21_MOT_1 - Motion Sébastien Cala et consorts - N'oublions pas les indépendant.e.s ! (Développement et demande de prise en considération immédiate).

Séance du Grand Conseil du mardi 26 janvier 2021, point 14 de l'ordre du jour

Texte déposé

Le 13 janvier dernier, le Conseil fédéral a annoncé de nouvelles mesures sanitaires ainsi que de nouvelles aides pour les secteurs économiques les plus touchés par les restrictions. La définition des cas de rigueur est en effet assouplie pour les entreprises dont l’activité a été interrompue par décisions des autorités fédérales ou cantonales durant 40 jours civils depuis le 1er novembre 2020. C’est une nouvelle positive qui permet notamment au secteur de la restauration ou de l’événementiel de pouvoir obtenir des aides de manière facilitée.

Le Conseil d’État a également annoncé de nouvelles mesures le 14 janvier en complément des soutiens fédéraux.

 

A la lecture de l’Ordonnance fédérale sur les mesures en cas de pertes de gain en lien avec le coronavirus (COVID-19)[1], on s’aperçoit cependant que la situation reste inchangée pour les acteurs dont l’activité n’est pas interrompue par les pouvoirs publics mais qui voient toutefois leur chiffre d’affaire chuter. Pour obtenir un soutien, ils doivent prouver que leur chiffre d’affaire a baissé de 40% au moins par rapport à la moyenne des cinq derniers exercices. Nombre de petits indépendants n’ont par exemple plus suffisamment de client·e·s pour s’assurer un chiffre d’affaire leur permettant de subvenir à leurs besoins et faire face à leurs charges. Rappelons en effet qu’au printemps 2020, la Confédération avait ouvert les APG aux indépendants touchés par la crise et cela jusqu’au 16 septembre, s’ils avaient déclaré un revenu AVS d’au moins 10'000 CHF et d’au maximum 90'000 CHF par année[2]. Depuis lors, ces personnes n’ont plus de soutien alors qu’après une accalmie estivale la situation sanitaire et économique s’est grandement détériorée durant l’automne, empêchant ces actrices/acteurs économiques de pouvoir exercer leur activité dans des conditions normales.

 

Alors que la campagne de vaccination bat son plein et que l’espoir d’une sortie de crise augmente sensiblement, il serait dommageable à l’ensemble de la société de voir ces petits indépendants ne pas réussir à passer la crise et se retrouver à l’aide sociale. Les indépendants n’ont, pour rappel, pas droit aux indemnités de chômage. Un soutien financier apparaît dès lors essentiel.  

 

Au vu de ce qui précède, les sous-signé.e.s ont l’honneur de demander au Conseil d’État de proposer au Grand Conseil une base légale qui :

 

- Permette au Conseil d’État d’accorder une aide à fonds perdu aux indépendants :

  • qui ne peuvent être éligibles aux conditions des cas de rigueur édictées par l’Ordonnance fédérale sur les mesures en cas de pertes de gain en lien avec le coronavirus (COVID-19)[3] ;
  • dont le chiffre d’affaire a chuté de 20% au moins entre les années civiles 2019 et 2020 ;
  • dont le revenu net de l’activité lucrative est inférieur à 90'000 CHF.

- Fixe ce soutien financier à un versement unique équivalent à 10% du chiffre d’affaire 2020 mais au maximum 6’000 CHF ;

 

[1]https://www.admin.ch/opc/fr/classified-compilation/20200841/index.html (Consulté le 14 janvier 2021).

[2]COVID-19 FAQ – Économie – Canton de Vaud, https://www.vd.ch/fileadmin/user_upload/themes/economie_emploi/entreprises/Q_A_Entreprises.pdf (Consulté le 14 janvier 2021)

[3]Ibidem.

Conclusion

Prise en considération immédiate et renvoi au CE

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Muriel Cuendet SchmidtSOC
Cédric EchenardSOC
Carine CarvalhoSOC
Stéphane MontangeroSOC
Denis CorbozSOC
Sébastien PedroliSOC
Eliane DesarzensSOC
Cendrine CachemailleSOC
Claire Attinger DoepperSOC
Salvatore GuarnaSOC
Vassilis Venizelos
Jean TschoppSOC
Julien EggenbergerSOC
Valérie InduniSOC
Sylvie Pittet BlanchetteSOC
Alexandre DémétriadèsSOC
Stéphane BaletSOC
Graziella SchallerV'L
Vincent KellerEP
Yves PaccaudSOC
Delphine ProbstSOC
Claire RichardV'L
Jérôme Christen
Pierre DessemontetSOC
Muriel ThalmannSOC
Olivier GfellerSOC
Vincent JaquesSOC
Monique RyfSOC

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
M. Sébastien Cala (SOC) —

Comme le soulignait le Conseil d’Etat en fin de semaine dernière et encore aujourd’hui, la campagne de vaccination a accéléré dans le canton et sur tout le territoire helvétique. Cette information laisse présager une amélioration de la situation sanitaire au printemps, au mieux. Si cette nouvelle est réjouissante, force est de constater que nombre d’acteurs économiques de notre canton ne parviendront pas à tenir jusque-là. Aujourd’hui, les conditions d’octroi des aides fédérales pour faire face à la crise économique ont été assouplies, particulièrement pour les secteurs fermés par les autorités pendant plus de 40 jours civils. Celles et ceux qui ne peuvent y prétendre se retrouvent, par contre, dans des situations très précaires. Cela concerne de nombreux indépendants de notre canton, toutes celles et tous ceux dont l’activité n’a pas été interrompue, mais auxquels les conditions actuelles ne permettent plus la rentabilité. 20, 25, 30, 35% de chiffre d’affaire en moins et les factures impayées s’accumulent. Tant que ces indépendants restent en-dessous de 40 % de perte de chiffre d'affaire, ils ne peuvent percevoir d’aide fédérale. Quelles sont alors les possibilités offertes à ces hommes et à ces femmes qui, comme nous toutes et tous, participent à la bonne marche de la société et de ce canton ? La réponse est simple : mis à part l’emprunt, il n’y en a aucune. Aujourd’hui, la Confédération n’apporte aucune solution à ces indépendants qui, par ailleurs, n’ont pas accès aux indemnités de chômage. Le Conseil fédéral leur avait ouvert les allocations pour perte de gain (APG) jusqu’au 16 septembre, mais depuis, il n’y a plus rien. Or, depuis le mois de septembre, on ne peut pas considérer que la situation pandémique et économique se soit améliorée, bien au contraire.

On ne peut continuer ainsi et laisser ces indépendantes et indépendants sans autre perspective que d’accumuler des factures impayées et de s’endetter. Afin que ces personnes réussissent à traverser cette crise, il apparaît essentiel que l’Etat de Vaud leur accorde un soutien. C’est pourquoi j’ai déposé la présente motion qui demande la création d’une base légale permettant au Conseil d’Etat d’apporter une aide à fonds perdus aux indépendants:

  • qui ne peuvent être éligibles aux conditions des cas de rigueur édictées par l'Ordonnance fédérale sur les mesures en cas de pertes de gain en lien avec le coronavirus (COVID-19);
  • dont le chiffre d'affaire a chuté de 20% au moins entre les années civiles 2019 et 2020 ;
  • dont le revenu net de l'activité lucrative est inférieur à 90'000 CHF.

