21_POS_25 - Postulat Alice Genoud et consorts - Redonnons vie à nos terres enterrées sous le bitume: Pour un plan de désimperméabilisation des sols.

Séance du Grand Conseil du mardi 12 octobre 2021, point 28 de l'ordre du jour

Texte déposé

L’imperméabilisation des sols, qu'on peut définir comme le recouvrement permanent d’une parcelle de terre et de son sol par un matériau artificiel imperméable tel que l’asphalte ou le béton[1], est un mécanisme devenu paradoxalement naturel et inaperçu de notre développement et de notre urbanisme.

Sans réfléchir, nous avons rendu imperméable des surfaces entières, et pas seulement avec des bâtiments et leurs toits. Des trottoirs, des places, des parkings, des aires de stockage ou même cours d'école ont été inutilement recouverte de bitume.

A tel point que le manque de pérméabilité est devenu une problématique importante pour notre pays et notre canton. Les surfaces imperméabilisées ont augmenté en Suisse de 29% en 24 ans. Selon les chiffres les plus récents, 4,7% du territoire suisse est imperméabilisé. Vaud pour sa part a un taux plus haut est que la moyenne nationale avec 5,3% (chiffre de 2004)[2].

Cette imperméabilisation pose de nombreux problèmes, en termes environnementaux et d'aménagement du territoire. Nous pouvons citer notamment :

 

  • La pression sur les ressources en eau : nos sols trop imperméabilisés ont perdu leurs capacités à absorber l'eau, reportant irrémédiablement la charge sur d'autres surfaces. Cela pose des problèmes notamment lors de fortes pluies, l'eau n'étant plus retenue naturellement dans des sols et risquant de provoquer des dégâts et des crues. Nous nous souvenons tous des inondations de juin 2018 à Lausanne, en partie dues au ruissellement urbain et à la faible capacité de rétention de nos sols.
  • Une perte de la diversité biologique : de nombreuses espèces sont tributaires du sol pour se développer. De grandes zones imperméabilisées, ou des zones qui coupent leur habitat par exemple une route, crée un danger supplémentaire sur l'écosystème.
  • L'augmentation des îlots de chaleur : ce phénomène qui commence à être bien connu, notamment dans les agglomérations s'explique notamment par une asphaltisation des sols et un déficit de verdure. Cela conduit à une intensification des températures plus accrue dans les agglomérations que dans la campagne. Il s'agit d'un effet direct important lors des étés caniculaires que nous venons et allons encore vivre.

 

Le réchauffement climatique accentue et va encore accentuer ces problèmes, avec des épisodes orageux plus forts ainsi qu'une augmentation des températures. La pression sur notre territoire en sera que plus grande, il est donc nécessaire de prendre cette problématique de l'imperméabilisation à bras le corps et ceci dès maintenant.

Ce postulat demande une réflexion autour d'une stratégie sur l'imperméabilisation des sols soit mise en place au niveau de notre canton. Différentes initiatives ont déjà été mises en place dans plusieurs communes, mais il est nécessaire d'avoir une politique globale sur le sujet et d'inciter les différents acteurs à se préoccuper de cette question.

 

Des pistes (non exhaustives) pourraient notamment être étudiées pour :

  • Limiter de nouvelles imperméabilisations inutiles, via par exemple une modification de la LATC ou l’instauration d’une taxe visant à limiter ce phénomène. Le produit de cette taxe pourrait être versé à un fonds de reconversion des surfaces. 
  • Désimperméabiliser le parc immobilier de l'Etat et de ses entités publiques, notamment par l'adaptation des parkings et la création de toitures végétalisées.
  • Réfléchir à des outils de sensibilisation et des arguments financiers afin d’inciter les propriétaires privés à désimperméabiliser leur(s) parcelle(s).
  • Inciter les communes à s'emparer de cette question, avec par exemple un fond dédié.
  • Développer une réflexion globale lors des renaturations de rivières ou dans l'analyse des bassins versant, afin d'également intégrer une politique de désimperméabilisation en amont et préventive.
  • Dresser un bilan des mesures liées à l'aménagement du territoire afin d'examiner si certaines aboutissent à un effet négatif sur la perméabilisation des sols. 
  • Réfléchir à des actions dans le cadre du deuxième plan climat.

 

Tous ces points sont évidemment des propositions, l'imperméabilisation des sols pouvant être abordée dans le cadre de plusieurs politiques et cadres légaux de notre Canton. Une réflexion globale par le biais de ce postulat permettrait certainement d'envisager d'autres pistes intéressantes et efficaces sur cette thématique qui nous concerne tous.

 

 

 

[1]Lignes directrices concernant les meilleures pratiques pour limiter, atténuer ou compenser l’imperméabilisation des sols, Commission européenne, téléchargeable sur https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwjs49_RvZvwAhUQC-wKHZqgBnEQFjADegQIFxAD&url=https%3A%2F%2Fec.europa.eu%2Fenvironment%2Fsoil%2Fpdf%2Fguidelines%2Fpub%2Fsoil_fr.pdf&usg=AOvVaw1e_ceNySpZHhaTJ6KFXa-e

[2]Office fédéral de la statistique, 2019, disponible sur https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/espace-environnement/indicateurs-environnement/tous-les-indicateurs/etat-environnement/impermeabilisation-sol.html

