24_REP_11 - Réponse du Conseil d'Etat au Grand Conseil à l'interpellation Mathilde Marendaz et consorts - Application de la loi foncière rurale : de la transparence ! (23_INT_193) (Suite des débats).
Séance du Grand Conseil du mardi 11 février 2025, point 29 de l'ordre du jour
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Visionner le débat de ce point à l'ordre du jourLe débat est repris.
Puisqu’il s’agit d’une reprise de débat, je suggère à Mme Marendaz de procéder à une synthèse du développement auquel elle avait procédé il y a quelques semaines.
Pour rappel, ma proposition de détermination faisait suite à la réponse du département à mon interpellation sur la transparence des activités de la Commission foncière rurale (CFR) et, plus précisément, sur une problématique restée sans réponse : celle des sociétés privées aux doubles casquettes qui acquièrent des terres en proposant des montants plus élevés que les agriculteurs, contraints à l’abandon de leur exploitation. J'avais illustré mon propos avec l'exemple de la ferme des Flogères, à Yens, où un agriculteur exploitant n'a pas pu racheter le domaine, devancé par une société concurrente, Henny SA, dont l’un des administrateurs était un cadre de l’entreprise SA Orllati. Pour souligner cette concurrence déloyale entre ces entreprises déguisées en sociétés agricoles et de véritables agriculteurs, j’ai reçu ce matin un témoignage par e-mail en réaction à l'article paru aujourd’hui dans 24heures. Je vais vous le lire :
« Je me permets de prendre contact pour donner suite à l'article mentionnant votre intervention au Grand Conseil et, plus particulièrement, la ferme de la Flogères, à Yens et Orllati. Propriétaire d’un bâtiment à quelques centaines de mètres depuis plus de huitante ans, je vous informe que Orllati est intéressé par le gravier et non le bâtiment insalubre, avec une façade sud qui menace de s’effondrer. Surtout, Orllati a pris contact avec tous les propriétaires voisins de la ferme pour leur proposer d’acheter leur parcelle, forêt, terres agricoles par l’intermédiaire du propriétaire du domaine, la société agricole Henny SA, avec comme consultant l’ancien géologue cantonal. »
Cette situation est préoccupante, car elle montre que la loi, qui vise initialement à préserver les droits fonciers de toute influence étrangère à ses objectifs et à protéger les intérêts de l’agriculture, est en réalité appliquée de manière défaillante dans le canton, en raison de cette situation particulière d’entreprise à double casquette ; le témoignage reçu ce matin est on ne peut plus clair : les agriculteurs sont bien conscients que cette entreprise contourne la loi foncière en utilisant une société agricole écran.
Hélas, la réponse à mon interpellation ne traite pas réellement cette problématique. Aucune solution concrète ni aucun outil n'est proposé pour faire face à ces rachats de propriétés foncières par des entreprises dont l’objectif est tout autre. Précisons encore qu’il y a deux ou trois mardis, j’avais déjà posé cette question restée sans réponse : pourquoi le Conseil d’État n’a-t-il pris aucune mesure ni adopté de position sur ce cas particulier, dont la problématique est pourtant bien connue ?
Certes, cette détermination n’est peut-être pas la solution parfaite, mais elle reste aujourd’hui la plus concrète pour nous permettre d’agir et que le foncier retrouve sa vocation première, sa fonction paysanne et qu’il ne soit pas acheté par des entreprises poursuivant d’autres intérêts. J’ai ainsi proposé la détermination suivante :
« Le Grand Conseil souhaite que le Conseil d’État modifie la Loi vaudoise d'application de la LDFR (LVLDFR) pour que le rapport d’activité de la Commission foncière rurale soit non seulement transmis à l'exécutif, mais également au législatif, dans le but d’assurer la transparence dans l’application de la loi et de préserver les intérêts de l’agriculture. »
Dans sa réponse à mon interpellation, le Conseil d’État mentionne qu’un rapport d’activité est bien rendu chaque année à l’exécutif, mais que le règlement cantonal (RLDFR) ne prévoit pas d’établir un rapport détaillé à l’intention du Grand Conseil sur les transactions autorisées par la CFR. Or, ce rapport existe déjà. Il suffirait qu’il nous soit communiqué pour éviter que des situations comme celle de la ferme des Flogères ne se reproduisent. Malheureusement, aucune autre solution ni outil n’a été proposé par le Conseil d’État pour surveiller ces dérives.