Le soutien financier est fixé à un versement unique équivalent à 10 % du chiffre d’affaire 2020, mais au maximum à 6000 francs. La base légale existe et le Conseil d’Etat peut répondre à cette motion par un décret. De ce fait et vu l’urgence de la situation, je demande le renvoi direct au Conseil d’Etat, avec le soutien des chefs de groupes socialiste, Vert, Vert-libéraux, Ensemble à Gauche et POP, ainsi que les LIBRES. Je les remercie d’avoir accueilli favorablement cette motion et espère que vous ferez de même.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

La discussion est ouverte.

M. Philippe Jobin (UDC) —

Je comprends bien cette motion qui vise à soutenir les moins bien lotis parmi les indépendants, victimes de cette crise. Par contre, il me semble extrêmement important de pouvoir coordonner les aides déjà à disposition et celles qui pourraient être admises par le biais de la motion. Elle impliquerait des modifications — monsieur le conseiller d’Etat, je parle sous votre contrôle. De nouveaux formulaires et un nouveau système informatique devraient être mis en place ou peaufinés, et une formation devrait être faite sur les nouvelles méthodes de calcul. C’est un premier point pour lequel j’attends confirmation. Pour le moment, le Conseil d’Etat dispose du système mis en place pour les cas de rigueur actuels. Le système mis en place pourra-t-il également s’appliquer aux nouveaux cas de rigueur, comme le propose M. Cala, afin que tout cela soit mis en place rapidement ?

En fonction de la discussion, mon groupe politique trouverait utile de renvoyer la motion au Conseil d’Etat pour qu’il réponde aux différentes questions, mais par contre nous demanderions une accélération de son traitement afin qu’elle puisse voir le jour d’ici deux semaines, pour avoir rapidement une proposition du Conseil d’Etat. Cette motion me paraît aussi importante que les décrets que nous avons avalisés pour le Conseil d’Etat et pour le canton de Vaud afin de pouvoir aider ceux qui en ont réellement besoin dans ce cas de figure particulier. Je remercie monsieur le conseiller d’Etat de répondre à mes questions et d’éclairer les lanternes de mon groupe. Nous demandons pour le moment le renvoi en commission.

M. Raphaël Mahaim (VER) —

J’appuie vigoureusement la motion de notre collègue Cala, qui tombe à point nommé. J’aimerais apporter quelques remarques, qui font écho à celles de Philippe Jobin. Lors des débats autour des décrets votés avant Noël, vous vous souvenez certainement que nous avons longuement discuté du seuil de 40 %, que Sébastien Cala vient de montrer à nouveau du doigt et qui relève vraiment de l’aberration absolue. En effet, on comprend bien que la santé financière absolue d’une entreprise ne dépend pas de savoir si l’on a perdu plus ou moins de 40 % de son chiffre d’affaire et que d’autres indicateurs sont plus pertinents. Lors de ces débats d’avant Noël, une proposition du Parlement avait été reprise par le Conseil d’Etat sous une forme différente et nous avions donné mandat au Conseil d’Etat de tout faire pour casser l’effet de seuil à 40 % et pour ouvrir le dispositif vaudois des cas de rigueur aux entreprises et indépendants qui n’auraient, par hypothèse, pas atteint les 40 % de perte du chiffre d’affaire.

D’après ce que j’ai pu comprendre dans les communications récentes du Conseil d’Etat — et je pose la question à M. le conseiller d’Etat — il a été confirmé que le chiffre de 40 % n’était plus une condition indispensable pour « cocher les cases » cas de rigueur. J’ai cru comprendre que, du côté de la Confédération, ils avaient fait sauter le seuil des 40 %, mais cela uniquement dans certains cas où les fermetures ont été imposées et pas nécessairement pour les autres secteurs ; je ne suis pas sûr d’avoir entièrement bien compris où nous en sommes.

Ainsi, la question, par laquelle je conclus, est double. D’abord, il est évident qu’il faut renvoyer la motion afin que le Parlement confie au Conseil d’Etat, de toute urgence, le soin de combler ce trou dans le système. En effet, on voit bien qu’il y a différents mécanismes d’aide, mais que certaines entreprises ou certains indépendants passent entre les mailles du filet, ce qui est inacceptable. C’est là ma première demande en lien avec la motion Cala. Ma deuxième demande consiste à implorer le Conseil d’Etat de communiquer très largement sur ses critères et notamment sur le fait que la fameuse barre des 40 % n’est plus une condition à remplir, selon la demande faite en décembre par le Parlement et reprise à son compte par le gouvernement. En effet, quand on discute avec des citoyens vaudois ou des entreprises en difficulté, beaucoup reviennent vers nous en disant « finalement, je ne vais pas déposer de demande d’aide, parce que je n’ai pas atteint la fameuse barre de 40 % et finalement, autant mettre la clé sous la porte. » Il serait inadmissible et dramatique que des entreprises mettent la clé sous la porte, alors que la volonté du Parlement a été très claire : nous souhaitons ouvrir les dispositifs d’aide aux cas de rigueur également en dessous de ce seuil. Pour toutes ces raisons, je vous demande d’accepter chaleureusement la motion Cala. Je me tourne également vers le Conseil d’Etat à qui je demande de communiquer largement sur ces questions pour que l’information circule — si elle est avérée, car ce n’est malheureusement pas toujours le cas — et que les entreprises puissent faire le nécessaire.

Mme Carole Dubois (PLR) —

La motion Cala exprime une préoccupation commune à l’ensemble des députés de ce Parlement, ainsi que l’ont déjà évoqué mes préopinants, à savoir éviter que certains acteurs économiques passent à travers les mailles du filet. Lors de la discussion du décret sur les cas de rigueur, en décembre dernier, le sujet a été largement évoqué par les deux bords de l’hémicycle. Suite à l’adoption de cet exposé des motifs et projet de décret, le Conseil d’Etat a édicté un arrêté sur l’attribution des cas de rigueur, dont la dernière évolution date de mercredi dernier, en abaissant le seuil d’éligibilité à 50'000 francs de chiffre d’affaire. La motion Cala intervient après les discussions de décembre dernier sur le projet de décret et après les décisions annoncées mercredi dernier par le Conseil d’Etat. Elle ne prend pas en compte la mise en place d’un système d’indemnisation ni n’en analyse le déploiement. Le groupe PLR s’inquiète que l’arrivée d’une nouvelle aide ne tienne pas compte du dispositif fédéral et vienne le bloquer alors qu’il commence tout juste à déployer des effets. Le risque est également de venir complexifier une procédure qui se veut simple, rapide et efficiente. Il faut rappeler que le statut d’indépendant n’exclut pas l’accès à l’aide de cas de rigueur, une aide qui ne tient pas compte des statuts juridiques, mais est allouée en fonction de l’impact économique de la crise. Une nouvelle aide sans aucune coordination avec celles qui sont actuellement distribuées constitue un danger important de blocage de tout le processus. Les premiers versements qui ont déjà été distribués devraient être réétudiés à la lumière des nouveaux critères... A ce stade, il me semble indispensable que le Grand Conseil soit rapidement informé du mécanisme mis en place et, le cas échéant, sur les possibilités d’y ajouter les propositions Cala sans l’enrayer. C’est pourquoi la grande majorité du groupe PLR demande que la motion soit renvoyée en commission, avec le vœu que le Conseil d’Etat s’engage à être à la disposition de cette commission dans un délai très court, afin que le Grand Conseil puisse aussi la traiter très rapidement. Cette manière de faire ne ralentirait pas le traitement de la motion, mais aurait l’avantage de coordonner cette demande avec un traitement global du dispositif d’aide.

