21_POS_51 - Postulat Dylan Karlen - Pour une analyse des effets de l’utilisation de pistolets à impulsions électriques (Taser) (Développement et demande de prise en considération immédiate).
Séance du Grand Conseil du mardi 12 octobre 2021, point 17 de l'ordre du jour
Texte déposé
L’équipement et l’armement des corps de police doivent en permanence évoluer pour s’adapter aux nouvelles menaces. Il en découle qu’une réévaluation régulière des moyens octroyés aux femmes et hommes de terrain fait partie des impératifs de la politique sécuritaire de toute collectivité publique. L’évolution des menaces et de la nature des engagements des forces d’intervention, dans le Canton de Vaud comme ailleurs, doivent pousser à reprendre cette réflexion.
Il ne s’agit pas de dire que les forces de police ont répondu de manière erronée ou inadaptée aux récentes situations auxquelles elles ont été confrontées – bien au contraire. Tout en réaffirmant la pleine confiance que nous pouvons avoir à l’égard des agents de terrain et la reconnaissance pour leur engagement et leur professionnalisme, y compris face à l’augmentation des agressions violentes dont ils sont victimes, il paraît opportun d’analyser l’adaptation de leur équipement face au développement de la situation sécuritaire.
Depuis 2008, nombre de corps de police ont acquis des pistolets à impulsions électriques, afin de minimiser les risques lors d’interventions nécessitant l’incapacitation d’un forcené. Alors qu’en 2010, l’arme de service était encore utilisée 29 fois en Suisse, elle n’est plus engagée qu’entre 8 et 15 fois par année depuis 2012.
Utilisatrice depuis plusieurs années, la police cantonale zurichoise vient d’annoncer l’achat de 170 nouveaux appareils, mentionnant que l’expérience a démontré que « les situations particulièrement dangereuses peuvent être mises sous contrôle de manière rapide et proportionnée[1] ». Il est par ailleurs précisé qu’en 2020, le Taser n’a été utilisé qu’une fois, alors que dans 14 cas, la seule menace de son utilisation a permis de mettre un terme à une situation dangereuse.
Un tel constat est confirmé par le canton de Berne qui, dans un rapport très complet, indique que, lors de l’utilisation du Taser, « le risque est nettement moindre aussi bien pour les agresseurs que pour les forces d’engagement, par rapport au recours à d’autres moyens de contrainte (notamment l’arme à feu, mais aussi le bâton)[2] ».
Dans le Canton de Vaud, le DARD est doté d’un tel dispositif. D’autres polices suisses et romandes ont pris une décision similaire, limitant parfois son usage à des forces d’intervention et, d’autres fois, décidant d’équiper toutes les patrouilles.
Il y a donc largement matière à étude. Les années d’expérience permettront de mettre en évidence le nombre d’utilisations, les situations typiques d’engagement, le nombre de personnes ayant subi des séquelles graves et l’incidence sur l’utilisation d’armes à feu en corrélation avec l’évolution des engagements en situation dangereuse.
En conclusion, le présent postulat invite le Conseil d’Etat à étudier les effets de l’utilisation de pistolets à impulsions électriques sur l'efficacité des interventions et la sécurité des agents de terrain et l’opportunité d’équiper ou non tout ou partie des gendarmes de terrain, en prêtant une attention toute particulière :
- aux demandes et opinions des hommes et femmes de terrain ;
- à l’évolution de la nature des interventions des agents ;
- à l’analyse de l’utilisation de pistolets à impulsions électriques par les corps de police qui en sont équipés dans le reste du pays ;
- au degré d’adaptation de chaque moyen d’engagement vis-à-vis de chaque situation, notamment en lien avec les infractions violentes.
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[1] Neue destabilisierungsgeräte für die Kantonspolizei Zürich, Medienmitteilung, 24. 08 2021.
[2] Examen des effectifs de la police cantonale, rapport du Conseil-exécutif en réponse à la motion 138-2016 Wüthrich (Huttwil, PS), 27 février 2019, p. 34.
Conclusion
Prise en considération immédiate
Documents
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourTout en réaffirmant la pleine confiance que nous pouvons avoir à l’égard des agents de police de terrain, y compris face à l’augmentation des agressions violentes dont ils sont victimes, il paraît opportun d’analyser l’adaptation de leur équipement face au développement de la situation sécuritaire. En effet, l’évolution des menaces et de la nature des engagements des forces d’intervention, dans le canton de Vaud comme ailleurs, doivent pousser à reprendre cette réflexion.
L’utilisation du pistolet à impulsion électrique par les forces de l’ordre fait actuellement débat aussi bien dans l’opinion publique qu’au sein des corps de police. Les ONG condamnent fermement son emploi de manière systématique, arguant que ces armes peuvent entraîner la mort, notamment sur des personnes souffrant de problèmes cardiaques. Cependant, plusieurs cantons ont tiré des bilans positifs de l’introduction du taser dans l’équipement standard des agents de terrain, chiffres encourageants à l’appui, en particulier concernant la sécurité des policiers, son impact dissuasif sur le comportement du forcené et la limitation de l’arme à feu.
Contact pris auprès de gendarmes, il s’avère que le sujet divise les praticiens. Il est par exemple rappelé que le ceinturon n’est pas extensible à volonté. Il y a donc largement matière à étude. Les années d’expérience permettront de mettre en évidence le nombre d’utilisations, des situations typiques d’engagement, le nombre de personnes ayant subi des séquelles graves et l’incidence sur l’utilisation d’armes à feu en corrélation avec l’évolution des engagements en situation dangereuse.
