22_LEG_272 - Exposé des motifs et projet de loi modifiant la loi sur la santé publique du 29 mai 1985 et rapport du Conseil d'Etat au Grand Conseil sur la motion Julien Eggenberger - Pour l'interdiction des "thérapies de conversion" (21_MOT_6) (3e débat).

Séance du Grand Conseil du mardi 29 octobre 2024, point 10 de l'ordre du jour

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Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

Il est passé à la discussion en troisième débat de l’article modifié en deuxième débat.

Article premier. –

Art. 71a. –

Pour rappel, pour cet article 71a, alinéa 5, je vais mettre en opposition la version du deuxième débat – le retour au texte du Conseil d’Etat – et la version du premier débat, avec l’amendement à la lettre c. 

Mme Céline Baux (UDC) —

Tout d’abord, je tiens à remercier les personnes qui ont soutenu ma proposition de revenir au texte du Conseil d’Etat lors du deuxième débat et je vous prie de maintenir ce résultat. Je suppose qu’il n’y a rien à ajouter par rapport aux précédentes discussions. Je voudrais simplement dire à celles et ceux qui désiraient profiter de cette importante votation sur l’interdiction des thérapies de conversion pour y ajouter le thème des transitions de jour que, pour la plupart d’entre nous, lorsque nous serons au point 14 de l’ordre du jour, ce thème ne sera déjà plus dans notre esprit. La loi aura été votée, la page sera tournée, la vie continuera. Mais cette petite lettre c, si elle est rajoutée, fera mal et entraînera des conséquences pour celles et ceux qui sont vraiment concernés, celles et ceux que nous voulons justement protéger par cette modification de la Loi sur la santé publique. Dès lors, je le répète, ne mélangeons pas les thèmes. Je vous remercie de soutenir la version du deuxième débat.

M. Blaise Vionnet (V'L) —

Sans surprise, je vais vous inviter à maintenir l’amendement de la lettre c. Je rappelle quelques raisons de faire ce choix. Le premier vote a été très serré, mais le deuxième vote un peu moins. Je m’adresse spécialement à celles et ceux qui ont changé leur position lors du deuxième vote avec les arguments suivants : premièrement, l’amendement proposé ne s’oppose aucunement aux transitions de genre. Cet amendement ne s’oppose pas à tous celles et ceux qui veulent entrer dans une transition de genre. Deuxièmement, l’amendement proposé ne cherche pas à mettre des restrictions. On aurait pu, par exemple, proposer un âge limite de 16 ou de 18 ans pour entrer dans une transition de genre. Cela n’a pas été proposé. Troisièmement, cet amendement laisse beaucoup de liberté aux personnes en questionnement sur leur identité générique. Il propose uniquement une invitation à la réflexion et à la prudence devant des démarches qui deviendront irréversibles au fur et à mesure de leur avancement. Quatrièmement, les députés de Genève ont accepté un amendement similaire et apparemment leurs débats n’ont pas été aussi nourris que les nôtres. Je ne sais pas si toutes les bonnes choses viennent de Genève, mais pour une fois, nous pourrions peut-être les écouter. Cinquièmement, et ce sera mon dernier argument, je voudrais revenir sur le mal-être psychologique vécu par beaucoup de jeunes en questionnement sur leur identité de genre. C’est aussi en qualité de médecin généraliste que je m’exprime. Il est vrai que le taux de suicide – ou de tentative de suicide – chez les jeunes est élevé en Suisse en comparaison avec les pays voisins. Ce fait est encore plus vrai pour les jeunes qui sont en questionnement sur leur identité de genre. Certains ont pensé qu’en accélérant le processus de transition de genre, on allait résoudre les problèmes psychologiques exprimés par les jeunes. La réalité n’est pas si simple. Certains jeunes qui ont effectué leur transition de genre vont mieux sur le plan psychologique ; c’est un succès et je m’en réjouis. En revanche, un certain nombre de jeunes ne vont pas mieux malgré leur transition de genre. Cette dernière n’a pas résolu leur souffrance psychique, qui est souvent d’origine plurifactorielle : l’identité de genre ne représentant qu’un seul des aspects de leur souffrance. Dès lors, il serait simpliste de chercher à résoudre le problème en disant : « Changez de genre : vous allez guérir de vos problèmes psychologiques et ceux-ci vont disparaître. » 