Mme Graziella Schaller (V'L) —

Les Vert’libéraux entendent également la détresse des indépendants et ils souhaitent qu’ils soient soutenus rapidement. Ces indépendants sont touchés par le ralentissement de l’économie et même s’ils n’ont pas forcément dû fermer leur commerce, leurs revenus ont été dramatiquement touchés et ainsi que cela a été dit, ils passent souvent entre les mailles des filets d’aide fédérale ou cantonale. Il faut les aider et il faut aller vite ! Le motionnaire a mis certaines conditions à ces aides, mais nous comprenons également que le Conseil d’Etat puisse être inquiet que les montants engagés soient illimités ou qu’ils explosent. Il aurait peut-être été bon que le motionnaire indique également qu’il est souhaitable que le Conseil d’Etat fixe une enveloppe globale, ou un fonds, ou un montant, ce qui aurait permis de placer une cautèle à l’aide apportée. Toutefois, nous pensons important de traiter rapidement cette situation. Assortie de la précaution de fixer une enveloppe globale, nous pourrions soutenir le renvoi direct au Conseil d’Etat afin que l’objet soit traité rapidement, car même si nous savons que la Commission des finances est très efficace, cela ira naturellement plus vite si traité directement par le Conseil d’Etat. Voilà pourquoi la grande majorité des Vert’libéraux soutiendra le renvoi direct au Conseil d’Etat.

M. Jean Tschopp (SOC) —

Nous abordons ici la question des petites et moyennes entreprises, essentielles au fonctionnement de notre économie. L’année dernière a été marquée par la fermeture des frontières, par les carnets de commandes qui se vident, ainsi que par le chômage et la précarité pour beaucoup. Dans ce contexte, les secteurs fermés ne sont pas les seuls à avoir souffert, loin s’en faut. L’hôtellerie, en particulier dans les régions de plaine, les commerçants dans la vente, d’autres secteurs dans l’industrie, les loisirs, la nouvelle économie et le numérique… Au fond, dans une économie interdépendante, la fermeture des restaurants, notamment, et des commerces, plus récemment, ont des conséquences directes sur la fréquentation d’autres espaces de détente et de loisirs, etc. La même logique prévaut pour les secteurs encore ouverts et pour ceux qui sont fermés : ils n’ont pas à faire les frais d’une situation de pandémie dont ils ne sont en rien responsables. Une indemnisation est donc nécessaire ; ils doivent pouvoir bénéficier des aides à fonds perdus dès la perte de 20 % de leur chiffre d’affaire.

Il est vrai que nous avons mené, en décembre, un débat sur la fixation du niveau de pertes permettant l’accès à l’aide à fonds perdus. Entretemps, les lignes ont bougé et le Conseil fédéral a élargi les aides à partir de 20 %. Plutôt que faire du cas par cas, le plus simple est sans aucun doute d’aligner les autres secteurs non fermés sur la perte de 20 % du chiffre d’affaires. L’angoisse des factures qui s’accumulent et qu’on ne sait pas comment payer, l’inconnue après bientôt un an de pandémie, la nécessité de renégocier des reports de dettes, les difficultés qui s’abattent sur les indépendants sont leur pain quotidien. Pour peu que l’on souhaite aider les indépendants, à commencer par les plus petits d’entre eux, l’urgence s’accommode mal d’un passage en commission qui nous fera perdre — ayons l’honnêteté de le reconnaître — plusieurs mois précieux. Renvoyons donc, dès à présent, ce texte au Conseil d’Etat, qui aura la latitude nécessaire pour répondre à la motion et adapter le décret en vigueur pour apporter une aide aussi large et étendue que possible aux indépendants.

M. Vassilis Venizelos —

La Confédération s’est montrée particulièrement pingre dans les premiers dispositifs mis en place pour accompagner les effets de la crise sanitaire. Les indépendants ont fait partie des oubliés des dispositifs mis en place. Le Conseil d’Etat a fort heureusement déployé un filet plus conséquent, avec des aides qu’il faut saluer et qui ont permis de réparer la pingrerie fédérale. Ici, notre collègue Cala fait une proposition de complément qui me paraît tout à fait à propos et qui nécessite une réponse rapide, de notre part comme du Conseil d’Etat, et c’est pourquoi je suis favorable au renvoi direct à ce dernier. J’émets simplement le vœu, dans la réponse que le Conseil d’Etat pourra donner à la requête, qu’une solution soit également trouvée pour le cas des jeunes entreprises, qui auraient été créées début 2020, et qui ne pourraient donc pas fournir de chiffres pour les années précédentes ‑ bien évidemment, puisqu’elles ont été créées au plus mauvais moment, quelques jours avant de devoir restreindre ou fermer leur activité. Je vous invite à renvoyer la motion directement au Conseil d’Etat en tenant compte du vœu que je viens d’exprimer.

M. Sébastien Cala (SOC) —

Je suis heureux de constater que l’ensemble du plénum adopte une position positive envers ce texte. Quant à la question du renvoi direct, j’aimerais revenir sur certains éléments relevés dans la discussion. Pour commencer, j’aimerais revenir à l’intervention de Mme Dubois qui précise que ma proposition ne prend pas en compte les dernières dispositions mises en place par le Conseil d’Etat et qui craint des problèmes de coordination. J’entends bien sa position, mais les services de M. Leuba et du Conseil d’Etat sont précisément ceux qui ont rédigé les décrets et qui vont préparer la prochaine adaptation, afin que le système actuel ne soit pas mis sous pression, mais simplement revu et adapté en fonction des demandes de la motion. Je suis tout à fait ouvert à la discussion sur la manière d’adapter le décret en question et je ne considère pas qu’il y ait là de problématique, alors qu’il est important d’aller vite, car il s’agit d’une urgence. Je maintiens donc ma demande de prise en considération immédiate.

