19_MOT_088 - Motion Marc-Olivier Buffat et consorts - Article 103 LATC et LPPPL - Des simplifications administratives s'imposent.
Séance du Grand Conseil du mardi 12 octobre 2021, point 9 de l'ordre du jour
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Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourLa motion vise à simplifier la procédure administrative, en particulier pour les travaux de rénovation intérieurs qui ne modifieraient pas la configuration ou l’affectation des locaux. En vertu de l’article 103, alinéa 4, de la Loi sur l’aménagement du territoire et des constructions (LATC), les communes exigent qu’une grande majorité des travaux soient soumis à annonce, y compris ceux ayant fait l’objet d’une demande d’autorisation auprès du Service cantonal du logement (SCL), dans le cadre de la Loi sur la préservation et la promotion du parc locatif (LPPPL). En outre, la commune demande également la production d’un certain nombre de pièces et de documents qui, le cas échéant, ont déjà été produits et analysés par ledit service cantonal. Par ailleurs, les travaux ne peuvent bien entendu pas commencer sans la décision de la commune.
Vous l’avez certainement lu ou avez du moins entendu parler de l’exemple du propriétaire qui souhaite réaliser l’agencement de la cuisine d’un appartement qu’il mettra en location, dans le futur. Une première demande d’autorisation de travaux est faite auprès du SCL, dans le cadre de la LPPPL. Suite à la détermination dudit service – soit dispense, soit autorisation – le propriétaire doit encore annoncer les travaux à la commune, qui va examiner la requête, exiger la production de pièces et de documents, avec le risque que cela dure plusieurs mois pour aboutir à des décisions, encore soumises à autorisation. Durant tout le processus administratif, l’appartement reste vide, alors que le canton connaît une pénurie de logements dans certains districts. En outre, un tel système alourdit inutilement la procédure et risque de décourager le propriétaire d’entreprendre des travaux. Une telle situation contribue aussi au vieillissement du parc locatif, ce qui n’est pas dans l’intérêt des locataires. Pour ce faire, le motionnaire ne demande aucune modification structurelle des dispositions légales, mais seulement une meilleure coordination et respect de la volonté du législateur afin d’éviter des appartements vides.
Lors de nos séances, le département convient que cette procédure mérite d’être simplifiée. A ce stade, au moment de la discussion de commission, il n’avait pas de proposition concrète à soumettre à la commission. Un travail avec le SCL devrait permettre de trouver une solution allant dans le sens d’une simplification. Le dispositif que le motionnaire propose est que du moment où il existe une procédure simplifiée généralement appliquée avec célérité par le canton, il ne faudrait pas déposer un deuxième dossier à la commune pour des travaux identiques. La majorité de la commission vous propose donc de prendre en considération cette motion et de la renvoyer au Conseil d’Etat.
Les députés minoritaires estiment, tout comme le motionnaire, que la situation décrite est perfectible. La législation actuelle exige une double démarche pour de simples travaux réalisés dans des logements soumis à la LPPPL : dans ce cas, la commune est consultée en tant qu’autorité compétente en matière d’urbanisme et doit se prononcer sur l’impact architectural du bâtiment, en lien avec la LATC, alors que le canton se prononce uniquement sur les coûts et la légitimité financière de procéder à des travaux selon la LPPPL. La problématique mise en lumière par le motionnaire résulte du fait que certaines communes ne respectent pas les délais ; elle ne résulte donc pas de l’article de loi. Il faudrait plutôt aller dans le sens d’une simplification du processus.
Les commissaires minoritaires estiment que l’objectif poursuivi par le motionnaire est louable, mais que la solution présentée, soit l’exemption du devoir d’annonce auprès des communes, ne permet pas de résoudre le problème. Exempter le propriétaire du devoir d’annonce poserait de nombreux problèmes :
- Introduire une exemption pourrait conduire certains propriétaires à entreprendre des travaux, de bonne foi, alors qu’ils ne détiendraient pas les autorisations nécessaires, vu qu’il est parfois délicat de faire la distinction entre les travaux qui sont soumis à un permis de construire et ceux qui ne le sont pas, vu les multiples critères à considérer.
- Introduire une exemption poserait des problèmes de conformité au droit fédéral (dispense du permis de construire en cas d’autorisation LPPPL).
- Introduire une exemption ne permettrait plus d’atteindre les objectifs visés par les deux différentes lois, la commune étant consultée en tant qu’autorité compétente en matière d’urbanisme et devant se prononcer sur l’impact architectural du bâtiment, en lien avec la LATC, alors que le canton se prononce uniquement sur les coûts et la légitimité financière de procéder à des travaux (LPPPL).
