22_LEG_74 - Exposé des motifs EXPOSE DES MOTIFS ET PROJET DE DECRET accordant au Conseil d'Etat un crédit-cadre de CHF 4'227'000 pour financer l'acquisition des moyens de base pour la lutte contre les incendies de forêt et EXPOSE DES MOTIFS ET PROJET DE LOI modifiant la loi du 2 mars 2010 sur le service de défense contre l'incendie et de secours (LSDIS) et la loi forestière du 8 mai 2012 (LVLFo) (1er débat).
Séance du Grand Conseil du mardi 24 septembre 2024, point 12 de l'ordre du jour
Documents
- Rapport de la commission-22_LEG_74-Jean-François Cachin
- Texte adopté par CE - EMPL-D Lutte incendies forêt
Transcriptions
Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourComme l’exigent les dispositions de la Loi sur le Grand Conseil (LGC), je vous rappelle mes intérêts de président d'honneur de la Fédération vaudoise des sapeurs-pompiers et d’ancien commandant des sapeurs-pompiers professionnels et volontaires de la ville de Lausanne.
La commission s'est réunie le 7 juin 2024 à la salle Cité, rue Cité-Devant 13 à Lausanne. Elle était composée de Mmes et MM. les députés suivants : Cendrine Cachemaille, Carole Dubois, Monique Hofstetter, Nathalie Jaccard, Nicolas Bolay, Oscar Cherbuin, Stéphane Montangero, Maurice Treboux et de votre serviteur comme rapporteur. L'administration était représentée par M. le conseiller d'Etat Vasssilis Venizelos, chef du Département de la jeunesse, l'environnement et la sécurité, accompagné de : MM. Sébastien Beuchat, directeur ad interim de la Direction générale de l'environnement (DGE) et directeur de la Direction des ressources et du patrimoine naturel (DIRNA) ; Sébastien Lévy, responsable du domaine des dangers naturels à la DGE ; Laurent Fankhauser, directeur de la division défense incendie et secours de l'Etablissement cantonal d’assurance (ECA) ; et Florian Cuche, inspecteur cantonal en charge de la défense incendie et secours à l’ECA. M. Yvan Cornu, secrétaire de commission, a tenu les notes de séance et je l’en remercie chaleureusement.
En août 2022, deux incendies ont ravagé près de 1000 hectares de forêts et de pâturages dans le Jura français voisin, avec des fumées qui ont atteint la Suisse, en particulier la Vallée de Joux et le bassin alémanique. Une étroite collaboration a été mise en place entre les partenaires des différents territoires, mais cet événement a permis de mettre en lumière quelques faiblesses du dispositif vaudois de lutte contre l'incendie de forêt. La même année, un incendie s'était également déclaré sur le territoire vaudois, dans une forêt de la commune d'Ormont-Dessous, nécessitant l'intervention complexe des sapeurs-pompiers. La multiplication des épisodes de sécheresse ces dernières années a mis en évidence la vulnérabilité des forêts vaudoises face au risque d'incendie. Or, le Canton de Vaud ne dispose pas encore d'une réelle base légale solide concrétisant l'obligation fédérale faite aux cantons de mettre en place des mesures pour combattre les incendies de forêt. C’est pourquoi le Conseil d'Etat propose d'y remédier en modifiant la Loi sur le service de défense contre l'incendie (LSDIS) et la Loi forestière (LVLFO).
Ces modifications légales vont permettre de clarifier les rôles et les responsabilités des communes et du canton, tant en matière de prévention que de financement des interventions. Certaines mesures de prévention vont s'imposer aux communes et aux propriétaires privés de forêts. Grâce à une stratégie cantonale, le but est de renforcer la capacité de l'Etat de répondre à des événements appelés à se reproduire de plus en plus fréquemment. Ce projet permettra au canton de Vaud de se doter des moyens organisationnels et opérationnels pour prévenir et lutter contre les incendies de forêt. L'accent est également mis sur la formation et l'équipement des sapeurs-pompiers.
