21_LEG_9 - EMPL sur le transport de sécurité de biens ou de valeurs (1er débat).
Séance du Grand Conseil du mardi 12 octobre 2021, point 20 de l'ordre du jour
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La commission ad hoc chargée d’examiner l’exposé des motifs et projet de loi sur le transport de sécurité de biens ou de valeurs (21_LEG_9) s’est réunie le lundi 10 mai 2021 de 13h30 à 15h30 et le mardi 8 juin 2021 de 7h30 à 8h45 au Parlement à Lausanne.
En 2019, à la suite de plusieurs attaques de fourgons de transport de fonds dans le canton de Vaud et en Suisse latine, le Conseil d’État a adopté un arrêté imposant des mesures aux entreprises de transport de fonds : véhicule avec un blindage lourd, dispositif rendant sans valeur le contenu en cas d’effraction ou d’agression, minimum de deux équipiers par véhicule chauffeur compris, transport entre 5h00 et 22h00, valeur maximale transportée par véhicule de dix millions de francs suisses. L’arrêté repose sur la clause générale de la police qui peut prendre des mesures particulières lorsque l’ordre public est en jeu, et doit être remplacé par une loi. C’est l’objet de cet exposé des motif et projet de loi, qui reprend dans les grandes lignes le contenu de l’arrêté. De plus, l’expérience acquise depuis la mise en vigueur de l’arrêté a permis d’apporter dans la loi une meilleure adéquation entre règles et nécessité des différents types de transports. Les mesures résultent de nombreuses discussions avec les entreprises de sécurité. La loi vise à limiter l’attractivité des transports de fonds et à préserver la sécurité de ces transports, ainsi que la sécurité publique.
II n’y a pas actuellement de volonté de légiférer sur le plan fédéral. Le Conseil fédéral n’est pas entré en matière sur les motions en lien avec cette question et aucune intervention parlementaire n’est pendante. Modifier le concordat romand de 1996 sur les entreprises de sécurité, qui réglemente cette activité économique, prendrait plusieurs années, ce qui ne répondrait pas à la problématique sécuritaire. La Suisse alémanique n’ayant pas non plus la volonté de légiférer et réglementer l’activité des sociétés privées de transport, il serait très difficile de s’accorder sur le plan suisse.
Lors de la première séance de commission, trois représentants de l’Association des entreprises suisses de service de sécurité (AESS) ont été auditionnés. Ils ont fait part de leurs expériences, questions et interrogations concernant l’exercice de leur métier dans des conditions qui leur permettent d’assurer la sécurité de leur mission ainsi que la viabilité économique de leurs entreprises. Le 2 juin 2021, par courrier, l’AESS a transmis à la commission sa prise de position concernant l’exposé des motifs et projet de loi. Depuis la séance du 10 mai 2021, des solutions permettant de garantir la continuité de l’approvisionnement et de la disponibilité en argent liquide ont été trouvées, conformément aux dispositions prévues à l’article 3 pour le transport de centre à centre. Les entreprises de services de sécurité privée acceptent donc le projet de loi dans son intégralité et sans modifications.
Les votes de la commission sur les articles de loi proposés au Conseil d’Etat sont les suivants : les articles 1 et 2 du projet de loi sont acceptés à l’unanimité, sans commentaire ; l’article 3 du projet de loi est accepté avec 1 abstention ; les articles 4 et 5 du projet de loi sont acceptés à l’unanimité, sans commentaire ; les articles 6 à 12 sont acceptés à l’unanimité. Au vote final, le projet de loi est accepté à l’unanimité. C’est également à l’unanimité que la commission recommande au Grand Conseil d’entrer en matière sur ce projet de loi. Je vous invite donc à confirmer les votes de la commission sur ce projet de loi qui vise à limiter l’activité des transports de fonds et à préserver la sécurité de ces transports ainsi que la sécurité publique.
La discussion sur l’entrée en matière est ouverte.