Je tiens également à revenir sur un autre argument. Le Conseil d’État justifie la délégation des compétences à une commission collégiale autonome et indépendante en matière de transactions foncières en expliquant que cela permet de protéger l’exécutif et son administration de tentatives de pression, d’influence et de corruption. Mais c’est le monde à l’envers, car justement, le législateur est un organe démocratique représentant le peuple. La loi a été conçue pour empêcher toute corruption et pression sur l’acquisition des terres agricoles, afin qu’elles restent à usage paysan. Le but du législateur était de garantir que les autorisations foncières ne puissent être influencées par des intérêts extérieurs à la loi. Or, dans notre canton, nous constatons aujourd’hui l’inverse. Or, les faits évoqués montrent une absence de prise au sérieux de cette problématique et un manque d’action pour y remédier. En conséquence, la loi ne remplit plus sa mission initiale de protection de l’agriculture.
Par conséquent, puisqu’aucune autre mesure n’est envisagée, j’ai proposé un renforcement de la surveillance pour éviter que de tels événements ne se reproduisent. J’ai également entendu dire que certains commissaires de la Commission de gestion (COGES) avaient accès à ce rapport. Je ne sais pas si cette information est exacte, car elle ne figure pas dans la réponse à mon interpellation. Toutefois, ce qui est certain, c’est que la problématique soulevée aujourd’hui semble avoir échappé au contrôle de la COGES. Cela démontre que transmettre ce rapport à seulement deux personnes n’est pas suffisant. Il est impératif d’accroître la transparence et la visibilité. Il me semble évident que l’accessibilité de ces informations au Grand Conseil est nécessaire pour assurer une véritable protection de nos terres agricoles.
Depuis quelques semaines, nous débattons largement des aspects fonciers, que ce soit par le biais du rapport n°88 de la Cour des comptes ou, plus récemment, suite aux révélations parues dans la presse la semaine dernière. Ce que l’on constate, c’est que toute question touchant au domaine foncier suscite une forte résonance émotionnelle, car elle concerne directement notre terre, notre sol, notre territoire. A cet égard, les interrogations soulevées par notre collègue Mathilde Marendaz dans son interpellation et sa détermination sont parfaitement légitimes. Comment garantir que les terres agricoles restent entre les mains des agriculteurs et ne deviennent pas de simples objets de spéculation pour de grandes entreprises ? C’est une véritable question de fond. Ainsi, la détermination présentée aujourd’hui vise précisément à accroître la transparence sur les transactions foncières de domaine rural. Elle demande qu’un rapport annuel soit présenté à l’ensemble des députés afin de mieux comprendre le fonctionnement de la CFR et de permettre un contrôle accru de ces transactions.
J’ai bien conscience que le mot contrôle peut en déranger certains. Toutefois, nous pouvons tous convenir qu’une plus grande transparence ne peut être nuisible à personne, à moins d’avoir quelque chose à cacher – petit clin d’œil. Quoi qu’il en soit, le groupe socialiste a toujours défendu, dans ses valeurs fondamentales, le principe de transparence en politique, quel que soit le sujet abordé. Il n’est donc pas surprenant que l’ensemble de notre groupe soutienne cette détermination qui vise à renforcer la transparence. Je vous encourage à soutenir cette détermination.
On peut tout à fait comprendre les interrogations soulevées par Mme Marendaz concernant les tentatives de contournement des règles pour acquérir du foncier et, dans une certaine mesure, tromper la Commission foncière. Cela dit, cette commission est composée de professionnels compétents en la matière, souvent des notaires ou des agriculteurs, des personnes disposant d’une expertise avérée et qui, en principe, n’ont aucun intérêt direct dans ces décisions. Je comprends néanmoins le raisonnement avancé. Mais si l’on pousse cette logique plus loin, il devient tout aussi facile de contourner les règles en faisant appel à un tiers. Vous avez évoqué un autre cas, mais il suffirait, par exemple, qu’un agriculteur serve de prête-nom pour une entreprise afin d’acquérir des terrains en son nom, et l’opération passerait sans encombre. Dès lors, je m’interroge sur le rôle du Grand Conseil dans cette affaire. Je ne suis pas certain que ce soit à nous d’intervenir directement. Peut-être faut-il réfléchir à la manière dont cette commission fonctionne, mais je doute que cette demande apporte une réelle solution. Le problème de fond demeurera, car il existera toujours des moyens pour transférer des acquisitions foncières à d’autres personnes.
