20_RAP_16 - Rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur le Postulat Florence Gross et consorts – Etude sur les problèmes d'approvisionnement et en médicaments et en matériel sanitaire ainsi que sur les pistes de solutions envisagées. (20_POS_204).

Séance du Grand Conseil du mardi 17 septembre 2024, point 29 de l'ordre du jour

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M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice

La Commission thématique de la santé publique (CTSAP) recommande au Grand Conseil d'accepter le rapport du Conseil d'Etat sur le postulat Gross. La postulante a rappelé que son texte avait été déposé en mai 2020, en pleine crise pandémique, par suite des difficultés d'approvisionnement en médicaments et en équipements de protection individuels (EPI). Connaissant les recommandations de la Confédération concernant les stocks de matériel que les cantons devaient constituer, elle constate que celles-ci ne semblent n'avoir été que partiellement respectées. Consciente que tout ne dépend pas du canton, elle insiste sur l'importance des pistes de solutions mentionnées au rapport. 

Le Conseil d'Etat admet que les ruptures de l'approvisionnement en médicaments s'avèrent de plus en plus fréquentes à l'échelle de notre pays. Son rapport explique les raisons à l'origine des difficultés d'approvisionnement, tout en précisant que la gestion des pénuries relève de l'Office fédéral pour l'approvisionnement économique du pays. La conseillère d'Etat en charge du Département de la santé et de l’action sociale (DSAS) tient à mentionner que la Confédération a créé une Task Force fédérale, chargée entre autres de la coordination avec les cantons. Dans le but de pallier les pénuries au maximum, a été notamment évoquée l'idée d’une production sur place de certains médicaments, tels que les antibiotiques de base, par la pharmacie de l'armée. De même, un « Plan pandémie » national est en cours d'élaboration et les déclinaisons cantonales dudit plan suivront. La commission tient à saluer, dans ce dossier, le fait de considérer la population comme un partenaire. Il en va de même de l'idée d'impliquer la pharmacie de l'armée dans la production de médicaments. 

La question de savoir si les pharmaciens, dans leur officine, seraient également à même de produire des antibiotiques a suscité de nombreux échanges. Il s'avère que les pharmaciennes et pharmaciens sont toujours formés à réaliser des préparations magistrales, mais la difficulté réside surtout dans l'obtention des matières premières et dans le prix desdites préparations magistrales par rapport aux médicaments habituellement sur le marché. De plus, les conditions d'un remboursement de telles préparations par l'assurance obligatoire des soins s'avèrent relativement complexes. Au vote, à l'unanimité des membres présents, la Commission de santé publique recommande au Grand Conseil d'accepter le rapport du Conseil d'Etat au postulat de Mme la députée Gross.

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

La discussion est ouverte. 

Mme Florence Gross (PLR) —

En effet, j’ai déposé ce postulat en mai 2020, pendant la crise Covid, alors même que nous vivions une pénurie de médicaments, mais surtout une grave pénurie d’EPI, alors qu’en 2018, l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) avait émis des recommandations au canton concernant le stock de matériel. Certes, en 2018, nous ne pensions pas à la pandémie, nous n'y réfléchissions pas. Nous avons vécu cette crise extrêmement complexe, notamment pour le personnel de soins manquant de ce type de matériel. Le premier but de ce postulat est qu'à l'avenir, si nous devions revivre une situation identique, que nous ne revivions pas un tel manque d'équipements de protection. Le but était d'obtenir un plan d'action clair, pour l'avenir et déjà pour le présent, puisque comme cela a été dit, nous vivons actuellement encore et toujours une pénurie de médicaments, parfois très problématique. 

Alors, je remercie le Conseil d'Etat pour son rapport. Toutefois, si l’on m’assure que ce fameux plan d'action existe, selon moi, il n’est toujours pas communiqué aux principaux partenaires, qui pourraient pourtant être rassurés, et le cas échéant, pourraient anticiper s’ils obtenaient le rapport. « Mieux vaut prévenir que guérir » et selon moi, l'anticipation est le maître mot. Nous devons apprendre des situations problématiques, comme nous devons apprendre de certaines erreurs. Gageons que ce rapport pourra rapidement être mis entre de bonnes mains. D'autant plus que la pénurie de médicaments est certes de la compétence de la Confédération, mais de nombreuses entités cantonales jouent un rôle important à ce sujet. La discussion de commission fut extrêmement instructive, notamment avec la pharmacienne cantonale et le médecin cantonal, sur les risques qu’entraine la pénurie de médicaments que nous vivons actuellement dans des situations vécues, et les moyens de la pallier. Qu'ils en soient ici remerciés ! En effet, bien que le domaine soit de compétence fédérale, ces personnes mettent tout en œuvre pour trouver des solutions, quel que soit le partenaire de santé qui fait face à des problèmes. 

J'espère donc vraiment que le « Plan pandémie » national et sa déclinaison cantonale puissent être bientôt communiqués, sachant qu’anticiper peut aussi permettre de rassurer, comme je l’ai déjà dit. Les informations ciblées et les réponses rapides apportées par les différents services permettent aujourd'hui de réagir, mais je pense que nous devons être largement plus proactifs. Malgré les recommandations de l'OFSP, en 2018, nous ne l'avons pas été. Ne refaisons pas la même erreur et soyons prêts. Je vous recommande d'accepter ce rapport, tout en gardant à l’esprit qu'il y a lieu de rester attentifs, car s’il est peut-être considéré que le problème des EPI est aujourd’hui réglé, la pénurie de médicaments nous rappelle que nous devons rester attentifs, sachant qu’il peut parfois s'agir de cas vitaux.