J’aimerais encore aborder deux éléments. Mme Schaller nous parle d’un plafond et je comprends tout à fait sa position. Il me paraîtrait en effet pertinent que le Conseil d’Etat, dans sa réponse, définisse une enveloppe financière maximale pour répondre à ces besoins ; libre à lui de la définir, il est mieux placé que nous pour cela. Quant au vœu de M. Venizelos concernant les jeunes entreprises, il est vrai que mon texte ne précise rien à ce propos, mais j’estime effectivement que le Conseil d’Etat devrait, dans sa réponse, prendre en considération les jeunes entreprises créées juste avant la pandémie et qui n’ont pas de chiffres pour 2019. Je vous remercie donc pour le soutien que vous apporterez à ce texte et souhaite que la majorité du plénum accepte la prise en considération immédiate et le renvoi direct au Conseil d’Etat.

M. Jean-Rémy Chevalley (PLR) —

Depuis le début de la crise COVID on assiste à un « tiraillage » : on tiraille dans tous les sens, car chacun a la solution et tient à apporter sa pierre à l’édifice. C’est louable, et je le salue, mais imagine-t-on un seul instant, chaque fois que l’on prend une décision ou que l’on renvoie une motion avec demande de prise en considération immédiate, la logistique que cela suppose, à l’arrière ? On impose un travail énorme ! Le Conseil d’Etat n’a pourtant pas attendu que nous déposions des motions pour faire quelque chose ! Il a déjà agi et mis en place des stratégies. En renvoyant directement la motion au Conseil d’Etat on risque de perturber tout le système, avec le risque d’être totalement improductif, car on va bloquer tout le système pour y adapter tout de suite tout ce qu’on veut. J’ai beaucoup de mal à le comprendre, alors que nous devons avoir une ligne claire et nous y tenir, plutôt que partir à tout moment à gauche et à droite.

Je salue l’objet déposé, tout à fait juste et pertinent. Je suis persuadé que le renvoi en commission ne prendra pas des mois et qu’il permettra à notre conseiller d’Etat de s’assurer — car la commission pourrait siéger d’ici 15 jours ou trois semaines — qu’il est possible de prendre une décision. Au moins, cela laisse au service le temps de mettre sur pied quelque chose de cohérent, sans occasionner du travail supplémentaire susceptible de retarder toute l’affaire. Voilà pourquoi je vous demande instamment de renvoyer la motion à l’examen d’une commission, avec la garantie du Conseil d’Etat qu’elle pourra siéger dans un délai extrêmement court.

M. Alexandre Berthoud (PLR) —

Mon propos va dans la droite ligne de ce que vient de dire Jean-Rémy Chevalley. Nous en avons la preuve avec l’amendement déposé par les Vert’libéraux : la question est complexe et nous avons passé des heures et des heures à traiter ces points-là en décembre. Personnellement, aujourd’hui, j’ai besoin que les cas de rigueur puissent être réalisés et j’estime que ce n’est pas du tout le moment d’ajouter une nouvelle couche au processus. Il ne s’agit pas de laisser qui que ce soit au bord de la route, mais je l’ai dit et répété, il y aura forcément de la casse ; certains montants seront certainement versés au mauvais endroit ; cela peut arriver et il ne faudra pas grincer des dents. Personnellement, j’estime que présenter aujourd’hui une motion sans passage en commission, mais avec renvoi direct au Conseil d’Etat, ne fera que gripper le processus et rendre la situation encore plus complexe. Il est important, maintenant, que les montants puissent être versés aux entreprises qui en ont besoin, aux bénéficiaires décidés et légitimés dans le cadre du décret mis en place. Je rappelle que, dans le cadre du travail du Parlement, nous avions également laissé un peu de place au gouvernement pour répondre à certains besoins, notamment inférieurs aux 40 % de chiffre d’affaires et d’autres éléments du même genre. Ne laissons personne au bord de la route, mais pour cela avançons et versons le plus vite possible l’argent aux premiers bénéficiaires. Nous devons étudier votre motion, et j’estime qu’une commission devrait s’y atteler rapidement. Votons donc le renvoi en commission le plus vite possible.

M. Julien Cuérel (UDC) —

Je suis la même ligne que mon collègue Berthoud et j’estime qu’il faut passer par une commission. En effet, j’estime que le texte n’est pas complet, alors que, comme on l’a dit, il ne faut laisser personne au bord de la route. Pour la restauration et les cas de rigueur, j’estime que la situation est réglée avec ce qui a été mis en place par le canton. Par contre, je vois une distorsion dans ce que propose M. Cala. Il y a une problématique concernant le statut d’indépendant, que je vais illustrer par un exemple. Prenez deux coiffeurs, dont l’un est indépendant et l’autre à son compte, mais sous la forme d’une société à responsabilité limitée (Sàrl). Dans les villes, aujourd’hui — et je puis vous le dire pour en avoir discuté avec plusieurs personnes — du fait de la fermeture des cafés et restaurants et de certains commerces, on constate une très nette baisse d’activité. Avec la motion Cala, on aiderait le coiffeur qui a le statut d’indépendant, mais par contre, celui d’à côté qui est aussi à son compte, mais a décidé d’exploiter sous la forme d’une Sàrl, n’y aurait pas droit et ne serait pas aidé. Dès lors, je préférerais que l’on passe par une commission pour examiner les différentes situations des entreprises, car M. Venizelos a raison, il s’agit d’entreprises ; on a parlé de PME, mais elles ne comptent pas que des indépendants. On aiderait sans aucun doute certaines personnes qui en ont besoin, c’est absolument clair, mais on risquerait aussi de laisser au bord de la route quelques petites PME ou petites entreprises, ce qui serait dommage. Je préférerais donc un passage en commission, qui permettrait de discuter de tous les aspects, pour examiner ce qui est fait, ce qui manque et ce qui pourrait être fait. Cela me semble nettement préférable.

M. Jean-François Chapuisat (V'L) —

J’aimerais apporter un témoignage. On a beaucoup parlé, à juste titre, de la problématique de la restauration. On a aussi parlé du domaine de la culture, un secteur qui a « ramassé » depuis le début de la crise et que tout a été fermé. Il y a la culture institutionnelle, mais aussi la culture privée, avec énormément de petits indépendants. On pense évidemment aux artistes, mais cela ne se limite pas à eux, car de nombreuses professions tournent autour de la culture. On ne les empêche pas de travailler et typiquement, dans cette salle, de nombreux techniciens nous assurent le son et l’image, mais évidemment, la masse de travail a complètement fondu. Je connais passablement de ces petits indépendants qui souffrent et qui n’ont pas droit à grand-chose. Que la motion soit renvoyée en commission ou directement au Conseil d’Etat, pensons aussi à eux.

