23_LEG_87 - Exposé des motifs et projet de décret sur le plan stratégique et les mesures du programme cantonal de lutte contre la pénurie de personnel dans le domaine de la santé et des soins infirmiers, InvestPro et Rapport complémentaire du Conseil d’Etat au Grand Conseil sur le postulat Philippe Vuillemin – CHUV–EMS : Relever le défi de la vieillesse passe aussi par l’égalité salariale des infirmières (17_POS_236) et Rapport du Conseil d’Etat au Grand Conseil sur le postulat Jessica Jaccoud – Pour des soins infirmiers forts, y compris dans le Canton de Vaud (22_POS_67) et Rapport intermédiaire du Conseil d’Etat au Grand Conseil sur les motions Philippe Vuillemin et consorts – Revoir la LPFES à la lumière de l’évolution médico-sociale en EMS (20_MOT_139) et Florence Gross et consorts – Pénurie de personnel infirmier en EMS/EPSM : une mesure incitative nécessaire (22_MOT_44) (1er débat).
Séance du Grand Conseil du mardi 27 août 2024, point 34 de l'ordre du jour
Documents
- Tableau miroir avant 1er débat au GC
- Rapport de la commission avec annexes - RC 23_LEG_87 - Sylvie Podio
- Texte adopté par CE - EMPD Investpro + 7 annexes - publié
- 23_LEG_87_RC compl
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourLa commission s'est réunie les 17 mai, 14 juin et 21 juin 2024 pour examiner cet objet. Elle remercie M. Ischy, secrétaire de commission au secrétariat du Grand Conseil, pour la rédaction des notes de séance. A la majorité, la commission a décidé de ne pas procéder à des auditions, mais elle a recueilli les déterminations des trois entités concernées, annexées au rapport de commission.
Le présent exposé des motifs et projet de décret vise à apporter une réponse globale aux défis liés au vieillissement de la population, l'augmentation des maladies chroniques, la pénurie de personnel dans le domaine de la santé, ainsi qu’à l'initiative populaire fédérale pour des soins infirmiers forts, également connue sous le nom d’« Initiative sur les soins infirmiers », acceptée par 61 % des voix au niveau fédéral et 64,7 % dans le Canton de Vaud le 28 novembre 2021. En réponse à cette initiative, le canton, tout comme la Confédération, intervient en deux étapes. Une première étape se focalise sur l'offensive de formation, la facturation de certaines prestations par les infirmières à l'assurance obligatoire des soins (AOS) et l'amélioration de l'efficience dans le domaine des soins médicaux de base. La seconde étape, actuellement en consultation, porte sur l'amélioration des conditions de travail, les perspectives de développement professionnel et la rémunération des soins.
Dans sa vision d’ensemble, le Conseil d'Etat a défini trois axes stratégiques : la promotion, la formation, la fidélisation et la revalorisation salariale. Dans un deuxième temps, le programme s'élargira à d'autres professions du domaine de la santé affectées par la pénurie. Le coût total de l'opération est estimé à 90 millions pour 2024-2027, avec une participation fédérale à 7,14 millions. Au-delà de la réponse à l'initiative pour les soins infirmiers, les objectifs d'InvestPro sont de garantir l'accès à des soins de qualité à la population vaudoise et de lutter contre la pénurie de professionnels dans le domaine de la santé et des soins infirmiers. A ce titre, il s'avère que le besoin de relève est très important dans le tertiaire et le secondaire, avec un déficit de 3000 personnes d’ici 2030, soit l'équivalent du personnel de l’Hôpital Riviera-Chablais (HRC).
La commission tient à remercier le Conseil d'Etat pour sa proactivité et l'élaboration rapide d'une stratégie structurée, ouverte et indispensable à la pérennité du système de santé vaudois. Des inquiétudes surgissent toutefois quant aux moyens financiers alloués, qui risquent de ne pas suffire, en particulier dans l'optique d'une revalorisation salariale de l'ensemble du personnel de soins des institutions et d'une accélération de la convergence vers la convention collective de travail de l'Hôpital Riviera-Chablais, en attendant une convention unique incluant le CHUV. Cette question a d'ailleurs donné lieu à des amendements à l'article 9, qui ont été soit rejetés, soit retirés lors de l'examen de la loi. Des discussions ont également porté sur le soutien des lieux de formation et la pénurie de personnel dans d'autres domaines que celui les soins infirmiers à proprement parler. Un amendement de plume a été accepté à l'article 10. La commission vous recommande l’entrée en matière sur ce projet de décret à l'unanimité.
La discussion sur l’entrée en matière est ouverte.
Le groupe socialiste salue en préambule la proactivité du Conseil d'Etat sur cette thématique. Trois ans après l'acceptation d'une initiative pour des soins infirmiers forts, le canton présente un projet avant même que le Conseil fédéral ne lance la consultation sur le deuxième volet. Cela mérite d’être souligné. Cette stratégie nous semble globalement solide, bien articulée autour de trois axes stratégiques qui couvrent l'ensemble des leviers d'action de l'Etat. Nous saluons aussi l'ouverture des mesures à d'autres professions de santé que celles des infirmiers et infirmières, en lien avec les analyses de l'Observatoire suisse de la santé (OBSAN), bien qu’une clarification soit encore attendue à ce sujet. Cette stratégie apporte assurément une première réponse aux enjeux nombreux et importants relevés dans les exposés des motifs et projet de décret et rappelés par Mme la présidente de la commission.
Face aux besoins en personnel attendus ces prochaines années et au nombre actuel de diplômés, on prend conscience des difficultés auxquelles nous allons faire face. On peut clairement le dire, il s'agit tout simplement de la pérennité du système de santé dans notre canton qui est en jeu. A ce titre, le groupe socialiste considère que le volet « Renforcement de l'attractivité et fidélisation des professionnels de la santé » n'est pas à la hauteur des enjeux et déposera un amendement visant à améliorer l'attractivité des emplois dans le domaine parapublic. Nous aurons l'occasion d'en discuter dans le cadre du débat.
Les infirmiers et infirmières sont une composante essentielle du service du système de santé suisse. Pour maintenir la qualité de l'emploi, nous devons garantir un nombre suffisant d'infirmiers et d'infirmières en Suisse. L’exposé des motifs et projet de décret proposé (InvestPro) vise à lutter contre la pénurie de personnes dans le domaine des soins infirmiers. Ce projet constitue le premier volet de la mise en œuvre de l'initiative pour les soins infirmiers forts. Comme rappelé dans le projet, le Canton de Vaud aura besoin de 2000 infirmiers supplémentaires d'ici 2030, ce qui représente un défi de taille.
Des discussions approfondies ont eu lieu au sein de la commission pour évaluer si la formation d'infirmiers au niveau des écoles supérieures (ES), comme pratiquée en Suisse allemande, pourrait contribuer à combler cette pénurie. Le Conseil d'Etat nous a expliqué que le système de santé vaudois était organisé pour privilégier une formation de type Haute école spécialisée (HES), et que le binôme formé par les infirmiers HES et les assistants en soins de santé communautaire (ASSC) répond au mieux à la complexité des prises en charge. La mise en place d’une formation de type ES nécessiterait un grand nombre de places de stage, ce qui n'est pas réalisable actuellement. En ce qui concerne les nouveaux modèles de soins, nous saluons l'initiative du Canton de Vaud qui forme, depuis plusieurs années, des infirmiers en pratiques avancées, permettant ainsi le développement de nouveaux modèles de soins.
Le plan stratégique de cet exposé des motifs et projet de décret s'articule autour de trois thèmes : promotion, formation, et fidélisation, pour un coût total de 90 millions sur les trois années à venir. En commission, il a été proposé d'augmenter ce montant afin de permettre une revalorisation salariale du parapublic et d’aligner la Convention collective de travail du secteur sanitaire parapublic vaudois (CCT-SAN) au niveau de la Convention collective de travail du personnel de l’Hôpital Riviera-Chablais (CCT-HRC). Cependant, une telle mesure entraînerait un coût supplémentaire estimé à 113 millions de francs supplémentaires, ce qui n’est actuellement pas possible, d'où la démarche pas à pas proposée par le Conseil d'Etat, visant à atteindre une convergence d'ici quelques années. Nous aurions souhaité soutenir davantage les infirmiers dans le parapublic avec un rééquilibre de salaire, afin de fidéliser le personnel et rendre les postes plus attractifs, notamment face aux salaires proposés dans les cantons voisins, mais il a fallu se résoudre à accepter le projet progressif du Conseil d'Etat.
Une autre question débattue en commission concernait les professionnels touchés par cet exposé des motifs et projet de décret, qui se limite aux professions de soins. Il s'agit de répondre à l'initiative pour des soins infirmiers forts. Les assistants socio-éducatifs (ASE) ont été inclus par souci de cohérence, vu leurs implications dans les Centre d’accueil temporaires (CAT), les EMS et les établissements psychosociaux médicalisés (EPSM), où ils collaborent avec les infirmiers et les ASSC. Les représentants des organisations syndicales ont exprimé le souhait d’étendre cet exposé des motifs et projet de décret à d'autres professions, telles que les auxiliaires de santé, le personnel de cuisine et le personnel de maison. Toutefois, cet exposé des motifs et projet de décret se concentre sur le personnel de soins et ne peut pas être étendu à toutes les catégories professionnelles.
En conclusion, nous saluons la rapidité avec laquelle le Conseil d’Etat a mis en œuvre cet exposé des motifs et projet de décret, malgré sa complexité qui implique plusieurs départements. Le groupe vert’libéral soutiendra l'entrée en matière de ce projet.
L'initiative pour des soins infirmiers forts a été largement acceptée au niveau suisse et unanimement plébiscitée dans le Canton de Vaud. Cet exposé des motifs et projet de décret concrétise cette initiative, du moins dans ses intentions, et arrive ainsi à point nommé. Ses trois objectifs – promotion des métiers de la santé, amélioration des diverses filières de formation, revalorisation des conditions de travail, notamment des salaires – méritent d’être soutenus. En effet, une pénurie de personnel s’annonce. L'importation massive de personnel formé à l'étranger, des conditions de travail inférieures à celles des cantons voisins, les défis démographiques présents et futurs, ainsi que le manque de reconnaissance des métiers de la santé, doivent nous inciter à développer une politique ambitieuse et volontariste. Cet exposé des motifs et projet de décret aurait dû aller dans cette direction. Cependant, sur deux points, le Conseil d'Etat et la commission se sont arrêtés en chemin. Premièrement, en ce qui concerne les moyens. Notre groupe a toujours soutenu l'idée de fusionner les trois conventions de travail – SAN, HRC et CHUV. Bien que cela ne fasse pas parti de notre ADN, nous sommes ouverts à un compromis, en envisageant d'y aller en deux temps, soit d’abord une fusion entre la Convention SAN et HRC puis entre cette nouvelle convention et la convention du CHUV.