L’amendement proposé est une invitation – et je le répète, une invitation – à se donner un peu plus de réflexion et à initier une telle démarche de transition avec prudence vu la non-réversibilité du processus. Laissons-nous interpeller par les pays européens qui reviennent en arrière avec des cautèles plus strictes ; ne nous opposons pas à une démarche de réflexion et de prudence. C’est dans l’intérêt de toute une génération qui pourrait le regretter dans 10 ou 20 ans. 

Mme Sylvie Podio (VER) — Rapporteur-trice de minorité

La minorité de la commission vous recommande de maintenir votre vote du deuxième débat en refusant cet amendement. Comme déjà mentionné, cet article est un doublon inutile de la lettre b amendée et, aujourd’hui, nous votons sur l’interdiction des thérapies de conversion et non pas sur les modalités permettant une réassignation de genre. Puisque nous abordons malheureusement cette question, je rappelle que l’accès à un traitement hormonal ou autre mesure médicale de réassignation de genre prend environ deux ans. Ainsi, la pratique et la loi actuelle permettent déjà un espace-temps aux personnes concernées pour expérimenter et se questionner sur leur identité de genre avant d’entreprendre un traitement médical de réassignation de genre. Le principe de précaution est donc déjà garanti. 

L’amendement soumis au Grand Conseil reprend certaines des conditions déjà existantes et obligatoires concernant le consentement libre et éclairé, mais il en omet une partie : ce sont des conditions nécessaires au consentement libre et éclairé, ce qui a comme conséquence d’avoir un effet inverse. Il envoie un signal positif aux thérapeutes qui sont réfractaires aux soins d’affirmation, alors que l’objectif de la loi est d’interdire les thérapies de conversion ainsi que les actions qui s’en rapprochent. Il donne un message négatif aux personnes concernées en remettant en question leur capacité d’autodétermination. Il considère les traitements en lien avec la transidentité comme moins acceptables que tout autre traitement médical ou chirurgical, puisque cette spécificité légale aurait comme conséquence un affaiblissement de l’article 23 de la Loi sur la santé publique traitant du consentement libre et éclairé – et ce, exclusivement pour les actes médicaux de réassignation de genre. Par conséquent, la minorité de La commission vous recommande de maintenir votre vote du deuxième débat.

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

En ma qualité de rapporteur de majorité, comme à titre personnel, je vous encourage à confirmer votre vote du premier débat et donc à accepter l’amendement consistant à ajouter une lettre c à l’alinéa 5. J’ai pris bonne note de tout ce qui a été dit au cours du premier comme du deuxième débat. Personne, dans cet hémicycle, ne conteste le fait qu’il faille interdire les pratiques visant à modifier ou réprimer l’orientation sexuelle ou l’identité de genre d’autrui. Ce sont essentiellement les alinéas 1 à 3 qui le prévoient. Nous les avons d’ailleurs clairement acceptées. Néanmoins, il nous faut lire attentivement la loi proposée. L’alinéa 5 fixe ce qui n’est pas concerné par les alinéas 1 à 3, donc ce qui n’est pas interdit. La lettre c proposée par la commission dit uniquement qu’il ne serait pas interdit d’inviter une personne qui s’interroge à la prudence et à la réflexion. Cet amendement ajoute que cette invitation à la réflexion doit se faire en respectant l’autodétermination de la personne. En refusant cet amendement, vous rendez illégal, donc punissable, le fait d’inviter une personne qui s’interroge à la prudence et à la réflexion, tout en respectant son autodétermination. Cet alinéa ne force donc pas à la réflexion, mais il ne punit simplement pas le fait de l’y inviter. Dans ce sens, je maintiens que la proposition de la majorité de la commission est bonne et qu’il faut accepter l’amendement consistant à ajouter cette lettre c. Je vous invite donc à suivre votre vote du premier débat.