Lorsque cette détermination a été déposée il y a quelques semaines, nous n’avions pas encore connaissance des cas dévoilés exactement une semaine plus tard concernant la présidence de la Commission foncière rurale. Toutefois, ces faits illustrent une réalité incontestable : la pression économique exercée sur les terrains agricoles est bien présente.
Il est évident que nous devons tous chercher à limiter cette pression autant que possible, et sur ce point, je pense que nous sommes unanimes, quelle que soit notre position dans cet hémicycle : il est essentiel de préserver l’outil fondamental de l’agriculture que sont les terres agricoles. Toutefois, nos avis divergent sur le rôle que peut jouer la transparence dans cette préservation. Pourtant, rendre le fonctionnement de cette commission plus transparent constitue, selon moi, un moyen particulièrement efficace de lutter contre les pressions politiques et financières susceptibles de mettre à mal la préservation essentielle des terrains agricoles.
Enfin, c’est précisément dans cette optique que j’ai déposé – et développé ce matin – une motion allant dans ce sens. Pour conclure, je tiens à vous informer que les Verts soutiendront cette détermination.
Je prends la parole en tant que sous-commissaire de la COGES au Département des finances et de l'agriculture qui s’est intéressé au fonctionnement de la CFR. Je vous renvoie d’ailleurs au futur rapport de la COGES pour plus de détails. Il me semble important de préciser un point afin d’éviter que le plénum ne se fasse des idées erronées ou exagérées sur le contenu des rapports de cette commission. Il s’agit d’un simple rapport d’activité auquel nous avons effectivement accès, mais qui ne fournit pas de détails sur chaque dossier traité. La commission examine chaque année plusieurs centaines de cas, environ 700, voire davantage certaines années. Il ne s’agit donc pas d’un document récapitulant chacun de ces dossiers en détail, ce qui nous permettrait, en tant que législateurs, d’exercer un contrôle minutieux sur chaque situation. En revanche, le rapport met en lumière des problématiques récurrentes ainsi que les jurisprudences applicables, qui orientent les décisions de la commission. Je ne me prononce pas sur le fond du débat quant à l’accessibilité de ces documents au Grand Conseil, car c’est une discussion que cette assemblée doit mener. Toutefois, d’après mon appréciation, ces rapports ne contiennent pas d’informations relevant du secret fiscal ni de données posant un problème au regard de la protection des données. Bien entendu, si cette détermination devait être acceptée, le Conseil d’État se forgerait sa propre opinion sur la question. Mais je tenais à partager avec vous mon point de vue et à souligner qu’il ne s’agit pas d’un document permettant de mener une contre-enquête sur des cas individuels. Ce rapport reste un simple compte rendu d’activité, comprenant une dizaine de pages.
Avant tout, je suis agriculteur, ce qui vous donne un premier élément de contexte. Madame Marendaz, il faut également noter que l’entreprise que vous avez citée a un fils qui est lui-même agriculteur, un point qui mérite d’être pris en compte. En ce qui concerne la détermination présentée, je m’y opposerai pour plusieurs raisons. Tout d’abord, un système de régulation a été mis en place et défendu par le Conseil d’État. Pourquoi ? Parce qu’il est conforme au droit fédéral et au droit cantonal. En fin de compte, que garantit-il ? La séparation des pouvoirs, qui me semble non seulement efficace en théorie, mais aussi respectée en pratique. Le système répond aux objectifs fondamentaux de la LDFR, notamment la préservation des terres agricoles pour les exploitants agricoles, ce qui est essentiel. Quant aux cas que vous avez mentionnés, j’aimerais pouvoir les examiner précisément, noir sur blanc. Je ne suis pas certain qu’il y ait une réelle torsion de la LDFR. La CFR joue un rôle clé dans ce processus, car ses décisions sont soumises à un contrôle approprié, garantissant ainsi l’équité et la transparence des transactions foncières. Enfin, pour ma part, que nous votions ou non cette détermination ne changera pas « le schmilblick », bien que je ne voie pas l’intérêt de la soutenir. En revanche, je comprends les interrogations soulevées, et sur ce point, madame la conseillère d’État, c’est à vous qu’il revient d’y répondre.