Lors de la séance de commission, les représentants de la DGE et de l'ECA ont présenté les principaux buts dans un document intitulé « Concept cantonal sur les incendies de forêt ». Cet exposé des motifs englobe deux projets de modification de loi et un projet de décret : la modification de la Loi du 2 mars 2020 sur le service de défense contre l'incendie, la modification de la Loi forestière du 8 mai 2012, ainsi qu’un projet de décret accordant un crédit d'investissement de 4'227’000 francs, destiné à financer les coûts d'acquisition, d'équipement et de formation à la lutte contre les incendies de forêt.
Après une discussion générale et les informations fournies par les représentants de l'Etat de Vaud et M. le conseiller d'Etat, la commission a examiné point par point le projet de modification de lois et le projet de décret. S’agissant du projet de loi modifiant la LSDIS, les membres de la commission recommandent unanimement au Grand Conseil d'entrer en matière. Les articles 1 à 22c chiffres 1, 2, 4 et 5, 22d et 2, ont été adoptés à l'unanimité des membres de la commission. Pour l’article 22c chiffre 3, un amendement fixant à 30 % au lieu de 50 % – comme initialement suggéré par le Conseil d'Etat – les frais pouvant être imputés à la collectivité publique a été proposé. Cet amendement a été accepté à l'unanimité des membres de la commission. Ainsi, la teneur de cet article est la suivante : « Lorsqu'il concerne une intervention dans un feu, une intervention dans une forêt appartenant à une collectivité publique ou la remise en état d'une forêt appartenant à une collectivité publique, les frais peuvent être mis à la charge de cette collectivité publique à raison de 30 % au maximum ».
S’agissant du projet de loi modifiant la LVLFO, les membres de la commission recommandent à l’unanimité au Grand Conseil d’entrer en matière. Les articles premier, 33, 69 et 2 ont été adoptés à l'unanimité des membres de la commission. Quant au projet de décret accordant au Conseil d'Etat un crédit d'investissement de 4'227’000 francs pour financer les coûts d'acquisition d’équipements et la formation liée à la lutte contre les incendies de forêt du 25 mars 2024, la commission recommande également, à l’unanimité, que le Grand Conseil entre en matière. Les articles 1, 2 et 3 de ce décret ont été adoptés à l'unanimité des membres de la commission. La commission a pris acte que la direction de l’ECA, via sa division défense, incendie et secours, est chargée de fournir les moyens dits « lourds », à savoir les véhicules, camions-citernes et unités légères tous-terrains.
La discussion sur l’entrée en matière est ouverte.
Je déclare mes intérêts : je suis président de la commission consultative du feu du Service de défense incendie et secours (SDIS) Chablais. Je prendrai position sur les trois objets afin de ne pas reprendre la parole. Cet objet est important, car avec le réchauffement climatique, la problématique des feux de forêt va, malheureusement, devenir de plus en plus présente. Comme l’a justement rappelé le président-rapporteur de la commission, nous observons cette tendance partout dans le monde, y compris en Europe, à proximité de chez nous. Les feux de forêt peuvent se propager très rapidement, avec une ampleur dévastatrice. Il est crucial d'agir le plus rapidement possible lors de départs de feu. Les projets de lois et décret proposent un plan complet, réfléchi, permettant un déploiement rapide et progressif, avec des formations spécifiques et des moyens sur le terrain. En donnant les moyens nécessaires et en clarifiant les rôles et financements, nous posons des bases importantes.
Nous tenons à saluer la qualité des discussions lors de la commission, ainsi que les explications claires et franches, tant du conseiller d'Etat que des personnes qui l'accompagnaient. Nos divers échanges et un dialogue constructif ont permis de trouver un consensus, notamment à l'article 22c, alinéa 3, et ainsi d'adopter l'ensemble des points à l'unanimité. Je profite de cette occasion pour remercier toutes les personnes qui s'engagent quotidiennement au sein des SDIS, ainsi que les entreprises qui permettent à leur personnel de quitter leur place de travail durant la journée, pour un feu en forêt ou pour d'autres missions. En ce qui concerne l'objet que nous examinons aujourd'hui, au nom du groupe socialiste, je vous invite à suivre l'unanimité trouvée en commission, tant pour la loi que pour le décret.