Or, nous sommes très inquiets quant à l’évolution de ce projet. En effet, le Conseil d’Etat a décidé de ne pas fusionner ces deux conventions et nous en sommes très déçus. Un amendement à l’article 9 visant à fusionner ces deux conventions a été rejeté de peu. Plus inquiétant, un commissaire influent a indiqué que l'État ne disposait pas des moyens financiers pour tenir cette promesse. Notre groupe est très inquiet, car nous sommes convaincus que seule une amélioration réelle et substantielle, notamment au niveau salarial, permettra d'atteindre les trois objectifs que nous avons cités et de répondre à la volonté populaire. Il manque effectivement des dizaines de millions dans le budget actuel.
Par cohérence avec les intentions du projet, il s'agira de soutenir l'amendement déposé à l'article 9, visant à rapprocher la convention sanitaire et la convention HRC. Par ailleurs, certains métiers, notamment les aides auxiliaires en soins, anciennement nommés auxiliaires Croix Rouge, ne figurent pas dans la liste à la lettre a, de l'article 3. S’agit-il d’un oubli ou d’un manque de volonté ? Nous espérons qu'il ne s'agit que d'un oubli, car cette fonction représente le gros des troupes dans les EMS notamment et dans les soins à domicile. Nous faisons preuve de compromis. Initialement, nous étions favorables à ce que toutes les étapes de soins sanitaires soient englobées dans InvestPro. Ce n’est malheureusement actuellement pas encore le cas. Cependant, le minimum est que tous les métiers de la santé y figurent.
Par un amendement à l'article 3, nous proposons d’ajouter la profession d’aide auxiliaire afin que tous les métiers de la santé et des soins importants soient intégrés dans cette progression. Notre groupe accorde une grande importance à ces deux points, et leur traitement déterminera notre position sur le soutien de ces propositions. InvestPro affiche de réelles ambitions, et tout en reconnaissant les efforts qui ont été faits, il est important qu’il ne devienne pas, en termes financiers, une politique au rabais qui ne satisferait pas la population ayant soutenu l'initiative.
Nous sommes en présence d’un exposé des motifs et projet de décret urgent en raison du calendrier de financement fédéral, qui a débuté le 1er juillet dernier. Rarement un projet a réuni autant de partenaires, avec deux départements fortement engagés. Le Conseil d'Etat a d'ailleurs pris le soin de prioriser les catégories de personnel concernées par InvestPro en fonction de l'urgence des pénuries. Le constat fait froid dans le dos et on peut se demander pourquoi la réaction a été si tardive. D’ici 2030, il manquera 2500 soignants HES ainsi que 500 ASSC, ASE et aide en soins et accompagnement (ASA). De plus, la dépendance au personnel soignant étranger représente un risque à moyen et long terme, car les pays limitrophes vivent une situation similaire à la nôtre. Par exemple, un tiers de l'hôpital d'Annecy est fermé en raison de pénuries de personnel, et l'Italie a augmenté récemment la taxation des frontaliers travaillant au Tessin de 6 %, sans parler de la concurrence salariale avec Fribourg et de Genève. Dans ma région, proche de Genève, la situation est critique dans tous les secteurs : hôpital, EMS et soins à domicile.
Je ne reviendrai pas en détail sur les mesures visant à promouvoir les professions de la santé, qui comprennent huit mesures. L'amélioration de l'offre en formation, évoquée par la présidente, et des aides financières pour environ 30 % des étudiants ayant besoin d'aide. En ce qui concerne la fidélisation du personnel en place, elle ne passe pas seulement par une revalorisation salariale, mais aussi par une précision des normes de dotation minimale du personnel soignant par rapport aux patients, ce qui est très important pour l'environnement de travail.
Je prendrai peut-être la parole lors du débat à venir, mais le groupe PLR vous invite à soutenir l'entrée en matière et à rejeter l'amendement à l'article 9 proposé en commission. Nous resterons attentifs aux autres amendements qui seront déposés.
Je ne répéterai pas ce qui a été dit par mes préopinants. Au nom du groupe des Verts, je vous invite à entrer en matière sur ce projet de décret qui revêt une grande importance pour le Canton de Vaud. Ce projet vise non seulement à mettre en œuvre l'initiative fédérale pour les soins infirmiers forts, et ainsi bénéficier du financement fédéral, mais aussi à répondre aux problèmes de pénurie dans les professions de la santé, et à mettre en place toute une série de mesures pour essayer d’y remédier.
Dans les points importants du projet, il convient de souligner la prise en charge globale des soins. Plutôt que de se concentrer sur une profession spécifique, le point fort de ce projet est de considérer tous les soins de manière globale, en essayant de regarder la prise en charge des patients dans son ensemble, et de reconnaître le pôle de compétence qui existe autour des patientes et patients en institution ou dans les hôpitaux. Dans le domaine des soins, la pénurie est importante, comme l’indiquent les chiffres de cet exposé des motifs et projet de décret. La pénurie ne concerne pas uniquement les professions d'infirmiers et d'infirmières, mais aussi d'autres professions de la santé.
En conclusion, j'invite le Grand Conseil à envoyer un signal fort en entrant massivement en matière sur ce projet de décret. Cette avancée est attendue par le terrain, et nous l’avons encore vu la semaine dernière devant le Grand Conseil. Le domaine des soins exprime une réelle souffrance au travail, et ce projet pourrait partiellement répondre à cette souffrance. C’est pourquoi nous avons travaillé rapidement en commission, permettant ainsi que ce projet soit rapidement inscrit à l’ordre du jour du Grand Conseil.
Je tiens à préciser mes intérêts : je suis directrice d’EMS et membre du comité de la Fédération des prestataires de services de soins et d’aide à la personne (FEDEPS) ainsi que de la Fédération patronale des EMS vaudois (FEDEREMS). Je souhaite à remercier le Conseil d'Etat pour cet exposé des motifs et projet de décret, d'importance cruciale pour l’avenir du domaine de la santé et des soins infirmiers.
Je souhaite profiter de cette occasion pour remercier toutes les personnes qui ont travaillé et travaillent encore dans les différents groupes de travail de ce projet : faîtières, collaborateurs de l'Etat, mais surtout collaborateurs des institutions concernées, qui ont apporté leurs différentes pratiques dans les mesures proposées. J’ai entendu mes préopinants parler de revalorisation salariale, mais je tiens à rappeler que nous abordons le premier volet des soins infirmiers de cette initiative, centré sur la formation et la fidélisation. Une simple revalorisation salariale n'est pas suffisante. En entendant les différents interlocuteurs me précédant, ce vaste projet soulève une crainte de ma part, à savoir que le débat tourne uniquement autour de la revalorisation salariale, alors que d’autres mesures proposées sont cruciales.
J’ai diverses remarques à formuler suite à la lecture de ce rapport. Comment peut-on exclure certains partenaires, notamment les organisations privées de soins à domicile (OSAD), dans le cadre d'offres de places de stage ? Un premier paragraphe du rapport indique qu'il n'y a pas de base légale pour verser des prestations d'intérêt général (PIG), mais il me semble que les EMS n'en touchent pas non plus, ce qui est d’ailleurs confirmé quelques pages plus loin. Quelle est la réelle excuse de cette exclusion ? Pourquoi se priver de places de stage qu'on considère comme insuffisantes, alors même que l'encadrement est assuré par des minimaux de formation ?
Autre point surprenant : la faible participation financière de la Confédération, pourtant promise lors des débats sur l'initiative sur les soins infirmiers. Sachant que notre canton représente environ 10 % de la population suisse, les 7,14 millions prévus pour le canton de Vaud semblent vraiment très faibles, d’autant que la Confédération a prévu un milliard pour soutenir les cantons. J'invite le Conseil d'Etat à se battre fortement sur cette question.
De nombreux points méritent d'être approfondis, et je sais qu'ils sont encore en discussion dans les groupes de travail. Je rappelle que la majorité des institutions sont prêtes à offrir des places de stage et de formation, que ce soit en tant que praticien formateur pour les étudiants HES, mais également en tant que formateur en entreprise pour les apprentis. Toutefois, les directions et cadres sont prêts à faire cet effort, à condition que certaines légères conditions leur soient accordées. Les directives en dotation devront également être ajustées pour coller à la réalité du terrain et des besoins, ainsi qu’à la pénurie actuelle. Les infirmiers et ASSC souhaitent se centrer sur le métier de base et non l'administratif grandissant. Il faut envisager une ouverture à d'autres métiers administratifs dont la dotation permettrait aussi d'éviter un grand nombre de départs. Quant à la revalorisation salariale, je tiens à rappeler le vote de la motion Jaccoud, qui vise clairement le personnel soignant diplômé – et je le rappellerai lors du débat sur les différents amendements.
L'exemple de revalorisation salariale de mai 2019 illustre l'échec de l'arrosage. En voulant viser trop de cibles avec un montant identique, on rate celle qui est prioritaire. En 2019, une infirmière a vu son salaire augmenter de 8 francs par mois, tandis qu'une gestionnaire en intendance a parfois vu son salaire augmenter de plus de 300 francs. Je tiens à rappeler que nous discutons d’un texte traitant des soins infirmiers et cibler les mesures est essentiel. C’est pourquoi je déposerai un amendement à l'article 3, visant à réduire la cible. D’ailleurs, le rapport indique qu'il n'y a ni preuves, ni chiffres démontrant un manque d'ASE ou d'ASA. Ce texte concerne les soins infirmiers et non le socio-culturel. Je vous invite donc à entrer en matière sur ce texte crucial, mais également à réfléchir à la cible réelle de ce texte : quelle est la cible visée par cette pénurie et quelle est la cible visée par le point, qui selon moi est l’organisation et la fidélisation.
À l'instar de mes préopinants, le groupe UDC soutient l'entrée en matière sur cet exposé des motifs et projet de décret qui, comme cela a été souligné, est important pour lutter contre la pénurie de personnel dans un secteur sous tension qui ne cesse de faire face à des défis importants. La question de la formation est primordiale, afin de ne pas dépendre trop fortement de nos voisins. S'il y a bien un secteur qui mérite notre attention, c'est celui-ci, et il faut des actions rapides. Je vous encourage donc à rentrer en matière. Le groupe UDC étudiera ensuite les différents amendements lors des débats à venir.
L’exposé des motifs et projet de décret que vous traitez aujourd’hui, autrement dit le programme InvestPro, constitue la réponse vaudoise à l'initiative pour des soins infirmiers forts. C’est un objet prioritaire pour le Conseil d'Etat, ainsi que pour le Département de la santé et de l’action sociale et le Département de l’enseignement et de la formation professionnelle, en particulier. Ce projet est d'ailleurs inscrit dans le Programme de législature du Conseil d'Etat. Il est le fruit d'un travail considérable mené pendant des mois, avec les partenaires de la formation et le monde sociosanitaire vaudois – je souhaite d'ailleurs les remercier chaleureusement pour leur engagement. Ce travail se poursuit encore aujourd'hui dans le cadre d'un certain nombre de groupes de travail qui continuent à œuvrer pour déployer les premiers éléments de ce programme.
