On connaît la fuite du dernier bailli bernois quittant le château Saint-Maire, à Lausanne, dans la nuit du 23 au 24 janvier 1798. Pourtant, dès son départ, les Vaudois d’alors n’ont pas tardé et ont rapidement organisé nouveaux pouvoirs et administration. L’Assemblée provisoire – constituée d’anciens représentants des villes – met en place un gouvernement de transition.
Premier vote vaudois
Peu après, un projet de constitution est rédigé sur le modèle français et soumis au vote le 15 février 1798. C’est une première pour les Vaudois. Seuls les communiants hommes (donc dès 16 ans) de la paroisse étaient appelés à se prononcer. Les pasteurs donnèrent en lecture le texte de la constitution aux paroissiens, explique Danièle Tosato-Rigo, professeure d’histoire moderne à l’Université de Lausanne. Tous ne comprirent pas le texte. Certains demandèrent un délai, d’autres décidèrent de faire confiance, comme en garde la trace le procès-verbal de la votation à Sergey : «Nous soussigné au nom de l’honorable Commune de Sergey déclarons que nous ne sommes pas en état de comprendre la Nouvelle Constitution, que l’on nous présente, mais comme nous devons croire que l’on ne veut que notre avantage commun dans cet espoir nous acceptons et nous signons.»
Nouvelles autorités vaudoises
Le deuxième vote vaudois concerne l’élection de la Chambre administrative (autorité exécutive). Les citoyens de plus de vingt ans élisent des assemblées primaires, qui à leur tour élisent un corps électoral. Ce dernier est chargé de l’élection. La Chambre administrative est composée de cinq membres (des patriotes modérés) qui s’occupent des questions relatives à l’agriculture, à l’économie publique, aux finances, aux travaux, aux cultes, à l’instruction et à la culture. Elle est placée sous l’autorité du préfet (représentant du pouvoir central), qui en nomme le président et peut participer aux séances avec voix consultative. Le Directoire (gouvernement central) avait le droit de destituer la Chambre administrative. À la suite de son élection, cette dernière décide de préserver les institutions locales ; seuls les noms sont changés. Elle siégera pour la première fois le 31 mars 1798 au château Saint-Maire à Lausanne.
Vers un système confédéral
Une période d’instabilité suivra cette «révolution». Jusqu’à ce que la République helvétique signe l’acte de médiation en 1803. Cet acte dote la Suisse d’une nouvelle constitution et l’organise en une confédération d’États. Le 14 avril, autre date significative pour les Vaudois, le Canton du Léman accède au rang d’État confédéral et devient officiellement le canton de Vaud.
D’après le chapitre «Les Vaudois s’éveillent à la liberté», par Philippe Bastide, historien et responsable du Bulletin du Grand Conseil, dans Histoire vaudoise (Infolio, 2015).