M. Nicolas Suter (PLR) —

Permettez-moi de soutenir le rapporteur de majorité. On nous a dit que cet amendement était redondant, qu’il n’était pas utile. Mais en attendant, pour un amendement qui est redondant et pas utile, je n’ai jamais vu une telle effervescence de messages. J’ai été contacté de part et d’autre, même après le deuxième débat qui, il faut l’avouer, était une bérézina, puisque nombre de députés, notamment de mon groupe, ont changé d’avis. Après le deuxième débat – et alors que le troisième débat semble plié – nous recevons encore des messages. Dès lors, je pense que cet amendement et toute cette loi ont du sens. C’est pour cela que j’ai accepté l’entrée en matière et que j’accepterai certainement la loi dans son ensemble. Cette loi est faite pour protéger des hommes et des femmes qui, à un moment donné dans leur vie, ont peut-être besoin de protection. Vous et moi, chacun d’entre nous, pouvons passer par un moment plus difficile. Demander un peu de prudence, un peu de réflexion va précisément dans le sens de cette loi. Pour cette raison, je vous recommande la version issue du premier débat.

M. Julien Eggenberger (SOC) —

J’essaie de rester optimiste et de ne pas céder à l’agacement, mais c’est difficile de ne pas y céder, en voyant pour la troisième fois ce débat longuement accaparé par quelques députés qui s’évertuent à faire de ce débat ce qu’il n’est pas. Néanmoins, comme ce que nous nous apprêtons à faire est très important, je me permets très brièvement de vous inviter – comme motionnaire, mais aussi au nom du groupe socialiste – à en rester à la sagesse du deuxième débat, qui est aussi celle du Conseil d’Etat.

M. David Vogel (V'L) —

Monsieur Eggenberger, je conçois bien qu’il ne faut pas faire de ce débat ce qu’il n’est pas. Néanmoins, je vous signale que c’est votre conseillère d’Etat qui a lié les deux sujets qui, à mon avis, n’avaient pas grand-chose à voir entre eux. Pourquoi les a-elle liés ? Je ne sais pas. 

J’avais déjà eu l’occasion d’évoquer le problème que cela pourrait poser aux enseignants. Comme l’a très bien dit le rapporteur de majorité, il s’agit de ne pas condamner un enseignant ou une enseignante qui appellerait – je rappelle que c’est le terme mentionné à la lettre c – un élève, s’il lui pose la question, à faire preuve de réflexion et de prudence. En l’occurrence, l’idée de défendre l’intérêt général d’un enfant ou d’un ado de 11, 12, 13, 14 ou 15 ans n’est pas d’apporter une réponse unique à une problématique multifactorielle. Or, la loi qui est proposée sans cet amendement – en plus de la décision 187 mise en place par Mme Amarelle en son temps – demande grosso modo de pencher toujours dans la même direction. Je vous cite un extrait de la décision 187 qui porte sur le sujet de la transition de genre : « Toute personne qui demande le changement de genre exprimé par un élève implique la procédure suivante : aller systématiquement dans le sens de la demande ». Je ne dis pas qu’il ne faut pas l’écouter, mais qu’il faut faire preuve de prudence et de réflexion. Dans la décision 187, une association est mise en référence – l’association Agnodice – pour répondre aux questions des professionnels. Je vous laisse aller consulter le site cette association : c’est une association militante, transaffirmative, qui pense que la seule décision qui vaut la peine d’être prise est la transition immédiate, une décision sur laquelle de nombreuses études et de nombreux pays sont en train de revenir. Dès lors, afin de protéger les enfants contre des décisions hâtives et parce que je trouve dommage d’interdire de prendre le temps de la réflexion pour des décisions importantes, je vous encourage à soutenir la commission dans sa majorité et à préférer la version du premier débat.

