23_HQU_128 - Question orale Mathilde Marendaz - Roger Nzoy tué à Morges : le droit à un procès équitable et à une enquête sérieuse.

Séance du Grand Conseil du mardi 12 décembre 2023, point 3.3 de l'ordre du jour

Texte déposé

Lors d'une conférence de presse le 10 novembre dernier, la commission chargée de faire la lumière sur le décès suite à une intervention policière de Roger Nzoy Wilhelm à Morges en 2021 a révélé l'intention du Ministère public de classer l'affaire d'importance majeure, sans offrir à la famille et à la commission la possibilité d'un procès public. L'organisation Border Forensics qui produit actuellement une expertise indépendante sur l'affaire, a publié des résultats préliminaires d'enquête qui révèlent que des éléments du dossier du Ministère public étaient manquants (ex: certaines communications radios des forces de l'ordre et le contenu des discussions avec le/la supérieur), grâce à la constitution d'une vidéo précise qui retrace la chronologie d'une partie de l'intervention et permet notamment d'identifier les lacunes du dossier.

 

Comment le Conseil d'État compte s'assurer que le Ministère public constitue un dossier complet comprenant toutes les preuves utiles et nécessaires face aux lacunes présentées dans l'enquête de Border Forensics ?
 

Transcriptions

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Mme Mathilde Marendaz (EP) —

Question orale Mathilde Marendaz – Roger Nzoy tué à Morges : le droit à un procès équitable et à une enquête sérieuse (23_HQU_128)

Lors d'une conférence de presse le 10 novembre dernier, la commission chargée de faire la lumière sur le décès à la suite d’une intervention policière sur Roger Nzoy Wilhelm à Morges, en 2021, a révélé l'intention du Ministère public de classer l'affaire pourtant d'importance majeure, sans offrir à la famille et à la commission la possibilité d'un procès public. L'organisation Border Forensics qui produit actuellement une expertise indépendante sur l'affaire, a publié des résultats préliminaires d'enquête qui révèlent que des éléments du dossier du Ministère public étaient manquants – par exemple certaines communications radio des forces de l'ordre et le contenu des discussions avec le/la supérieur – grâce à la constitution d'une vidéo précise qui retrace la chronologie d'une partie de l'intervention et permet notamment d'identifier les lacunes du dossier.

Comment le Conseil d'Etat compte-t-il s'assurer que le Ministère public constitue un dossier complet comprenant toutes les preuves utiles et nécessaires face aux lacunes présentées dans l'enquête de Border Forensics ?

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Président-e du Conseil d’Etat

La question posée fait référence à une procédure judiciaire en cours, à laquelle l'Etat n'est pas partie. La séparation des pouvoirs, principe cardinal de notre Etat de droit auquel je le sais vous êtes tous attachés, ne permet pas et ne doit pas permettre au gouvernement de s'immiscer dans une procédure. De même, notre Constitution ainsi que la Loi sur le Ministère public garantissent tant l'indépendance de ce dernier que le secret de l'instruction. Il n'est donc ni possible ni souhaitable de donner une quelconque instruction au Ministère public. Pour rappel, les partis disposent des voies de droit prévues par la loi pour requérir des preuves et des mesures d'instruction. Il leur est également possible de contester des décisions qui ne leur conviendraient pas. Le gouvernement ne saurait donc s'assurer que le Ministère public constitue un dossier complet.

Mme Mathilde Marendaz (EP) —

J'aimerais vous alerter sur la problématique des enquêtes impliquant des organes de l'Etat. Hier encore, nous avons appris par la RTS le classement de l’affaire Lamine Fatty impliquant la mort d'un jeune Gambien dans sa cellule, en 2017, alors qu'il avait été arrêté à tort. Le Ministère public a donc déjà adopté une attitude laxiste déjà dénoncée par des experts et des organisations, et relevée par la presse lors du jugement des auteurs de la mort de Mike Ben Peter. Concernant l'affaire Lamine Fatty, classée par le procureur alors que de nombreuses problématiques sont encore pendantes, notre collègue Dolivo avait déposé une interpellation à l'époque, en 2017, à laquelle le Conseil d'Etat n'a jamais répondu. Cette attitude interroge sur le laxisme du Conseil d'Etat et du Ministère public en matière de procès équitable.

Ainsi, à la lumière des problèmes récurrents liés à des affaires impliquant l'appareil sécuritaire de l'Etat, et alors qu'il y a eu plusieurs cas de jeunes hommes noirs morts lors d’interventions policières ou dans des contextes carcéraux en 2016 et 2021, comment allez-vous vous assurer que les enquêtes sont indépendantes, alors qu’elles mettent en cause l'appareil sécuritaire de l'Etat, lequel ne peut pas se dédouaner d'une certaine responsabilité puisqu'il est mis en cause ?

Mme Christelle Luisier Brodard (C-DITS) — Président-e du Conseil d’Etat

Je ne sais pas s’il s’agit bien d’une brève question complémentaire. Cela étant, la meilleure preuve d'indépendance est de laisser le Ministère public effectuer son travail et surtout de ne pas s’immiscer politiquement, dans le cadre de la séparation des pouvoirs.

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