Suite aux attaques récurrentes de fourgons de transports de fonds, le Conseil d’Etat a adopté un décret pour assurer leur sécurité. Il s’agit aujourd’hui de passer à l’étape suivante, soit d’adopter un projet de loi pour pérenniser la sécurité de ce genre de transport. Ce projet de loi a fait l’objet de nombreuses discussions préalables entre le département, la Police cantonale et les représentants de la branche. Un consensus a été trouvé. De même, les autres cantons ont pu exprimer des souhaits qui ont été pris en compte. Vu l’importance du sujet, la commission a reçu toutes les informations nécessaires et a auditionné des professionnels de la branche, ce qui lui permet de vous recommander, à l’unanimité, l’entrée en matière sur cette loi et son adoption. Comme le groupe PLR, je vous recommande d’en faire de même.
Le groupe socialiste soutient cet exposé des motifs et projet de loi.
Je déclare mes intérêts : jusqu’à l’hiver dernier, j’étais responsable de la branche sécurité au sein du syndicat Unia, lequel est signataire de la convention collective qui couvre notamment les convoyeurs de fonds et c’est à ce titre que je souhaite intervenir. Comme cela est indiqué, il s’agit d’une problématique de sécurité publique, mais aussi de personnel et d’intégrité physique des collaboratrices et collaborateurs des entreprises de convoyage de fonds. A ce titre, malgré l’attention que la commission a porté à cette audition et le fait que les employeurs de la branche aient été consultés, je tiens à souligner qu’il y a aussi du personnel de convoyage à disposition pour témoigner et pour expliquer leurs conditions de travail. Notre Grand Conseil serait bien inspiré de les entendre.
L’exposé des motifs et projet de loi mentionne l’absence d’intervention pendante au niveau fédéral. Il s’agissait peut-être d’une rédaction prémonitoire, car il se trouve que notre collègue Nicolas Rochat Fernandez en a déposé une, reprise par la conseillère nationale Brigitte Crottaz, et qui demandait un cadre légal fédéral pour le convoyage de fonds. Malheureusement, à l’issue de la dernière session, cette motion a été refusée, au même titre que les précédentes demandes de législation sur l’ensemble des services de sécurité. Nos autorités, tant exécutives que législatives, ne peuvent que dénoncer le caractère irresponsable des options prises par la Confédération en la matière. J’aimerais souligner l’évolution positive de ne pas avoir limité une législation sur le convoyage de fonds qui se contenterait de savoir si les véhicules peuvent circuler ou pas la nuit, ce qui était exprimé au départ dans une proposition patronale, reprise par d’autres bords politiques et qui ne couvrait pas l’ensemble des mesures sécuritaires nécessaires pour assurer la protection du convoyage de fonds. L’exposé des motifs et projet de loi tel que proposé prévoit ainsi différents dispositifs techniques mais aussi des moyens en termes de dotation de personnel et de formation qu’il serait utile, à l’avenir, de développer.
Le Conseil d’Etat va à pas feutrés sur l’article 8 de la loi, soit le concept de sécurité des entreprises. En effet, il veut d’abord contrôler l’existence d’un concept de sécurité, mais on sent qu’il n’est pas encore prêt à édicter des normes strictes. Dans cette perspective, nous devons tous l’encourager à être attentif à ces dispositions car, dans la branche, seulement 20 heures de formation de base sont prévues. Une fois que vous avez effectué 20 heures de formation, vous pouvez déjà effectuer du convoyage de fonds. Face au défi sécuritaire auquel nous sommes confrontés, ces dispositions sont insuffisantes et, malgré les demandes syndicales, les partenaires sociaux ne sont pas parvenus à se mettre d’accord sur une amélioration de la situation. Dans un tel contexte, c’est bien au concordat, respectivement au canton de Vaud, de fixer des critères qui soient davantage exigeants pour assurer la sécurité de toutes et tous.