Le présent postulat invite le Conseil d’Etat à étudier d’une part, les effets de l’utilisation de pistolets à impulsion électrique sur l’efficacité des interventions et la sécurité des agents de terrain, et d’autre part, l’opportunité d’équiper ou non, tout ou partie des gendarmes de terrain. Considérant qu’une demande sans parti pris de réalisation d’une étude complète sur le sujet ne nécessitait pas d’importants débats quant à son opportunité, j’ai opté pour la prise en considération immédiate et le renvoi au Conseil d’Etat, le passage en commission n’amenant pas de réelle valeur ajoutée à la demande formulée.
La discussion est ouverte.
Je n’ai pas véritablement le même point de vue que M. Karlen sur la complexité du sujet. Comme il l’a indiqué, la question fait débat, notamment quant aux problèmes amenés par ces tasers, que ce soit pour les personnes cardiaques ou les femmes qui apparemment y réagissent assez fortement. Par conséquent, je demande un renvoi en commission pour que nous puissions recevoir des éléments techniques sur le sujet, n’étant moi-même pas une spécialiste – comme, me semble-t-il, beaucoup d’entre nous. J’espère ainsi que nous pourrons en discuter de façon plus sereine et approfondie, forts d’éléments techniques et de retours du terrain qui me semblent particulièrement importants.
Il y a quelques minutes, nous venons de renvoyer en commission une proposition traitant de l’addiction aux jeux d’argent pour un complément d’information. Il serait très surprenant de renvoyer ce postulat directement au Conseil d’Etat, alors que le taser pose de nombreuses questions, constitue une arme très contestée et contestable. Dès lors, il me paraît nécessaire que ce thème soit traité en commission.
Comme mon collègue Philippe Leuba pour l’objet précédent, je vous invite à renvoyer ce postulat en commission, et ce pour les raisons suivantes. En effet, un certain nombre de questions se posent, puisque le taser – et on le constate dans de nombreuses études publiées – n’est pas une garantie absolue d’éviter l’usage de l’arme à feu. Ainsi, il faudrait voir comment les polices zurichoises et bernoises – exemples cités par M. Karlen – ont utilisé le taser, et ce que cela a signifié pour la personne qui a subi cette arme. Il faut également définir les catégories de policiers qui doivent être équipés ou qui seraient ainsi équipés, ce que seuls les policiers ou commandants de police peuvent dire.
Il faut également fournir une formation à l'utilisation du taser dont les modalités devraient être définies. Ensuite, vous indiquez que les gendarmes ne sont pas les seuls intervenants sur le terrain. En effet, les policiers communaux sont largement confrontés à des situations où l’usage du taser pourrait être envisagé. Toutefois, aucune base légale ne peut contraindre les polices communales à s’en équiper. Je vous rappelle que le canton de Vaud comprend dix polices. De ce fait, il est impossible d’avoir une police cantonale munie d’un équipement et les neuf autres d’en être privées. Ainsi, la question se pose. A ce jour, les polices municipales n’ont pas du tout été consultées ; j’ignore complètement ce que leur commandant ou leur responsable politique pensent.
Quant à la question médicale, elle se pose parce des études montrent que le taser peut s’avérer dangereux pour les personnes aux prédispositions cardiaques. En outre, l’expérience internationale via la police des polices en Grande-Bretagne – l’Inspection générale de la police nationale (IGPN) en France – a mis le doigt et critiqué l’usage trop fréquent du taser. Il faut par conséquent aussi observer comment et pourquoi utiliser un taser. Ce sont des questions primordiales; vous en aurez certainement d’autres en commission.
Enfin, comme vous l’avez indiqué, monsieur Karlen, le débat autour du taser est très controversé, y compris dans les corps de police. Ainsi, une discussion au sein de votre plénum après un passage en commission amènerait tout son sens à l’orientation du Conseil d’Etat.
Puisque nous nous acheminons vraisemblablement vers un renvoi en commission – que je soutiens – j’’aimerais que celle-ci se penche sur l’usage du taser versus le coup de feu. J’avais toujours cru qu’on avait mis le taser sur pied pour éviter un dégainage trop rapide de l’arme – faire feu et réfléchir après ! Le taser n’a peut-être pas apporté toutes les réponses souhaitées. Je prends bonne note des propos de Mme la conseillère d’Etat. Pour moi, le débat devrait porter sur la question suivante : le taser permet-il de diminuer au maximum l’usage de l’arme à feu – qui est à mon avis, ces derniers temps, en Europe, utilisée beaucoup plus facilement qu’avant – ou accepter que le taser n’est pas une arme totalement inoffensive non plus. Il serait opportun que la commission se penche sur cette question. En tant que simple citoyen lambda, je me suis demandé si à la gare de Morges, l’usage d’un taser à la place d’une arme à feu n’aurait pas été plus approprié. Je l’ignore. Mais il me semble que c’est une question que je suis en droit de me poser.
J’ai en mémoire cette vidéo d’Oscar Freysinger qui s’était fait filmer en train de se faire « taser », se mettant ouvertement en scène. Nous savons que c’est une pratique qui lui avait moyennement réussi par la suite – mais ce n’est pas le sujet. Le taser demeure une pratique très controversée, en particulier lorsqu’on ne s’y attend pas, qui peut avoir des conséquences lourdes. Comme l’a dit Mme la conseillère d’Etat, il s’agit d’un sujet délicat. A tout le moins, nous devons éviter un renvoi direct de ce texte au Conseil d’Etat et en discuter calmement en commission. Il me semble que c’est la meilleure chose à faire.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
La présidenterappelle que l’auteur ayant demandé le renvoi direct au Conseil d’Etat et certains membres le renvoi en commission, le plénum doit décider du cheminement du postulat.
Le renvoi à une commission, opposé au renvoi direct au Conseil d’Etat, est choisi par 64 voix contre 46.
Le postulat, cosigné par au moins 20 membres, est renvoyé à l'examen d'une commission.