24_POS_40 - Postulat Claude Nicole Grin et consorts - Pour une meilleure prise en charge des médicaments non utilisés ou périmés.

Séance du Grand Conseil du mardi 17 septembre 2024, point 32 de l'ordre du jour

Texte déposé

Les substances actives, ou leurs résidus, des médicaments à usages humains ou vétérinaires rejetés dans les eaux usées sont traités dans les usines d’épuration des eaux. Néanmoins une part active de ces produits se retrouve dans les cours d’eau et les eaux souterraines. Une autre source potentielle de contamination environnementale provient directement d’une mauvaise prise en charge des médicaments non utilisés ou périmés.

 

Les médicaments prescrits et distribués non consommés et non périmés ne peuvent pas réintégrer une nouvelle chaîne d’approvisionnement, selon les principes directeurs de l’OMS de 1996, applicables aux dons des médicaments. Ceux-ci sont donc intransmissibles et doivent être détruits. Ils ne sont pas des déchets ménagers ordinaires et leur élimination demande des traitements particuliers pour éviter des effets indésirables. Il n’existe pas de réglementation fédérale pour l’élimination des médicaments. Le seul texte servant de référence est un document d’« Aide à l’exécution pour l’élimination des déchets médicaux » datant de 2004, ce texte n’est pas une véritable réglementation mais son application permet une pratique uniforme en Suisse.

 

L’élimination des déchets médicaux et vétérinaires ainsi que les déchets présentant un risque de contamination demande de faire appel à des services spécialisées. Il est donc nécessaire de procéder au préalable à un tri des déchets afin de les acheminer dans un centre de collecte des toxiques, ou directement dans un lieu de destruction approprié. Les déchets de médicaments particulièrement critiques tels que certains cytostatiques, les composés halogénés ou mercuriels doivent être incinérées dans des Usines d’incinération des déchets spéciaux (UIDS).

 

D’autre part, le principe de précaution doit prévaloir pour les médicaments ainsi tous les médicaments sont considérés comme des déchets spéciaux, même si tous ne contiennent pas des substances dangereuses au sens de l’« Ordonnance fédérale sur les produits chimiques ».

 

Selon l’art.13 de l’ « Ordonnance fédérale sur les déchets » (OLED), c’est aux cantons de veiller à la collecte séparée des déchets spéciaux produits par les ménages. En tout état de cause, cette loi oblige à déposer les médicaments, y compris les produits homéopathiques dans des lieux dédiés à cet effet. Les cantons sont libres d’opter pour un système en partenariat avec les pharmacies ou organisé dans les déchetteries gérées par eux ou par les communes.

 

Dans le canton de Vaud, les médicaments sont déposés dans les déchetteries, mais celles-ci ne disposent pas nécessairement de l’équipement ni des compétences de tris. Les pharmacies ne sont pas tenues de récupérer les médicaments et aucun fonds ne leur est alloué pour financer leur élimination.  D’autres cantons, comme, par exemple, Neuchâtel et Genève, ont adopté une autre politique. Les pharmacies sont les lieux de retour des médicaments périmés ou non consommés et ces deux cantons financent leurs frais d’élimination. Cette pratique englobe aussi les médicaments vendus en ligne ou achetés à l’étranger.

 

Il est nécessaire de développer dans le canton de Vaud des solutions d’élimination des médicaments non utilisés plus fiables, aussi bien pour des questions de santé publique qu’environnementales.

 

Aussi cette présente motion demande au Conseil d’État :

 

  • D’étudier différentes mesures de prises en charge des médicaments à éliminer.
  • D’étudier la mise en place de partenariats avec les pharmacies ou avec d’autres experts des propriétés des composants des médicaments.
  • De définir les modes d’élimination appropriées des médicaments et de prendre les mesures nécessaires.