Mme Jessica Jaccoud (SOC) —

Je constate que l’ensemble du plénum soutient ce texte, à demi-mots pour certains et en mots pleins pour d’autres, mais je ressens aussi une frilosité qui conduit une partie du plénum à vouloir renvoyer ce texte en commission, à mon avis sous de faux prétextes. J’aimerais donc dissiper certains malentendus. La motion de M. Cala n’est pas imprécise bien au contraire, et je vous invite à la relire. Il n’est donc pas question que le travail en commission puisse y apporter des précisions, alors que le texte tel qu’il est, qu’il a été présenté tout à l’heure par son auteur et soutenu par plusieurs intervenants, nous permet de connaître exactement les intentions de son auteur. Il s’agit de combler des lacunes, là où les aides existantes ne sont pas possibles ou pour les renforcer. Nous avons beaucoup parlé du milieu de la restauration qui est très touché, nous avons parlé de la culture comme M. Chapuisat vient de rappeler, mais il y a aussi le milieu du sport dans lequel évoluent de nombreux indépendants, petits et grands, qui souffrent aussi de la crise, de ne pas pouvoir exercer leur métier, pour certains depuis plusieurs mois.

Nous vivons tous ici de slogans politiques et de campagne. Je vous invite à passer de la parole aux actes et à ne pas vous défiler devant vos propres promesses, faites régulièrement à votre électorat, aux habitants du canton ou ici, dans ce plénum. Je vous invite donc à soutenir la motion et à la renvoyer directement au Conseil d’Etat, afin qu’il puisse revenir le plus rapidement possible présenter les suppléments dont les indépendants, dans ce canton, ont besoin, sans perdre du temps à vouloir renvoyer le texte en commission et tenter ensuite de le couler, de l’amender, de le modifier, de le reporter, ou que sais-je encore. Il faut que l’économicité gagne sur la nécessité de soutien. Je vous invite à soutenir la motion, à la renvoyer directement au Conseil d’Etat et à faire preuve de conséquence.

M. Marc-Olivier Buffat (PLR) —

Je suis assez d’accord avec notre collègue Jessica Jaccoud quand elle dit que la motion est très précise ; j’ai envie de dire qu’elle l’est même trop. A mon avis, c’est précisément ce qui peut poser problème pour un renvoi direct au Conseil d’Etat, sans passage en commission. Ainsi que nous l’avons entendu tout à l’heure de la part du Conseil d’Etat, il y aura manifestement des difficultés pour l’avancement de la vaccination, et des retards, de sorte que le pronostic peut-être optimiste que nous pouvions avoir en fin d’année dernière ou au tout début de celle-ci doit connaître certains délais. C’est dire que, malheureusement, la crise sanitaire, mais aussi économique, sera encore longue et pourra même potentiellement déployer des effets postérieurement à la crise. Lorsque l’on cible des aides de manière très précise, évidemment, ainsi que tous les bords politiques me semblent l’avoir dit, on court le risque de laisser certaines personnes de côté. J’abonde dans le sens des propos de Julien Cuérel tout à l’heure, à savoir qu’en disant que les indépendants doivent être les bénéficiaires de cette aide rapide et calculée selon tel et tel schéma, on risque de laisser de côté certaines situations économiques qui sont tout à fait similaires voire identiques, hormis la forme juridique. Cela peut causer des distorsions et entraîner des inégalités de traitement. M. Cuérel a eu raison de citer les coiffeurs, il y a les boulangers, et tous les « indépendants » qui sont à la fois propriétaire de leur SA, directeur et gérant.

Enfin, j’aimerais encore vous rappeler qu’au mois de décembre, à l’unanimité, notre Grand Conseil a voté pour un fonds de soutien à l’économie de 200 millions. Précisément, il avait été dit dans ce plénum que ces aides peuvent servir, par exemple, à ce type d’aide ou d’action. Il est également vrai, comme l’a aussi dit notre collègue Mahaim, que d’après ce que l’on entend du Conseil fédéral, il semble qu’une zone grise soit en train de se créer. Au-dessus de 40 % de pertes, nous avons tous compris que cela ouvrait la porte à des indemnisations, mais en-dessous et à quelles conditions, il est bien difficile de se faire une idée précise. Je suis absolument favorable à ce type d’aide, ainsi qu’à la simplification de l’outil et à sa rapidité nécessaire, mais je pense que la cible devrait être beaucoup mieux définie, afin de ne laisser personne de côté et qu’on n’ait pas demain la sensation d’avoir peut-être… Je suis indépendant, comme vous le savez et je confirme mes intérêts, même si je crains ne pas être tout à fait dans la cible prévue par la motion. Beaucoup d’indépendants ont des situations similaires à celles de certaines SA ou Sàrl, et il sera difficile, ensuite, de faire des équilibrages ou de rétablir une égalité de traitement équitable entre tous les acteurs économiques. Je l’avais dit au mois de décembre : le gros du peloton se situe précisément… On a eu l’air de dire tout à l’heure qu’il s’agit des indépendants en-dessous de 90'000 francs de revenu net, mais je serais surpris — le Conseil d’Etat nous donnera peut-être des chiffres tout à l’heure ou en commission — de voir le nombre d’indépendants qui entrent dans cette catégorie, y compris les petites structures et « faux indépendants » qui pourraient bénéficier de ces aides. Donc oui aux aides, oui à la rapidité et à la simplification, mais je pense que nous devons vraiment définir mieux le champ des bénéficiaires, afin de ne laisser personne de côté dans ces petites et moyennes entreprises. Je vous remercie donc de choisir le renvoi en commission

M. Jérôme Christen —

Le groupe des LIBRES soutiendra le renvoi direct pour deux raisons. Premièrement, nous sommes d’avis qu’il est urgent d’agir et qu’il faut raccourcir les processus, chaque fois que nous le pouvons, dans les circonstances que nous connaissons, car il y a de nombreuses personnes en détresse à qui nous devons venir en aide. Nous sommes convaincus que le gouvernement détient toutes les compétences pour en faire usage avec pertinence et nous ne doutons pas que cet avis soit partagé par la majorité d’entre vous. Deuxièmement, nous ne voyons pas quel bénéfice nous tirerions du passage devant une commission dont nous sommes de toute façon exclus. (Rires.)

M. Raphaël Mahaim (VER) —

J’ai beaucoup de compréhension pour le dernier argument du groupe des LIBRES. Pour revenir sur le fond de la question, j’aimerais apporter un bref commentaire sur ce qu’ont dit nos collègues Cuérel et Buffat. C’est vraiment faire un mauvais procès d’intention à la motion que de prétendre qu’elle va — si je simplifie — « monter » les indépendants contre les autres types de sociétés, alors qu’elle vise exactement l’inverse. Pour rappel, le dispositif « cas de rigueur » couvre toutes les entreprises, quelle que soit leur forme juridique, que ce soit une entreprise individuelle, une société de personnes ou une SA ; tout est couvert par le dispositif des cas de rigueur. Je n’ai jamais entendu M. Cala vouloir réinventer la roue ! Le texte de sa motion reprend simplement ce que nous avions commencé à dire en décembre : les critères des cas de rigueur sont trop restrictifs. Berne les a légèrement étendus en janvier, mais dans une mesure qui ne paraît toujours pas satisfaisante. Nous ne disons donc rien d’autre que ce qui a déjà été dit en décembre ; il s’agit d’une demande pressante au Conseil d’Etat d’élargir les critères afin que toutes les entreprises qui sont dans une situation critique puissent entrer dans l’entonnoir des cas de rigueur. Pour cela, le canton doit maintenant communiquer, inviter les entreprises concernées à faire le nécessaire, évidemment tout cela sans porter préjudice à la vitesse de traitement des dossiers qui est un élément clé. Il faut maintenant que l’argent vienne rapidement pour aider les personnes en difficulté.