InvestPro revêt surtout une importance essentielle pour notre population et pour les institutions de soins de notre canton, qui prennent chaque jour en charge des personnes vulnérables ou malades. Elles font déjà face à un défi majeur : la pénurie de personnel qui sévit non seulement dans notre canton, mais également ailleurs en Suisse. C'est pourquoi nos deux départements vous soumettent ce programme ambitieux, qui contient un programme au périmètre large et dont le coût est certes important, mais qui doit être vu comme un investissement nécessaire si nous voulons assurer dans un futur proche des soins de qualité à la population vaudoise. Ces investissements doivent aussi servir à maintenir dans le métier des hommes et des femmes formés, en améliorant leurs conditions de travail, afin de les maintenir durablement dans ces différentes professions de soins.
On a déjà pu l'évoquer et différentes interventions ont fait état de cette problématique : en 2040, notre canton comptera environ 163’000 habitants et habitantes supplémentaires. Dans ce contexte, la part des personnes de 80 ans et plus doublera en quelques années. Aujourd’hui, les personnes de 65 ans ont une espérance de vie de 86 ans, alors que pour nos grands-parents, elle n’était que de 65 à 70 ans. Ce gain de 20 ans en deux générations peut nous réjouir, mais impliquera à l’avenir encore plus de soins et plus de besoins de prise en charge. De plus, 30 % de la population vit actuellement avec une maladie chronique. Chez les personnes âgées, ce taux s’élève à 48 %, nécessitant parfois un accompagnement quotidien pour adapter les traitements et assurer le suivi. Ces polymorbidités impliquent également plus de soins et de compétences.
En parallèle, les situations individuelles, sociales ou sanitaires, tendent à se complexifier. Tout cela alors même que la pénurie de personnel soignant dans le domaine de la santé sévit d'ores et déjà dans le canton, particulièrement dans certaines régions du territoire vaudois. Cette pénurie s'explique par différentes raisons. Bien que le nombre de professionnels de la santé ait augmenté d'un quart entre 2012 et aujourd'hui, le nombre de jeunes qui se forment reste insuffisant pour combler les besoins. De plus, les personnes qui exercent une activité dans le domaine de la santé sont nombreuses à quitter leur profession, en particulier en raison de la pénibilité. Les chiffres de l'OBSAN le confirment : 36 % des soignants quittent leur poste entre l'âge de 20 et 24 ans. Une réponse politique doit donc pouvoir être apportée à ces différents constats. InvestPro, en est une, mais d’autres initiatives devront sans doute être imaginées en fonction de ce que nous réussirons à engranger avec le programme qui vous est soumis aujourd'hui et qui se base sur trois axes importants que je vais détailler dans quelques instants. Bien entendu, en fonction des résultats que nous réussirons à engranger, il s'agira peut-être de monitorer les résultats du programme et d'adapter les réponses qui seront données.
Concernant les trois axes d'InvestPro, il s'agit tout d’abord de fournir un effort et de développer des moyens pour renforcer l'offre de formation. Ensuite, il vise à promouvoir les métiers de la santé, à les rendre plus visibles, accessibles et attractifs, en particulier auprès des jeunes en quête d’un emploi et d'orientation professionnelle. Enfin, il a pour objectif d’améliorer les conditions de travail et de lutter contre la pénibilité. Vous le savez, les personnels de soins et de santé sont nombreux à devoir travailler la nuit, les week-ends et les jours fériés. Les hôpitaux et les EMS ne ferment pas le 25 décembre – heureusement pour nous toutes et tous – ni ne font pas le pont de l'Ascension. Les hôpitaux et les EMS travaillent en permanence et cela implique des horaires difficiles avec de la fatigue qui, couplés aux situations individuelles difficiles, parfois tragiques, auxquelles les professionnels sont exposés, peut à terme les inciter à quitter le domaine, d'où la nécessité d'une récupération qui soit acceptable pour les professionnels concernés.
À travers InvesPro, nous souhaitons encourager les employeurs à accorder plus d'heures de repos payées pour compenser le travail de nuit et les heures dites de contrainte. A partir de 2025, nous souhaitons co-financer des projets qui pourront être testés dans des institutions et qui nous permettront d'identifier des pratiques plus bénéfiques pour le repos des collaboratrices et des collaborateurs. Nous misons sur le fait que cette mesure d'impulsion contribuera à fidéliser les professionnels. Outre la question de la récupération, d'autres éléments contribuent à un taux de départs précoces dans la profession des infirmiers et des infirmières de 40 % ces dernières années dans notre pays. Les difficultés de concilier la vie privée et la vie professionnelle, induites par des horaires particuliers, reviennent régulièrement parmi les explications données par celles et ceux qui décident de partir. De fait, un certain nombre d'améliorations doivent être apportées, telles que la possibilité pour les professionnels d’accéder à leur planning suffisamment tôt pour pouvoir organiser la garde des enfants, les déplacements et leur vie privée. Pour que les personnes actives dans ces domaines aient envie de rester dans leur métier, il faut qu'elles puissent exercer leur profession dans les règles de l'art. Cela implique, par exemple, un bon ratio patients-soignants, ainsi qu’un mix adéquat de soignants et de compétences autour des patients.
Les trois axes d'InvestPro – la promotion des métiers de la santé, l'investissement consenti dans la formation et la fidélisation – impliquent, sur ce dernier point, des investissements financiers. C'est pourquoi, pour financer le programme, nous sollicitons 47 millions supplémentaires pour 2025 à 2027, un montant qui vient s'ajouter aux contributions de la Confédération et aux investissements d'ores et déjà été consentis ces dernières années par le Grand Conseil, notamment dans le domaine de la revalorisation des salaires de la CCT-SAN.
Sur ce point, des critiques ont été émises, notamment dans le cadre des travaux de la commission. On en a aussi entendu un certain nombre lors du débat d'entrée en matière. Mesdames et messieurs, je tiens à vous rappeler que, depuis 2019, près de 30 millions de francs annuels sont versés chaque année par le canton, afin de réduire le gap entre les salaires prévus dans la CCT-SAN et celle CCT-HRC. Grâce à ces injections financières, l’écart entre les salaires, par exemple pour les infirmières, a déjà pu être réduit de manière substantielle. Grâce aux financements complémentaires prévus dans le cadre d'InvestPro, nous réussirons sans doute à aligner les salaires des personnels actifs dans le domaine des soins infirmiers, entre ceux relevant de la CCT-SAN et ceux de la CCT-HRC. Il est important de rappeler, en lien avec les critiques qui ont été émises, que l'initiative sur les soins infirmiers forts, comme l’a rappelé Mme Gross, concentre l'action publique autour des infirmières et des infirmiers. Cependant, dans le cadre d'InvestPro, nous avons étendu le périmètre du programme aux autres professions pour inclure les soins au quotidien auprès des malades et des personnes vulnérables, des professions qui, elles aussi, connaissent d'ores et déjà une pénurie – ou risquent de la connaître dans les prochaines années.
Monsieur Vuilleumier, j'ai eu l'occasion de vous répondre lors des travaux de la Commission thématique de la santé publique. Les auxiliaires Croix-Rouge sont effectivement inclus dans le périmètre, contrairement à ce qui a été évoqué ces derniers jours dans des discussions en lien avec ce débat.
En résumé, tout au long du débat et en lien avec les amendements, mon collègue et moi-même, aurons l'occasion de préciser d'autres éléments. Pour conclure, à ce stade, nous souhaitons insister sur le fait qu'InvestPro se fixe pour objectif de mobiliser le travail synergique de tous les partenaires. D’ici 2023, nous souhaitons disposer de professionnels de soins, de santé et socio-éducatifs compétents, engagés et en suffisance pour pouvoir répondre de manière adéquate et ajustée aux besoins évolutifs de santé de la population vaudoise. Nous sommes tous conscients que le défi est de taille, mais grâce à votre soutien à cet exposé des motifs et projet de décret, nous pourrons commencer à le relever dès aujourd'hui. Je vous remercie d'ores et déjà pour votre soutien.
La discussion est close.
L’entrée en matière est admise à l’unanimité.
Il est passé à la discussion du projet de décret, article par article, en premier débat.
Les articles 1 et 2 sont acceptés à l’unanimité.
Art. 3. –
En commission, j’avais déposé un amendement à l’article 9, mais j’aurais plutôt dû le déposer à l’article 3, comme je pense le faire aujourd’hui, pour compléter – contrairement à ce que veut faire Mme Gross – les métiers concernés par lnvestPro. Madame la conseillère d’Etat, vous m’aviez dit que ce que l’on appelait autrefois les « auxiliaires Croix-Rouge » – qui s’appellent maintenant « aides et auxiliaires de santé » – étaient intégrés. De mon côté, à la suite de vos propos, je me suis renseigné auprès de syndicats et de plusieurs EMS et il m’a été confirmé que, dans les 4 métiers cités à l’article 3, lettre a, les anciens « auxiliaires Croix-Rouge » ne sont effectivement pas intégrés. Avant de déposer un amendement, pouvez-vous me dire très précisément dans quels métiers ces auxiliaires Croix-Rouge sont intégrés.
Comme annoncé en introduction, je souhaite déposer un amendement à l’article 3, alinéa 1, lettre a, soit la suppression des aides en soins et accompagnement (ASA) et des assistants socio-éducatifs (ASE). Pour ma part, j’ai compris ce projet de décret comme un soutien aux soins infirmiers, aux soins de santé. Dans le rapport, notamment en page 7, on peut lire que des renseignements doivent être pris à propos d’une éventuelle pénurie avérée d’assistants socio-éducatifs. Cela ne répond pas à ma question. Sur le terrain, je ne constate pas cette pénurie d’aides en soins et accompagnements ou d’assistants socio-éducatifs ; je n’ai pas de peine à en trouver. Dès lors, je préfère réduire la cible pour que les mesures soient vraiment ciblées – et non pas arrosées – et concernent ces professions – notamment les infirmiers et les assistant en soins et santé communautaire (ASSC) – qui connaissent des pénuries et qui doivent être revalorisées, pas uniquement financièrement, mais également dans les tâches et les fonctions. Ces personnes doivent pouvoir se recentrer sur leur métier par toutes les mesures annoncées par lnvestPro. En effet, les départs annoncés ne mentionnent pas uniquement l’aspect salarial, mais également le fait qu’il y a trop d’administratif ou de fluctuations d’horaire. Je propose donc de supprimer ces deux métiers qui, selon moi – et selon le rapport qui donne plus d’interrogations que de réponses – ne sont pas ciblés par la pénurie. Il convient de réduire la cible pour que les mesures profitent vraiment aux métiers concernés par la problématique actuelle dans notre canton et dans notre pays.
« Art. 3. – Al. 1, lit a : Professionnels de soins et d’accompagnement : infirmiers, assistants en soins et santé communautaire (ASSC)
, aides en soins et accompagnement (ASA), assistant socio-éducatifs (ASE)».
En commission, lors de la discussion sur cet article, la question des ASA a été soulevée à nouveau. Le Conseil d’Etat a donné des précisions un peu plus larges que ce qui figure à la page 7 du rapport de commission. Effectivement, une pénurie est envisagée d’ici à 2030. Il a été démontré qu’entre 2012 et 2019, 12 % des assistants sociaux éducatifs ont quitté la profession, particulièrement dans le secteur de la personne âgée et celui du handicap. Parmi les raisons de départ évoquées se trouvent la faiblesse des rémunérations, mais aussi – il faut le souligner – le manque de reconnaissance des compétences par rapport aux collègues au bénéfice d’une formation tertiaire. Dans son bulletin de 2021, l’Observatoire suisse de la santé (OBSAN) indique aussi que 70 % des directions d’EMS en Suisse rapportent des difficultés à recruter du personnel disposant d’un CFC dans les soins et l’accompagnement. Suite à ces précisions, l’article 3, sans amendement, a été accepté avec une abstention.
