLR
Jean-François CachinPLR
Regula ZellwegerPLR
Florian DespondPLR
Sylvain FreymondUDC
Loïc BardetPLR
Yann GlayreUDC
Josephine Byrne GarelliPLR
Sonya ButeraSOC
Charles MonodPLR
Laurent BalsigerSOC
Monique HofstetterPLR
Cloé PointetV'L
Oriane SarrasinSOC
Florence GrossPLR
Jean-Louis RadiceV'L
Chantal Weidmann YennyPLR
Cédric WeissertUDC
Carole SchelkerPLR
Nicolas SuterPLR
Anne-Lise RimePLR
Jean-Bernard ChevalleyUDC
Fabrice NeyroudUDC
Oscar CherbuinV'L
Jean-Daniel CarrardPLR
Aurélien DemaurexV'L
Jean-Franco PaillardPLR
Sergei AschwandenPLR
Gérard MojonPLR
Michael WyssaPLR
Olivier PetermannPLR
Yvan PahudUDC
Mathieu BalsigerPLR
Marc-Olivier BuffatPLR
Pierre-Alain FavrodUDC
Elodie Golaz GrilliPLR

Documents

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Nicolas Suter (PLR) — Rapporteur-trice

Il s’agit d’une initiative proposant la modification d’une loi fédérale, en l’occurrence l’article 18 de la Loi sur l’aménagement du territoire (LAT). Aujourd’hui, les propriétaires sont poussés à poser des panneaux solaires, à assainir leurs bâtiments, ou encore à établir un certificat énergétique en cas de vente. La LAT a déjà évolué en admettant que des installations solaires ne sont plus soumises à autorisation, mais elles doivent faire l’objet d’une annonce sous réserve des sites IFP, ISOS, etc. L’une des difficultés, pour les propriétaires qui souhaitent assainir leur bâtiment, concerne l’enveloppe du bâtiment, car les isolations périphériques peuvent atteindre entre 20 et 30 cm d’épaisseur. Or, elles ne sont plus considérées comme des travaux d’entretien, mais comme des rénovations, voire comme une augmentation de la surface bâtie. Ces travaux sont donc soumis à autorisation. Parfois, il est impossible de réaliser une isolation périphérique, même pour des raisons d’assainissement énergétique, notamment si les droits à bâtir sont épuisés.

Ainsi, l’initiant souhaite demander aux Chambres fédérales de modifier la LAT pour comprendre non seulement les installations solaires, mais aussi les travaux d’assainissement énergétique de manière globale. La commission, dans son ensemble, soutient la démarche proposée par l’initiant, en particulier pour ce qui concerne les problèmes rencontrés par les propriétaires souhaitant isoler leurs bâtiments et se trouvant hors zone à bâtir. Le fait qu’une telle isolation soit prise en compte dans le calcul de surface bâtie doit être modifié.

Les discussions en commission se sont concentrées sur le périmètre de cette initiative, notamment sur ce qui pourrait réellement être entrepris avec le texte proposé, sachant que les lois et règlements cantonaux en la matière restent bien évidemment applicables. Une partie de la commission souhaite cadrer le texte, quand l’autre partie est d’avis que de toute manière, cette initiative devra encore passer par les Chambres fédérales qui auront tout lieu de retravailler cette initiative.

Finalement, par 8 voix contre 7, la commission propose d’amender l’initiative de la manière suivante :

« Art. 18a. – Al. 1 : La règle vaut notamment pour l’installation de systèmes de chauffages plus écologiques, l’isolation thermique, la production d’énergie renouvelable (installations solaires, éoliennes de petite taille, pompes à chaleurs, etc.)pour l’isolation thermique, les installations solaires, les systèmes de chauffage écologiques et les vitrages pour capter l’énergie solaire (chauffage passif). »

L’initiative ainsi amendée a été validée à l’unanimité de la commission.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. Maurice Neyroud (PLR) —