Encore une fois, si l’on relit la motion Cala, elle ne demande rien d’autre et cela vient relayer la demande du Parlement, en décembre. Au-delà de la participation très sensible du groupe des LIBRES aux travaux de la commission, je ne vois pas ce qu’un passage en commission apporterait de plus à des demandes qui sont connues, déjà exprimées en décembre et parfaitement claires. La balle est maintenant dans le camp du gouvernement. J’imagine qu’il apportera déjà certains éléments de réponse aujourd’hui, mais nous attendons du Conseil d’Etat qu’il transforme l’essai afin que l’aide vienne à disposition de ceux qui en ont vraiment besoin.

M. Sébastien Cala (SOC) —

Je remercie mes préopinantes et préopinants. J’aimerais relever un élément qui me semble être un faux procès. On ne peut pas dire que mon texte exclue des indépendants qui sont à la tête d’une Sàrl, par exemple, comme M. Cuérel l’a soulevé, M. Berthoud l’a laissé entendre et que M. Buffat a aussi relevé. J’ai basé mon texte sur la législation fédérale sur les allocations pour perte de gain (APG) et les cas de rigueur des APG. Il y est bien précisé, et la référence figure dans mon texte, que la définition d’indépendant est claire : il s’agit des indépendants et de toutes les personnes dont la situation y est assimilable ; je souhaite que tout soit clair sur ce point. Maintenant, on me reproche d’être trop précis, mais si je ne l’avais pas été, on m’aurait reproché d’être trop large. Je ne crois pas que nous avancerons beaucoup avec des arguments de ce type.

Je vous invite à avancer, car de toute façon, la réponse du Conseil d’Etat et le projet de décret reviendra devant la Commission des finances, qui aura tout loisir d’adapter, corriger et modifier le projet. Je vous encourage donc à voter le renvoi direct, c’est-à-dire à agir aujourd’hui.

M. Julien Cuérel (UDC) —

Je remercie mes préopinantes et préopinants. J’aimerais relever un élément qui me semble être un faux procès. On ne peut pas dire que mon texte exclue des indépendants qui sont à la tête d’une Sàrl, par exemple, comme M. Cuérel l’a soulevé, M. Berthoud l’a laissé entendre et que M. Buffat a aussi relevé. J’ai basé mon texte sur la législation fédérale sur les allocations pour perte de gain (APG) et les cas de rigueur des APG. Il y est bien précisé, et la référence figure dans mon texte, que la définition d’indépendant est claire : il s’agit des indépendants et de toutes les personnes dont la situation y est assimilable ; je souhaite que tout soit clair sur ce point. Maintenant, on me reproche d’être trop précis, mais si je ne l’avais pas été, on m’aurait reproché d’être trop large. Je ne crois pas que nous avancerons beaucoup avec des arguments de ce type.

Je vous invite à avancer, car de toute façon, la réponse du Conseil d’Etat et le projet de décret reviendra devant la Commission des finances, qui aura tout loisir d’adapter, corriger et modifier le projet. Je vous encourage donc à voter le renvoi direct, c’est-à-dire à agir aujourd’hui.

M. Pierre Dessemontet (SOC) —

La question qui se pose ici est celle de l’urgence ! Nous le savons tous, dans ce Grand Conseil : même si l’on peut se dire qu’il est possible d’aller vite, que la commission peut se réunir vite et que cela peut revenir vite devant le Grand Conseil, un tour devant une commission prend plusieurs mois et nous ne revoterions pas sur ce sujet avant la fin du printemps ; je le sais, nous le savons, tout le monde le sait. Le problème est évidemment que nous sommes en situation d’urgence. Cela fait dix mois et demi que la pandémie dure. Nous avons vu, l’année passée, des statistiques relativement rassurantes quant au nombre de faillites enregistré dans le pays, en 2020, selon lesquelles les entreprises étaient résilientes. Mais elles l’étaient parce qu’elles ont mangé petit-à-petit leurs réserves. Maintenant, dix mois et demi plus tard, alors que nous sommes en fin de deuxième vague, craignant la troisième vague et de nouvelles fermetures, toute une série d’entreprises sont au bout de ce qu’elles peuvent faire et assumer. Alors, leur dire aujourd’hui « Nous allons prendre plusieurs mois pour discuter si on couvre vraiment tout le monde, si telle ou telle catégorie d’entrepreneurs est couverte ou pas », et à ce titre-là dire à tout le monde : « Renvoyons la balle de quelques mois », de manière qu’aucune aide ne soit possible pour aucun d’entre eux pendant ce temps-là, c’est prendre le risque que, sur les près de 50'000 raisons individuelles que nous connaissons dans le canton, plusieurs centaines voire milliers ne soient plus là pour bénéficier de l’aide quand elle arrivera. Nous devons malheureusement agir dans des circonstances extraordinaires, qui nécessitent effectivement de prendre certains raccourcis. Le renvoi direct au Conseil d’Etat en est un, et je vous recommande de l’accepter.

M. Alexandre Berthoud (PLR) —

Je suis assez, ou plutôt vraiment surpris par les propos de mon collègue Dessemontet, car il est membre de la Commission des finances depuis quelques mois et, par conséquent, qu’il sait qu’il ne faut pas des mois et des mois pour traiter un dossier ou une motion telle que celle-ci. Je pense que le Conseil d’Etat a pris note de l’urgence et qu’il est beaucoup plus intelligent de passer en commission. Le Conseil d’Etat ne va pas s’abstenir de lire la motion et se rendre aveugle dans ce domaine. Il va prendre note de ce qui a été discuté dans le texte de M. Cala, arrivera avec des pistes de solutions et nous pourrons aller très très vite. Nous avons déjà démontré que c’était possible et je suis donc très étonné d’entendre dire que cela prendra des mois et des mois. Les statistiques sont connues. Les statistiques des faillites citées datent de 2020, et ce sont les statistiques 2021 qui seront intéressantes. Cela ne prendra pas des mois et je pense que nous serons ainsi beaucoup plus efficaces. J’aimerais encore faire comprendre à M. Dessemontet que la valeur temporelle d’une remise au Conseil d’Etat est la valeur temporelle du Conseil d’Etat et non celle du Parlement. Nous avons donc meilleur temps de travailler en commission.