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Olivier Epars
David RaedlerVER
Blaise VionnetV'L
Cédric EchenardSOC
Felix StürnerVER
Jean-François ChapuisatV'L
Anne Baehler Bech
Claude-Alain GebhardV'L
Rebecca JolyVER
Séverine EvéquozVER
Stéphane MontangeroSOC
Marc VuilleumierEP
Yves PaccaudSOC
Léonard Studer
Elodie LopezEP
Anne-Laure Métraux-BotteronVER
Graziella SchallerV'L
Jean-Christophe BirchlerV'L
Sabine Glauser KrugVER
Didier LohriVER
Jérôme Christen
Cloé PointetV'L
Céline MisiegoEP
Claire RichardV'L

Documents

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Jean-Claude Glardon (SOC) — Rapporteur-trice

La commission ad hoc chargée d’examiner le Postulat Alice Genoud et consorts s’est réunie le 17 août 2021 en présence de Mme Béatrice Métraux, Cheffe du Département de l’environnement et de la sécurité, accompagnée de Mme Sandrine Portmann de la direction de l’aménagement, de M. Sébastien Beuchat, Directeur de la Direction des ressources et du patrimoine naturels (DIRNA), et de M. Yves Golay, responsable de la section construction durable à la Direction générale des immeubles et du patrimoine (DGIP). Nous remercions toutes ces personnes pour toutes les informations apportées lors de la séance.

La problématique de l’imperméabilisation des sols est de haute importance : les surfaces imperméabilisées en Suisse ont augmenté de 29 % en 24 ans et couvrent désormais 5,3 % du territoire vaudois, alors que la moyenne suisse est de 4,7 %. Un haut taux de sols imperméables a plusieurs conséquences : leur capacité à absorber l’eau diminue, comme lors des fortes pluies de 2018 et 2021 qui ont causé de graves inondations ; les îlots de chaleur augmentent dans les villes ; la diversité biologique diminue. Le dérèglement climatique accentuant ces problèmes, il est nécessaire de se préoccuper de la question. Forte de ces constats, la postulante demande au Conseil d’Etat une réflexion sur la mise en place d’une stratégie au plan cantonal, qui pourrait se montrer exemplaire. Différentes initiatives sont déjà en place, dans plusieurs communes, mais il est nécessaire d’avoir une politique globale sur le sujet et d’inciter les différents acteurs à se préoccuper de la question.

La cheffe du département a rappelé que cette problématique avait déjà été évoquée par le Grand Conseil dans le cadre de discussions sur les sols. L’imperméabilisation des sols relève, en effet, d’une thématique cruciale pour l’avenir de nos sociétés, et les projets de recherche et rapports de la Confédération en ont décrit l’urgence. Deux types d’atteintes aux sols doivent être considérées : la perte de surfaces par artificialisation et la baisse de la qualité générale. Dans la présentation de la position du Conseil d’Etat, Mme la Cheffe du département a largement développé cette problématique et surtout les réflexions et les démarches déjà entreprises par le canton. Pour le détail, je vous renvoie à mon rapport.

Les prémices de la réflexion souhaitée par le postulat sont incluses dans le Plan climat cantonal, via l’élaboration d’un Plan d’action cantonal pour la protection des sols dont les travaux doivent débuter cet automne. Il se concentrera vraisemblablement sur la protection de la qualité des sols à travers leurs multiples fonctions et définira les moyens de mettre en œuvre une politique publique coordonnée et cohérente de la gestion des sols, et d’identifier les meilleurs leviers d’action juridiques et techniques.

Dans la discussion générale, la question fut de savoir quels pourraient être les outils incitatifs permettant de lutter contre cette problématique. Mme la conseillère d’Etat a indiqué qu’il s’agira de déterminer dans quelle mesure l’Etat pourra mettre des moyens à la disposition des communes et augmenter la somme de 3 millions prévus dans le premier Plan climat cantonal. La réflexion sera aussi menée dans le cadre de l’élaboration du deuxième Plan climat cantonal. Certes, donner des moyens financiers est important, mais ce qui fait surtout défaut est la base légale. Il faudra donc peut-être poser des critères de défense des sols et modifier le PDCn, ainsi que la Confédération le recommande et que certains cantons l’ont fait.

Une commissaire, bien que consciente de la nécessité d’agir, s’est demandé en quoi le postulat ajouterait une pression, puisque de nombreuses démarches sont en cours ou en réflexion. Mme la Conseillère d’Etat estime intéressant et utile pour l’Etat d’obtenir l’assentiment et le soutien du Grand Conseil, vis-à-vis des partenaires tels que les communes ou l’économie auxquels l’Etat explique ses démarches. Pour la postulante, son texte offre aussi l’occasion d’expliquer la problématique et de faire connaître les démarches entreprises. Les incitations financières sont des leviers intéressants et l’appui du Grand-Conseil peut contribuer à faire avancer les choses.

En conclusion, la réflexion demandée par le postulat pourrait être menée en parallèle au Plan d’action cantonal pour la protection des sols prévu dans le Plan climat cantonal, car il n’y a pas de contradiction entre la démarche demandée dans le postulat et celle du Canton. Finalement, la commission recommande au Grand Conseil, par 6 voix et 1 abstention, de prendre en considération ce postulat et de le renvoyer au Conseil d’Etat.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

La discussion est ouverte.

