REP_666748 - Réponse du Conseil d'Etat au Grand Conseil à l'interpellation Pierre-François Mottier et consorts - Promenons-nous dans les bois pendant que loup n'y est pas (18_INT_260).
Séance du Grand Conseil du mardi 19 janvier 2021, point 17 de l'ordre du jour
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Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourJ'ai bien pris note de la réponse du Conseil d'État à mon interpellation déposée au mois de novembre 2018. Or, depuis cette période, pas mal de louveteaux ont vu le jour et la réponse ne m'a pas satisfait, comme vous vous en douterez. Effectivement, on nous indique que tout va bien, que la situation est bien gérée et qu'il faut circuler, car il n'y a rien à voir. Or, ce n'est pas le cas. Aujourd'hui, j'ai le sentiment et l'impression que la gestion de nos grands prédateurs, et de nos loups spécifiquement, n'est pas sous contrôle. Depuis plusieurs années, certaines personnes aimeraient que nos régions puissent cohabiter avec de grands prédateurs ; je pense que cela est très difficile, voire impossible. Si je ne suis pas fondamentalement opposé à ces grands prédateurs, je suis toutefois d'avis que nous avons un gros problème : ces animaux n'ont eux-mêmes pas de prédateurs et ne sont pas régulés. S’il existe des cautèles ‑ dès que l'on a tant de moutons ou de bovins mangés ou tués par des grands prédateurs et des loups, nous avons le droit d'en abattre un ‑ c'est une fausse bonne idée.
Les bergers et les gens qui s'occupent, dans nos régions et campagnes, de moutons et d'animaux victimes de ces grands prédateurs n'ont pas peur des loups. Ce n'est pas cela le problème, tout est lié aux dégâts qu'ils occasionnent. Il faut être conscient qu'une personne surveillant entre 300 à 350 moutons a la boule au ventre en se réveillant avant d'aller contrôler son troupeau. Ils doivent même parfois euthanasier, avec un couteau de cuisine ou de poche, une brebis à l'agonie, un agneau à moitié dévoré. Nos bergers ne veulent plus de ces situations. Nous avons peur et nous ne voulons plus faire cela. Le problème lié à la gestion des chiens de garde ou encore de ramener les troupeaux tous les soirs dans des enclos pose également des difficultés au niveau des pâturages — il y a un immense piétinement — mais aussi d'accroissement de nos moutons et des brebis. Il ne s'agit pas de mesures suffisantes. Nous en arrivons à une situation dans laquelle nous avons perdu la maîtrise et le contrôle de ces grands prédateurs qui sont des animaux magnifiques — j'ai eu la chance d'en croiser quelques-uns. Nous devons donc prendre soit des mesures plus drastiques, soit des mesures supplémentaires. Cette réponse ne me convainc donc pas du tout. Un grand prédateur qui n'a lui-même pas de prédateur pose problème. Il ne faut pas oublier que nos ancêtres avaient éradiqué les grands prédateurs pour une bonne raison. La Suisse a une superficie qui n'a pas bougé. Actuellement, la population a doublé, voire triplé, par rapport au passé et nous nous rendons compte que la cohabitation avec les humains n'est pratiquement pas possible. Nous devons donc prendre des mesures bien plus strictes. L'abattage ou la chasse de ces animaux devient imminente et nous devons le faire le plus rapidement possible. En conclusion, un grand prédateur qui n'en a pas reste un problème...
La discussion est ouverte.