M. Gérard Mojon (PLR) —

Monsieur Dessemontet, vous voulez aller vite et je crois que tout le monde est d’accord avec vous. Alors, si l’on veut aller vite, arrêtons de vouloir changer les règles. Si on change les règles à tout moment, cela ne fait qu’allonger le processus. Selon moi, maintenant, les services de M. Leuba ont commencé à procéder à des paiements sur les cas de rigueur, et c’est très bien. Laissons ces services payer et regardons s’il y a encore des trous que nous pourrions combler. A ce moment-là, il sera possible d’agir, mais venir avec de nouvelles règles aura pour seule conséquence de freiner encore le processus, ce que personne ici ne souhaite. Je confirme ce que vient de dire notre collègue Berthoud : la Commission des finances peut agir extrêmement rapidement ; et, quand elle sait que c’est nécessaire, elle le fera.

M. Philippe Leuba — Conseiller-ère d'État

Evidemment, le Grand Conseil est maître de sa procédure et le Bureau est maître d’attribuer une motion à la commission de son choix. Sur la question du délai, d’abord, il m’apparaît que ‑ si vous choisissez le passage en commission ‑ nous pourrions très bien la faire passer à la Commission des finances, qui a déjà traité l’ensemble des décrets de décembre dernier. Cette commission siège au minimum une fois toutes les deux semaines, et le Conseil d’Etat prend l’engagement que cette question soit traitée lors de la prochaine séance de la Commission des finances, si le Bureau décidait de la lui renvoyer. Ainsi, vous auriez un tour complet du dispositif actuel et la capacité de mesurer les éventuels trous dans le filet d’ici deux à trois semaines au plus tard. Le Conseil d’Etat qui est, comme vous, conscient de l’urgence qu’il y a à éviter les trous dans le filet, agirait ensuite par voie d’arrêté puis par voie de décret, comme il l’a fait ce printemps, à la suite de l’éventuelle discussion de la Commission des finances, afin d’avoir un dispositif complet qui bouche tous les trous. Quel est le problème posé par le renvoi direct de la motion Cala au Conseil d’Etat ? La Loi sur le Grand Conseil (LGC) stipule que si on lui renvoie une motion rédigée, le Conseil d’Etat doit, prendre un exposé des motifs et projet de décret qui consacre toute la motion et rien que la motion. Il peut certes l’assortir d’un contre-projet, mais il doit au minimum vous saisir d’un décret qui réalise toute la motion et rien que la motion. Cela n’inclut donc pas le vœu de M. Venizelos quant aux nouvelles sociétés, ni celui de M. Cala lui-même d’élargir aux PME, car comme l’a dit M. Tschopp tout à l’heure, un indépendant n’est pas une PME.

J’aimerais vous exposer la situation et le dispositif des cas de rigueur tel qu’il existe actuellement, dans le canton. Nous avons été le premier canton à rendre ce dispositif opérationnel jusqu’à ce que l’argent sorte, car l’élément déterminant est là et non dans les grandes théories. Nous avons été l’un des premiers cantons à le réaliser et l’argent continue à sortir. Nous avons repris le dispositif fédéral, mais en étant plus généreux. D’abord, contrairement à d’autres cantons, nous n’avons pas limité le nombre de secteurs éligibles. Nous n’avons pas sectorisé les aides, étant conscients que ce qui est déterminant n’est ni le secteur d’activité, ni le statut de l’employeur et de l’entreprise, mais bien l’impact de la pandémie sur le résultat de l’entreprise quelle qu’elle soit et quelle que soit sa nature juridique. Que l’on soit un indépendant, une Sàrl, une SA, une Société coopérative, etc., ce n’est pas le statut de l’employeur qui compte, mais l’impact de la pandémie sur le poste de travail, quelle que soit sa nature juridique. C’est ce que nous avons fait, alors que d’autres cantons ont privilégié les secteurs éligibles. Ensuite, nous concrétisons la discussion de décembre dernier sur l’élargissement et la réduction de l’effet de seuil causé par la limite de 40 % fixée par le droit fédéral. Nous tenons compte du vœu du Grand Conseil, ainsi que je l’ai exprimé en décembre dernier, pour ne pas avoir cet effet de seuil et pour pouvoir rendre éligibles certaines personnes moins impactées que la limite fixée par le droit fédéral. Nous continuerons à le faire, c’est la volonté du Conseil d’Etat.

Le problème que pose la motion Cala, c’est qu’elle est trop précise et donc, je suis bien désolé de devoir le dire, qu’elle exclut tous ceux qui ne sont pas des indépendants. Or, l’exemple donné par M. Cuérel est une évidence : certains indépendants ont de gros revenus et de petites PME ont de très faibles revenus. Vous ne pouvez donc pas calibrer l’aide que vous apporterez en fonction d’une structure juridique ; il faudrait plutôt agir en fonction de la fragilité économique. Certaines entreprises en SA ou en société coopérative sont plus fragiles que l’étude de Maître Buffat, avocat à Lausanne, par exemple, qui est un indépendant, alors que certains indépendants ne sont pas ou peu ou touchés par la crise. Ce n’est pas le statut juridique mais l’impact de la crise sur le statut économique qui est déterminant. Il ne faut donc pas prévoir un régime pour les indépendants sans tenir compte de la situation parfaitement comparable et égale d’autres structures, par ailleurs en Sàrl ou autre. Or, le renvoi du texte Cala tel quel contraint le Conseil d’Etat à rédiger les demandes de M. Cala, et rien qu’elles, sauf à présenter un contre-projet. Le Service de développement économique, qui appartient à mon département et qui croule déjà sous les demandes ‑ puisque toutes les demandes d’aide économique lui sont adressées ‑ serait alors obligé de rédiger deux textes, l’un pour la motion Cala et l’autre pour un contre-projet. On ne peut pas se contenter du seul contre-projet ; cela n’est pas compatible avec la LGC. Ce travail serait parfaitement inutile, d’autant plus que personne ne conteste — je suis sûr que M. Cala ne conteste pas — le fait que l’on traiterait différemment deux situations économiques identiques frappées de la même manière par la pandémie, suivant qu’il s’agit d’un indépendant ou d’une Sàrl, par exemple ; il faudrait avoir deux types d’aides pour la même situation économique et sanitaire. Or, c’est contraire à l’égalité de traitement, ainsi qu’à l’économie des moyens.