Mme Alice Genoud (VER) —

Je remercie le président-rapporteur pour son rapport extrêmement complet. La question de l’imperméabilisation des sols est assez insidieuse, dans le sens où elle est très visible et, en même temps, totalement invisible. On sait en effet, avec les statistiques données par le rapporteur, que la Suisse et le canton de Vaud s’imperméabilisent tous les jours. Mme la conseillère d’Etat l’a dit en commission : on parle de 0,75 mètre par seconde en moyenne et plus de 1 à 2 mètres par seconde sur le Plateau. On voit donc que c’est une problématique plus importante pour les cantons tels que le canton de Vaud. C’est aussi une problématique importante dans les agglomérations, mais pas seulement ; les villages et les villes de plus petite importance ont les mêmes problèmes.

En commission, quelques pistes ont été amorcées et elles me semblent intéressantes. On a notamment parlé de la base légale qui, à mon avis, est un point crucial et qui manque, apparemment. Il y a aussi toute une réflexion dans le cadre du plan d’action cantonal pour la protection des sols. On a également parlé des questions de subventionnement pour les communes et il faut réfléchir à l'échelon cantonal sur cette question. Il y a encore la question des standards actuellement pratiqués par l’Etat sur son domaine ; ne pourrait-on pas aussi les appliquer aux communes et aux privés ? De nombreux questionnements sont arrivés et la discussion de commission a été riche. Je remercie aussi Mme la conseillère d’Etat d’être venue avec tout un panel de représentants de l’administration, ce qui montre que la thématique est très transversale. Cet élément risque d’être compliqué pour la mise en pratique : de nombreuses personnes doivent se mettre ensemble pour arriver à un résultat concret. Certes, nous en sommes tout à fait capables, mais la réflexion doit être amorcée.

Je remercie la commission d’avoir accepté de renvoyer ce postulat au Conseil d’Etat à la presque unanimité. Je me réjouis de voir une avancée sur le sujet, qui peut apparaître petit, mais qui a une forte implication en termes de durabilité et d’adaptation au changement climatique. Tous les lieux aujourd’hui imperméabilisés retiennent la chaleur et deviennent des îlots de chaleur, mais ils retiennent aussi la pluie. On a notamment pu le constater cet été avec de nombreuses tempêtes et une pluie abondante : rendre une agglomération, une ville ou un village plus perméable permettra de réagir mieux au réchauffement climatique, qui est maintenant présent et qui amènera beaucoup de tels événements compliqués à gérer. J’espère que le Grand Conseil suivra l’avis de la commission.

Mme Florence Gross (PLR) —

Le postulat présenté ici nous soumet une liste à la Prévert de pistes censées résoudre un problème complexe. Or, parmi celles-ci, on trouve une modification aléatoire de la Loi sur l’aménagement du territoire et les constructions (LATC), mais surtout l’instauration d’une nouvelle et énième taxe – par qui, pourquoi et comment ? – concentrée sur les villes, affectée à un fonds de reconversion des surfaces. Après le dézonage, voire l’expropriation prévue par la Loi fédérale sur l’aménagement du territoire (LAT), nous voici à la reconversion des surfaces…

Certes, il ne s’agit que d’un postulat. Toutefois, les nombreuses demandes présentées, et notamment des modifications légales et l’instauration de nouvelles taxes, alors que même celles-ci ont été refusées récemment au niveau fédéral, nous heurtent. La grande majorité du groupe PLR ne soutiendra donc pas la commission et ne renverra pas ce texte au Conseil d’Etat. En effet, nous pouvons lire dans le rapport que le plan d’action cantonal pour la protection des sols est en cours d’élaboration. Ne multiplions pas les actions ; concentrons-nous et privilégions l’efficience. Une taxe n’est aucunement une mesure incitative, ainsi qu’on peut le lire dans le rapport. Le rapport de commission rappelle que des travaux sont en cours à la Direction générale de l’environnement (DGE). Dès lors que des recommandations deviennent des taxes, elles ne sont plus des incitations. Nous vous invitons donc à ne pas renvoyer ce texte au Conseil d’Etat, qui travaille déjà, en parallèle, sur cette problématique. 

M. Pierre-Alain Favrod (UDC) —

On parle dans ce postulat des terres sous le bitume et le béton. Dans les villages de ce canton, il n’y a rien de trop sous le bitume. Mais il est écrit que l’imperméabilisation des terres est aussi due à l’agriculture intensive, dans ce canton, ce qui compacterait les sols, soi-disant. Or, il n’existe en Suisse aucune agriculture intensive ! 190'000 hectares, soit 3,5 fois la grandeur du lac Léman, est sous le régime écologique. Le plus gros problème se trouve dans les villes de ce canton, où tout est mis sous bitume et béton. C’est là qu’il faut s’inquiéter, car avant de devenir une grande ville, il y avait des rivières, des vergers, des cultures et, maintenant, il n’y a plus que logements, locatifs, etc. Je vous demande d’en rester à la thématique des villes bitumées et vous recommande de refuser ce postulat.

Mme Carole Schelker (PLR) —

La problématique de l’imperméabilisation des sols est d’une haute importance. Parmi d’autres facteurs, elle contribue aux inondations, qui deviendront de plus en plus fréquentes ces prochaines années. Selon moi, il est dans l’intérêt de toutes et tous de prendre des mesures proportionnées pour éviter les dégâts matériels et perturbations liés aux inondations, qui génèrent bien plus de charges financières que les mesures préventives réalisées en amont. Nous l’avons expérimenté cet été, notamment dans ma région d’Yverdon-les-Bains et Grandson.

