24_REP_62 - Réponse du Conseil d'Etat au Grand Conseil à l'interpellation Nicola Di Giulio et consorts - Sismothérapie (ECT) – Que savons-nous sur son utilisation et ses véritables résultats ? (24_INT_32).
Séance du Grand Conseil du mardi 8 octobre 2024, point 28 de l'ordre du jour
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Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourJe tiens à remercier le Conseil d'Etat pour avoir ouvert le dialogue sur la sismothérapie, marquant ainsi une première étape vers une meilleure compréhension et une guérison éclairée. Pour rappel, la sismothérapie, aussi appelée électroconvulsothérapie (ECT), est un traitement médical reconnu pour son efficacité dans plusieurs troubles mentaux graves, notamment certaines formes de dépression résistante, accompagnées de symptômes psychotiques, ainsi que dans les troubles bipolaires sévères. Ce traitement s'avère souvent plus efficace que les médicaments ou autres techniques actuellement disponibles en psychiatrie pour ces indications.
Le Conseil d'Etat, dans sa conclusion, présente l'ECT comme un traitement psychiatrique sûr et bénéfique pour certains patients, en particulier ceux souffrant de troubles résistants aux autres approches. Cependant, la réalité est plus nuancée, car de nombreux professionnels de la santé expriment des réserves à son égard. Les lignes directrices récentes de l'OMS et du Haut-Commissariat des Nations Unies insistent sur la nécessité d'informer pleinement les patients des risques associés à l'ECT, tels que la perte de mémoire ou des lésions cérébrales, ce qui entre en contradiction avec certaines affirmations du Conseil d'Etat.
De plus, la majorité des références utilisées par le Conseil d'Etat datent d'avant 2019, tandis que des analyses plus récentes indiquent que les risques, y compris celui de perte de mémoire permanente et un risque modéré de mortalité, justifient une suspension de l'ECT jusqu'à ce que son efficacité soit prouvée de manière plus solide.
Il est donc primordial d'adopter une approche prudente. Il est nécessaire que les formulaires de consentement transmis aux patients, ainsi que les informations présentes sur les sites des établissements psychiatriques, mentionnent clairement les effets secondaires potentiels, ce qui n'est malheureusement pas toujours le cas aujourd'hui. En conclusion, il est essentiel que les patients soient pleinement informés afin de prendre des décisions éclairées sur leur traitement. C'est pourquoi je vous soumets à nouveau la détermination suivante :
« Le Grand Conseil invite le gouvernement vaudois à mettre en place toutes les mesures nécessaires pour que les formulaires de consentement et les sites des établissements psychiatriques qui administrent l’ECT incluent clairement les effets nocifs potentiels, comme le préconise l’OMS. »
La discussion sur la détermination est ouverte.
Avant de m'exprimer sur la détermination, je souhaiterais répondre à l'interpellation de notre collègue Di Giulio. La sismothérapie a toujours été un sujet très controversé, tant parmi les professionnels de santé que dans l'opinion publique. En tant qu'étudiant en médecine il y a plus de 40 ans, j'ai eu l'occasion d'assister aux dernières séances de sismothérapie encore pratiquées à l'époque, avant que cette méthode ne soit mise de côté pendant plusieurs décennies. Il est apparu que, pour certains patients souffrant de dépressions sévères ou de catatonie, l'ECT restait parfois la seule solution pour les sortir de leur état, offrant ainsi un recours thérapeutique précieux dans des cas très spécifiques.
Ce traitement, bien que controversé, s'est avéré être une solution salutaire pour des patients soigneusement sélectionnés. Bien entendu, ce type de thérapie implique toujours plusieurs séances et une information détaillée est systématiquement fournie, comme c'est le cas avant toute intervention médicale. D'ailleurs, je ne connais aucun traitement médical dépourvu de tout effet secondaire. Dans ces situations particulières, si on laisse ces patients dans leur état, ils sont perdus, complètement déconnectés du monde extérieur. Certes, des troubles de la mémoire, souvent transitoires, peuvent survenir, mais ces effets sont infiniment moins graves que de laisser ces individus dans leur état mélancolique ou catatonique.
Cette résolution appelle à encore plus de formulaires et de bureaucratie. Or, dans le cadre d’un traitement aussi complexe que l’ECT, l'information est déjà communiquée avec une grande précaution. C'est pourquoi je ne soutiendrai pas cette détermination.
Je suis un peu surpris que M. Di Giulio revienne avec une détermination qui reprend plus ou moins les mêmes termes que la précédente qui a été balayée par ce Grand Conseil. On va donc refaire le même débat...
Je remercie M. Vionnet pour les informations qu'il a transmises en complément sur la sismothérapie. Pour ma part, je fais confiance au corps médical pour transmettre les informations nécessaires aux patients et c'est dans ce cadre que je vous encourage à refuser cette détermination.
Comme mes deux préopinants, je vous invite à rejeter cette détermination. Il me semble que le nécessaire est fait en termes d'informations. Avec ce type de détermination, nous risquons de faire de la cogestion ; or, je ne suis pas sûr que ce soit le rôle d'un Grand Conseil de dire quel formulaire doit être rempli ou non.
Comme cela a été mentionné précédemment, et comme le précise la page 2 de la réponse du Conseil d'Etat à cette interpellation, « Avant toute prise en charge, une information détaillée, orale et écrite est dispensée au patient et éventuellement à ses proches. Un consentement éclairé est obtenu du patient ou de ses proches en cas d'incapacité de discernement. Aussi, le patient bénéficie d’une information/évaluation de la part d’un-e médecin anesthésiste. » Nous sommes donc clairement dans des pratiques encadrées et des prises en charge extrêmement spécifiques.
Cette détermination n'est donc pas nécessaire, car ces mesures sont déjà appliquées dans le cadre de l'art médical. De plus, comme cela a été évoqué à propos des prescriptions de psychotropes chez les jeunes, nous sommes ici dans des cas très spécifiques et finalement rares. En comparaison avec le nombre de prescriptions globales, les médecins concernés sont d'autant plus vigilants. Ils engagent des discussions approfondies avec les patients avant de procéder à ce type de traitement. Il n'y a aucun cas de prise en charge de ce genre qui se ferait « dans le dos » des patients, sans que ceux-ci soient pleinement informés des potentiels effets et du déroulement du traitement.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
La détermination Nicola Di Giulio est refusée par 101 voix contre 4 et 13 abstentions.
Ce point de l’ordre du jour est traité.