Je déclare mes intérêts, parce que j’ai oublié de le faire lors du débat d’entrée en matière : je suis président du Pôle santé de la Vallée de Joux, institution qui emploie notamment du personnel touché par l’amendement de notre collègue Gross. Au vu de ce que relèvent la présidente de la commission et l’OBSAN, je trouve la position de notre collègue un peu surprenante. Nous sommes en 2024 et on nous annonce une pénurie pour 2030. Faire le choix de réduire la voilure dans ce domaine et attendre la pénurie de 2030 pour réagir, cela me semble un peu tardif. Sans mauvais jeu de mots, je pense qu’il vaut mieux prévenir que guérir. Dans ce cadre, je pense qu’il est important de maintenir l’article tel que présenté par le Conseil d’Etat.
Par ailleurs, dans la CCT-SAN actuelle, les ASA commencent en classe salariale 5. Il s’agit tout de même de salaires très peu attractifs. On parle de 3’872 francs par mois, c’est assez peu en regard de la situation actuelle, notamment du renchérissement du coût de la vie, de l’inflation ou des primes d’assurance-maladie. Aujourd’hui, si nous voulons être attractifs dans ce domaine, nous devons mieux considérer leur travail et les maintenir dans ce projet de décret.
J’entends bien les arguments évoqués, mais alors pourquoi prendre les HES dans le personnel soignant et pas dans le milieu socio-éducatif ? J’ai l’impression qu’on écarte certaines professions alors que, dans le socioculturel, des HES sont aussi employés. Vous allez me dire que, tout d’un coup, il n’y a pas de pénurie. Je n’ai pas les chiffres – le rapport ne le montre pas – mais je répète cette phrase qui figure dans le rapport : « Pour ce qui concerne plus spécifiquement les EMS, renseignement doit être pris à propos d’une éventuelle pénurie. » Ainsi, je n’ai toujours pas obtenu de réponse à ma question.
Monsieur Cala, je suis prête à retirer mon amendement si vous ne déposez pas le vôtre à l’article 9 et que l’on ne parle pas de convergence HRC. Selon moi, il faut prendre en considération les ASA, mais aussi l’ensemble des métiers du sociosanitaire dans le projet lnvestPro, dans la réorganisation, dans la fidélisation, et non pas uniquement dans l’aspect financier. Pour moi, une réorganisation doit comprendre toutes les équipes – c’est évident – et on ne parle même pas des gens de l’intendance ou autres. La réorganisation va concerner l’ensemble des équipes, le pluridisciplinaire. Néanmoins, à la lecture du rapport et en entendant les prises de parole lors de l’entrée en matière, tout ce qui compte, c’est la revalorisation salariale. Je vous rappelle qu’après 2019, des gestionnaires en intendance ont touché 300 francs, alors que des infirmières ont touché 8 francs. J’aimerais bien que l’on ne retombe pas dans le même revers en élargissant à l’ensemble des professions. Etant donné que le débat semble aujourd’hui être ciblé uniquement sur la revalorisation salariale, je pense maintenir mon amendement. On verra bien ce que donnera ce premier débat, mais s’il s’agit d’une réorganisation ou de mesures de fidélisation, il est bien évident que je prendrai en considération l’entier des métiers travaillant dans les institutions concernées.
Bien sûr, l’initiative pour des soins infirmiers forts se concentre sur les infirmiers, mais dans la pratique, il y a des structures dans lesquelles il n’y a pas que les infirmiers et infirmières qui exercent un travail auprès des patients. Je prends l’exemple des centres d’accueil temporaire (CAT) : dans ces structures, ce sont vraiment les assistants socio-éducatifs qui exercent une grande partie du travail. Dans ce panel de professions citées dans l’alinéa a, l’idée était vraiment de couvrir le personnel proche du patient – infirmiers, ASA ou ASE – dans nos structures, qu’il s’agisse d’EMS ou de CAT. J’encourage Mme Grosse à retirer son amendement, parce que ce projet a vraiment été pensé pour les personnes qui sont au plus près du malade et en contact direct avec les soins.
Je suis presque choqué par cet amendement qui fait fi de tout le travail accompli par le canton de Vaud pour la formation professionnelle de ces ASE. Je rappelle que, dans les gymnases, notre canton forme aussi des ASE. Dès lors, il n’est pas logique de ne pas revaloriser tout ce pan de la formation professionnelle duale. On ne peut pas supprimer ces métiers de la revalorisation. Je rejoins les propos de mon collègue Vionnet et je demande à Mme Gross de consulter la base du PLR pour savoir si elle désire effectivement que les fonctions et les tâches quotidiennes des personnes en formation duale ne soient pas revalorisées.
Je le répète, vous ne parlez que de revalorisation salariale, alors que ce projet de décret parle d’autre chose. Si vous acceptez d’élargir vos chakras, je suis prête à retirer mon amendement. Mais pour vous, tout ce qui compte, c’est une augmentation salariale. La semaine passée, le Conseil d’Etat a annoncé une revalorisation salariale dans la CCT sociale. Expliquez-moi pourquoi, aujourd’hui, un éducateur HES qui travaille dans un établissement psychosocial médicalisé (EPSM) d’une fondation qui dépend de la CCT sociale a été revalorisé, alors que le même éducateur qui travaille dans le même type d’institution, un EPSM, CCT SAN n’a pas été revalorisé et ne fait pas partie d’lnvestPro. Il s’agit du même métier, du même public. Il faut suivre la logique jusqu’au bout ou ne pas la suivre du tout. Aujourd’hui, j’estime que nous ne sommes pas dans cette logique. Dans lnvestPro, on travaille sur les métiers médicaux et c’est dans ce domaine qu’il y a actuellement une vraie pénurie. Nous devons revaloriser ces métiers, parce que tout le monde a été revalorisé en 2019 et cela a créé des inégalités : il y a eu arrosage complet et ceux que l’on souhaitait cibler ont été les moins revalorisés. Pour une fois, profitons d’une revalorisation du personnel soignant diplômé et évitons d’inclure d’autres niveaux. Je le rappelle, ce projet de décret n’a pas comme unique but une revalorisation salariale… ou alors nous ratons notre cible.
J’ai de la peine à suivre le débat sur cet amendement. J’entends Mme Gross dire que, selon elle, le décret ne se cantonne pas aux questions de revalorisation salariale. Même si ces dernières ont beaucoup été évoquées lors de l’entrée en matière, le décret que nous devons voter est beaucoup plus large que le projet sur lequel nous avons débattu en commission. Le projet qui nous est soumis – et que nous allons voter in fine – est beaucoup plus large que cela. Par conséquent, je ne comprends pas très bien l’argument de Mme Gross qui consiste à dire que si l’on ne se focalise pas sur la revalorisation salariale, elle serait d’accord de retirer son amendement. Madame Gross, votre amendement porte sur l’article 3 qui définit directement les catégories de professionnels concernés par l’ensemble du décret, donc par l’ensemble des mesures. J’ai un peu de peine à suivre le débat. Je pense que si la question de le revalorisation salariale est importante, elle n’est effectivement pas la seule à être concernée par ce décret. Je pense qu’il serait regrettable de pénaliser le système sociosanitaire de ce canton en retirant certaines professions de cette liste ainsi que du programme InvestPro, pour l’ensemble des mesures prévues par ce décret, qu’il s’agisse des questions salariales, de la formation, de la fidélisation ou des conditions-cadres. Dès lors, je vous invite à ne pas soutenir cet amendement.
Madame Gross, je vais gentiment rejeter le marché que vous nous proposez. Votre tentative de diviser le personnel est tactiquement bien jouée, mais vous touchez l’ensemble des volets en procédant ainsi, donc vous retournez l’argument contre vous-même. Vous dites que l’on cannibalise le débat sur la revalorisation salariale, mais ce débat ne tourne pas uniquement autour de cette question… bien au contraire. Nous avons souligné que les deux autres volets du Conseil d’Etat sont solides et pertinents, c’est pour cela que nous ne déposerons pas d’amendement aujourd’hui. En commission, nous avions déposé quelques amendements sur la formation, mais les explications fournies par le Conseil d’Etat nous ont conforté dans notre idée de les retirer. Mme Gross et la droite de ce Parlement prendront leurs responsabilités au moment de voter. La gauche refuse d’endosser la responsabilité de supprimer les professions concernées. Nous verrons ce qui adviendra lors du vote final.
Je vais maintenir l’amendement que j’ai déposé, en tout cas, pour le premier débat. Je pense que cibler l’ensemble des mesures permettra de satisfaire les collaborateurs. Je rappelle l’exemple que j’ai mentionné précédemment : les 8 francs et les 300 francs. Je peux vous promettre qu’il a été difficile d’annoncer une augmentation de 8 francs pour le personnel qui connaissait une pénurie et de nombreux départs, alors que, dans le domaine de la restauration, l’augmentation était de 300 francs. Aujourd’hui, la concurrence avec la CCT de restauration – hors restauration collective – pose d’ailleurs d’autres problèmes. Annoncer une telle décision a été très compliqué et je ne veux pas me retrouver dans ce même état de fait.
Aujourd’hui, j’estime qu’il faut cibler les personnes qui manquent vraiment dans certains postes de travail, à savoir les infirmiers et les ASSC. Sans dénigrer le socioculturel, ces personnes font un autre travail que les ASE et les conditions de travail sont également différentes. Je pense que ces professions doivent rester la cible principale de projet de décret et je maintiens donc mon amendement.
En préambule, je tiens à insister pour qu’au moment du vote, le Grand Conseil maintienne la version proposée par le Conseil d’Etat. Monsieur Vuilleumier, les auxiliaires de santé auxquels vous vous référez ne font pas partie des articles dont il est question ici, parce que, comme nous l’avons expliqué en commission, pour rédiger cet article – aussi en lien avec les financements fédéraux prévus – nous avons repris la nomenclature de l’OBSAN. Or, dans cette dernière, les catégories auxquelles vous faites référence n’apparaissent pas de manière formelle. C’est l’explication que nous vous avons donnée. En revanche, dans les groupes de travail, dans les institutions qui mettront en place le programme lnvestPro, il est évident que les auxiliaires de santé feront aussi partie de l’application de ce programme.
Par ailleurs, vous saviez aussi qu’il y avait une certaine volonté du Conseil d’Etat de traiter ce projet de décret en urgence. Je remercie la commission qui a rendu un rapport très rapidement. Nous souhaitions être prêts avec notre projet vaudois pour pouvoir, le moment venu, solliciter un certain nombre de financements de la part de la Confédération. En effet, l’ordonnance du Conseil fédéral prévoyait une entrée en vigueur au 1er juillet 2024. Nous nous sommes donc basés sur cette nomenclature, mais je vous ai donné des assurances en commission. Je les répète ici publiquement, elles figureront ainsi dans le Bulletin du Grand Conseil : les professionnels auxquels vous vous référez font bel et bien partie du programme lnvestPro à travers les projets qui se déploient dans les différentes institutions.