Puisque nous avons longuement évoqué la question du temps de parole tout à l'heure, je me permets une remarque que les membres de la fameuse Commission des institutions et des droits politiques (CIDROPOL) voudront bien considérer. Je me suis toujours étonné que dans la Loi sur le Grand Conseil actuelle, lorsqu’on dépose un texte aussi important qu’une motion – qui peut avoir un caractère contraignant – le temps de parole pour le défendre est limité ; il en va de même pour une interpellation. En revanche, lorsqu’il s’agit d’une détermination – un vœu pieux – il n’y a aucune restriction et la parole peut être monopolisée. Il y aurait peut-être matière à réflexion, car il semblerait plus logique d’accorder davantage de temps à ceux qui déposent des motions plutôt qu’à ceux qui présentent des déterminations. C’est un point qui pourra être discuté lors de la prochaine révision de la LGC.
Quant à ma deuxième remarque, nous sommes toutes et tous attachés à la séparation des pouvoirs. La réponse du Conseil d’État est très claire quant aux attributions de la CFR. Dans tout ce qui nous a été exposé, je ne sais pas s’il est question d’un cas particulier ou d’une problématique plus large. Nous savons bien que, dès que le nom d’Orllati apparaît, certains esprits s’échauffent. Comment distinguer le vrai du faux ? Je n’en ai strictement aucune idée. Néanmoins, ce qui demeure certain, c’est qu’une détermination ne nous permettra pas d’y voir plus clair. Pire encore, comme l’a souligné le Conseil d’État, le Grand Conseil n’a aucune compétence en la matière. On peut multiplier les vœux, cela ne changera rien. D’autant plus que si cette détermination devait être adoptée, je ne vois pas bien en quoi cela permettrait au Grand Conseil d’intervenir.
Enfin, last but not least, l’instrument de la détermination n’est tout simplement pas opportun. La loi, en l’état, est parfaite ; s’il faut la modifier, alors il faut déposer une motion ou un postulat. Mais une détermination ne saurait ni modifier la loi ni influencer la pratique de la Commission foncière. Pour toutes ces raisons, je vous invite à ne pas soutenir cette détermination.
J’ai une question adresser à Mme la conseillère d’Etat Dittli. Dans sa réponse, il est mentionné qu’à l’article 64 de la LDFR, « on prévoit d’autres cas d’exceptions en matière d’autorisation pour l’acquisition de biens-fonds agricoles applicables également aux personnes morales. C’est en particulier le cas en vue d’une exploitation des ressources du sol permise par le droit de l’aménagement du territoire. » Cela soulève une question essentielle : le prix au mètre carré reste-t-il identique, qu’il s’agisse d’une utilisation agricole ou d’une exploitation visant à extraire des graviers ou d’autres minerais ? La CFR fixe-t-elle un prix unique, indépendamment de l’objectif d’exploitation ? Cela serait une information intéressante à obtenir. Si c’est le cas, cela pose un véritable problème. Il serait en effet très avantageux d’acquérir des terrains à des prix particulièrement bas sous prétexte d’un usage agricole, pour ensuite les exploiter à des fins industrielles.
Enfin, je dois dire que le rapport de la Cour des comptes m’a profondément troublée. C’était pour le moins interpellant. De plus, les récentes informations qui circulent au sujet de la CFR suscitent de nombreuses interrogations. Nous avons besoin d’explications et d’éclaircissements. Il serait important de nous rassurer sur ces différents points.
Je tiens à revenir sur les propos de M. Buffat, dont je regrette l'intervention sur la forme avant de privilégier le fond. J'ai le sentiment qu'il a souvent une appréciation à géométrie variable lorsqu'il s'agit de déterminer quels sont les bons outils ou la bonne manière de pratiquer la démocratie. M. Buffat est, à mon avis, bien connu pour ses interventions particulièrement longues. Ce n’est pas une critique personnelle, mais dans les bancs où je siège, on a parfois l'impression d’être visé par ces petites considérations morales sur les « bons outils » de la démocratie. Pourtant, nous utilisons les instruments qui sont à notre disposition. Et, ce que vous dites sur les catégories d'intervention, cela n’a vraiment aucun fondement. En effet, lorsqu'on dépose une motion, on dispose d’un temps très limité pour la présenter, mais une fois celle-ci débattue et discutée en plénum, on peut passer jusqu'à deux heures à en discuter. D’ailleurs, tout à l’heure, vous avez proposé une prise en considération immédiate d’une motion qui a généré un débat de 40 minutes. Par conséquent, une détermination constitue simplement un outil qu’on utilise après une réponse à une interpellation, comme celle-ci, qui date de 2023. En résumé, cela reste un instrument tout à fait similaire à d'autres formes d'intervention, telles que les motions ou les postulats. Voilà, je voulais simplement vous recadrer sur ce point. (Rires)
Sur le fond, je suis entièrement d'accord avec vous, la LDFR doit assurer que les terres agricoles sont et continuent à être exploitées par des agriculteurs. Et c'est le sens, le cœur de la LDFR : ce que je défends à 300 %. Je vous rejoins sur le fond. Vous avez posé plusieurs questions auxquelles je vais essayer de répondre.