M. Pierre Zwahlen (VER) —

Les problèmes d'approvisionnement en médicaments sont toujours actuels et nous savons qu'il y a pénurie sur plusieurs médicaments d'usage général. La question se pose, car nous vivons un très grand paradoxe : nous sommes un pays de pharmas et de grandes entreprises pharmaceutiques, mais nous manquons de médicaments parce qu’ils sont produits de préférence en Asie, en Chine en particulier. Les chaînes d'approvisionnement sont perturbées et il s'agit de trouver des solutions. 

Je regrette moi aussi qu'un plan d'action n'ait pas encore été publié ni directement adressé aux différents actrices et acteurs, notamment les pharmacies. Bien sûr, des médicaments produits par la pharmacie de l'armée pourraient être une solution, ainsi que d'autres pistes évoquées dans le rapport du Conseil d'Etat. Je pense aussi que des alternatives plus sobres que la chimie pharmaceutique peuvent être trouvées pour certains des maux dont souffre une partie de notre population. Il importe en tout cas de renforcer considérablement les efforts de coordination avec la Confédération, qui est compétente pour l'approvisionnement du pays. Mais ainsi que le dit le rapport, il faut aussi une coordination à l'échelle romande, au minimum, pour que les patients et patientes qui ont besoin de matériel sanitaire et de médicaments puissent en disposer, ou alors il faut que des alternatives claires soient mises à disposition. Je remercie déjà le Conseil d'Etat pour ses efforts et, bien sûr, soutiendrai ce rapport.

Mme Rebecca Ruiz (C-DSAS) — Conseiller-ère d’Etat

J’ai des éléments de réponse à vous apporter sur quelques points, et aussi des éléments de mise à jour. S'agissant du Plan pandémie de l'OFSP et sa déclinaison cantonale – point abordé tant par Mme Gross que par M. Zwahlen – je puis vous dire que les cantons ont reçu en consultation, cet été, la nouvelle version de ce plan. La consultation est maintenant terminée et les retours ont été faits. Le plan de pandémie de niveau fédéral n'est pas encore terminé et il devra ensuite se décliner au niveau cantonal. En effet, les cantons ne vont pas établir chacun dans leur coin un Plan pandémie, qui ne serait évidemment pas raccord avec ce qui aura été décidé et discuté. Tout cela se fait de manière concertée, avec les cantons, en lien avec ce qui sera décidé in fine par l'OFSP et par la Confédération. Par conséquent, l’opération va encore prendre un peu de temps. J'entends qu'il y a de l'impatience à ce sujet, mais nous devons évidemment attendre que les travaux se terminent au niveau de la Confédération pour pouvoir ensuite le décliner au niveau cantonal. 

S'agissant de la question problématique de l'approvisionnement en médicaments, je vous apporte un élément de mise à jour : au mois d'août de cette année a été soumis au Conseil fédéral un rapport intitulé « Proposition de mise en œuvre pour les mesures préconisées dans le rapport de l'OFSP sur les pénuries de médicaments. Rapport final 24 du groupe de travail interdisciplinaire ». Ainsi, un gros travail a été réalisé, de manière interdisciplinaire, sur un sujet éminemment important, mais ainsi que le dit clairement le rapport, les cantons sont évidemment totalement tributaires des plans d'action et des décisions prises au niveau de la Confédération. Ainsi, ce rapport contient également les résultats de l'analyse des propositions de mise en œuvre pour améliorer la situation de l'approvisionnement en médicaments, en Suisse. Vous avez raison, monsieur Zwahlen, c'est complètement paradoxal. La Suisse pays de la pharma fait régulièrement face à des pénuries de médicaments, y compris pour des médicaments complètement standards. Très régulièrement, des antibiotiques – par exemple pour les enfants – viennent à manquer, ce qui met en émoi non seulement les parents, mais aussi les pharmacies, par exemple lorsqu’un certain nombre de virus se mettent à circuler fortement. Un certain nombre de propositions sont donc faites dans ce rapport établi par le groupe de travail interdisciplinaire composé de spécialistes issus de l'enseignement, de la recherche, de l'industrie pharmaceutique, des fournisseurs de prestations, des cantons et de la Confédération. Il présente 14 propositions de mise en œuvre qui touchent, par exemple, aux rôles des différents acteurs, au stockage des médicaments vitaux dont entre autres les antibiotiques dont je vous parlais, à l'accès au marché, aux incitations pour les fabricants, à l'achat et la fabrication directement par la Confédération et à la coopération internationale. 

Sur cette base, le Conseil fédéral a maintenant confié des mandats à différents départements – au Département de l'Intérieur, évidemment, au Département de l'Economie, mais également au Département fédéral de la défense, de la protection de la population et des sports (DDPS) – pour poursuivre ces travaux et élaborer des bases décisionnelles. Là encore, comme pour le Plan pandémie, vous connaissez les différentes échéances au sein de notre système politique et décisionnel, d'autant plus lorsque cela concerne d'abord la Confédération avant de devoir être ensuite traduit en mesures cantonales. Cela va donc également prendre du temps, alors que des critiques sont régulièrement émises par les cantons, par le biais des pharmaciennes et des pharmaciens cantonaux, en lien avec cette question d'approvisionnement. Ensuite, puisque nous sommes plus proches des prestataires de soins et des pharmacies, nous sommes évidemment interpellés directement afin de faire remonter des éléments à la Confédération lorsque des pénuries problématiques se produisent, malheureusement de plus en plus fréquemment. Donc les travaux sont en cours, nous suivons les choses de près et sommes le plus diligent possible, mais il n’est pas possible d’aller « plus vite que la musique », ou que la Confédération, en l'occurrence. 

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

La discussion est close.

Le rapport du Conseil d’Etat est approuvé à l’unanimité.

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