21_INT_149 - Interpellation Muriel Thalmann et consorts - Des remises d’impôts et des plans de paiement accordés au compte-gouttes, dans quel intérêt ? (Développement).

Séance du Grand Conseil du mardi 23 novembre 2021, point 8 de l'ordre du jour

Texte déposé

L’administration cantonale peut accorder des remises d’impôt ou des plans de paiement lorsque les contribuables rencontrent des difficultés à rembourser leur dette fiscale.

 

Ainsi l’art. 231 al. 1 LI/VD prévoit que :

L’Administration cantonale des impôts peut accorder une remise totale ou partielle des impôts, intérêts compensatoires et intérêts de retard, rappels d’impôts et amendes, lorsque leur paiement intégral frapperait trop lourdement le contribuable en raison de pertes importantes ou de tous autres motifs graves”.

 

Deux conditions cumulatives sont posées à une éventuelle remise des impôts cantonaux et cantonaux (ICC) (art. 231 al. 1 LI/VD ): il convient de considérer :

  • d’une part, la disproportion entre la dette fiscale et la capacité économique du contribuable (“leur paiement intégral frapperait trop lourdement le contribuable”) et
  • d’autre part, les motifs graves en présence desquels le droit vaudois autorise l’octroi d’une remise des impôts (“en raison de pertes importantes ou de tous autres motifs graves”).

 

L’ACI peut aussi accorder au contribuable le paiement échelonné d'une ou de plusieurs factures (d’impôt) en cas de difficulté financière momentanée (plan de recouvrement). Il appartient alors au contribuable, qui demande des facilités de paiement respectivement une remise d’impôts, de proposer les montants qu'il entend rembourser respectivement le montant de remise d'impôt (p. ex. un échelonnement à CHF 1000.- par mois ou une remise d’impôts de CHF 20'000.- sur CHF 150'000.-). Si l'autorité fiscale estime que ces montants sont insuffisants, elle refuse tout simplement la demande et ne vient pas avec une "contre-proposition" à celle faite par le contribuable.

 

Il s’ensuit que les facilités de paiement ou les remise d’impôt sont très difficilement octroyées par l’ACI. Ainsi, un avocat spécialisé dans la fiscalité m’a rendue attentive à cette problématique, tout en exprimant son incompréhension vis-à-vis d’une telle retenue, vu que cette pratique induit des pertes fiscales pour le Canton, ce dernier perdant finalement la totalité de l’argent réclamé.

 

Cette pratique a aussi été confirmée dans le cadre des recherches réalisées en lien avec la Motion déposée par l’Intergroupe F, relative à l’extinction de la co-solidarité fiscale. Il semblerait que le fisc ne fasse même pas usage de ce moyen lorsque la partie qui est recherchée pour l’entier de la dette fiscale a pourtant peu contribué à la substance fiscale (dette fiscale liée à l’ancien état de fait qui ne peut matériellement pas être payée, BOECKLI, Eintracht undHader mit Steuerfolgen, in RF 1991, pp. 223 et ss).

 

Et pourtant l’institution de la « remise totale ou partielle des impôts normalement dus vise » à éviter les conséquences trop rigoureuses pour les contribuables tombés dans le dénuement (cf. ATF 142 II 197 consid. 6.3).  C’est la raison pour laquelle le droit fédéral prévoit que les montants dus peuvent, sur demande, faire l’objet d’une remise totale ou partielle pour un contribuable tombé dans le dénuement, lorsque le paiement de l’impôt, d’un intérêt ou d’une amende infligée ensuite d’une contravention entraîne des conséquences très dures (art. 167 LIFD (RO 2015 9)). L’Ordonnance du 12 juin 2015 sur les demandes en remise d’impôt concrétise certains aspects du régime de la remise de l’IFD. L’institution de la remise d’impôt ne faisant malheureusement pas l’objet d’une harmonisation par la LHID, elle ne permet pas d’exiger des cantons qu’ils mettent en place une solution identique à celle proposée dans le droit fédéral.

 

Au vu de ce qui précède, j’ai l’honneur de poser les questions suivantes :

  • Quel est le taux d'octroi de paiement échelonnés (facilités) ces dix dernières années ?
  • Quel est le taux d'octroi de remises d’impôts ces dix dernières années ?
  • Combien de cas se sont soldés par une perte totale sur ces dix dernières années
  • Quel est le montant total de ces pertes en lien avec des refus d’octroyer des plans de paiements et des remises d’impôts ?
  • Le Canton a-t-il l’intention de revoir sa pratique en matière d'attribution de remises d’impôt et de plans de paiement ?

 

Je remercie le CE pour ses réponses.

Conclusion

Souhaite développer

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Cendrine CachemailleSOC
Blaise VionnetV'L
Julien EggenbergerSOC
Eliane DesarzensSOC
Salvatore GuarnaSOC
Carine CarvalhoSOC
Jean TschoppSOC
Anne-Sophie BetschartSOC
Jérôme Christen
Denis CorbozSOC
Stéphane BaletSOC
Graziella SchallerV'L
Cédric EchenardSOC
Sébastien CalaSOC
Didier LohriVER
Valérie InduniSOC
Alberto CherubiniSOC
Yves PaccaudSOC
Céline MisiegoEP
Delphine ProbstSOC
Claire Attinger DoepperSOC
Jean-Claude GlardonSOC
Muriel Cuendet SchmidtSOC
Stéphane MontangeroSOC

Documents

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
Mme Muriel Thalmann (SOC) —

J’ai déposé cette interpellation, car les recherches effectuées dans le cadre de la motion sur l’extinction de la cosolidarité fiscale ont montré que le fisc n’accordait que rarement des remises d’impôt, même dans des cas qui paraissent pourtant évidents. On pourrait en effet imaginer que le fisc accorde des remises d’impôt à la partie qui est recherchée pour l’entier de la dette fiscale. Malheureusement, dans la pratique, il s’avère que, même dans ces cas, les remises d’impôts sont très rarement octroyées.

Cette pratique m’a été confirmée par une avocate spécialisée dans les affaires fiscales ainsi que par un autre avocat qui pratique le droit des familles. Enfin, des recherches effectuées par les Femmes juristes suisses ont mis en évidence le fait que c’est au contribuable qui demande des facilités de paiement ou une remise d’impôts de proposer les montants qu’il entend rembourser, respectivement le montant de la remise d’impôt. Et lorsque le fisc refuse une proposition, il semblerait qu’il se contente de refuser la demande, sans faire de « contre-proposition ». Cette pratique me parait aller à l’encontre du bon sens, car une contre-proposition permettrait de trouver une solution win-win pour tout le monde. Mon interpellation demande donc au Conseil d’Etat d’analyser sa pratique en matière d’attribution de remises d’impôt et de plans de paiement et s’il a l’intention de la revoir.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

L’interpellation est renvoyée au Conseil d’Etat qui y répondra dans un délai de trois mois.

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