Un deuxième aspect du travail devrait être pris en compte, il s’agit de celui de la dotation en personnel. Bien qu’elle soit évoquée pour certaines tâches, la dotation paraît limitée. D’autres volets tels que la structure des locaux constituent actuellement des failles dans la sécurité et la chaîne de livraison des fonds. Ces éléments ne font pas explicitement partie de cet exposé des motifs et projet de loi mais pourraient être inclus sous le concept de sécurité de l’entreprise. Enfin et dernier point pas des moindres, le respect de la convention collective : si les entreprises sont en infractions répétées avec cette dernière, à savoir qu’elle paierait par exemple des salariés à des salaires inférieurs à 4000 francs, il va de soi que cela engendre aussi un risque de corruption et que ces éléments mériteraient d’être contrôlés dans le concept de sécurité des entreprises. Sous les réserves que j’ai émises et en espérant constater des développements futurs de cette disposition légale, je salue le côté précurseur, même s’il est incomplet, de notre canton, en soulignant encore une fois que tous les pays qui nous entourent, sans exception, disposent de législations bien plus sévères que celle dont notre canton prévoit de se doter.
Pour faire bref, le groupe des Vertes et Verts vaudois salue un projet de loi qui est absolument nécessaire dans un domaine que l’on sait hautement problématique et qui a donné lieu à plusieurs incidents dramatiques et qui auraient pu l’être davantage. A ce titre, il était véritablement essentiel que le Conseil d’Etat vienne avec un projet de loi permettant à la fois de tenir compte des intérêts des entreprises et surtout des travailleuses et travailleurs concernés, et à la fois de la sécurité de la population. Sur ce point, le projet du Conseil d’Etat est excellent. L’unanimité de la commission le montre : c’est un projet nécessaire, actuel et qui permettra, on l’espère, de répondre aux risques de sécurité émanant au transport de fonds. A ce titre, les Vertes et Verts vaudois voteront en faveur de ce projet de loi et remercient le Conseil d’Etat pour la qualité de ce dernier.
Je remercie la commission pour son travail et pour toutes les questions qui nous ont été posées. Je remercie également l’analyse faite par les députés ayant parlé de ce projet de loi. Il est vrai que la Confédération se décharge sur les cantons de cette grave question du transport de fonds. La Confédération ne veut en outre pas prendre de mesures, raison pour laquelle, et au vu de ce qui s’est passé dans le canton de Vaud, nous avons d’abord été obligés de prononcer cet arrêté urgent qui se concrétise aujourd’hui par une loi. Il s’agit du processus « arrêté urgent puis concrétisation par une loi » et je remercie d’ores et déjà le plénum de soutenir ce projet de loi.
Concernant les divers éléments soutenus par le député Arnaud Bouverat, il est clair que nous devrons fixer ces critères de sécurité par la suite. Pour les salaires, nous sommes limités par la convention collective. Ce projet de loi constitue un compromis qui tient compte des contraintes liées à l’activité de transport de biens et de valeurs nécessaires au bon fonctionnement de l’économie, de la société et surtout qui introduit des mesures de sécurité renforcées. Avec les mesures introduites d’abord dans l’arrêté et, j’espère, dans la loi, l’activité criminelle a diminué. Toutefois, et j’en conviens avec vous, il faudra poser des critères aux plans de sécurité mais cela se fera par la suite. Pour la convention collective, nous ne pouvons pas aller au-delà de cette dernière. J’entends vos remarques et il nous importe également que le personnel soit correctement rémunéré et bien pris en charge car, comme vous l’avez dit : un personnel mal rémunéré, mal pris en charge et qui ne se sent pas en sécurité peut être soumis à la corruption.
Je vous remercie pour vos appréciations et pour votre soutien. Comme vous avez pu le constater durant ces derniers mois, nous avons réussi à déjouer deux attaques et, pour l’instant, nous sommes dans une situation beaucoup plus calme et c’est bien grâce aux mesures que nous avons prises.
La discussion est close.
L’entrée en matière est admise à l’unanimité.
Le projet de loi est adopté en premier débat.
Etant donné le vote du Grand Conseil, je demande l’application de l’article 100 de la Loi sur le Grand Conseil (LGC), soit le deuxième débat immédiat.
Retour à l'ordre du jourLe deuxième débat immédiat est admis à la majorité des trois quarts (105 voix contre 5).
Deuxième débat
Le projet de loi est adopté en deuxième débat et définitivement par 120 voix.