Il est à noter que des prescriptions sont déjà appliquées aujourd’hui pour limiter l’évacuation des eaux de surface à l’échelle de la parcelle, par infiltration ou rétention. Puisqu’il n’y a pas de cadre légal vraiment bien formulé, des exigences pourraient être formulées de façon plus claire pour les bâtiments neufs et existants, telles que des surfaces minimales pour l’infiltration des eaux, afin de réduire autant que possible la charge sur les eaux claires.

Par rapport à ce qui vient d’être dit, je rappelle que le postulat est vraiment centré sur les villes – ce qui est bien mentionné dans le rapport de la commission. Une réflexion plus globale a été menée au sein de la commission, notamment concernant l’exploitation des surfaces cultivées, mais le postulat concerne uniquement les villes et propose une liste de pistes déjà évoquées et en cours d’analyse au sein du Conseil d’Etat, mais dont certaines ne sont pas applicables ou de compétence communale. Il est bien précisé qu’il s’agit d’une liste de pistes et d’exemples. Selon moi, nous pouvons accepter ce postulat, et cela surtout étant donné l’importance de cette problématique liée aux inondations.

M. Yvan Pahud (UDC) —

L’imperméabilisation des sols est en effet un sujet important et des solutions doivent être trouvées. Néanmoins, il faut bien identifier la cause de cette imperméabilisation et je n’en trouve qu’une : la pression démographique. Une augmentation de 200'000 habitants durant ces 20 dernières années, dans ce canton : plus on accueille de monde, plus il faut bétonner et il faut en être conscient.

Concernant le texte de notre collègue, quand je lis que le problème vient du goudronnage, des trottoirs et des cours d’école, je l’invite à venir à Sainte-Croix, à 1'100 mètres d’altitude. Pourquoi est-ce qu’on goudronne ? Parce qu’on a de la neige ! Je n’ai encore pas vu que l’on puisse déneiger dans l’herbe et tenir une surface propre pour la population. Voilà pourquoi il a fallu bétonner et goudronner ces surfaces.

Je rejoins mes collègues, M. Favrod et Mme Gross : c’est surtout dans les détails qui nous sont proposés, soit l’instauration d’une taxe visant à limiter ce phénomène, qu’il y a un problème. Toujours à Sainte-Croix, la commune devrait passer à la caisse pour payer une taxe, parce que le préau a été goudronné afin que les élèves soient au propre l’hiver, quand on a un mètre de neige. Inciter les communes à s’emparer de cette question avec, par exemple, un fonds dédié, va de nouveau créer une usine à gaz et obliger à demander des fonds aux contribuables pour payer toutes ces combines. Dès lors, je ne peux que refuser ce postulat.

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

Ce texte me laisse un peu songeur. Maintenant, on veut désimperméabiliser les sols. Il y a encore quelques années, dans ce Grand Conseil, on luttait contre le bétonnage. Si on désimperméabilise dans un sens tout en continuant à mettre du béton ailleurs, je ne sais pas ce que l’on aura gagné. Oui, il est vrai qu’en ville, il y a pas mal de béton. Des cours d’école sont bétonnées et provoquent un dégagement de chaleur ; doit-on les rendre à nouveau à la nature, en terre battue, sans se préoccuper de ces revêtements que l’on met pour la sécurité de nos enfants ? Je trouve que les pavés herbeux sont une bonne solution.

On nous parle des villes bitumées. J’habite Lausanne depuis longtemps et je n’ai pas beaucoup vu de routes nouvelles, de nouvelles places, ni des tonnes de bitume ou de béton déversées dans cette ville. Evidemment, le concept de ville peut évoluer : il y a une très grande ville depuis Morges, qui monte quasiment jusqu’à Froideville et qui redescend du côté de Lutry. C’est une très grande ville, dans laquelle de nombreuses nouvelles zones de villas ont entraîné un bétonnage là où, autrefois, c’étaient des campagnes. Mais à ce que je sache, ce n’est pas la ville de Lausanne qui est allée bétonner ces campagnes, mais c’est dans ces campagnes et dans ces villages que l’on a été très content d’accueillir de nouveaux habitants, car cela fait de nouveaux impôts, et pour cela on a forcément dû bétonner. Il y a même des endroits où l’on a construit sciemment, en sachant que, depuis des siècles, c’était là que ça s’inondait quand il y avait trop de pluie, mais on l’a quand même fait. Alors, je veux bien que l’on désimperméabilise les sols – pourquoi pas ? C’est comme le pendule qui va tantôt dans un sens et tantôt dans l’autre – mais cela ne sert à rien si l’on ne continue pas à être un peu soucieux de l’habitat : où le disposer et comment construire les voies d’accès pour les habitants qui le composent.

M. Fabien Deillon (UDC) —

Pour avoir participé à cette commission, je me suis rendu compte que le train était en route. Comme  indiqué dans l’excellent rapport de notre collègue Glardon, les prémices de la réflexion souhaitée par le postulat sont inclues dans le plan cantonal, via l’élaboration d’un plan d’action cantonal pour la protection des sols dont les travaux vont débuter cet automne. Ils ont peut-être déjà commencé, puisque la commission a siégé en août ? Je pense qu’il faut s’en tenir à cela. Ce n’est pas la peine de renvoyer ce postulat, alors que les travaux sont en cours. On nous a dit que le plan d’action devait inclure une partie importante de la réflexion autour de l’imperméabilisation du sol, de ses conséquences et des moyens d’y remédier. Le résultat pourrait par exemple définir de nouvelles lignes conductrices, afin d’intégrer concrètement les fonctions des sols dans les pesées d’intérêt, voire des outils incitatifs pour la désimperméabilisation des sols. Je pense que les avis seront très partagés et qu’il est inutile de renvoyer ce postulat au Conseil d’Etat.