Mme Géraldine Dubuis (VER) —

Au nom des Verts, je vous enjoins à suivre le vote du deuxième débat et à rejeter cet amendement. Mes collègues et moi-même avions exposé les raisons pour lesquelles nous considérions que l’amendement voulu par la majorité de la commission n’allait pas dans le sens escompté. Je me permets de rappeler quelques petits éléments : tout d’abord, rappelons que la volonté aujourd’hui est de discuter de thérapie de conversion et non pas de transition. Nous envoyons véritablement un signal aux personnes concernées. En effet, comme nombre d’entre vous, j’ai été contactée par des personnes. J’aurais peut-être dû déclarer mes intérêts : je suis membre du comité du Pôle Agression et Violence, une association spécialisée dans l’aide aux victimes de violences liées à l’orientation sexuelle. A ce titre, j’ai reçu de nombreux témoignages de personnes qui ont vécu des épisodes de thérapie de conversion ou des difficultés en lien avec ce problème. Il est donc important, en tant que législateurs, que nous soyons – et je vous y invite – prudents et à l’écoute des gens du terrain. Nous devons aussi prendre en considération que les moments difficiles – qui ont été dénoncés précédemment dans une prise de parole – sont liés à ces thérapies de conversion ; c’est ce que vivent des personnes qui, actuellement, ne sont pas bien dans leur être intérieur, dans leur intime profond. Nous ne devons pas aller à l’encontre des possibilités qui leur seraient offertes pour accéder à des soins spécifiques qui leur permettraient d’être mieux avec elles-mêmes. Comme l’a dit l’un de mes prédécesseurs, diminuer le taux alarmant de tentatives de suicide, dont la population trans est malheureusement victime, devrait être une de nos priorités en tant que législateurs. 

Aujourd’hui et lors du dernier débat, je pense que nous avons pu envoyer un signal fort, un signal qui dit qu’en tant que législateurs, nous prenons en considération la nécessité de dire non à ces thérapies de conversion et de faire confiance aux personnes qui sont concernées, en particulier aux personnes trans, pour faire preuve de la prudence qui leur est nécessaire à elles-mêmes pour pouvoir entreprendre les démarches qui feront d’elles et eux des gens mieux dans leur vie, mieux dans leur peau.

M. Jacques-André Haury (V'L) —

Il y a une chose, dans les propos de Mme la rapportrice de minorité, que je ne peux pas laisser passer. Madame Podio, vous dites qu’accepter cet amendement, c’est faire une différence avec d’autres actes médicaux ou d’autres actes chirurgicaux. Eh bien, oui, madame : le médecin fait la différence. Le médecin est appelé à soigner les organes malades, il est appelé à corriger les maladies des accidents, il est éventuellement amené à retirer des organes malades, notamment cancéreux. Mais il n’a pas pour usage dans sa pratique de mutiler, c’est-à-dire d’enlever à des adolescents des organes sains, d’enlever à des femmes un utérus sain, d’enlever à de jeunes garçons un pénis et des testicules sains. C’est une attitude médicale profondément différente du reste de la pratique médicale. Alors, excusez-moi, madame Podio, mais il est normal que le médecin – et peut-être aussi le monde politique – établisse une différence entre une médecine qui est presque de la psychochirurgie – c’est-à-dire un traitement chirurgical ou médical pour un problème d’ordre psychique – et le reste de sa pratique. Je ne suis pas du tout transphobe : j’ai été l’ami de M. Jean-Michel Henry, qui fut l’un des premiers hommes à faire une transition de genre, il y a déjà pas mal d’années. Cela a été médiatisé : il est devenu Anne-Daphné Henry. Nous étions amis par le service militaire. J’ai aussi soigné, avec beaucoup de bienveillance, des patients qui ont fait une transition de genre. Dans la transphobie, il y a le mot phobie : ceux qui me font peur, ce sont mes confrères qui, dans une certaine mesure, pratiquent à la légère une médecine qui est contraire aux principes hippocratiques.