- Introduire une exemption ne permettrait plus aux communes de se prononcer sur la question patrimoniale, les travaux simples pouvant parfois provoquer des dégâts irrémédiables sur un bâtiment historique de note 3 par exemple.
Les commissaires minoritaires regrettent que le motionnaire ait refusé de transformer sa motion en postulat, conformément au vœu formulé par la conseillère d’Etat, ce qui aurait permis au Conseil d’Etat de proposer une solution idoine. Au vu de ce qui précède, la minorité de la commission invite le Grand Conseil à classer cette motion.
La discussion est ouverte.
Tout d’abord, pour répondre au dernier argument de la rapportrice de minorité qui semble me reprocher de ne pas avoir accepté la transformation en postulat, j’aimerais vous dire que chat échaudé craint l’eau froide. En effet, chaque fois que j’ai accepté de transformer mes textes en postulats, on ne peut pas dire qu’ils aient débouché sur des améliorations tangibles. La dernière fois que j’ai admis une transformation en postulat, j’avais d’ailleurs averti que c’était la dernière fois et que l’on ne m’y reprendrait plus. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé de maintenir la forme de la motion, mais je précise que le Conseil d’Etat dispose d’une marge d’appréciation pour y répondre, bien entendu.
De quoi parlons-nous exactement ? Il s’agit des doubles autorisations lorsqu’un propriétaire veut entreprendre des travaux. A cet égard, je suis sur le site de l’Etat de Vaud que vous pouvez consulter également. Au point consacré à l’article 103 LATC se trouve une planche : quand doit-on demander une autorisation de construire, à quel moment faire un permis de construire, combien cela coûte-t-il, etc. Mon texte ne change absolument rien à ce qui y est expliqué, mais simplifie le processus administratif. Il faut en effet constater qu’aujourd’hui comme demain et après-demain, il sera toujours difficile de savoir quels sont les travaux soumis à autorisation et lesquels ne le sont pas ; cela fait partie de la jurisprudence et de la pratique. Vous ne pourrez jamais empêcher un propriétaire d’entreprendre des travaux parce qu’il estimait, à tort ou à raison, qu’une autorisation n’était pas nécessaire. Jamais un instrument juridique n’empêchera quelqu’un d’entreprendre des travaux dans son immeuble au mépris, le cas échéant, d’un certificat amiante qui serait obligatoire, etc. Mon intervention n’a donc nullement l’intention de régler ce problème, qui demeurera quoi qu’il en soit. Que ce soit en zone à bâtir, sur des immeubles, sur des transformations, celui qui veut faire des travaux illicitement contrevient à la loi, ce qui peut éventuellement revêtir un caractère pénal, mais vous ne pouvez pas l’attacher avec des cordes pour l’empêcher d’agir de façon inadéquate.
L’article 103 LATC réserve déjà les lois spéciales ; la loi le prévoit expressément. Pourtant, certaines communes se demandent si la question ne concernerait pas plutôt la LPPPL. Je me demande bien pourquoi puisqu’il s’agit à l’évidence d’une loi spéciale – lex specialis – et même d’une loi postérieure à la précédente. Seulement lorsque nous avons parlé de la LPPPL, il y avait beaucoup de problèmes à résoudre, vous vous souvenez certainement de la question du droit de préemption et des terrains constructibles ou non, de sorte que l’on a sans doute oublié de mentionner que la LPPPL devait être concernée par la réserve mentionnée à l’article 103, alinéa 6, LATC, alors qu’à mon avis, c’est une évidence. C’est d’autant plus vrai que si vous relisez l’article 6 de la LPPPL votée par le peuple et par ce Grand Conseil – et que j’avais d’ailleurs soutenue à l’encontre de la volonté majoritaire de mon propre parti – vous verrez bien qu’il y avait une volonté très nette d’aller rapidement de l’avant et d’éviter que des appartements restent vides, comme l’a très bien rappelé le rapporteur de majorité.
Or, aujourd’hui, on arrive au résultat inverse de ce qui est voulu par la loi et des appartements restent vides alors que l’on attend les autorisations de faire des travaux. Et je ne vous explique pas la situation en période de pandémie et de télétravail : ce fut évidemment cent fois pire, avec des appartements restés vides de six mois à une année, alors qu’on dispose déjà d’une autorisation cantonale en vertu de la LPPPL ! On fait du travail à double entre le canton et la commune, on ralentit les processus et on crée un risque de décisions contradictoires, même si je vous avoue ne pas en avoir connaissance. Dans cette procédure administrative, on marche donc à l’envers !