M. Stéphane Montangero (SOC) —

Sous les pavés, le sable ; sous le béton, la terre. C’est en substance ce que l’on peut résumer des débats que nous avons entendus jusqu’à présent. Si je suis d’accord avec mon collègue Vuillemin par rapport aux pavés herbeux, j’avoue que j’ai un peu plus de mal à comprendre et à suivre le raisonnement de mon collègue Deillon, notamment. Oui, un certain nombre de choses sont en route et c’est justement pour cela qu’il faut transmettre ce postulat qui demande une réflexion sur la stratégie par rapport à l’imperméabilisation des sols. Si on ne le fait pas, que va-t-il se passer ? Au moment où les autres travaux seront sur notre table, on se dira « mais que se passe-t-il en matière d’imperméabilisation des sols ? C’est un sujet important » et nous serons accusés de saucissonnage.

Si l’on regarde simplement ce qui est demandé dans ce postulat, il y a quelques pistes :

  1. il est écrit au conditionnel ;
  2. il contient le terme « notamment » ;
  3. il contient les termes « non exhaustif ».

Cela laisse donc une grande latitude pour faire les choses de manière intelligente. Contrairement à mon collègue Pahud, quand je lis « inciter les communes à s’emparer de cette question avec, par exemple, un fonds dédié », si j’avais dans ma commune un fonds alimenté par le canton, où le canton met à disposition de l’argent pour permettre d’empoigner cette thématique – je déclare mes intérêts : je suis municipal de la commune d’Aigle, en charge de l’environnement – j’en serais très content. Je vous invite à transmettre le postulat au Conseil d’Etat.

M. Maurice Mischler —

Je remarque qu’il y a un peu d’amnésie dans cette assemblée. Je vous rappelle que, la nuit du 11 au 12 juin 2018, il y a eu un orage dont nous devrions tous nous souvenir – il n’y a que trois ans de cela. Pour répondre à M. Vuillemin qui dit n’avoir pas vu beaucoup de routes se faire, le fait qu’il y ait eu des inondations aussi importantes venait justement du fait que la réflexion sur l’imperméabilisation du sol n’avait visiblement pas suffi pour les empêcher. Si elle nous est proposée et si ce sujet est si important, c’est justement pour des cas extrêmement violents. Si nous n’y réfléchissons pas ici et qu’il arrive à nouveau un événement aussi important qu’en 2018, nous n’aurons plus que les yeux pour pleurer et pour regretter « si nous avions su, alors nous aurions fait quelque chose ». C’est un postulat et il engendre une discussion gauche-droite totalement stérile, alors qu’il s’agit de sécurité de l’aménagement du territoire ! Il faut accepter ce postulat pour que la DGE puisse faire son travail.

M. Eric Sonnay (PLR) —

Avec ce postulat, qui paie ? Cela a été dit : il y a des villes, bétonnées et goudronnées, et il y a des villages. Le 26 décembre 1999, l’ouragan Lothar est passé et une grande partie des forêts vaudoises ont été détruites. On n’a pas changé les forêts pour autant… Les 11 et 12 juin 2018, nous avons vu Lausanne sous l’eau. J’ai été commandant du feu pendant 20 ans et nous avons souvent été appelés pour des inondations. Dans le canton de Vaud, dans les années 60-70, nous avons créé beaucoup de canalisations pour évacuer l’eau de pluie. Aujourd’hui, dans certaines communes et surtout dans certaines villes, ces canalisations sont oubliées ou sont pleines. En tant que commandants du feu, combien de fois avons-nous dû vider des caves et qu’avons-nous découvert ? Il existe des places pour évacuer l’eau, mais elles sont pleines de feuilles mortes, depuis des années et les canalisations sont bouchées. Ce n’est pas aux petits villages de venir payer pour le bétonnage et pour tout ce qui n’est pas fait dans les communes. Certains villages n’ont pas trop de problèmes d’inondations, mais c’est clair que quand il y a un orage et que 30 ou 40 litres d’eau tombent en 15-20 minutes, tout le monde est inondé. Les 11 et 12 juin 2018, nous aurions eu toutes les canalisations imaginables, à Lausanne, et il y aurait quand même eu des inondations. Il ne faut pas rêver : quand des événements extrêmes de la nature se produisent, on ne peut pas aller contre – idem pour le Lothar. Mais on ne peut pas aller taxer des gens qui font leur travail, dans les petites communes, là où les municipalités savent où sont les canalisations, où sont les départs d’eau et qui, une ou deux fois par année, emploient des gens pour les déboucher, et leur dire de payer pour ceux qui ne le font pas ! Je vous invite à refuser le postulat.  

Mme Alice Genoud (VER) —

Je suis un peu étonnée de la tournure prise par le débat, surtout au vu des discussions qui ont eu lieu en commission. Il faut en rester au texte de base de ce postulat : l’idée est de donner une impulsion pour réfléchir aux questions d’imperméabilisation. En effet, j’ai cité le fait d’avoir une taxe parmi différentes possibilités ; c’est l’une d’entre elles. Il ne faut pas se focaliser sur une seule possibilité, en oubliant le projet global et toute la problématique, qui reste extrêmement prégnante et à laquelle il n’y a pas forcément de solution toute faite. C’est une problématique à laquelle beaucoup de gens ont réfléchi et à laquelle la Confédération a réfléchi ; concrètement, dans le canton de Vaud, il faut que nous ayons les outils et les réflexions, que ce soit par le plan des sols ou d’autres. Mais il ne faut pas s’arrêter sur un seul onglet du postulat. J’estime que, de la part de notre Grand Conseil, il serait négatif de refuser ce postulat parce qu’alors, nous ne donnerions pas d’impulsion pour que l’on s’occupe de cette thématique. On ne peut pas se contenter de dire : des choses sont en train d’être faites. C’est bien le cas, mais cela ne signifie pas que l’on ne doive pas continuer et aller plus loin.