Vous m'avez posé la question de savoir s'il y a eu des recours contre les décisions de la CFR et, le cas échéant, quels critères sont appliqués. Permettez-moi de vous apporter quelques brèves explications. C'est effectivement mon département, via la Direction générale de l'agriculture et des forêts (DGAV), qui dispose d’un droit de recours contre les décisions prises par la CFR. Lorsque la CFR prend une décision, elle l'adresse au département par l'intermédiaire de la direction de la DGAV. Cette direction prend connaissance des décisions, les examine et vérifie leur conformité avec la législation. Ensuite, elle propose au département de déposer ou non un recours. Ensuite, c’est le département seul qui est compétent pour signer et soumettre un recours auprès de l'autorité compétente.
En ce qui concerne le passé, comme vous avez pu le lire, quelques recours ont été déposés, notamment trois, depuis mon arrivée. La DGAV a effectivement proposé au DFA plusieurs projets de recours contre des décisions de la CFR. Trois d’entre eux ont abouti à une procédure judiciaire devant la Cour de droit administratif et public (CDAP). L’un de ces recours a été partiellement admis, un autre est devenu sans objet suite à une nouvelle décision de la CFR, et le dernier est toujours pendant devant la CDAP.
Ensuite, si l’on examine le cas de Yens, je souhaite citer un passage de la loi que la députée Thalmann a également mentionné. L'article 64 de la LDFR prévoit des cas d’exceptions en matière d'autorisation pour l’acquisition de bien-fonds agricoles, qui s'appliquent également aux personnes morales. Ces exceptions concernent notamment l’exploitation des ressources du sol autorisée par la législation sur l’aménagement du territoire, ou encore lorsque l'acquéreur détient une autorisation permettant, conformément à l'article 24 de la Loi fédérale sur l'aménagement du territoire, de ne pas utiliser le terrain à des fins agricoles.
Il est donc important de comprendre que la LDFR ne décide pas seule de l'exploitation des sols. Si la LDFR garantit la transmission des terres, l’exploitation du sol relève également de l’aménagement du territoire. Concrètement, cela signifie que la CFR considère que les conditions de l'article 64, lettre c de la LDFR sont remplies lorsque les immeubles à acquérir, ou à grever d’une servitude de superficie, sont inventoriés positivement dans le Plan directeur des carrières (PDCar), ou identifiés comme sites prioritaires dans le plan sectoriel des décharges contrôlées. Si le doute subsiste, la CFR sollicite toujours un préavis de l'autorité cantonale compétente dans ce domaine. En règle générale, la CFR, qui gère un grand nombre de dossiers et travaille très bien, n'a pas reçu d'indication de la DGAV permettant de conclure qu'il y ait eu une défaillance dans l'instruction des dossiers. C'est important de le préciser, notamment dans le cas de Yens.
En ce qui concerne votre détermination, j'entends les préoccupations soulevées. Pour revenir sur vos propos tenus il y a deux semaines, il est essentiel de rappeler le rôle et les attributions de chacun. Le législateur fédéral, comme cela a été relevé, a pris la décision de protéger les intérêts des exploitants agricoles dans le cadre de la LDFR, tout en laissant aux cantons la possibilité de mettre en place des organes compétents pour atteindre cet objectif. C'est dans ce contexte que la loi cantonale a été rédigée, confiant à la CFR la compétence en matière d'autorisations, et précisant que cette commission serait nommée par le Conseil d'État, à qui elle doit transmettre un rapport annuel. Le département en charge de l'agriculture, selon la loi cantonale, exerce une haute surveillance sur la CFR, notamment par voie de recours auprès du Tribunal cantonal. Enfin, les commissions de contrôle, finances et gestion surveillent également l’activité de l'exécutif.