En ce qui concerne l’amendement déposé par Mme Gross, je vous invite à en rester à la version du Conseil d’Etat. S’agissant des ASE, Mme Podio vous a rappelé la réponse qui avait été donnée dans le cadre des travaux de la commission. Je vous ai donné des éléments en lien avec une étude qui a été faite du côté social. En plus des études de l’OBSAN, il existe un certain nombre d’études vaudoises sur la pénurie dans le domaine des soins, mais une pénurie existe aussi dans le domaine social. La pénurie des ASE – même si elle n’est pas aussi urgente que d’autres types de pénuries dans le domaine de la santé, vous avez raison, madame Gross – est tout de même une donnée à prendre en compte. Or, c’est aussi un personnel qui est présent auprès des personnes âgées dans certaines institutions, un personnel qui s’acquitte d’un travail important en complémentarité – en transversalité, comme vous l’avez vous-même relevé – en interprofessionnalité, au plus près des besoins des patientes et des patients.
S’agissant des ASA, de mon point de vue, il est également nécessaire de les maintenir dans ce programme. Madame Gross, comme vous le savez bien de par votre activité professionnelle et comme vous l’avez vous-même relevé, dans les équipes, lorsqu’il s’agit de mettre en place un certain nombre de projets en lien avec le programme lnvestPro ou en lien avec des revalorisations – mais sur la question salariale, de toute façon, tout cela est couvert par les professions et les fonctions qui sont soumises à la CCT pour savoir si elles sont revalorisées ou pas – il est difficile pour un manager ou un responsable d’équipe de faire des différences entre des personnes qui travaillent finalement auprès des mêmes patients. De ce point de vue, je vous encourage – aujourd’hui ou lors d’un débat ultérieur – à revoir votre position sur cet amendement.
Madame Gross, je comprends votre inquiétude : l’expérience vécue en 2019 dans de nombreuses institutions en lien avec la revalorisation salariale a donné lieu à des incompréhensions du côté du personnel infirmier. En réalité, c’était le résultat de décisions prises, non pas par l’Etat, mais par la CPP. In fine, c’est cette dernière qui a discuté de la manière dont la revalorisation de 2019 allait être mise en place et appliquée. Par la suite, lorsque des injections financières supplémentaires ont été données, il y a eu des demandes particulières de la part de l’Etat pour diriger les revalorisations prioritairement du côté des professionnels des soins et en particulier des infirmiers. Comme je l’ai dit en préambule, cela a permis de réduire l’écart entre les salaires des infirmières et des infirmiers de la CCT-SAN et de la CCT-HRC. Je comprends que cette première expérience de 2019 ait donné lieu à passablement de frustration ou d’incompréhension de la part des infirmières et des infirmiers dans les établissements. Néanmoins, je le répète : nous sommes dans le cadre d’un partenariat social et c’est la CPP qui a pris des décisions – suite aux négociations qui ont eu lieu au sein de la CPP – pour la suite des revalorisations. Il y a eu des consignes, comme ce fut le cas dans le domaine de la CCT sociale – on nous avait alors dit qu’il fallait diriger les revalorisations sur les professions dans lesquelles il y avait le plus de pénurie et pas forcément sur l’entier du personnel. Il faut le dire, cela ne plaisait pas toujours aux syndicats, mais il s’agissait d’une demande précise du Conseil d’Etat pour essayer de réduire les écarts ou de renforcer l’attractivité des professions qui connaissent des pénuries et dans lesquelles les gens sont tentés d’aller travailler dans d’autres cantons. J’espère avoir été assez claire. Encore une fois, je vous invite à en rester à la version du Conseil d’Etat.
Madame la conseillère d’Etat, j’ai vraiment envie de vous croire, mais en même temps, je suis très surpris d’entendre aujourd’hui des informations qui diffèrent beaucoup de ce que vous nous avez dit en commission. Depuis deux semaines, j’ai eu plusieurs entretiens avec des gens qui ne sont pas connotés politiquement – des responsables de ressources humaines dans des EMS ou des syndicats – et qui m’ont dit que les auxiliaires en soins – anciennement auxiliaires Croix rouge – ne sont mentionnés nulle part. C’est assez difficile de comprendre : ils ne sont pas dans les quatre métiers mentionnés, mais ils sont quand même dedans… Soit, j’en prends note. Pour l’heure, je renonce à déposer l’amendement que j’avais proposé. Avec mes petits camarades, nous allons refaire deux ou trois séances d’information et nous verrons si nous déposerons un amendement à ce sujet au cours du deuxième débat.
L’amendement Florence Gross est refusé par 69 voix contre 66 et 2 abstentions.
Je demande un vote nominal.
Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.
Celles et ceux qui acceptent l’amendement Florence Gross votent oui ; celles et ceux qui le refusent votent non. Les abstentions sont possibles.
Au vote nominal, l’amendement Florence Gross est refusé par 71 voix contre 69.
* Introduire vote nominal
L’article 3 est accepté avec quelques abstentions.
Les articles 4 à 8 sont acceptés à l’unanimité.
Art. 9. –
Je souhaite déposer l’amendement suivant qui a déjà été présenté en commission :
« Art. 9. – Al. 3 (nouveau) : Le Conseil d’Etat alloue un montant permettant la convergence salariale du secteur parapublic et de la convention collective de travail de l’Hôpital Riviera-Chablais (CCT-HRC) pour les professions concernées à l’article 3. »
La demande relayée par cet amendement n’est pas nouvelle. Le 21 novembre 2019, un accord est intervenu entre les syndicats, les associations faitières du secteur sanitaire parapublic vaudois et le Conseil d’Etat en vue d’atteindre la convergence entre la CCT-SAN et la CCT-HRC. Elle a également été actée par le Grand Conseil au travers du renvoi de la motion Jaccoud transformée en postulat. Fruit de deux ans d’intenses échanges entre les différents partenaires sociaux et l’Etat, cette demande de convergence se fait encore attendre pleinement par le personnel, malgré les efforts déjà consentis par le Conseil d’Etat. Cette demande est aujourd’hui renouvelée par les partenaires sociaux qui ont d’ailleurs répondu à la consultation organisée par la Commission thématique de la santé publique. L’un des objectifs principaux d’lnvestPro est de fidéliser le personnel et renforcer l’attractivité du secteur. De grandes inquiétudes subsistent à ce sujet et il est temps de reconnaître l’engagement du personnel de santé.
Lors des travaux en commission, le Conseil d’Etat lui-même a démontré que les conditions de travail appliquées au CHUV sont en dessous de celles appliquées à Genève et à Fribourg. A cela s’ajoute le fait que le canton du Valais révise sa CCT et s’oriente vers une revalorisation supérieure à celle du CHUV. Le Conseil d’Etat a également relevé que les écarts salariaux entre la CCT-SAN et le CHUV sont très importants. On parle de 8’000 francs par mois en termes de salaire moyen annuel en ce qui concerne les hôpitaux de la FHV, 10’000 francs par mois pour les EMS et 5’000 francs pour les soins à domicile. Nous pouvons avoir de réelles craintes quant à l’attractivité des institutions de santé vaudoises.
La demande de convergence s’inscrit par ailleurs dans le cadre de la réponse à l’initiative fédérale pour des soins infirmiers forts. A ce titre, et je le reconnais, il serait cohérent que la Confédération débloque des fonds au-delà de ceux alloués pour la seule offensive de formation. Malheureusement, ce n’est pas le cas. Si l’Etat fédéral ne prend pas ses responsabilités en ne répondant pas pleinement à l’initiative, il s’avère essentiel que le canton prenne la main et assume la responsabilité déléguée par la Confédération. En cela, je vous encourage vivement à soutenir cet amendement.
Cet amendement a déjà été déposé en commission. Je ne vais pas vous faire un résumé de nos discussions – d’autant que je ne serais peut-être pas aussi objective qu’une présidente de commission devrait l’être. Finalement, cet amendement a été refusé par 8 voix contre 7.
Tout d’abord, je déclare mes intérêts : c’est en tant que présidente de la Fédération des hôpitaux vaudois (FHV) que je prends la parole. Comme je n’ai pas pris la parole lors du débat d’entrée en matière, je voudrais remercier le Conseil d’Etat pour ce projet de décret et pour l’investissement important mis en place pour traiter ces trois axes primordiaux pour le futur du personnel soignant de la santé publique.
J’en viens à l’axe 3 dont il est question dans cet article 9 et dans l’amendement déposé par M. Cala. Comme Mme Gross l’a dit, dans ce projet de décret, il est extrêmement important de prioriser l’amélioration des conditions de travail au niveau de la fidélisation. Il faut prendre conscience de la pénibilité des horaires contraignants et du besoin d’heures de repos ainsi que des conditions-cadres qui vont privilégier la conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale.
Concernant spécifiquement la revalorisation salariale, plusieurs études comparatives ont été effectuées ces dernières années, notamment dans le cadre de la CCT-SAN. En conséquence, une démarche de revalorisation du secteur sanitaire parapublic a déjà été amorcée. Mme la conseillère d’Etat a d’ailleurs indiqué que, depuis 2019, 30 millions par année ont été mis à disposition par l’Etat pour revaloriser les salaires parapublics. Néanmoins, il faut tenir compte d’un élément central : contrairement à l’avis de la plateforme des travailleurs, les représentants patronaux de la plateforme des employeurs de la CCT-SAN demandent unanimement de ne plus viser la convergence entre les niveaux salariés CCT-SAN et CCT-HRC, mais d’opter pour des revalorisations qui tiennent compte d’autres réalités, selon les fonctions CCT étendues et les comparaisons intercantonales des fonctions publiques, etc. Cela s’explique pour plusieurs raisons. La CCT-HRC concerne les fonctions hospitalières et n’est pas transposable au secteur des soins à domicile et aux EMS. En plus de la grille salariale différente de la CCT-SAN, la CCT-HRC comporte des conditions statutaires ou salariales extrêmement rigides, ce qui va à l’encontre de la flexibilité ou de la souplesse d’interprétation qui est actuellement possible dans le cadre de la CCT-SAN et qui est très précieuse, en tout cas, pour les hôpitaux que je représente. ¨
Les coûts d’une application de la CCT-HRC ont été chiffrés et sont extrêmement élevés. On parle d’environ 120 à 140 millions. La CCT-HRC permet des rémunérations initiales certes plus élevées, mais ces augmentations ne se poursuivent pas sur l’entier de la progression salariale. Il y a même, à la fin de la progression salariale, des rémunérations de la CCT-SAN qui sont supérieures à celles de la CCT-HRC.