Nous souhaitons que la commune et le canton se parlent et que lors du dépôt d’un dossier LPPPL, cela vaille aussi pour autorisation et déclaration de travaux au sens de l’article 103 LATC. Cela me semble être d’une évidence telle qu’il n’aurait pas dû être nécessaire de déposer cette motion. Je vous invite à soutenir ce texte et à le renvoyer au Conseil d’Etat et vous en remercie d’avance.
Les Verts soutiendront bien entendu le rapport de minorité, soit demander que la motion soit classée. Ce n’est pas que le problème que M. Buffat vient d’exposer n’existe pas, mais parce que la solution proposée aujourd’hui, comme l’a bien démontré Mme la rapportrice de minorité, pose des problèmes structurels qui empêchent de l’accepter. Je comprends que M. Buffat ait pu être échaudé par la proposition de transformation en postulat, mais j’estime néanmoins que cela aurait été bénéfique, car je crois – c’est peut-être de la naïveté ? – que le Conseil d’Etat aurait pu proposer une solution qui satisfasse tous les partis, ce qui serait assez positif. Finalement, je continue à regretter que nous ne puissions débattre d’un postulat plutôt que d’une motion. Pour cette raison, nous préconisons le refus de ce texte.
En transformant sa motion en postulat, notre collègue Buffat aurait permis au gouvernement de proposer une solution adéquate pour les communes qui ne respectent pas les délais, par exemple. Le motionnaire lui-même ne connaît pas de procédure contradictoire ! C’est dire si l’enjeu, dans cette affaire, n’est pas immense. Sous prétexte de simplification administrative, on crée un dispositif qui se heurte à de gros écueils, justement pour les communes. En effet, ces dernières ont des responsabilités en matière d’urbanisme et de protection du patrimoine et si elles ne sont pas informées des travaux, elles ne pourront pas en juger comme il se doit. Il y a des problèmes de conformité au droit fédéral et, de manière générale, c’est une atteinte aux lois sur le parc locatif dûment approuvées par le peuple en février 2017. Autrement dit, il s’agit à nouveau, de la part d’un député que l’on sait très engagé au service des bailleurs, de trouver des solutions pour simplifier en fait les tâches administratives, malheureusement au détriment des locataires. C’est là toute la sensibilité du sujet, et je le reconnais volontiers, en tant que co-président de l’Association des locataires de Lausanne et membre du bureau de la même association sur le plan vaudois.
J’interviens pour rappeler que le Conseil d’Etat s’était déclaré tout à fait prêt à trouver une solution pour améliorer le processus. Je rappelle également que les propositions faites par le motionnaire sont également contraires au droit puisqu’elles introduiraient des problématiques au niveau du droit patrimonial, par exemple. Le Conseil d’Etat a dit qu’il allait travailler sur cette problématique et, par conséquent, adopter cette motion reviendrait à compliquer les choses alors que les travaux sont en bonne voie.
On peut être pour ou contre, mais je ne peux pas accepter que l’on balance que c’est contraire au droit ! A quoi est-ce contraire ? A rien du tout et en tout cas pas à l’article 103 LATC, puisqu’il serait simplement précisé et même pas modifié. L’article 103 LATC réserve déjà des lois spéciales, alors mesdames et messieurs mes contradicteurs, dépêchez-vous de le modifier ! Il existe quantité de cas, et pas uniquement la LPPPL, dans lesquels les lois spéciales sont réservées, en particulier en matière de protection de la nature, des sites, des paysages et des monuments historiques et cela ne vous dérange pas une seule seconde. Le texte existe déjà.
Ensuite, cela me choque que M. Zwahlen vienne dire que c’est contraire au droit. Cher collègue, relisez l’article 6 et en particulier l’alinéa 3 de la LPPPL ! On voulait des procédures rapides ; on voulait éviter que des logements demeurent vides. Oui, je le confirme ici et vous le savez par le registre de mes intérêts : je pratique le droit du bail en tant qu’avocat et, dans ce cadre, je représente des bailleurs. Mais c’est la pratique et je dirais que c’est une proposition win-win : le propriétaire a un intérêt évident à ce que cela aille rapidement de l’avant, et les locataires qui cherchent un appartement également. Il est absurde et contraire à la volonté du législateur – je le dis et le répète – ainsi que contraire à la volonté du peuple qui souhaite que les choses aillent rapidement de l’avant, de bloquer des rénovations d’appartements pendant six ou huit mois supplémentaires par des procédures administratives inutiles et redondantes, qui ne correspondent à aucune nécessité quelconque. Et cela, encore une fois, même si vous croyez que le Conseil d’Etat dispose de solutions miracles.