A l'heure actuelle, le droit fédéral impose aux cantons de mettre en œuvre des mesures pour combattre les incendies de forêt. Toutefois, le droit vaudois ne dispose pas encore d’une base légale claire concrétisant cette obligation. Dès lors, le Conseil d'Etat propose d’y remédier en modifiant la LSDIS ainsi que la LVLFO. Ces modifications légales vont permettre de clarifier les rôles et responsabilités des communes et du canton, tant en matière de prévention que de financement des interventions. Le rôle des sapeurs-pompiers y est également bien défini, tout comme l'obligation pour les propriétaires privés de prendre des mesures propres à empêcher tout départ de feu.
Le canton de Vaud est précurseur en la matière, étant le premier canton à présenter un tel projet, ce qui lui vaut d'ailleurs d’être félicité par la Fédération suisse des sapeurs-pompiers. Il est clair que nous ne pouvons pas rester les bras croisés et attendre de nouveaux événements similaires à ceux survenus en 2022 à la Vallée de Joux et dans le bassin lémanique. Nos étés deviennent de plus en plus chauds, ce qui accentue les possibilités d'incendie de forêt. Le crédit-cadre de 4'227’000 francs sert à financer l'acquisition des moyens de base pour la lutte contre les incendies de forêt, les équipements individuels ainsi que la formation de base. Les modifications légales apportées aux deux lois concernées établissent un cadre bien défini pour les sapeurs-pompiers, les communes, les propriétaires de forêt privés, ainsi que l’ECA.
La commission a accepté le crédit d'investissement ainsi que les modifications des deux lois à l'unanimité. Le groupe PLR suivra la commission et accepte à l'unanimité l'entrée en matière de ce projet de décret, et il vous invite à faire de même.
Cela a été souligné, nous avons souvent l'habitude de suivre ces malheureux épisodes d'incendie aux actualités, que ce soit à l'autre bout du monde ou dans d'autres pays d'Europe. Cependant, avec le réchauffement climatique, ce qui était autrefois l'exception risque malheureusement de devenir si ce n’est la norme, du moins une probabilité, même dans nos contrées. Il semble donc très important de se tenir prêt et d'adapter notre dispositif à la fois législatif et lié aux possibilités d'intervention, face à ces risques posés par le réchauffement climatique. Ainsi, il est essentiel de se battre contre ce réchauffement climatique, tout en s’y adaptant. En ce sens, ces différents projets méritent d’être salués et nous pouvons remercier le Conseil d'Etat. C'est pourquoi les Vertes et les Verts soutiendront les différents projets.
Je me réjouis de cet accueil positif des différents intervenants et groupes politiques. Il est vrai que le risque d'incendie est une réalité à laquelle le canton de Vaud doit désormais faire face. En effet, l'été 2022 reste l'un de mes premiers souvenirs en tant que conseiller d'Etat, lorsque 1’000 hectares de forêts ont brûlé dans le Jura français voisin. Bien que le feu n'ait pas atteint nos territoires, cela a alerté l'ensemble du dispositif vaudois et romand. L'armée est également intervenue pour prêter main-forte à la France. Il est clair que nous devons désormais composer avec cette réalité.
En Suisse, et notamment dans le canton de Vaud, 90 % des incendies sont d'origine humaine, bien que les causes intentionnelles restent heureusement rares. Les conditions évoluent : comme l'a souligné M. Moccchi, nous faisons face à des vagues de chaleur, à la sécheresse, et avec des essences forestières peu adaptées à ces changements climatiques. C'est pourquoi le Conseil d'Etat agit fortement depuis plusieurs années avec une politique forestière ambitieuse et un soutien significatif au milieu forestier. Ce dispositif renforce notre capacité à répondre à ce risque, en comblant certaines lacunes et en clarifiant certaines responsabilités entre le canton et les communes. Nous nous donnons également les moyens matériels d'intervenir plus efficacement en cas d'incendie. Ces moyens viennent d'ailleurs compléter d'autres moyens financiers développés par l'ECA. Je me réjouis du bon accueil exprimé dans les différentes interventions.