Conclusion

Renvoi à une commission avec au moins 20 signatures

Liste exhaustive des cosignataires

SignataireParti
Patricia Spack IsenrichSOC
Cendrine CachemailleSOC
Marc MorandiPLR
Yannick MauryVER
Valérie ZoncaVER
Pierre FonjallazVER
Vincent KellerEP
Sébastien CalaSOC
Oriane SarrasinSOC
Felix StürnerVER
Joëlle MinacciEP
Théophile SchenkerVER
Cloé PointetV'L
Martine GerberVER
Blaise VionnetV'L
Muriel ThalmannSOC
Yolanda Müller ChablozVER
Thanh-My Tran-NhuSOC
Sylvie PodioVER
Guy GaudardPLR
Cédric RotenSOC
Romain PilloudSOC
Alberto MocchiVER
Anna PerretVER
Nathalie VezVER

Documents

Transcriptions

Visionner le débat de ce point à l'ordre du jour
Mme Josephine Byrne Garelli (PLR) — Rapporteur-trice

La commission nommée pour étudier cette motion s'est réunie le jeudi après-midi 31 août 2023. Ont assisté à la séance Mme la conseillère d'Etat, Rebecca Ruiz, cheffe du département de la santé et de l'action sociale, accompagnée de Mme Marie-Christine Grouzmann, pharmacienne cantonale, et M. Thierry Marchand, ingénieur en technique d'environnement au sein du Département général de l'environnement. Les notes de séance ont été prises par M. Fabrice Lambelet, secrétaire de commission parlementaire, qu’il soit sincèrement remercié pour son travail. 

La motion discutée se base sur l'Ordonnance fédérale sur la limitation et l'élimination des déchets (OLED), qui impose aux cantons suisses de veiller à la collecte séparée des déchets spéciaux, dont les médicaments périmés. Les pratiques varient entre les cantons. En effet, certains exigent que les pharmacies reprennent les médicaments périmés, tandis que d'autres organisent la collecte dans les déchetteries. Les médicaments récupérés sont incinérés à haute température pour éviter la libération de produits toxiques. Le Conseil d'Etat reconnaît l'importance de cette problématique pour la santé publique et l'environnement. Si l'élimination ne s'effectue pas correctement, cela peut provoquer des contaminations des sols, de l'eau potable et des écosystèmes naturels. 

La consommation de médicaments périmés peut se révéler également dangereuse pour la santé à cause de leur perte d'efficacité thérapeutique. Selon le principe du pollueur-payeur, les pharmacies vaudoises sont tenues de récolter les médicaments périmés ou non utilisés lorsqu'ils sont ramenés par les particuliers. Ils sont triés puis éliminés selon des règles strictes. La prise en charge financière est assurée par les pharmacies sur la base de la responsabilité du vendeur de produits devant faire l'objet d'une élimination contrôlée. Néanmoins, les pharmacies rechignent à reprendre les médicaments qu'elles n'ont pas vendus. Les citoyens peuvent aussi les ramener dans certaines déchetteries communales possédant un lieu de collecte de déchets spéciaux. Toutes les communes ne prévoient pas cela, car cela demande du personnel formé à cet effet. De plus, les frais sont à charge des communes.

La discussion générale a soulevé plusieurs questions, notamment sur les risques de pollution, la sécurité des contenants de collecte, le cheminement des médicaments périmés vers leur lieu d'élimination, le traitement de déchets hospitaliers et la gestion des médicaments non périmés. Elle a également abordé les problèmes liés au gaspillage des médicaments, à la surprescription et aux emballages inadaptés. Finalement, étant donné qu'il n'y a pas formellement de demande de modification légale, la motion a été transformée en postulat avec l'accord de la motionnaire pour permettre une étude plus approfondie de la question. Au vote, la commission recommande au Grand Conseil d'envoyer la motion transformée en postulat au Conseil d'Etat à l'unanimité.

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

La discussion est ouverte. 

Mme Claude Nicole Grin (VER) —

Le journal local Lausanne Cités dans son numéro d'août 2024 a consacré un article sur le devenir des médicaments périmés. La journaliste rappelait qu'en Suisse, la population reste une grande consommatrice de médicaments. Selon les derniers chiffres de l'Office fédéral de la statistique (OFS) de 2022, 55 % de la population de plus de 15 ans, en Suisse, prend au moins une fois par semaine des médicaments. Ceux-ci sont éliminés par le corps, principalement par les déjections dans les eaux usées, contribuant à la formation de microparticules difficiles à éliminer par les stations d'épuration. 

Cette importante consommation médicamenteuse s'accompagne facilement d'un stockage de médicaments dû à une surévaluation des besoins ou des emballages trop grands, médicaments qu'il s'agira d'éliminer lorsqu'ils seront périmés. Selon l'article 13 de l'ordonnance fédérale sur les déchets, il incombe au canton de veiller à la collecte séparée des déchets spéciaux produits par les ménages. En tout état de cause, cette loi oblige à déposer les médicaments, y compris les produits homéopathiques, dans des lieux dédiés à cet effet. Les cantons sont donc libres d'opter pour un système en partenariat avec les pharmacies ou organisé dans les déchetteries gérées par eux ou par les communes. 

