21_LEG_49 - EMPL Modification du Code de droit privé judiciaire vaudois (CDPJ) (2e débat).

Séance du Grand Conseil du mardi 7 décembre 2021, point 5 de l'ordre du jour

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Mme Florence Bettschart-Narbel (PLR) — Rapporteur-trice

Un amendement avait été déposé la semaine passée et, lors du débat, Mme la conseillère d’Etat avait indiqué qu’elle examinerait son opportunité avec le Service juridique et législatif (SJL). Avant de commencer le débat, article par article, il est important d’obtenir des réponses à ces questions. J’ai contacté hier le secrétaire de commission qui m’a indiqué n’avoir pas eu de nouvelles à ce sujet, je remercie donc la conseillère d’Etat pour ses futurs éclaircissements.

Mme Béatrice Métraux — Conseiller-ère d’Etat

Comme je m’y étais engagée lors de la dernière séance du Grand Conseil, j’ai sollicité, d’une part, le Tribunal cantonal en la personne de la juge cantonale Marie-Pierre Bernel et, d’autre part, Me Schwaar du SJL. Les conclusions de ces deux juristes sont les suivantes : l’article 28c du Code civil suisse subordonne effectivement la mise en place d’une surveillance électronique à la requête du demandeur. L’article 51a du Code de droit privé judiciaire vaudois (CDPJ), tel qu’il est rédigé dans le projet de modification soumis à l’approbation du Grand Conseil, pourrait laisser entendre que le juge a le pouvoir d’ordonner la surveillance d’office. Au fond, le droit cantonal, dans la mesure où il s’agit d’une disposition d’application d’une norme fédérale, s’inscrit dans le cadre légal prévu par le droit fédéral. Dans la mesure où l’article 28 du Code civil figure dans le chapitre des dispositions sur la protection de la personnalité, le juge ne peut pas statuer ultra-petita. C’est la maxime de disposition de l’article 58, alinéa 1, du Code de procédure civile qui s’applique en pareille situation. De la même manière que le juge n’ordonnera pas d’interdiction d’un proche ou de contact s’il n’en est pas requis, le législateur prévoit que la surveillance électronique ne sera ordonnée que sur requête d’une partie.

En ce qui concerne la rédaction que nous vous avons présentée, il ne s’agit ni d’une intention ni d’une omission que de ne pas l’avoir mentionnée dans le CDPJ, mais l’objectif était d’éviter des redondances inutiles. Voilà ce que ces deux juristes ont indiqué à mon département.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Il est passé à la discussion du projet de loi, article par article, en deuxième débat.

L’article 6 est accepté tel qu’admis en premier débat.

Art. 51a. –

Mme Jessica Jaccoud (SOC) —

M. Masson a évoqué l’assiduité avec laquelle les avocats pratiquant dans le judiciaire lisent les lois et, à ce titre, je peux vous certifier qu’ils liront bien plus le Code civil que le CDPJ, et ce, même si j’ai beaucoup de respect pour ce dernier texte de loi. En effet, nous n’avons pas pour réflexe de consulter en tout premier lieu le CDPJ. Mme la conseillère d’Etat est intervenue tout à l’heure et a bien précisé qu’il n’y avait pas de quiproquos s’agissant de l’application de cette disposition. Elle a aussi indiqué qu’à ce stade les plus hauts émissaires des affaires juridiques de ce canton n’estiment pas nécessaire de compléter cette disposition légale. Je vous invite dès lors à refuser et à ne pas donner suite à cet amendement Masson afin d’éviter des redondances inutiles.  

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Sans surprise, je ne suis pas du même avis que ma collègue et consœur Jessica Jaccoud. Notre travail de législateur doit être aussi clair et compréhensible que possible, pas seulement pour les avocats mais également pour les justiciables en général et le juge. Lorsqu’un texte de loi indique qu’un juge « peut », la tentation est grande pour le magistrat, qui doit parfois prendre des mesures dans l’extrême urgence – des mesures préprovisionnelles – va faire preuve de zèle au point de prononcer des mesures sans que la partie demanderesse le requière expressément. Il est important de travailler utilement et intelligemment sans, et cela me paraît être l’essentiel, dénaturer de quelque manière que ce soit le principe même, puisque le droit fédéral s’impose, de bien vouloir attirer l’attention du justiciable, des hommes de loi, sur le fait que la disposition est calquée sur le droit fédéral et que le juge ne peut pas ordonner cette mesure d’office.

Je le dis clairement, il n’y a rien de pire, et nous avons déjà eu ce genre de discussion dans le cadre de CODEX durant laquelle plusieurs députés avaient indiqué qu’il n’était pas nécessaire de répéter, puisque cela figurait déjà dans telle ou telle loi. Pour le praticien et encore plus pour le justiciable –nous devons faire des lois non pas pour des spécialistes mais bien pour nos concitoyennes et concitoyens – il n’y a rien de pire que de devoir jongler entre trois codes – le Code civil, le code de procédure civile ou le CDPJ – pour ensuite tenter d’en faire la synthèse. Mme la conseillère d’Etat nous a lu l’avis de droit en insistant sur le « pourrait » et je pense que l’on pourrait même enlever le conditionnel, car cela tombe sous le sens que cela peut être ordonné d’office. Encore une fois, il ne s’agit que d’apporter de la clarté et des explications et cela ne dénature en rien le texte.