De plus, le texte de M. Cala mentionne 90'000 francs de chiffre d’affaire. Comme vous le savez, le Conseil d’Etat a abaissé le seuil d’éligibilité pour les cas de rigueur, prévus initialement à 100'000 en raison de l’aide pour les loyers au début. Nous l’avons maintenant abaissé à 50'000, ainsi que vous pouvez le lire dans l’arrêté du Conseil d’Etat adopté la semaine dernière, et ainsi, une partie des indépendants sont éligibles aux cas de rigueur. Une partie des personnes visées par le texte de M. Cala est donc déjà éligible pour le dispositif vaudois des cas de rigueur. Vous devez donc tenir compte du système qui existe avant de demander au Conseil d’Etat de rédiger un texte de loi qui ne tient pas compte du dispositif existant ‑ je suis bien désolé de devoir le dire. Si vous ne voulez pas gripper le système, alors que vous avez insisté à juste titre, en décembre dernier, pour que les aides soient rapidement octroyées et que l’élément de rapidité est cardinal dans le dispositif déployé par le Conseil d’Etat, si donc vous ne voulez pas que le premier dispositif mis en place par un canton soit grippé par la demande de modification introduite par M. Cala et qui touche en partie les mêmes bénéficiaires, entreprises et indépendants, vous devez choisir une voie qui ne soit pas dilatoire, car ce n’est pas du tout là l’intérêt du Conseil d’Etat, mais une voie intelligente qui permettra à la commission, avec ou sans Vaud Libre et le PDC, car l’essentiel n’est pas là, de considérer l’ensemble du filet, l’ensemble du dispositif et ses éventuels trous.

Vous chargerez alors le Conseil d’Etat de rédiger — et il le fera — un dispositif qui comblera l’ensemble des trous et non seulement une partie. En effet, le texte de M. Cala ne touche qu’une partie des trous, alors que M. Venizelos a parlé à juste titre d’un autre trou, celui des entreprises créées en 2020 et qui ne sont de ce fait pas couvertes par le dispositif fédéral tel qu’il existe. Nous travaillons actuellement avec M. Parmelin sur ce point, dont il faudra bien tenir compte pour le dispositif vaudois. On voit bien que le texte Cala ne couvre pas tous les trous du système. Alors, nous travaillerions la proposition Cala, ce qui serait une obligation si vous la renvoyez directement au Conseil d’Etat et, en parallèle, nous devrions travailler sur les moyens de boucher les autres trous… Compte tenu de l’urgence, c’est complètement aberrant. Si vous voulez aller vite, être efficaces, il faut que nous puissions encore une fois, dans le délai de 10 à 15 jours, dans le cadre de la Commission des finances ou ailleurs, vous présenter complètement le dispositif actuel et voir avec la commission les trous qui, aux yeux de la Commission des finances, doivent être bouchés. A ce moment-là, le Conseil d’Etat présentera un arrêté suivi d’un exposé des motifs et projet de décret afin de boucher tous les trous.

De grâce, ne refaites pas trois ou quatre fois la même opération, car vous allez avoir un service, un département et un chef de département totalement épuisés parce que le dispositif que vous cherchez à mettre en place est en constante variation. Et c’est quelque chose qui ne va vraiment pas si vous voulez une politique de soutien efficace ! Je vous appelle donc à renvoyer la motion à la Commission des finances, si Mme la présidente le veut bien, afin que le texte puisse être traité lors de la prochaine séance. Le Conseil d’Etat présentera alors un arrêté complémentaire au dispositif actuel afin de boucher tous les trous que la Commission des finances jugera pertinents, cela dans un délai extrêmement bref. C’est la sagesse même !

M. Philippe Vuillemin (PLR) —

Il ne me reste plus qu’à souhaiter que les autres conseillers d’Etat aient entendu votre plaidoyer et fait le maximum pour expliquer cela à leurs groupes respectifs.

M. Philippe Leuba — Conseiller-ère d'État

Je ne sais pas exactement quelles démarches ont été faites par mes collègues, mais je crois pouvoir affirmer qu’ils ont tous été surpris par la demande de renvoi direct au Conseil d’Etat. J’ai eu une brève discussion avec M. Broulis et avec Mme Gorrite qui souhaitaient tous deux qu’une première phase hyperrapide et non dilatoire puisse se faire devant une commission pour que vous ayez une perception exacte du dispositif actuel et que vous puissiez déterminer en toute exhaustivité les trous qui sont à boucher et qu’on puisse éviter le cas par cas. Dans cette affaire, à aucun moment le Conseil d’Etat n’a traîné les pieds. Il a choisi la voie de l’arrêté pour mettre en place cinq dispositifs applicables immédiatement. Dans le cas de WelQome, nous avons libéré les 30 % de l’aide cantonale avant l’utilisation des bons. Nous avons passé par la voie de l’arrêté, puis passé par une ratification parlementaire du dispositif proposé par le Conseil d’Etat, au travers d’une séance de la Commission des finances mise sur pied hyper-rapidement et qui a aussi travaillé rapidement. C’est la démonstration dans les faits, madame Jaccoud — et non dans les programmes électoraux ou de flyers distribués sur les marchés qui n’ont pratiquement plus lieu d’être — que le Conseil d’Etat sait qu’il faut aller vite et qu’il a l’intention de le faire, mais cela dans un minimum d’ordre, à la fois pour le bénéficiaire potentiel de l’aide, mais aussi pour les collaboratrices et collaborateurs du Service d’aide économique qui ne peuvent pas être confrontés tous les matins à des changements structurels importants des différentes aides qui doivent être mises sur pied. La sagesse est encore une fois d’agir avec détermination et rapidité, mais aussi un minimum d’ordre.

Mme Jessica Jaccoud (SOC) —

Tout d’abord, je souhaite m’excuser de prendre la parole après M. le conseiller d’Etat. Pourtant, je souhaite rappeler que le Conseil d’Etat n’a pas pris position. Monsieur Leuba, vous n’êtes pas non plus censé être le porte-parole de ce que vos collègues du Conseil d’Etat vous auraient glissé à l’oreille juste avant ou pendant cette séance. Et monsieur Vuillemin, nous aurons peut-être l’occasion de discuter un jour de comment se passent les relations entre les conseillers d’Etat et les groupes au Grand Conseil. En tout cas, chez nous, c’est tout à fait sympathique, et j’espère qu’il en est de même chez vous, avec l’ensemble de vos conseillers d’Etat. Cela dit, sans déposer formellement de motion d’ordre, je vous invite à passer au vote.

M. François Cardinaux (PLR) —

Effectivement, j’arrive exactement à ce qui a été dit ce matin par Sandrine Evéquoz et par ma préopinante il y a un instant. Il me semble que tous les débats ont été épluchés et maintenant, il faut que nous votions.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Je rappelle que l’auteur ayant demandé le renvoi direct au Conseil d'Etat et certains députés le renvoi en commission, le plénum doit décider du cheminement de la motion.

Le renvoi en commission, opposé au renvoi direct au Conseil d'Etat, est choisi par 71 voix contre 65 et 2 abstentions.

M. Sébastien Cala (SOC) —

Je demande le vote nominal.

Mme Sonya Butera (SOC) — Président-e

Cette demande est appuyée par au moins 20 députés.

Celles et ceux qui privilégient le renvoi au Conseil d’Etat votent oui, celles et ceux qui préfèrent le renvoi en commission votent non ; les abstentions sont possibles.

Au vote nominal, le renvoi en commission, opposé au renvoi direct au Conseil d'Etat, est choisi par 71 voix contre 67 et 2 abstentions.

La motion est renvoyée à l’examen d'une commission.

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