En résumé, la FHV est favorable à des revalorisations salariales ciblées, moyennant l’obtention de moyens financiers correspondants. Dans le cas contraire – cela figure dans le projet de décret, mais il faut le souligner – les hôpitaux concernés ne seront eux-mêmes pas en mesure d’assumer les coûts d’une revalorisation salariale, sachant qu’actuellement déjà, les tarifs hospitaliers – malgré une revalorisation – ne couvrent pas les charges auxquelles ils doivent faire face. Les représentants des employeurs de la CCT-SAN travaillent actuellement à une refonte du chapitre « rémunérations » de la convention, ainsi que de sa grille salariale. C’est précisément là qu’il faut mettre la priorité. Cela permettra d’affecter tous les moyens supplémentaires aux fonctions à prioriser, avec la garantie de suivre une logique inscrite dans la durée. Une fois ces travaux terminés – normalement au premier semestre 2025 – la mise en œuvre sera conditionnée en accord entre les partenaires sociaux de la CCT-SAN. Je ne sais pas si je l’ai précisé en préambule, mais les faitières impliquées dans la CCT-SAN sont évidemment la FHV, la Fédération patronale des EMS vaudois (FEDEREMS), l’Association professionnelle vaudoise des institutions médico-psycho-sociales (Héviva) et l’Association vaudoise d’aide et de soins à domicile (AVASAD).
En conclusion, au nom de la FHV, je dirais qu’appliquer un autre système de rémunération – HRC-CHUV, etc. – n’est en soi ni réaliste ni souhaitable. Il est de la responsabilité des employeurs de trouver une solution, de la soutenir auprès des parties prenantes et enfin de la mettre en œuvre. C’est pour cette raison que je vous encourage à refuser cet amendement à l’article 9.
Je pense qu’il faut revenir un peu en arrière et analyser la genèse de cette volonté de convergence. C’est une proposition qui avait été faite en 2018 – il y a quand même quelques années – par le conseiller d’Etat alors en charge du département et qui proposait aux parties sociales de prendre le chemin de la grille HRC pour améliorer les conditions salariales de la CCT-SAN qui, à l’époque, étaient moins bonnes. A partir de là, tout un processus s’est mis en place. Cela fait maintenant des années et des années que les parties sociales discutent entre elles, qu’elles négocient – cela ne sort donc pas de nulle part. La bascule dans la grille salariale HRC a déjà permis d’améliorer les conditions salariales de certaines personnes, mais, sans cette convergence, beaucoup d’infirmières et d’infirmiers – dont on parle beaucoup, parce qu’ils font un travail remarquable – n’ont pas vraiment vu leurs conditions salariales s’améliorer. Il est donc important que nous puissions aller dans ce sens. Bien sûr, cela a été dit, ça ne va pas tout résoudre. La question des conditions de travail est aussi extrêmement importante. Je rappelle que la Commission paritaire professionnelle (CPP) a fait un travail assez important ces dernières années, certes qui n’a pas abouti, mais qui visait justement à essayer de reprendre les différentes professions de l’HRC et de les transposer dans la CCT-SAN pour arriver à une convergence. Cette dernière est attendue depuis de nombreuses années par de très nombreuses personnes qui travaillent dans le domaine des soins. Cela ne va pas tout résoudre, mais je pense que c’est quelque chose qui doit être soutenu et je remercie notre collègue Cala d’avoir déposé cet amendement.
J’ai une interrogation sur la forme de cet amendement : « un montant permettant… », cela me paraît extrêmement vague, notamment sachant que le financement se traite plutôt à l’article 12 qu’à l’article 9. Mais il s’agit d’un problème technique. Sur le fond, je vous invite également à refuser cet amendement. Je remercie M. Mocchi d’avoir rappelé l’historique. En effet, c’est ce cher – cet onéreux – M. Maillard qui avait souhaité cette revalorisation ratée et non ciblée. Certes, par la suite, cela a permis un financement de cette fameuse bascule salariale, mais à aucun moment de la convergence.
En revanche, monsieur Mocchi, je réfute vos dires selon lesquels les infirmières n’auraient pas vu d’impact. Depuis ce malheureux arrosage de 2019, le Conseil d’Etat a revu sa cible et a alloué des montants importants sur d’autres mécanismes financiers pour le personnel soignant diplômé. Evidemment, on en veut toujours plus, mais des mesures ont été prises et des montants importants ont été alloués pour le personnel infirmier. Certes, aujourd’hui, la bascule est encore financée aujourd’hui – nous pouvons nous en réjouir – mais comme l’a très bien dit ma collègue Carole Dubois, la convergence – tant financièrement qu’au niveau des équivalences de fonctions – n’est actuellement plus souhaitée unanimement. D’ailleurs, je crois que ma collègue l’a dit, des montants sont investis par la plateforme employeurs, avec l’accord de Mme la conseillère d’Etat, pour donner un mandat à un expert pour proposer une solution adaptée à nos réalités de travail, sachant que si l’HRC – pourtant, membre de la FHV – a aujourd’hui une grille salariale différente, il ne faut pas oublier que cela découle de sa spécificité intercantonale. Certes, l’herbe est toujours plus verte ailleurs, mais je rappelle que nous avons d’autres axes de fidélisation. Aujourd’hui, nous parlons de souplesse des horaires de travail pour une meilleure conciliation de la vie privée et de la vie professionnelle.
Je pense que nous avons en main un projet de décret qui nous permettra de faire des avancées. J’ai de la chance d’avoir des collaborateurs qui œuvrent dans les différents groupes de travail lnvestPro. Je crois que tout le monde veut aller dans le bon sens. Je vous invite à refuser cet amendement, parce qu’un montant supplémentaire ne veut rien dire. Le projet de décret parle de 113 millions. Où va-t-on aller les chercher ? Il faut que les gens soient vraiment ciblés. Je rappelle par ailleurs qu’une partie devrait être financée par les établissements concernés. Mme Dubois en a parlé pour les hôpitaux, les tarifs ne permettent pas ce financement. Quant aux tarifs des EMS, ils sont imposés par l’Etat et ne permettent dès lors pas non plus de prendre en considération ces revalorisations.
Je remercie toutefois le Conseil d’Etat pour les efforts consentis jusqu’à maintenant. Mme Ruiz en a parlé lors de l’entrée en matière, des montants importants ont déjà été mis en jeu dans cette revalorisation. C’est un travail que nous devons faire ensemble : professionnels, faitières, plateforme employeurs, plateforme employés et évidemment le Conseil d’Etat. L’amendement proposé à l’article 9 demande un montant supplémentaire, en tant que présidente de la Commission des finances, j’entends une petite sonnette d’alarme qui me dit que ceci n’est pas assez clair dans le cadre d’un tel projet global. Je vous invite donc à refuser cet amendement.
Je déclare mes intérêts en ma qualité de président de l’Association vaudoise des cliniques privées. Et oui, dans ce canton, il y a aussi un secteur privé qui emploie quelque 3500 collaborateurs et collaboratrices dans le domaine de la santé, pour plus de 200 000 journées d’hospitalisation, un secteur qui subit aussi de plein fouet les problèmes de pénurie de personnel et de fidélisation de ses collaborateurs et collaboratrices. Ce secteur mérite aussi d’être impliqué dans la discussion que nous menons aujourd’hui.
Finalement, l’amendement qui nous est proposé donne raison à l’amendement déposé tout à l’heure par Mme Gross. En effet, le décret concerne un certain nombre de mesures dans le domaine de la formation et de la fidélisation. En ce qui concerne les revalorisations, cela a déjà été dit, deux textes sont actuellement aux mains du Conseil d’Etat et feront l’objet d’un débat devant ce Grand Conseil. Dès lors, l’amendement proposé arrive un peu comme un cheveu dans la soupe – ou comme une sorte de cheval de Troie dans ce texte. A notre avis, ce n’est pas le moment d’en discuter. Encore une fois, on peut aussi discuter des contributions du canton pour ceux qui ne sont pas directement concernés par la CCT-SAN. C’est expliqué en haut de la page 14 du rapport de la commission. Dans les cliniques privées vaudoises, les situations sont disparates. Néanmoins, si le Conseil d’Etat nous alloue des montants pour arriver à rejoindre la CCT-SAN, nous n’y sommes finalement pas opposés. Mais encore une fois, ce n’est pas le débat qui nous occupe aujourd’hui. Pour cette première raison, je vous invite à refuser cet amendement qui le fut d’ailleurs en commission. La deuxième raison pour laquelle il faut refuser cet amendement – Mme Gross a eu raison de la mentionner – c’est parce que cet amendement devrait plutôt figurer à l’article 12 qui, sauf erreur, traite de la contribution financière. L’article 9 parle spécifiquement des mesures de fidélisation. Même si, dans ce texte, nous parlons de revaloriser l’activité professionnelle, il me semble que cet amendement devrait intervenir à l’article 12. De toute manière, je vous invite à refuser cet amendement.
Je prends note que certains milieux patronaux, dans le domaine de la santé du canton de Vaud, ne soutiennent plus la convergence. Je note aussi que les milieux que je fréquente – des syndicats et des associations de collaborateurs – soutiennent toujours massivement cette convergence. Bien sûr, suivant avec qui l’on discute et la perspective, on peut dire que la convergence n’a plus d’intérêt.
Je l’ai dit dans mon propos initial, pour nous, cet amendement est fondamental. Il représente une volonté politique de revaloriser et d’unifier les conditions de travail entre la CCT-SAN et la CCT-HRC, en attendant – dans quelques années ou je ne sais pas dans combien de temps – une convention unique avec le CHUV. Refuser cet amendement donnerait un signal très négatif, cela pérenniserait des inégalités de traitement de salaire qui n’ont plus de raison d’être aujourd’hui. Dès lors, je vous demande vraiment de soutenir cet amendement pour être à la hauteur des ambitions que l’initiative a fait naître au niveau suisse et vaudois, mais aussi de l’ambition qu’a fait naître ce projet InvestPro.
Evidemment, je ne partage pas les propos de mon estimé collègue Vuilleumier. Parce que, dans le fond, le soutien de la convergence n’est pas l’objet fondamental de ce projet de décret. Ce dernier vient d’InvestPro. Malgré le fait que je suis depuis longtemps aux finances, j’ai participé à deux commissions sur trois. Ce texte ne se limite pas à l’argent, on parle de formation, de promotion et de fidélisation. Et je rappelle que, durant les quatre prochaines années, l’Etat va investir 46,8 millions dans ce domaine – cela figure à la page 40 du projet de décret.