Je rejoins aussi ce qui a été dit par M. Vuillemin : c’est une partie d’une thématique beaucoup plus grande – la question du mitage du territoire, du mode de vie dans nos agglomérations, etc. Il faut aussi être humble : ce n’est qu’une petite partie, mais cela ne veut pas dire que l’on ne puisse pas y réfléchir en tant que telle.

Un point n’a pas été relevé : l’idée d’être proactif sur la question d’imperméabilité des sols, qui coûte cher. On a parlé d’argent et de taxes, mais des sols imperméables qui provoquent de gros dégâts lors de grandes averses entraînent aussi des coûts. Il est intéressant de voir que les assurances, notamment, réfléchissent beaucoup à ce sujet et elles travaillent avec la Confédération, par exemple avec la carte de l’aléa ruissellement, qui montre les endroits où coule l’eau. Ce travail fait en partenariat avec l’assurance montre son intérêt à ce que ces événements ne coûtent pas trop cher.

Je vous invite donc à renvoyer le postulat au Conseil d’Etat. Cela nous permettra d’avoir un débat intéressant sur les questions de perméabilité, avec l’aide du travail du Conseil d’Etat. On peut lui faire confiance : de nombreux députés ont exprimé leur malaise face à la question d’une taxe. Cette question de taxe peut être réfléchie de manière à prendre en compte ce que le Grand Conseil a dit aujourd’hui.

M. Alain Bovay (PLR) —

Mon collègue Eric Sonnay a totalement raison. Un plan général d’évacuation des eaux avait été mis en place par le canton. Les communes avaient reçu des subventions et pouvaient se projeter dans l’avenir et des situations de crues centenaires. En l’occurrence, ces plans ont été ajustés en fonction des modifications climatiques. Dans les communes bonnes élèves, la mienne par exemple – je déclare mes intérêts en tant que syndic de la commune de Saint-Légier-La Chiésaz – 90 % de notre réseau est relié, et nous avons encore mis en place des bassins de rétention, car des adaptations ont eu lieu ces dernières années. Des bassins de rétention sont créés sur des immeubles, sur des toits plats ou végétalisés, en plus des bassins naturels situés à différents endroits de la commune, et répondent aux attentes du plan général d’évacuation des eaux. Dès lors, 90 % de notre réseau est relié, alors que dans les villes, on est à hauteur d’environ 70 %.

Les concitoyens que je représente ont financé de manière importante la réalisation de ces ouvrages, par les taxes. Et maintenant on nous dit qu’il faut penser à faire de la rétention d’une manière beaucoup plus généralisée, à l’échelon cantonal. Le mieux est d’inciter, et les communes ont des incitations. Il faut faire confiance aux communes, qui sont elles aussi conscientes de ce problème. Il faut leur laisser la liberté d’entreprendre et de pouvoir faire leur travail, selon les besoins du territoire et ses possibilités, en fonction de la perméabilité des terrains.

M. Pierre-André Romanens (PLR) —

Mon collègue Alain Bovay a dit environ 85 % de ce que je voulais dire. Nous nous rejoignons profondément sur la problématique du plan général d’évacuation des eaux mis en place il y a une quinzaine d’années, dans ce canton, et qui règle passablement de problèmes. Aujourd’hui, on ne peut plus réaliser d’objets sans avoir un regard assez pointu sur la manière d’évacuer les eaux et de laisser les eaux de pluie pénétrer dans les sols. Aujourd’hui, on ne construit plus sans tenir compte de ce phénomène ; ce n’est plus possible.

Le canton a aussi mis en place un plan qui empêche les réalisations dans des zones dangereuses, inondables ou sujettes à des glissements de terrain. C’est déjà fait ; c’est en place et cela continue à faire ses effets. Par rapport à ce plan général d’évacuation des eaux, tout un processus se met en place, avec des moyens qui sont là, car il y a des taxes. En effet, chaque fois que vous raccordez une canalisation, vous payez une taxe et celle-ci permet justement de produire des effets sur les améliorations. Chaque fois que vous transformez, que vous améliorez un coin de territoire construit, il faut procéder à ces modifications. Le travail est fait par le canton, par les communes ; bref, il est fait par tout le monde. Je ne vois donc pas à quoi sert ce postulat aujourd’hui : il a une guerre de retard. Si l’on parle de la taxe, elle est déjà perçue. Je vous invite à ne pas soutenir ce postulat.