Je suis désolé d'intervenir après vous à nouveau, monsieur le conseiller d'Etat, mais je souhaite rebondir sur les propos de mon préopinant, M. Mocchi. Il est vrai que le groupe UDC soutiendra cette idée. M. Mocchi a évoqué le réchauffement climatique qui est indéniable. Cependant, il est également évident que, dans de nombreuses régions autour de la Suisse, les grands incendies de forêt ont été provoqués par des zones montagneuses qui ne sont plus pâturées et par des forêts abandonnées, au nom de la biodiversité. Ces zones deviennent inévitablement des foyers d'incendie à moyen et long terme. Je suis particulièrement inquiet pour les centaines d'hectares à proximité de la ville de Lausanne, laissés à l'abandon depuis 50 ans. Cela devient d'autant plus préoccupant lorsqu'on sait que lors d'un été extrêmement sec comme celui de 2023, une simple cigarette peut provoquer un incendie. Il serait regrettable de voir un jour ces forêts du Jorat prendre feu ! C'est pourquoi il est essentiel d'assurer une mise en place financière pour l’ECA.
La discussion est close.
L’entrée en matière est admise à l’unanimité.
Article premier. –
Les articles 2 à 22b sont acceptés à l’unanimité.
Art. 22c. –
Cet amendement a été accepté l'unanimité des membres. Il consiste à passer de 50 % à 30 % au maximum.
« Art. 22c. – Al. 3 : Lorsqu'ils concernent une intervention dans une forêt appartenant à une collectivité publique ou la remise en état d'une forêt appartenant à une collectivité publique, les frais peuvent être mis à la charge de cette collectivité publique à raison de
50%30% au maximum. »
Je vous encourage à en rester à la proposition du Conseil d'Etat, qui prévoit une répartition à parts égales, soit 50/50. Les communes ont une part de responsabilité dans ces différentes mesures, et il est important pour le Conseil d'Etat de garantir une répartition équitable des tâches entre le canton et les communes. Ce projet de loi clarifie non seulement les rôles et les responsabilités de chacun, mais également la répartition des moyens financiers qui sont importants. Je pense notamment aux mesures de prévention que les propriétaires devront mettre en place, qui seront entièrement financées par le canton. Le Conseil d'Etat estime donc qu'une parité de 50 % entre le canton et les communes est la solution la plus juste. C'est pourquoi je vous invite à en rester à la version proposée par le Conseil d'Etat.
Je prends à mon tour position sur l'article 22c et vous encourage, chères et chers collègues, à soutenir l'amendement proposé en commission pour plusieurs raisons. D'une part, en cas d'incendie de forêt, les frais seront intégralement pris en charge par le canton pour les propriétaires privés, tandis que les communes pourront, de manière potestative, être co-responsables à hauteur de 50 % maximum. Il est important de noter que dans les grandes forêts, il est souvent extrêmement difficile de distinguer les forêts privées de celles appartenant aux collectivités publiques, tant les tranches sont parfois extrêmement fines, formant un véritable patchwork de forêts. Lors des discussions en commission, un consensus a été trouvé autour de ce 30 %, qui fait effet miroir à la répartition des coûts canton/communes pour l'entretien des forêts. C'est pourquoi je vous invite, chers collègues, à accepter et soutenir cet amendement, unanimement accepté en commission.
Je ne vais pas répéter ni paraphraser les propos de ma collègue Dubois, mais je souhaite également vous inviter à soutenir le compromis que nous avons élaboré en commission, et qui, comme cela a été mentionné, a été adopté à l'unanimité des membres présents.
Retour à l'ordre du jourL’amendement de la commission est accepté par 99 voix et 11 abstentions.
L’article 22c, amendé, est accepté à l’unanimité.
Les articles 22d, premier et 2, formule d’exécution, sont acceptés à l’unanimité.
Le projet de loi est adopté en premier débat.
Le deuxième débat interviendra ultérieurement.
Le débat est interrompu.