Monsieur Cala, je n’ai pas apprécié vos menaces. Vous nous dites « vous devez assumer », mais assumer, c’est aussi être respectueux des citoyennes et des citoyens et ne pas faire n’importe quoi. De quoi parle-t-on aujourd’hui ? Nous parlons d’une convergence – cela figure en page 15 du rapport de commission – nous parlons de 80 millions de francs par année. Sur quatre ans, cela fait un tout petit peu plus que les 46,8 millions qui n’étaient pas uniquement mis dans un montant en lien avec la revalorisation salariale. Je rappelle qu’il y a aussi de la promotion, de la formation et de la fidélisation. Peut-être que Mme Ruiz pourra préciser à nouveau ces montants, mais on nous avait parlé d’un montant de l’ordre de 80 millions pour réaliser une convergence. Je pense que l’amendement de M. Cala n’entre pas dans l’unité de matière de ce texte. L’unité de matière du texte, ce sont ces 90 millions, dont 27 millions qui proviennent de la Confédération. Certes, nous pouvons aller chercher un peu plus d’argent, mais je ne suis pas d’accord de mentir aux gens. Le gouvernement a déjà menti, en 2018, en faisant des annonces crasses sur les montants que l’on mettait à disposition de ces corps de métier. Nous n’avons jamais pu assumer. Ma collègue Gross a raison : nous avons revalorisé les mauvais emplois, les mauvaises fonctions. Aujourd’hui, un cuisinier d’EMS touche un revenu mensuel de 6200 francs. Je vous laisse imaginer combien perçoit un cuisinier dans un restaurant… Cela pose de réels problèmes de concurrence dans les fonctions. Pour ma part, je pense que nous avons aujourd’hui à disposition un montant de 47 millions sur 4 ans, avec des éléments qui sont clairs et précis. Il s’agit tout de même d’une certaine somme. Nous devons respecter ces montants et les allouer au bon endroit et au bon moment. Pour le reste, il s’agit d’un autre texte, monsieur Cala. Je vous remercie de refuser cet amendement.
Je suis très partagé au sujet de cet amendement. Je suis, depuis trois mois, membre du comité stratégique d’Héviva et je partage les préoccupations relatives aux conditions de travail des infirmières et à l’attractivité du métier. Dans un sens, j’ai envie de soutenir cet amendement.
En même temps, lorsque je vois ce que cela va coûter et lorsque j’entends le Conseil d’Etat nous dire qu’il a le projet d’arriver progressivement à une convergence avec la CCT-HRC, cela m’amène à ne pas soutenir cet amendement. J’invite mon groupe et les autres membres de ce Grand Conseil à ne pas le faire, parce que cela amènerait quelque chose qui ne figure pas directement dans le projet d’lnvestPro.
Je crois qu’il ne faut pas uniquement envisager la fidélisation sous l’angle financier. En tant que président d’une fondation, lorsque je parle avec des personnes qui œuvrent dans ce domaine, ce qu’elles désirent, c’est d’avoir une harmonie dans leur travail. Or, l’harmonie, ce n’est pas seulement une question d’argent. Je vous propose de refuser cet amendement et d’aller de l’avant en cherchant des solutions avec le Conseil d’Etat.
Lors de la commission sur le postulat de Mme Jaccoud pour des soins infirmiers forts, j’ai eu l’opportunité de dire – et je déclare mes intérêts, je suis infirmière de formation – qu’il fallait vraiment se concentrer sur les métiers de soins et ne pas se disperser avec d’autres professions, même si ces dernières sont naturellement très importantes pour le fonctionnement d’un hôpital, d’un EMS ou de n’importe quelle institution qui s’occupe de personnes malades. A un moment donné, il faut se concentrer sur les métiers qui connaissent une vraie pénurie. L’intelligence du projet de décret que nous avons devant les yeux aujourd’hui, c’est que le Conseil d’Etat s’est concentré sur les professions dans lesquelles la pénurie est la plus importante.
Quand j’entends que l’on veut amender l’article 9 pour aller vers une convergence avec la CCT-HRC, j’ai envie de savoir qui est précisément concerné. Est-ce uniquement le personnel soignant ? Je n’en suis pas certaine. Par ailleurs, différents montants sont articulés : 113, 115 millions. Il semblerait que les employeurs aient demandé 50 millions. Il y en a 30 qui sont aujourd’hui sur la table devant nous. M. Berthoud vient de parler de 80 millions. La pétition lnvestPro qui a été remise au président ce matin parle de 90 millions par année. Nous assistons à une guerre des chiffres et mener un tel débat en plénière ne permettra pas de faire du bon travail. Je vous appelle à en rester au projet de décret actuel, éventuellement à ouvrir des discussions avec le patronat et les syndicats pour essayer de définir le montant qui serait nécessaire pour améliorer les salaires des infirmières et des ASSC.
En préambule, je déclare mes intérêts : je suis membre du comité régional du Syndicat des services publics (SSP) qui est l’un des principaux signataires de la CCT-SAN. Nous pouvons discuter longtemps de la couleur de l’herbe, mais la question à résoudre est la manière dont nous traitons le personnel qui nous soigne. Or, ce n’est pas la couleur de l’herbe qui nous intéresse aujourd’hui, mais les salaires qui tombent tous les mois et qui devraient permettre à ce personnel de vivre dignement. Je cite le projet de décret : « Le Conseil d’Etat relève que les écarts salariaux entre la CTT-SAN et le CHUV sont importants : 8’000 francs en termes de salaire moyen annuel pour ce qui concerne les hôpitaux de la FHV, 10’000 francs pour les EMS et 5’000 francs pour les soins à domicile. » Je cite toujours le Conseil d’Etat : « Nous pouvons avoir de réelles craintes quant à l’attractivité des institutions de santé vaudoises. »
Aujourd’hui, plutôt que de continuer à fonctionner chaque année avec une mesure qui, certes améliore la situation, mais ne nous donne pas de cap, avec cet amendement, nous avons la possibilité de nous fixer un objectif clair : aligner les salaires du secteur parapublic sur la CCT-SAN. Je me permets d’ajouter que l’Etat a fait – fait et devra continuer à faire – un effort financier important sur la question des salaires. Cela questionne finalement le modèle économique du domaine de la santé, modèle dont le système tarifaire ne permet en réalité pas de payer correctement le personnel. C’est pour cela que nous sommes aujourd’hui en train de discuter de ce modèle. Finalement, nous n’avons pas d’autre choix que de procéder à ces revalorisations. La question consiste à savoir si l’on clarifie aujourd’hui où l’on veut aller – et le rythme devra encore être précisé – ou si l’on continue à proposer des mesures par à-coups. Je vous invite donc à soutenir l’amendement proposé.
Nous sommes dans une situation assez intéressante : le Conseil d’Etat souhaite renforcer l’attrait du système de santé vaudois à travers ce projet de décret, mais en même temps, il maintient des écarts salariaux inacceptables entre le personnel sous le régime de la CCT-SAN en comparaison avec la CCT-HRC. Il est assez évident que ces différences drainent inlassablement le personnel soignant vers le CHUV et l’hôpital Riviera-Chablais. En parallèle à la question des salaires se pose également la question des différences en matière de coût de la vie entre les différents cantons romands. Cet élément, bien que d’importance primordiale pour rendre le système de santé vaudois attractif pour les petites mains, est largement ignoré par la politique gouvernementale. Soyons honnêtes sur la question du pouvoir d’achat du personnel soignant sous régime de la CCT-SAN : pendant que nos cantons voisins courent le 100 mètres, le canton de Vaud est sous narcose, si ce n’est pas en arrêt cardiaque. J’aurais rarement été d’accord avec notre collègue Sébastien Cala, mais il a raison : la demande formulée aujourd’hui n’est pas nouvelle. Cela fait très longtemps que le Conseil d’Etat sait que cette revalorisation salariale va coûter des millions chaque année. Nous n’allons pas y couper. A la fin de l’année 2022, nous aurions eu la possibilité de renvoyer la motion Jessica Jaccoud au Conseil d’Etat et le gouvernement aurait eu l’opportunité de présenter un contre-projet. Au lieu de cela, le texte a été transformé en postulat et a perdu sa substance. Nous repoussons toujours ce dossier de la CCT-SAN aux calendes grecques. Ne pouvant justifier plus longtemps de telles différences salariales, à titre personnel, je maintiens la ligne que je tenais sur la motion Jaccoud en apportant mon soutien à cet amendement.
Je dois dire que j’ai été très contente d’entendre la déclaration de mon préopinant, parce que je pensais dire la même chose – peut-être en d’autres termes. Effectivement, c’est bien gentil de proposer que les institutions qui emploient du personnel dans le parapublic proposent des mesures pour rendre les conditions de travail un peu plus intéressantes, peut-être une harmonie au travail, mais il n’en reste pas moins que ces gens dans ces institutions touchent parfois 800 à 1000 francs de moins par mois que les personnes qui font exactement le même travail, par exemple au CHUV. Comme l’a dit mon collègue, nous ne pouvons pas reporter aux calendes grecques une décision qu’il faudra bien assumer une fois pour toutes, c’est-à-dire d’atteindre cette convergence salariale. C’est un dossier qui revient régulièrement devant nous et nous savons très bien qu’il faut nous en emparer. Il s’agit de personnes qui ont des salaires très modestes et, pour elles, une différence de 800 à 1000 francs est importante. Cette différence provoque régulièrement des départs dans ces institutions. Ce sont de vrais problèmes que les directeurs d’institutions doivent régler régulièrement. Dès lors, je vous invite à suivre l’amendement proposé. Il ne faut pas se voiler la face : il faudra régler la question une fois pour toutes et il ne sert à rien d’en parler chaque année. Nous aurons de nouveau des manifestations. L’énergie mise en œuvre a aussi un coût financier. Comme vous, je suis évidemment préoccupée par les finances de l’Etat, mais ces reports de décision nuisent à toute une profession et à la prise en charge de toute une série de personnes faibles dans ces institutions.
Je vais peut-être répondre de manière désorganisée aux différents éléments qui ont été amenés dans le débat. A juste de titre, Mme Dubois a relevé qu’une étude était en cours. Aujourd’hui, comme elle l’a dit, il n’y a pas d’accord entre les partenaires et, à ce stade, rien n’indique que les membres des différentes faitières accepteront la proposition.
Monsieur Berthoud, vous nous dites que cette proposition n’a pas d’unité de matière, mais il me semble que le salaire fait partie des revalorisations des conditions de travail. Monsieur Berthoud, je ne fais pas de menace, je constate simplement des écarts salariaux très conséquents. Je constate que les cantons limitrophes offrent de meilleures conditions de travail. De mon côté, j’éprouve une réelle inquiétude pour la capacité des institutions de santé à recruter. Je vous laisse regarder combien de postes sont à pourvoir chaque année dans notre canton. Il est toujours plus difficile de trouver du personnel.
Madame Byrne Garelli, vous avez mentionné que vous ne saviez pas qui serait touché par cette convergence HRC. Mon amendement précise qu’il s’agit des professions mentionnées à l’article 3. En l’occurrence, il ne s’agit pas des cuisiniers, mais bien des professions de soins et de santé, des professions qui étaient relevées dans le postulat Jaccoud qui a été accepté ici.
Enfin, monsieur Cardinaux, je dois avouer que j’ai été un peu surpris par votre position. Vous nous dites que le salaire n’est pas l’unique élément, qu’il n’est pas toujours important. Quand on gagne 4000 francs bruts par mois – parfois moins – je vous assure que les sous comptent quand même. Quand on peut gagner 10’000 francs de plus dans le canton voisin, les sous comptent quand même. Quand nous n’arriverons pas à ouvrir des lits dans les EMS, parce que nous n’aurons plus de personnel, les sous compteront quand même.