La réponse du Conseil d'État date de février 2019, elle a donc mis du temps avant d'arriver devant votre plénum. Toutefois, nous avions déjà réponduen 2019. Les éléments factuels et les mesures prises par le Conseil d'État doivent maintenant être précisés. Les dernières observations de loups à Genève le montrent : l'espèce des loups se déplace sur plusieurs centaines de kilomètres. Les loups sont suivis à l'échelle de la Suisse, et les études dans le canton sont prioritaires pour connaître au plus près la situation effective et anticiper — M. Mottier a entièrement raison — les attaques sur le bétail. Nous avons mis en place un monitoring et celui-ci est parfaitement efficient. Il comprend désormais un suivi toute l'année par des pièges-photos mais aussi un monitoring acoustique entre juillet et décembre ainsi que des analyses génétiques systématiques en cas d'attaques ou de découvertes d'excréments imputables à l'espèce.
Un point de situation extrêmement complet a été fait par courriel au Groupe grands carnivores, comme aux exploitants directement concernés par les attaques de loup. Trouvant important que vous soyez tenus au courant, je souhaite partager avec vous les éléments principaux donnés au Groupe grands carnivores. En date du 9 novembre dernier, la Suisse comptait 95 loups identifiés génétiquement et composés d'individus en transit et de 14 meutes. Le canton de Vaud, quant à lui, compte une meute composée d'un couple reproducteur et de deux subadultes nés en 2019 et de cinq louveteaux nés en 2020. Les analyses génétiques à disposition montrent que la meute du Jura vaudois occupe un vaste territoire qui s'étend de la route du Marchairuz ou sud-ouest de la Dôle, comprenant aussi une partie du grand Risoux et de la forêt du Risoux en France. Trois autres loups distincts génétiquement ont été identifiés entre décembre 2019 et novembre 2020, et c'est la raison pour laquelle vous n'avez pas reçu ces informations, notre réponse datant de février 2019. Le 29 décembre dernier, un loup a été observé près de Rougemont, après avoir tué un cerf mâle.
En matière de dégâts, les cantons ont adressé des demandes d'indemnisation à la Confédération pour quelque 700 animaux de rente. Dans le canton de Vaud, trois animaux de rente ont été tués, dont un veau à la Dôle et deux moutons aux Charbonnières. Aucun dommage n'est à déplorer dans les Alpes. Ce nombre restreint ne signifie pas pour autant que d'autres tentatives de prédation n'aient pas eu lieu, nous l'avons vu dans la presse récemment. Depuis toutes ces attaques, une mesure de test de parc de nuit et équipé de clôtures électrifiées à cinq fils a été mise en place sur l'alpage concerné. Il ressort de cette expérience que la mesure est réalisable, certes compliquée à mettre en œuvre — la pose est difficile en raison de la nature du terrain, et il est également difficile de faire entrer le bétail quotidiennement. Toutefois, sa mise en place doit être évaluée de cas en cas. En 2020 et pour le canton de Vaud, les coûts totaux de soutien à ces mesures se sont élevés à 71'500 francs, pris en charge par la Direction générale de l'environnement (DGE).
Pour anticiper au mieux la saison d'estivage 2021, une rencontre a eu lieu le 4 décembre dernier entre mon département et la direction de Prométerre. A cette occasion, un catalogue d'une dizaine de mesures de prévention et d'accompagnement a été présenté. Nous répondrons donc au postulat de M. le député en énumérant l'ensemble de ces mesures. Au nombre des mesures envisagées figurent notamment l'augmentation du mandat de conseil aux éleveurs pour la protection des troupeaux, via Proconseil, et l'analyse de vulnérabilité des alpages du Jura vis-à-vis du loup. Nous prévoyons également de renforcer les collaborations et les échanges entre les acteurs concernés, que ce soit au niveau cantonal ou fédéral. Nous espérons que ces mesures prises en coordination et en harmonisation avec les associations professionnelles d'agriculteurs pourront limiter autant que possible les attaques. Toutefois, de toute évidence, les mesures qui seront prises par les agriculteurs pendant l'année 2020 seront elles aussi prises en charge par la DGE. Je vous fais grâce du catalogue de mesures dont nous avons discuté et je vous propose d'en débattre lors du dépôt du postulat attendu par notre autorité.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
Ce point de l’ordre du jour est traité.