Mme Carole Schelker (PLR) —

Je voudrais revenir sur les plans généraux d’évacuation des eaux (PGEE). Nous avons tous lu le rapport de la Cour des comptes sur les PGEE. Trois recommandations y sont faites, dont l’une concerne justement les questions d’infiltration et de rétention, en disant qu’elles n’ont pas été suffisamment prises en compte dans la première volée des PGEE qui ont été réalisés. Maintenant, dans l’une des recommandations, il est question de remettre sur la table les PGEE pour l’ensemble des communes. Finalement, si le Conseil d’Etat propose des outils et des mesures d’accompagnement pour mieux appliquer la recommandation de la Cour des comptes dans les futurs PGEE, j’estime que c’est plutôt un appui aux communes qu’une contrainte. Renvoyer ce postulat serait ainsi l’occasion de faire un état des lieux sur cette problématique, afin que nous, députés, puissions connaître les démarches entreprises et intervenir en amont sur les mesures envisagées. Je vous propose de renvoyer le postulat au Conseil d’Etat.

M. Jean-Luc Chollet (UDC) —

Nous passons sans précaution d’une thématique à l’autre. Il est indiscutable que depuis les années 70 jusqu’à l’aube des années 2000, la construction de grandes banlieues et de centres commerciaux, industriels et artisanaux, avec d’immenses parkings, ne s’est pas accompagnée de mesures de rétention d’eau. C’est terminé ! Depuis le début de ce nouveau siècle, vous ne mettez pas à l’enquête et, à plus forte raison, vous ne construisez pas si vous n’avez pas de possibilité de stockage et de rétention d’eau pour libérer cette eau beaucoup plus doucement, notamment lors de grands orages. La politique et la façon de procéder ont complètement changé. C’est une première chose.

La deuxième chose, c’est la modification des pratiques agricoles. Bien sûr, durant les 30 dernières années du siècle précédent, les améliorations foncières et les remembrements n’ont pas été très regardants sur la mise en tuyaux des ruisseaux, l’abandon des haies et l’augmentation des surfaces labourées faciles à travailler. Cela également, c’est terminé ! Chaque paysan doit avoir un minimum, très contraignant, de surfaces recouvertes de végétation ; vous ne laissez plus une terre à nu pendant l’hiver ! Toutes ces pratiques ont complètement changé et le paysan lui aussi, de gré ou de force – aussi de gré, car il s’agit de son outil de travail – a pris conscience - car il faut toujours faire des expériences douloureuses et malheureuses avant de se rendre compte que l’on a fait faux –que le sol doit être le plus perméable possible. D’ailleurs, concernant le mois de juillet, je défie nos bons donneurs de conseils et de leçons de nous dire comment on aurait pu faire des moissons sans faire de dégâts aux terrains, à moins d’avoir des hélicoptères qui puissent faucher nos céréales. On ne maîtrise donc pas tout.

A titre personnel, je tiens un registre des précipitations depuis plus de 30 ans. Je ne constate pas une modification significative, en plus ou en moins, du nombre des millimètres de pluie qui tombent année après année. Il se situe entre 750 et 1200, mais je ne saurais dire que, en 30 ans, la courbe a véritablement changé. Ayons donc un peu de confiance dans les mesures qui sont prises, de grâce. Peindre le diable sur la muraille, c’est peut-être bon en période électorale, mais ouvrons les yeux : nous allons dans la bonne direction.

Mme Muriel Thalmann (SOC) —

Non, monsieur Chollet, il y a effectivement une aggravation des événements pluvieux. Les scientifiques se sont mis d’accord sur ce point : il y a de plus en plus d’événements soudains, avec des précipitations importantes. Le problème d’une imperméabilisation du sol est reconnu. Ce n’est pas un problème droite-gauche ni un problème campagnes-villes ; c’est un problème climatique. Nous devons absolument changer nos habitudes et améliorer les mesures qui sont actuellement mises en place. Ce postulat a donc tout son sens et je vous invite à le soutenir. 

Mme Béatrice Métraux — Conseiller-ère d’Etat

Je vais reprendre les derniers propos de la députée Thalmann, parce qu’elle a raison. La compaction des sols est un enjeu climatique. Au-delà du clivage droite-gauche, il faut se préoccuper de cette compaction des sols et de leur imperméabilisation. Pourquoi s’en préoccuper ? C’est qu’à ce jour, en dehors de la protection des meilleures terres agricoles au moyen des surfaces d’assolement qui sont indispensables – il n’existe pas d’outil législatif suffisant. Nous avons simplement des articles de loi généraux, qui n’appliquent pas de levier direct explicite pour protéger le sol. La stratégie nationale des sols publiée par le Conseil fédéral, en 2020, relève ces lacunes et elle fixe des objectifs qui sont quasiment intégralement en lien direct avec l’imperméabilisation des sols et le maintien de leur qualité. Je cite par exemple l’objectif « zéro consommation de sol à l’horizon 2050 », la prise en considération des fonctions des sols dans l’aménagement du territoire, ou la sensibilisation à leurs valeurs et à leur vulnérabilité. Telle est la stratégie 2050 de la Confédération qui devra être mise en œuvre par les cantons.

Du point de vue de l’aménagement du territoire – puisque cette question a aussi été évoquée – dans le plan directeur cantonal, la mesure A11 lutte indirectement contre l’imperméabilisation des sols, puisqu’elle privilégie le développement vers l’intérieur et limite les possibilités d’étendre la zone à bâtir sur la zone agricole, et la mesure F12 qui est parallèle protège les surfaces d’assolement (SDA). Mais ce sont là des politiques sectorielles et ne visent qu’une seule fonction du sol. Les outils concrets de mise en œuvre ou les incitations pour la protection des autres fonctions des sols sont encore faibles et les moyens de l’Etat limités. Pour vous donner un exemple, l’établissement cantonal d’assurance contre l’incendie et les éléments naturels (ECA) est très préoccupé de la question des eaux de ruissellement. Nous avons souvent des discussions au sein de l’ECA sur cette question des eaux de ruissellement, avec les événements climatiques qui ont eu lieu. La réflexion qui est proposée ici peut très bien être menée en parallèle au plan d’action cantonal des sols. Et concernant la taxe, laissez l’administration gérer la question et vous faire des propositions concrètes, des propositions métier, qui s’intégreront dans le plan d’action des sols.