Actuellement, la CFR produit des statistiques et un rapport annuel, conformément à l'article 6 de la RLVLDFR et des directives et circulaires. Ces documents sont transmis à la DGAV et à mon département, mais le Conseil d'État ne reçoit que le rapport annuel. La loi cantonale et son règlement ne prévoient pas la transmission de ces documents au Grand Conseil. Toutefois, dans un souci de transparence, nous allons étudier les possibilités de transmettre certaines informations aux commissions de contrôle, respectivement au Grand Conseil, respectivement au public, tout en respectant la protection des données. Nous prendrons une décision sur la manière de rendre public une partie du rapport annuel, tout en gardant à l'esprit, comme l'a souligné M. Bouverat, que ce document n'est pas secret, mais principalement technique.
Enfin, j’aimerais encore répondre à la question complexe posée par Mme Thalmann. Il faut d'abord préciser que le prix agricole d'un terrain reste le même. Cependant, il existe un autre domaine qui ne relève pas de ma compétence, celui des concessions pour l'exploitation des carrières. Dans ce cadre, l'État fixe les critères, sur proposition de la Direction générale de l’environnement – sauf erreur de ma part, ce n'est pas mon département qui est compétent dans ce domaine. Ensuite, le Conseil d'État prélève une taxe sur la plus-value. Toutefois, il est important de souligner que cela relève de la DGE et non de la LDFR ni de la CFR, puisque le prix du terrain agricole lui-même ne change pas.
Je remercie Mme Dittli pour sa réponse. Si je comprends bien, le prix au mètre carré est identique, que l'on destine le terrain à une activité agricole ou à une exploitation générant des bénéfices bien plus importants, ce qui me semble peu logique. De plus, j’aimerais savoir si, lors d’une demande d’achat de terrain auprès de la CFR, il est obligatoire d’indiquer l’objectif de l’achat, exploitation agricole ou extraction des ressources du sous-sol. En d’autres termes, doit-on explicitement annoncer la finalité de l’acquisition ?
Par ailleurs, une question se pose clairement : ne devrait-on pas distinguer les prix en fonction de ces deux usages fondamentalement différents ? La Loi sur le droit foncier rural vise à préserver les terres agricoles et à soutenir les agriculteurs, en tenant compte de leur besoin de terrain pour produire et assurer un revenu correct. Dès lors, l’application d’un tarif identique au mètre carré, malgré des objectifs et des niveaux de rentabilité radicalement différents, me semble discutable.
Madame la députée Thalmann, je vous remercie pour cette question supplémentaire. Le prix du sol agricole reste inchangé. En revanche, la question de l’exploitation du sous-sol relève d’un tout autre domaine, sur lequel elle n’a aucune compétence. Elle n’est pas habilitée à statuer sur l’utilisation des ressources du sol. Malheureusement, je ne connais que peu le dispositif régissant l’octroi des concessions pour l’exploitation des carrières. C’est toutefois dans ce cadre que ces questions devraient être posées. Au niveau de la CFR, cette dernière n’a pas compétence en la matière.
Mme la conseillère d’Etat n’a pas répondu à ma question que je répète : lors du dépôt d’une demande d’achat de terrain, doit-on préciser l’objectif de cet achat ? S’agit-il d’une exploitation agricole ou bien d’une extraction des minéraux ? Cette distinction me semble non seulement importante, mais essentielle. Si cette obligation n’existe pas, il me paraît indispensable que la CFR s’interroge sur cette question, révélatrice d’un véritable hiatus. Il serait même nécessaire d’envisager une modification de la loi, car ces deux usages poursuivent des objectifs radicalement différents et devraient, en toute logique, faire l’objet d’une tarification distincte.
Je considère avoir répondu à la question, mais puisqu’elle est essentielle, je me permets de le répéter : la CFR n’a aucune compétence pour statuer sur l’exploitation du sous-sol. C’est le plan d’exploitation des carrières qui est compétent en la matière, et non la CFR. Cette question relève donc d’une autre autorité et ne dépend pas de mon département.
Retour à l'ordre du jourLa discussion est close.
La détermination Mathilde Marendaz est refusée par 73 voix contre 56 et 3 abstentions.
Ce point de l’ordre du jour est traité.