Je remercie la commission pour son travail et son président pour le rapport. La commission a bien compris l’importance et la nécessité de faire évoluer la règle fédérale qui est clairement contre-productive et freine la transition énergétique. Je rappelle que la LAT compte une isolation de façade de plus de 3 cm d’épaisseur en zone agricole comme un agrandissement ; elle est donc prise en compte dans la surface bâtie et non pas considérée comme un travail d’entretien. Ce qui implique que si un propriétaire en zone agricole a épuisé son potentiel d’agrandissement, une isolation lui sera interdite et il ne pourra effectuer qu’un simple crépi isolant.

Pourtant, la volonté politique tend à tout mettre en œuvre pour encourager des travaux d’isolation, qui sont nécessaires dans le cadre de la transition énergétique ; une isolation de 20 à 30 cm est maintenant chose courante. Malheureusement, les lois et les règlements sont souvent en retard face aux besoins de la population et à la volonté politique d’accélérer la transition énergétique. Toutefois, au chapitre des bonnes nouvelles, il faut signaler que la règle pour l’installation de panneaux solaires a été modifiée au niveau de la LAT. Elle permet aujourd’hui l’installation de panneaux solaires dans les zones à bâtir et hors zones à bâtir, soit par exemple dans les zones agricoles, sans procédure d’autorisation, avec un simple devoir d’annonce. Cette avancée permet aujourd’hui à de nombreuses toitures d’être équipées de capteurs solaires.

Par conséquent, accepter cette initiative permettra d’avoir la même règle pour la pose d’une isolation extérieure que pour l’installation de capteurs solaires – un devoir d’annonce – sans procédure d’autorisation, ce qui permettra aux innombrables propriétaires de bâtiments hors zone d’entreprendre des travaux d’isolation efficaces. A l’évocation de la difficulté de faire évoluer les lois et les règlements, je ne peux m’empêcher de préciser que j’ai déposé cette initiative le 13 septembre 2022 – il y a déjà bientôt une année. Or, elle ne vous est proposée qu’aujourd’hui. Heureusement, peu après son dépôt en ces murs, cette initiative a été reprise mot pour mot par l’une de nos représentantes PLR au Parlement fédéral, qui l’a déposée à Berne sous forme de motion. Cette dernière a été rapidement acceptée par le Conseil fédéral, puis transmise au Conseil national, le 3 mai dernier, qui l’a acceptée par 152 voix contre 22 et 7 abstentions. Par conséquent, le Conseil fédéral devrait proposer un projet de modification de loi aux Chambres très prochainement – une excellente nouvelle.

Dans ce cadre, je regrette qu’une proposition si simple et efficace, qui ne coûte pas un centime et qui va dans le sens de la volonté d’économie d’énergie, mette trois fois plus de temps à passer au Parlement vaudois qu’aux Chambres fédérales. En outre, même acceptée aujourd’hui, son chemin jusqu’à Berne est encore bien long. Le Conseil d’Etat devra d’abord rédiger un projet de décret qui passera devant une nouvelle commission puis revenir au Grand Conseil avant d’être transmis. Il est donc fort probable que ce changement de loi aura vu le jour et soit appliqué avant que notre Grand Conseil l’adopte : c’est dire la difficulté et l’inutilité de certaines procédures. Cette considération est un petit message à peine voilé à l’attention de la Commission thématique des institutions et des droits politiques dans le cadre d’une révision de la Loi sur le Grand Conseil. En conclusion, je vous encourage à soutenir cette initiative.

M. Loïc Bardet (PLR) —

Monsieur le président, vous avez bien fait de donner la parole à notre collègue Neyroud, puisqu’il a dit l’essentiel de ce que j’avais prévu. Néanmoins, précisons encore que suite à l’acceptation du Conseil national en mai dernier, le Conseil des Etats devra se prononcer sur le sujet le 14 septembre prochain. Par conséquent, en soutenant aujourd’hui la proposition de notre collègue Neyroud, nous donnerons un signal clair aux directions de la Chambre des cantons. On a tendance à dire que les Vaudois sont lents afin que les Bernois puissent les suivre… Je vous remercie de soutenir le texte afin de prouver que c’est toujours vrai et non l’inverse !