M. Jacques-André Haury (V'L) —

Il y a une chose, dans les propos de Mme la rapportrice de minorité, que je ne peux pas laisser passer. Madame Podio, vous dites qu’accepter cet amendement, c’est faire une différence avec d’autres actes médicaux ou d’autres actes chirurgicaux. Eh bien, oui, madame : le médecin fait la différence. Le médecin est appelé à soigner les organes malades, il est appelé à corriger les maladies et les accidents, il est éventuellement amené à retirer des organes malades, notamment cancéreux. Mais il n’a pas pour usage dans sa pratique de mutiler, c’est-à-dire d’enlever à des adolescents des organes sains, d’enlever à des femmes un utérus sain, d’enlever à de jeunes garçons un pénis et des testicules sains. C’est une attitude médicale profondément différente du reste de la pratique médicale. Alors, excusez-moi, madame Podio, mais il est normal que le médecin – et peut-être aussi le monde politique – établisse une différence entre une médecine qui est presque de la psychochirurgie – c’est-à-dire un traitement chirurgical ou médical pour un problème d’ordre psychique – et le reste de sa pratique. Je ne suis pas du tout transphobe : j’ai été l’ami de M. Jean-Michel Henry, qui fut l’un des premiers hommes à faire une transition de genre, il y a déjà pas mal d’années. Cela a été médiatisé : il est devenu Anne-Daphné Henry. Nous étions amis par le service militaire. J’ai aussi soigné, avec beaucoup de bienveillance, des patients qui ont fait une transition de genre. Dans la transphobie, il y a le mot phobie : ceux qui me font peur, ce sont mes confrères qui, dans une certaine mesure, pratiquent à la légère une médecine qui est contraire aux principes hippocratiques.

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

L’article 71a est accepté tel qu’admis en deuxième débat par 69 voix contre 60 et 5 abstentions.

M. François Cardinaux (PLR) —

Je souhaiterais un vote nominal.

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui soutiennent la version du deuxième débat votent oui ; celles et ceux qui préfèrent la version du premier débat votent non. Les abstentions sont possibles. 

Au vote nominal, l’article 71a est accepté tel qu’admis en deuxième débat par 71 voix contre 61 et 5 abstentions.

*insérer vote nominal

Le projet de loi est adopté en troisième débat.

La discussion générale est ouverte.

M. Sébastien Cala (SOC) —

ous voici arrivés au terme d’un long débat entamé avant la pause estivale. Le groupe socialiste se réjouit globalement de l’accueil favorable qu’a reçu ce projet de loi, même si nous déplorons que les échanges aient été malheureusement pollués par les questions de réaffirmation de genre, un élément qui n’était pas au cœur du projet de loi et qui est extérieur à la modification légale attendue par la motion Eggenberger. Ce texte représente une avancée significative pour les droits humains dans notre canton. Tenter de modifier l’orientation affective et sexuelle d’une personne, empêcher une personne de vivre son orientation affective et sexuelle relève en effet d’une forme de répression particulièrement violente et grave. Nous ne pouvons que nous réjouir que l’Etat mette un terme à ces pratiques et protège enfin correctement la dignité, les droits et les libertés de chacune et chacun. Comme je l’ai mentionné en ouverture de débat, aimer n’est pas un tort, aimer ne se soigne pas, aimer ne se contrôle pas, aimer c’est la liberté et ce projet de loi l’acte pour l’ensemble de notre population. Le groupe socialiste soutiendra unanimement ce projet de loi.

Mme Rebecca Joly (VER) —

En effet, nous voici arrivés au terme de ce débat et au vote final. Je dois vous dire que je suis assez émue aujourd’hui de l’acte que nous allons faire. (Bruit dans la salle.) Vous pouvez râler à droite, mais je trouve que c’est un moment émouvant. Je dois vous avouer que, parfois dans cet hémicycle, on se demande vraiment si ce que l’on fait a des impacts. Aujourd’hui, je crois que l’on peut vraiment dire que ce vote aura un impact sur de nombreuses personnes dans ce canton. Je pense que ce vote aura un impact non seulement symbolique très fort, puisqu’aujourd’hui – je l’espère à une écrasante majorité, voire à l’unanimité – nous allons voter une loi qui interdit une pratique qui est assimilée à de la torture. Aujourd’hui, nous allons formellement interdire une pratique qui met en péril la santé physique et psychique de beaucoup de jeunes et de beaucoup de personnes dans ce canton et dans ce pays. Aujourd’hui, nous allons envoyer un signal fort aux personnes concernées par des thérapies de conversion : effectivement, leur orientation affective et sexuelle, leur identité de genre ne constitue pas un crime et elles ont le droit d’être protégées dans leur personnalité. Je crois que ce geste est fort et qu’il va changer la vie de certaines personnes, puisque ces pratiques étant interdites, nous aurons une base légale, un outil juridique pour prendre éventuellement des sanctions contre les personnes qui sont à l’origine de telles pratiques. Je crois que c’est aussi un geste qui pourra changer la vie de centaines de personnes à l’avenir, dans ce canton. Aujourd’hui, c’est donc avec une certaine émotion que je vous invite, au nom des Verts unanimes, à accepter ce projet en vote final et à interdire les thérapies de conversion dans notre canton.