Quant à eux, les hôpitaux sont bien organisés quant à la gestion et au tri de ces déchets. Les pharmacies des hôpitaux amènent les médicaments périmés directement aux structures d'incinération adéquates. En Suisse romande, dans la plupart des cantons, les pharmacies ont l'obligation légale de reprendre les médicaments des particuliers non utilisés. Dans les cantons de Vaud et du Jura, les médicaments échus ne sont pas repris par les pharmacies, même si certaines pharmacies franchisées et appartenant à de grandes chaînes récupèrent les médicaments périmés gratuitement. Les médicaments périmés retournés en pharmacie sont d'abord triés. Les comprimés ou les gélules sont sortis une à une de leurs emballages. Les emballages et cartons se regroupent selon leur type de matériaux et les étiquettes sont enlevées des boîtes pour anonymiser le patient. Ces manipulations, nécessaires, sont une tâche supplémentaire pour les pharmacies. Les comprimés, les gélules et tous les autres médicaments sont ensuite stockés dans des conteneurs étanches et scellés. Les médicaments suivent une filière spéciale, différente de celle des déchets ménagers, selon les prescriptions de l'Office fédéral de l'environnement et seront incinérés à très haute température. Cela évite le dégagement de produits de dégradation toxique dans l'atmosphère et à travers les résidus calcinés, ce qui pourrait se produire s'ils étaient incinérés aux mêmes températures que les déchets ménagers, en étant jetés dans les poubelles des particuliers. Cela évite aussi que les médicaments soient jetés dans les WC ou dans les éviers. Les médicaments se dégradent souvent au contact de l'eau et forment des microparticules difficiles à éliminer par les stations d'épuration. S'ajoutant à celles des déjections, ces micropolluants se retrouvent ensuite dans les rivières, et produisent des dégâts difficilement réversibles à la faune et à la flore aquatique. Cela est valable pour tous les types de médicaments. 

C'est pourquoi il est nécessaire de trouver les meilleures solutions pour l'élimination des médicaments, dans le canton de Vaud. Il serait aussi peut-être possible, comme pour d’autres cantons romands, qu’une obligation légale soit adressée aux pharmacies de reprendre les médicaments non utilisés via des soutiens financiers appropriés pour soutenir ces tâches d'élimination particulières. Mais évidemment, toute autre solution mérite aussi d'être étudiée. Par conséquent, comme la commission, nous ne pouvons que recommander au Grand Conseil de renvoyer au Conseil d'Etat ma motion transformée en postulat afin de trouver et proposer les meilleures solutions pour l'élimination des médicaments périmés.

M. Jean-Daniel Carrard (PLR) —

Je déclare mes intérêts comme membre de la commission. La motion de Madame Claude-Nicole Grin est intéressante et soulève des questions pertinentes, car la question de la reprise des médicaments non utilisés interroge, que ce soit au niveau de la santé publique, des médicaments périmés, de la nocivité pour l'environnement, ou des substances chimiques non maîtrisées. Actuellement, il n'y a pas de règle de reprise des médicaments par les pharmacies. Certaines pharmacies hésitent parce qu'elles ne se sentent pas obligées de récupérer des médicaments qu’elles n'auraient pas vendus elles-mêmes. Toutes les communes ne sont pas nécessairement non plus équipées pour pouvoir procéder à cette récolte de médicaments. Enfin, la motionnaire a accepté de transformer sa motion en postulat, un objet beaucoup plus souple, nous ne pouvons que soutenir cette démarche et le renvoi de cette motion transformée en postulat au Conseil d'Etat pour étude et rapport. 

Mme Aliette Rey-Marion (UDC) —

En effet, les pharmacies qui acceptent de reprendre les médicaments périmés ou non utilisés se heurtent à des frais d'élimination, et certaines se montrent réticentes. Les grandes communes, quant à elles, se sont organisées afin de récupérer ces médicaments par le biais des déchetteries. C'est pourquoi je vous demande d'accepter cette motion transformée en postulat afin de permettre au Conseil d'Etat de procéder à une analyse complète et de trouver une solution qui soit acceptable pour tout le monde.

M. Jean-François Thuillard (UDC) — Président-e

La discussion est close.

Le Grand Conseil prend  le postulat en considération par 109 voix et 1 abstention.

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