M. Jerome De Benedictis (V'L) —

Le groupe vert’libéral accueille avec beaucoup d’enthousiasme la volonté de simplifier les procédures de construction pour les améliorations énergétiques et souhaite vivement que le Parlement fédéral se saisisse de cette thématique, comme il l’a d’ailleurs déjà fait. Pour cette raison, nous soutiendrons l’initiative telle qu’amendée par la commission. Nous relevons également que le signal envoyé aux propriétaires de biens hors zone à bâtir, notamment en milieu agricole, serait des plus favorables, tant il est problématique de voir leur volonté d’assainir leur bâtiment stoppée net par un cadre légal d’une incompréhensible rigidité. Que ce soit en milieu urbain ou agricole, l’assainissement des bâtiments doit être simple et accéléré. Cette initiative y contribue.

M. Jacques-André Haury (V'L) —

J’ai écouté avec grand intérêt l’intervention de M. l’initiant Maurice Neyroud. La semaine passée, il fut question de sobriété parlementaire. Ainsi, je me demande à quoi cette initiative sert encore et me permets de poser la question suivante au Conseil d’Etat : si le Conseil fédéral adoptait une législation allant dans le sens de cette initiative, le Conseil d’Etat pourrait-il simplement abandonner ce travail parlementaire inutile ?

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Président-e du Conseil d’Etat

La question des procédures – thème de la journée – est une question extrêmement importante qui inclut l’aspect des liens entre le droit fédéral et cantonal. Cette initiative a rencontré l’enthousiasme. Sur le plan fédéral, les normes sont extrêmement contraignantes. Ainsi, tous les éléments qui tendent à l’assouplissement doivent être soutenus. Cependant, et pour répondre à M. Neyroud, demeurons conscients qu’une initiative cantonale n’a jamais constitué l’instrument le plus souple et le plus rapide pour arriver à des solutions. Néanmoins, le dépôt de ce texte a permis de faire évoluer l’intention des parlementaires sur le plan fédéral et vraisemblablement aussi la législation.

Nous sommes en train d’accomplir le travail pour le solaire, travail qui a déjà été effectué pour les pompes à chaleur – mais qu’un recours bloque actuellement. Le texte de M. Neyroud permettra d’ancrer le mécanisme sur le plan légal. Concernant les isolations périphériques, je rappelle qu’un changement de pratique de la part de l’administration cantonale est déjà en cours, de manière à ce que cette dernière ne soit plus prise en compte dans le cadre de la surface habitable hors zone à bâtir. Suite à des discussions et des échanges assez serrés avec l’administration fédérale, la pratique a pu immédiatement être changée. Nous avons aujourd’hui, je le répète, la possibilité de ne plus prendre en considération l’isolation des bâtiments dans le calcul de la surface habitable.

Par souci d’efficacité, je vous invite évidemment à soutenir cette initiative pour adresser un signal à Berne. Enfin, pour répondre à M. Haury, nous sommes assez en ligne avec la nécessité d’efficacité. Nous nous montrerons très attentifs à la suite donnée au texte parlementaire fédéral. Si d’aventure les législations fédérales étaient adoptées avant notre retour devant vous, je pense que nous demanderions potentiellement un classement, puisqu’adresser à Berne une initiative qui a déjà trouvé sa réponse serait superflu. A ce stade, je vous invite à soutenir cette initiative ; nous resterons très attentifs à la nécessité d’efficacité et de crédibilité par rapport aux réponses apportées au niveau fédéral.

M. Laurent Miéville (V'L) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil prend l’initiative en considération partiellement avec quelques abstentions.

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