M. François Cardinaux (PLR) —

J’ai peut-être un peu de peine à comprendre tout ce qui se dit, mais une chose me paraît évidente : le texte était clair, mais tout d’un coup, on veut lui ajouter de faux garde-fous, des éléments qui n’ont aucune logique à figurer dans cette loi. Il faut en rester au texte que nous avons choisi la semaine dernière, comme le préconise M. Mojon, le rapporteur de la majorité de la commission. (Réactions dans la salle.)

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

Monsieur le député, je vous rappelle que nous en sommes à la discussion finale.

M. Julien Eggenberger (SOC) —

Ce n’est pas tous les jours qu’une motion arrive en débat final avec un projet de loi. Même si nous nous sommes un peu écharpés sur un aspect particulier, je relève avec satisfaction que ce projet de loi a été unanimement soutenu sur son principe par l’ensemble des personnes qui sont exprimées lors des différents débats. C’est donc avec une certaine émotion que je prends la parole dans ce débat final. Cette loi – que nous allons adopter aujourd’hui, j’en suis sûr – est un signal fort à l’intention des personnes LGBTIQ+ : elles ont le droit de vivre comme elles sont, à l’abri de l’emprise de celles et ceux qui leur refusent le droit à la différence, c’est aussi le signal qu’il n’y a rien à guérir en matière d’orientation affective et sexuelle ou d’identité de genre, mais un soutien à concrétiser. Je vous remercie d’avance pour le soutien que vous apporterez à ce projet de loi.

Mme Céline Misiego (EP) —

C’est aussi avec une certaine émotion que je prends la parole aujourd’hui. Si nous écoutons les voix de celles et ceux qui ont souffert de ces thérapies de conversion, qu’entendons-nous ? « C’était une démarche volontaire de ma part de suivre ces thérapies. J’ai vite compris que l’homosexualité n’était pas acceptée par ma famille, par mes amis, par mon église et que pour avoir ma place dans ce monde, je devais changer. » Dans le témoignage que je viens de vous lire, relayé par la RTS, la personne raconte comment, désespérée, elle a supplié Dieu de la guérir de son homosexualité. Elle décrit une souffrance si profonde, si accablante, qu’elle a cherché refuge dans la prière, dans l’espoir d’un miracle. Elle dit : « C’était une démarche volontaire de ma part de suivre ces thérapies. J’ai vite compris que l’homosexualité n’était pas acceptée par ma famille, par mes amis, par mon église et que pour avoir ma place dans ce monde, je devais changer. » Ce témoignage reflète une douleur partagée par tant d’autres, une douleur née non pas de son orientation sexuelle, non pas de son identité de genre, mais du rejet, de l’incompréhension, de la haine de son entourage et de la société qu’elle connaît. Et c’est bien cela qui rend ces personnes malades. Je remercie la majorité du Grand Conseil de prendre en compte la souffrance de ces personnes et son refus de les stigmatiser.

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

La discussion est close.

Le projet de loi est adopté définitivement par 104 voix contre 7 et 27 abstentions.

Rapport du Conseil d’Etat au Grand Conseil sur la motion Julien Eggenberger - Pour l’interdiction des "thérapies de conversion" (21_MOT_6)

Décision du Grand Conseil après rapports de la commission

M. Gérard Mojon (PLR) — Rapporteur-trice de majorité

A l’unanimité, la commission vous recommande d’accepter le rapport du Conseil d’Etat.

M. Jean-François Thuillard (UDC) —

La discussion n’est pas utilisée.

Le rapport du Conseil d’Etat est approuvé avec quelques abstentions.

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