Pendant que je vous écoutais, je suis allé consulter le site de Montreux, qui dit qu’il faut bien se renseigner pour savoir quels projets sont soumis à autorisation. Il n’y a pas de règle absolue, en la matière, mais si vous avez une autorisation LPPPL, puisqu’il s’agit d’une loi spéciale sur la préservation du parc locatif, c’est bien la preuve que ces travaux peuvent être entrepris sans autres. Il s’agit précisément d’une loi spéciale au sens de l’article 103 LATC.
Dans tout article de loi où l’on peut simplifier, pour rendre la vie plus facile à ceux qui utilisent ces règlements, il faut le faire. C’est une première raison. Ensuite, lisez bien l’article 6 que M. Buffat propose :
« LATC, Article 103 Alinéa 6 : ne sont pas soumis à la procédure des alinéas précédents :
a) Les objets ne relevant pas de la souveraineté cantonale (inchangés).
b) Les objets dispensés d’autorisation par une législation cantonale spéciale ou qui ont déjà fait l’objet d’une autorisation ou dérogation en application de la LPPPL. »
Cela signifie qu’une fois ces autorisations obtenues, il n’y a pas besoin de faire encore une deuxième démarche ou une deuxième demande. Cela a été clairement expliqué par M. Buffat et j’estime qu’il faut l’accepter comme cela nous est proposé.
Je répète ce que j’ai dit tout à l’heure. Effectivement, lorsque nous avons traité cette motion, le département a aisément convenu que la procédure méritait une simplification. Ce que M. Buffat aimerait instiller, avec sa motion, consiste à simplifier cette procédure au maximum. C’est aussi pourquoi, en grande partie et même en majorité, la commission et son président de majorité vous encouragent fortement et vivement à appuyer cette motion et à la prendre en considération.
La motion Marc-Olivier Buffat propose une amélioration de la coordination entre la LPPPL et la LATC qui devrait amener une simplification administrative pour les propriétaires et pour les locataires. Ce sujet avait déjà été traité en commission, en 2019. Dans tous les cas, il devrait être repris dans la révision de la LATC, partie construction, qui est en cours de rédaction.
Quand un propriétaire entreprend des travaux de minime importance, il peut être dispensé de permis de construire, selon la LATC et dispensé d’autorisation selon la LPPPL. Pour rappel, l’autorisation selon la LPPPL est exigée pour tous les travaux qui provoquent une plus-value sur l’immeuble. C’est donc une autorisation qui vient en plus du permis de construire. Logiquement, ces travaux de faible importance devraient être très simples à réaliser, d’un point de vue administratif. Toutefois, quelle que soit leur importance et même dans les cas bagatelle dont je viens de parler, le propriétaire doit annoncer à la municipalité qu’il fait des travaux et c’est cette dernière qui décide si un permis est nécessaire ou non. Le propriétaire doit aussi demander une dispense d’autorisation à la Division logement au sein de mon département. Il doit donc contacter deux autorités, ce qui peut prendre du temps, ainsi que l’ont relevé à la fois la majorité et la minorité de la commission, et l’ensemble des députés qui se sont exprimés ; je pense que nous en sommes tous conscients. Nous accueillons donc volontiers le principe d’une simplification, quelle que soit l’issue du vote sur la motion.
Simplement, les pistes proposées par le motionnaire ne nous paraissent pas adéquates. La première proposition de réduction du devoir d’annonce pourrait poser problème, car entre les travaux soumis à permis de construire et ceux qui en sont dispensés, la différence est difficile à établir et nous courons là un risque que des propriétaires entreprennent des travaux sans autorisation. Ensuite, la deuxième proposition concernant la dispense de permis de construire en raison d’une autorisation LPPPL pose un problème de conformité au droit fédéral du fait que la LPPPL ne règle pas les problèmes de permis de construire. Ainsi, si la motion était acceptée, nous la prendrions comme une volonté de simplification des procédures, un souci partagé par le Conseil d’Etat. Nous verrions ensuite quels sont les meilleurs moyens de procéder à une simplification, mais sans qu’ils soient forcément en lien avec les propositions faites par M. Buffat.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
Le Grand Conseil prend la motion en considération par 72 voix contre 50 et 2 abstentions.