Fondamentalement, ce postulat devrait permettre de présenter au Grand Conseil les résultats de l’analyse et ainsi de vous impliquer. Il est vrai qu’en séance de commission, j’avais clairement indiqué que le postulat ne gênait en rien le plan d’action des sols du Conseil d’Etat. Le premier comité de pilotage a eu lieu hier : nous commençons donc déjà à travailler sur la question des sols. Le postulat devrait amener des réflexions supplémentaires. Je vous invite à ne pas vous focaliser sur la question de la taxe, parce qu’il n’est pas certain que le Conseil d’Etat proposera une taxe. Un postulat est un postulat ; d’autres mesures en lien avec les communes vous seront probablement proposées, en lien avec les PGEE ; en effet, le PGEE 2.0 a déjà été présenté à une autre commission. Toutes ces questions sont indispensables, parce que la compaction des sols est un enjeu climatique qui importe à toutes et tous.

M. Jean-Luc Chollet (UDC) —

Je ne veux pas allonger le débat, mais je crois qu’il est fondamental. Nous devons avoir le courage et la lucidité d’aborder tous les aspects, y compris ceux qui ne nous plaisent pas. Lorsque j’ai commencé ma carrière, il y a 50 ans, le canton comptait 450'000 habitantes et habitants ; il en compte 800'000 maintenant et on nous garantit que, d’ici 15 ans, il comptera 200'000 habitants de plus. Sauf à les mettre dans des maisons en pisé reliées par des pistes de brousse, la pression sera encore plus forte sur un territoire qui n’est pas extensible. Alors, je crois que le moment est venu, car nous pouvons encore changer les choses. J’ai l’optimisme de croire que nous pouvons encore avoir les 200'000 habitants supplémentaires annoncés, mais sans exercer de pression plus contraignante. J’ai également l’optimisme – et ce n’est pas une naïveté – de croire que nous en prenons la direction, à la fois avec les terres qui sont transformées, goudronnées et bétonnées, et dans l’agriculture. Cela ne se limite pas à aller donner un coup de pioche dans sa cour en bitume, pour dire « comme cela je ne paierai pas la taxe de raccordement » – qui est une taxe incitative – car cela ne sert à rien. Je crois vraiment qu’une réorientation est nécessaire et j’ai l’audace de croire que nous en prenons le chemin.

M. Pierre Dessemontet (SOC) —

J’interviens pour revenir sur un fait qui vient d’être rappelé à plusieurs reprises par certains de mes préopinants qui parlent de la liaison entre l’imperméabilisation du sol et la croissance démographique de ce canton. Certes, monsieur Chollet, depuis 50 ans, il y a eu une forte bétonisation de la Suisse, et du canton de Vaud en particulier. Pourtant, quand on examine les chiffres sur cette période, on se rend compte que l’essentiel de la bétonisation s’est produit entre 1970 et 2000, soit à une période où la croissance démographique du canton était relativement faible. C’est la répartition de la population qui a énormément changé : des gens sont sortis des villes et « colonisé » toute une série de campagnes. Depuis 2000, énormément de progrès ont été faits dans ce domaine, ce qui signifie que la hausse de la population n’est pas corrélée à une hausse correspondante de l’imperméabilisation des sols, puisque l’on a pris fortement conscience de ces effets.

Concernant les statistiques de pluviométrie, monsieur Chollet, vous avez raison sur l’année : les volumes sont à peu près les mêmes ; ils n’ont pas changé sur 50 ans et ils ne changeront pas dans les 50 années qui viennent. C’est la répartition de cette pluviométrie qui a changé : on est passé d’un régime de pluies modérées, sur de longues périodes, à des événements extrêmement violents, mais qui ne se présentent pas aux mêmes moments et qui continueront à ne pas se présenter aux mêmes moments au cours des 50 années qui viennent. Notamment, les entre-saisons vont devenir beaucoup plus violents, des saisons printanières et automnales qui deviennent beaucoup plus pluvieuses, et des étés beaucoup plus secs.

Concernant le postulat, nous pouvons donc constater déjà un avancement dans le bon sens. Mais nous avons un problème du fait que le régime pluviométrique est en train d’évoluer, et c’est un problème que nous n’aurions pas eu sans cette évolution. De ce point de vue, au sujet de l’imperméabilisation des sols, l’idée serait de revenir en arrière, non pas tellement sur la question de la croissance de la population, mais sur la manière d’occuper le territoire au cours ces 50 dernières années. Une de ces bonnes idées semble relativement modeste : partout où c’est possible, on peut essayer de désimperméabiliser le sol. C’est le sens de ce postulat et, à titre personnel, je vais le soutenir.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil prend le postulat en considération par 67 voix contre 59.

M. Alexandre Berthoud (PLR) —

Je demande le vote nominal.

Mme Laurence Cretegny (PLR) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 membres.

Celles et ceux qui acceptent de renvoyer ce postulat au Conseil d’Etat votent oui ; celles et ceux qui le refusent votent non. Les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, le Grand Conseil prend le postulat en considération par 69 voix contre 59.

* Insérer vote nominal.

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