Quelques réactions : madame Schaller, il n’y a aucun report de décision. Je crois que, chaque année, le Conseil d’Etat négocie tant avec la plateforme employeurs qu’avec la plateforme collaborateurs. D’ailleurs, Mme Ruiz l’a répété : suite à certaines négociations, des montants sont engagés annuellement et je rappelle aussi que les deux dernières indexations – soit le 1,4 et 1,6 – ont été financées à 100% par l’Etat aux entités parapubliques, alors même que ces entités parapubliques ne sont subventionnées qu’à 70%. L’indexation a été financée à 100%, l’écart de 30% a été pris par l’Etat. Dès lors, on ne peut pas non plus dire que ce dernier ne fait rien. Au bout d’un moment, ce sont des accusations que je ne peux plus entendre.
Par ailleurs, je suis surprise par certaines interventions de l’UDC ou du groupe vert’libéral. Je peux comprendre que le modèle que la gauche souhaite à terme est l’étatisation du secteur parapublic, mais n’oublions pas les conséquences financières. Quand tout le monde sera soumis à la LPers, il y aura effectivement une égalisation des salaires avec le CHUV, mais cela aura un certain coût. Je ne parle même pas de LPP et de l’efficience, nous avons vu comment cela s’est passé avec l’AVASAD… mais ce ne sont que mes considérations personnelles.
Enfin, monsieur Cala, le salaire minimum d’une auxiliaire de santé à 100% après bascule n’est pas de 4000 francs, mais de plus de 4200 francs. N’oublions pas cette bascule ; ne vous fiez pas à la grille salariale CCT-SAN, car la bascule est financée – rappelons-le, c’est important.
Tout d’abord, je reviens sur ce que vient de dire notre estimé collègue, M. Cala. Une différence de 4000 à 10’000 francs ? Je ne sais pas où il a vu cela, mais je m’inscris totalement en faux. Par ailleurs, j’aimerais quand même vous rappeler que nous pourrions aussi renverser l’équation et nous demander si les salaires du CHUV ne sont pas trop élevés. Ne devrait-on pas réfléchir d’une autre manière, regarder à un autre niveau ? Avec cet élément, je pense que l’on se battrait peut-être un peu moins.
Je ne peux m’empêcher de rajouter aux propos tenus par M. Cardinaux qu’il faudrait peut-être voir avec les caisses de pensions en primauté de prestations par rapport aux primautés de cotisations, cela représente encore quelques dizaines de millions de francs. Monsieur Eggenberger, je vous connais depuis fort longtemps, je sais que vous rêvez qu’il n’y ait plus que l’Etat qui gère l’ensemble des activités et qu’il n’y ait plus de parapublic. Personnellement, je rêve d’une autre vie professionnelle : je pense que l’argent est effectivement un élément à prendre en compte, mais qu’il y en a d’autres. Dans le domaine de la finance, certains collaborateurs sont d’accord de gagner beaucoup moins d’argent en travaillant dans des établissements plus en adéquation avec leurs convictions personnelles.
Monsieur Cala, je suis désolé, mais vos premiers propos étaient réellement des menaces : « Si, à droite, vous ne faites pas ça, vous verrez bien ce qui va se passer ». Il est difficile de parler d’autre chose que d’une menace. Evidemment, ce n’est pas une menace sous l’angle pénal, mais cela reste toutefois une menace. Maintenant que vous êtes aussi président d’un pôle de santé, je me réjouis de vous voir intégrer, dans le tube de vos finances, le montant en lien avec l’amendement que vous proposez. Evidemment, en revoyant la situation des Prestations d’intérêt général (PIG) et en ne pensant pas qu’on va vous financer ceci par vos PIG, ça va être un petit peu plus compliqué. Je vous propose, de temps en temps, de mettre cette casquette quand vous appuierez sur le bouton.
Par ailleurs, je rappelle qu’il n’y a pas d’unité de matière, parce que l’on parle d’un exposé des motifs de l’ordre de 47 millions et votre proposition sur la revalorisation salariale représente à elle seule 320 millions de francs. Je vous prie de m’excuser, mais c’est comme si l’on annonçait à la population que la terre est plate. (Rires.)
Je vous remercie pour ce débat enflammé sur un sujet qui, en effet, a d’ores et déjà fait l’objet d’un certain nombre d’interventions dans ce Grand Conseil, à chaque fois avec passablement d’arguments de part et d’autre. Cela montre bien le caractère essentiel de cette question des salaires ou en tout cas des mesures qui participent à de bonnes conditions de travail pour le personnel soignant dans notre canton. Beaucoup de choses ont été dites et un certain nombre d’éléments ont aussi pu être amenés dans le cadre des travaux de la commission. Je me permettrai toutefois de préciser certaines choses, puisque depuis les travaux de la commission, le département a aussi pu mettre à jour un certain nombre de chiffres par rapport aux salaires qui sont pratiqués aujourd’hui – en tout cas les salaires des infirmières sans spécialisation par institution et dans les différents secteurs dont il est question aujourd’hui. Je pense qu’il est intéressant que vous entendiez certains de ces chiffres pour revenir sur certains a priori ou simplement pour mesurer la manière dont les écarts dont je vous parlais avant en préambule ont pu être comblés à travers les différentes mesures de revalorisation. Je répète que, depuis 2019, 30 millions ont été injectés par l’Etat pour contribuer à ces revalorisations. Ces 30 millions ne se sont ni évaporés – je vous rassure – ni été enterrés sous le Château, ils ont bel et bien été octroyés aux institutions des différents secteurs concernés par la CCT-SAN pour contribuer concrètement à des revalorisations de salaires dans ce domaine, avec certains effets concrets qui vont peut-être vous surprendre aujourd’hui.
Je ne reviens pas sur les arguments présentés auparavant, nous avons parlé de ce qui s’est passé en 2019, comment cette revalorisation s’est produite – sans doute de manière insuffisamment forte pour les infirmières – et comment, depuis lors, nous avons pu réduire l’écart avec le financement de la fameuse bascule. Aujourd’hui, grâce à ces mesures de revalorisation, nous pouvons observer que le salaire à l’engagement des infirmières sans spécialisation a augmenté en moyenne de 514 francs – soit une augmentation de 9,85% – et de 234 francs en fin de carrière. En commission, les détails de ces chiffres ont été donnés, ils sont retranscrits dans le rapport. Ces chiffres sont maintenant stabilisés sur la base des retours des institutions. Dans le cadre de ce débat, il me tenait à cœur de donner les derniers chiffres en notre possession. Certes, nous observons des écarts de salaires qui peuvent être importants entre le secteur parapublic et le CHUV. En revanche, à l’engagement, vous serez étonné d’apprendre qu’une infirmière sans spécialisation va être moins payée au CHUV qu’elle ne le sera dans le cadre de la CCT-SAN à l’AVASAD, dans un hôpital de la FHV, à l’hôpital Riviera-Chablais ou même dans un EMS. Je ne vais pas entrer davantage dans les détails, mais je tiens ces chiffres à disposition de celles et ceux qui ont des intérêts pour toutes ces questions. En résumé, à son engagement, une infirmière du CHUV recevra moins qu’une infirmière dans les secteurs que je viens d’évoquer.
Par ailleurs, vous serez également étonné d’apprendre – je l’ai été en lisant ce tableau mis à jour – qu’à l’engagement, une infirmière en EMS va toucher plus qu’une infirmière qui travaille dans un CMS, dans un hôpital de la FHV ou même au CHUV. Et ceci, alors même qu’au moment où les premières discussions ont eu lieu dans ce Grand Conseil en lien avec la motion de l’ancien député Vuillemin et des différents postulats qui ont été traités – dont celui de Mme Jaccoud – on mettait en évidence le fait qu’il y avait, au sein même de la CCT-SAN et des différents secteurs d’activité, des différences salariales importantes. En l’occurrence, au moment où l’étude de l’IDHEAP avait été faite – ce qui avait amené les premiers travaux de 2019 – on mettait en évidence le fait que les salaires des infirmières en EMS étaient beaucoup plus bas que les salaires des infirmières dans les autres secteurs que j’évoquais tout à l’heure. Vous le voyez bien, depuis les revalorisations qui ont été faites depuis 2019 – et qui vont continuer à se faire si le décret est voté in fine, évidemment sous réserve que les budgets soient approuvés par le Grand Conseil – les écarts de salaires encore existants vont continuer à se réduire, en tout cas pour le personnel soignant pour lequel ces revalorisations sont prioritaires, non seulement en raison de la pénurie, mais aussi d’une certaine pression du côté de la frontière avec le canton de Genève qui offre des salaires beaucoup plus élevés. Les écarts avec l’hôpital du Valais se sont largement réduits, certains secteurs ont des salaires plus élevés que dans l’hôpital du Valais, contrairement à ce qui a pu être dit. Néanmoins, je l’ai dit en préambule, il est vrai que dans certains secteurs, notamment dans la région de La Côte, nous rencontrons aujourd’hui un certain nombre de difficultés de recrutement, en particulier en lien avec les salaires genevois. Dès lors, il est encore nécessaire de procéder à des revalorisations pour essayer de réduire ces différents écarts.
La convergence – telle que discutée en 2019 et appuyée par le Conseil d’Etat – a un coût très important : à l’époque, on parlait de 115 millions, aujourd’hui on serait proches des 80 millions, mais nous n’avons pas refait le calcul sur la base de la masse salariale qui avait fait l’objet de l’étude HR Bench de l’époque. Par ailleurs, nous n’intégrons pas non plus exactement toutes les revalorisations que je viens d’évoquer. Il faudrait refaire tous les calculs, mais on parle de dizaines de millions, si la convergence devait se faire. Evidemment, cette convergence ne concernerait pas uniquement les professions soignantes, mais l’entier des personnes et des fonctions qui travaillent dans les différentes institutions. Nous poursuivons donc l’objectif que le Conseil d’Etat s’était fixé à l’époque, à savoir tendre pas à pas vers cette convergence, en mettant la priorité sur les professions pour lesquelles la pénurie est la plus importante. Comme vous le voyez très concrètement, ces écarts se réduisent peu à peu. C’est pourquoi sur la base de ces éléments, comme pour les autres amendements, je vous invite à en rester à la version du Conseil d’Etat.
L’amendement Sébastien Cala est refusé par 74 voix contre 60 et 2 abstentions.
Je demande un vote nominal.
Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.
Celles et ceux qui soutiennent l’amendement Sébastien Cala votent oui ; celles et ceux qui le refusent votent non. Les abstentions sont possibles.
Au vote nominal, l’amendement Sébastien Cala est refusé par 76 voix contre 60 et 2 abstentions.
*introduire vote nominal
L’article 9 est accepté avec quelques avis contraires et abstentions.
Art. 10. –
Il s’agit simplement d’un amendement pour adapter le titre de l’article à ce qui est inscrit dans l’article. Effectivement, cet article ne traite pas réellement de la fidélisation, mais plutôt de la sécurisation des soins. A l’unanimité, la commission a accepté cette modification.
« Art. 10. – (titre) :
FidélisationSécurisation des soins »
Retour à l'ordre du jourL’amendement de la commission est accepté à l’unanimité.
L’article 10, amendé, est accepté à l’unanimité.
Les articles 11 à 13 et 14, formule d’exécution, sont acceptés à l’unanimité.
Le projet de décret est adopté en premier débat.
Le deuxième débat interviendra ultérieurement.