Enfin, puisque j’ai la parole, je me permets une réflexion supplémentaire sur ce projet. En réfléchissant au texte de M. Masson, qui s’interroge sur la marge de manœuvre du Canton de Vaud de s’écarter du droit fédéral – le droit fédéral part de l’idée que le juge ne peut pas ordonner cette mesure d’office en cas de surveillance active par bracelet électronique – et compte tenu du fait que nous avons choisi une surveillance passive, il faudra voir si cela tient la route. Je tiens à le souligner, car si un jour on a une surprise dans un arrêt du Tribunal fédéral, je ne voudrais pas être passé à côté de cette remarque. Il y a suffisamment d’ « aguillage » comme ça pour sécuriser la situation et il faut clairement préciser, dans le sens de l’amendement Masson, que cela ne peut pas être ordonné d’office. Il convient donc de soutenir l’amendement proposé par notre collègue.

M. Stéphane Masson (PLR) —

Cet avis de droit nous éclaire ; c’était précisément l’objectif que de disposer d’un peu de temps entre la première et la deuxième lecture. Les propos de Mme la conseillère viennent confirmer mon intention d’éclaircir le débat et d’éviter toute décision au sujet de cet article. J’ai bien compris qu’il s’agissait d’éviter toute redondance inutile. Toutefois, il est important de fixer clairement cette disposition. Cela est d’autant plus important que le message du Conseil fédéral, à l’appui de la loi qui introduit cet article 28 du Code civil et sur lequel repose l’article 51 dont on discute, est très clair. En effet, le Conseil fédéral indique que « le tribunal ne peut ordonner la surveillance électronique que si le demandeur le requiert ». On ne saurait être plus clair. On pourrait soulever le fait que le Tribunal cantonal est muet à ce sujet et qu’il n’y a qu’à aller lire la Feuille fédérale (FF). Mais il est important pour nous, législateur cantonal, d’adopter un article posant des bases claires et limpides pour une interprétation ayant les mêmes qualités.

Nous sommes tous d’accord sur la démarche et je vous invite donc à voter mon amendement qui évitera tout malentendu et sortes de discussion. Je suis avocat et ne fais pas du judiciaire, mais je peux vous garantir que tout professionnel accomplissant correctement son travail, soit qui défend son client, ne manquera pas de crier au scandale et à l’illicéité de toute mesure de surveillance que viendrait ordonner un juge, sans la requête d’une partie à la procédure et en se basant tout bonnement sur l’article 51a, alinéa 1, tel que rédigé. Faisons donc un peu d’hygiène juridique, conformons-nous au droit fédéral, ces redondances n’étant ni inutiles ni un luxe. Je vous remercie de soutenir cet amendement.

« Art. 51a. – Al. 1 : Lorsqu’une interdiction d’approche ou de périmètre ou une expulsion de domicile est prononcée, le président du tribunal d’arrondissement peut, si la partie demanderesse le requiert, astreindre l’auteur de violence, menace ou harcèlement à une surveillance électronique. »

Comme vous pouvez le constater, c’est le même amendement que celui déposé au premier débat. Il ne s’agit pas d’insister, mais bien de clarifier une situation. Je vous remercie de soutenir cet amendement.  

Mme Céline Misiego (EP) —

Je ne comprends pas cet amendement. Nous sommes tous d’accord pour dire qu’il faut protéger les victimes et punir les auteurs. Nous avons démontré que cet amendement était inutile, et il est redéposé alors même qu’il va compliquer la démarche des victimes. Le groupe Ensemble à Gauche et POP vous recommande donc de le rejeter.

M. Stéphane Masson (PLR) —

Je serai bref : non, ce n’est pas inutile et je ne sais pas dans quelle langue il faut le répéter. Ce débat évolue dans le droit civil et non pas dans le droit pénal. Il s’agit de la maxime de disposition et c’est clair : un juge ne peut accorder à une partie ni plus ni moins que ce qui est demandé et reconnu. Cela signifie qu’un juge ne peut pas seul et librement décider d’une surveillance électronique. C’est clair et net et il faut le dire dans la loi, car qu’on le veuille ou non, c’est comme ça : dura lex sed lex.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

L’amendement Stéphane Masson est accepté par 62 voix contre 58 et 2 abstentions.

M. Jean Tschopp (SOC) —

Je demande un vote nominal.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui acceptent l’amendement votent oui ; celles et ceux qui le refusent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, l’amendement Stéphane Masson est accepté par 67 voix contre 63 et 2 abstentions.

*Introduire vote nominal

L’article 51a, amendé, est accepté avec 2 avis contraires et de nombreuses abstentions.

Les articles 174a et 2, formule d’exécution, sont acceptés tels qu’admis en premier débat.

Le projet de loi est adopté en deuxième débat.

Mme Florence Bettschart-Narbel (PLR) — Rapporteur-trice

Bien qu’un amendement ait été adopté, il est urgent d’adopter ce projet de manière définitive et je demande donc un troisième débat immédiat.  

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Le troisième débat immédiat est refusé, la majorité des trois quarts n’étant pas atteinte (64 voix contre 59 et 7 abstentions).

Le troisième débat interviendra ultérieurement.

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